Directeurs d’école agressés et incivilités scolaires : à qui la faute ?

C'est le sujet de conversation du jour. On redécouvre que la France n'est pas 58ème (sur 63 pays) au classement PISA sur la violence scolaire pour rien... ainsi, la moitié des directeurs d'école primaire se sentent agressés, insultés et surtout harcelés par certains parents. Cela n'a rien de nouveau, et dans le contexte de tensions sociales actuel il n'y a rien de surprenant. L'amour de son prochain n'étant pas l'approche et la conception des relations avec autrui du français moyen, les incivilités sont omniprésentes partout : à l'école où les enfants sont à l'image des adultes, dans la vie quotidienne et dans les lieux publics dont les transports en commun. En fait les institutrices (il n'y a quasiment plus d'hommes dans ce milieu) n'en bavent pas plus que les policiers ou les postiers, elles ont à affronter les mêmes problèmes.
J'ai été professeur d'école pendant seize ans et il me parait nécessaire de remettre les choses à leur place. L'instit' n'est plus le maître respecté d'antant qui logeait dans les écoles et vivait donc dans les mêmes communes que les familles. Depuis 1990 la profession s'est fortement "fonctionnarisée" ; rappelons que le passage au statut de PE s'est fait suite à une première pénurie de recrutement et les difficultés à pourvoir les postes vacants par les ex-écoles normales. Les nouveaux "profs d'école" subissaient alors des affectations non choisies, vagabondaient beaucoup (les logements de fonction sont passés à la trappe) et avaient une approche plus académique qu'affective des enfants...
Parallèlement à cela les mentalités ont changé. Les parents citoyens sont devenus des parents consommateurs. Place aux exigeances au détriment des besoins de l'enfant. Personnellement j'ai eu peu de soucis avec mes parents d'élèves à part une école ZEP en Picardie où le directeur alcoolique et dépressif ne tenait pas la boîte... résultat : les cas sociaux s'en donnaient à coeur joie, les parents se battaient entre eux devant l'école, les conseils des maîtres tenaient à la foire d'empoigne, tensions, conflits, et en prime hiérarchie qui tournait la tête. Avant de parler des "agressions" de la part des parents parlons des incivilités entre enseignants, sujet très tabou... car le repli sur soi et l'égoïsme concerne tout le monde. En l'absence de sens collectif c'est le chacun pour sa poire qui prime, avec les problèmes que cela engendre...
Donc la France consumériste de 2014 redécouvre la violence scolaire. Le problème est hélas plus large. Je peux attester que 80% des parents s'occupent de leurs enfants et respectent les profs, ce sont les 20% restants qui posent problème. Qui sont-ils ? En fait vous les connaissez : les cas sociaux immatures qui faute d'une tête bien remplie vivent avec leurs entrejambes et le ventre fécond de leurs femmes. Faire des mômes rapporte des allocs', un logement HLM, les soins médicaux gratuit. Et avec l'obligation de scolarité que les instits' se débrouillent. Amis internautes la question vous concerne au premier chef. Ces gamins turbulents qui trainent au pied de votre immeuble, les pétarades de motos débridées des grands frères, les parents à la mine déconfie dont le langage et la maturité n'excèdent pas le potentiel d'un gosse de treize ans. Beaucoup d'entre vous connaissent et subissent ces gens dans leur quartier. Alors imaginez la gestion de ces individus dans le cadre scolaire, quand toute autorité a été retirée aux instits' avec des directrices chargées de gérer la misère sociale.
Au fait, savez-vous qu'il y a pénurie de directrices d'école ? Qui peut être étonné ? Quand tout problème retombe pénalement sur la tête de ces "fonctionnaires" condamnés à 60 heures de présence hebdomadaire dans leur école, pris en étau entre parents, collègues et hierarchie... ceci explique cela. Ajoutons que la démagogique réforme des rythmes scolaires ne fera qu'aggraver le problème, en ajoutant des situations conflictuelles avec les élus locaux. Triste constat.
A partir du moment où une minorité de voyous et de profiteurs en tout genre peut pourrir la vie d'un quartier et d'une école sans risquer des poursuites sérieuses (tolérance à la française oblige, on va dire comme ça), ce sont les braves gens qui encaissent. Quand une maitresse d'école fait une dépression nerveuse et s'arrête un mois qui est pénalisé ? Je discute beaucoup de ces questions avec des responsables de parents d'élèves (PEEP et APE surtout) qui s'accordent à reconnaître que la situation dans les écoles devient de plus en plus tendue.
Amis seniors je vous entends d'ici ricaner. Ah le bon vieux temps des punitions, des examens d'entrée en sixième et des 10% d'une génération au bac ! Mais les temps ont hélas bien changé et c'est l'évolution générale des relations sociales qui est en cause. L'éducation des enfants concerne tout le monde, y compris celle des rejetons de vos voisins. Prenez l'exemple de la dame agressée dans le métro de Lille par un voyou sans que personne ne réagisse : Comment des gens passifs et égoïstes peuvent-ils transmettre des valeurs et des exemples à leurs enfants ? C'est bien notre relation à autrui qui est à revoir.
L'école de la république n'est pas l'annexe du secours populaire mais un lieu d'apprentissages. Comment parler de 80% d'une génération au bac avec une population déresponsabilisée, consumériste et rêtive aux règles de la vie collective ? Heureusement tout le monde n'est pas abruti. La plupart d'entre vous sont (ou ont été) des parents responsables, c'est aussi le cas de la majorité des enseignants. Mais cessons de laisser une minorité de voyous nous pourrir l'existence, à l'école comme ailleurs... tout est question de volonté. Si le système des hussards noirs a vécu ne laissons pas les dérives du consumérisme et de la logique libérale achever notre école.
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