Données des passagers : Accord UE-USA, une fausse victoire
Malgré une opinion publique européenne échaudée par les révélations d’Edward Snowden, nous apprenons que l’organisation bruxelloise et les Etats Unis ont trouvé un accord concernant l’échange des données entre les deux blocs continentaux.
Bien que cet accord soit présenté comme une avancée par l’organisation bruxelloise, il signe en réalité la démission de nos « représentants européens » face à la protection de la vie privée et un renoncement au principe de présomption d'innocence.
Protection des données, le passage en force de Bruxelles, les coups bas des USA
Cela fait plusieurs décennies que l’Organisation bruxelloise tente de légiférer sur le sujet, il est nécessaire de faire un bref historique des initiatives :
Suite aux attentats du 11 septembre 2001, Washington prend plusieurs mesures visant à contrôler les passagers aériens.
C’est en 2004 que les USA négocient un accord avec l’organisation bruxelloise concernant les transferts de données des passagers. Cet accord s’est fait sans consulter le parlement européen qui saisira la justice européenne.
Un véritable outre-passement des pouvoirs de la commission qui a été condamné par les magistrats. L’accord était le 30 mai 2006 invalidé.
En 2007, la commission européenne propose alors « une décision cadre »relative à l’utilisation du transfert des dossiers passagers, cette dernière était limitée dans le temps.
(Une décision cadre et une procédure législative qui permettait de ne pas soumettre le texte au parlement européen, mais seulement aux représentant des exécutifs des états membres.)
L’association européenne pour la défense des droits de l’homme expliqua alors :
"Pour la première fois dans l'histoire de l'Europe moderne un système de caractère explicitement répressif s'applique à la totalité des citoyens et pas seulement à ceux contre lesquels il y a des présomptions ou des indices d'être impliqués dans des actes illicites. Tout le monde se retrouve ainsi en position de « suspect ». Le projet de décision-cadre prévoit que les données PNR, en particulier commerciales, de tous les passagers qui entrent, sortent ou traversent l'espace européen feront l'objet d'une collecte et conservation afin d'être analysées sous le scope du risque terroriste. Ce sont 19 données personnelles qui seront ainsi collectées."
En mars 2008, Washington formule de nouvelles exigences en matière d’envoie des données, la controverse suscitée par l’accord de 2007 semblait bloquer toute évolution en la matière.
Washington va alors négocier directement avec la République Tchèque un accord étendu sur les données des passagers en échange d’une exemption de visa pour les ressortissants tchèques.
Les Etats-Unis vont alors se s’appuyer sur les derniers entrants dans l’Union Européenne (qui ne bénéficiaient pas du programme de visas simplifiés) pour faire pression sur Bruxelles.
Un coup bas pour l’organisation bruxelloise qui dans le cas où de tels négociations aboutiraient, verrait sa position, pour renégocier l’accord de 2007, considérablement diminuée. En effet, 12 pays sur les 27 que comptait l’Union Européenne ne participaient au programme d’exemption des visas.
En novembre 2008, le parlement européen vote alors une résolution qui ouvre le champ à la machine législative en déclarant :
"que la collecte et le traitement de données pouvaient être un outil utile pour lutter contre le terrorisme. Mais il a exprimé de fortes réserves sur la nécessité et la valeur ajoutée de la proposition."
Le texte temporaire et controversé de 2007 restait donc en vigueur, les parlementaires attendaient un accord plus soucieux de protéger la vie privée.
En 2011, la commission européenne négociera un nouvel accord avec les Etats-Unis, qui sera lui-même validé par le parlement européen en avril 2012.
L’association européenne pour la défense des droits de l’homme estime dans un communiqué que ce vote est :
"contre toute attente."
Selon Madame Int’ Veld, eurodéputée néerlandaise :
"La conformité n’est pas en accord avec la législation européenne, mais il y a des considérations politiques et diplomatique pour voter oui "
Elle ajoute :
"Le nouvelle accord n’apporte pas plus de droits aux citoyens. Accepter l’accord, c’est accepter la violation de nos droits fondamentaux."
Lien : http://www.lemonde.fr/technologies/article/2012/04/19/le-parlement-europeen-accepte-le-transfert-aux-usa-des-donnees-de-ses-passagers_1687268_651865.html
En 2013 les révélations d’Edward Snowden sur les pratiques d’espionnage de masse des services américains, ont augmenté la défiance des citoyens contre ce type d’accord.
Il a donc fallu rassurer la population ainsi que les parlementaires européens d’autant que la procédure adoptée en 2012 aurait pu être soumise à la validation de la cour de justice européenne et éventuellement remis en cause.
L’organisation bruxelloise repris donc le chemin de la négociation afin d’obtenir des garanties supplémentaires.
C’est apparemment chose faite avec l’accord obtenu ces derniers jours.
Les ressortissants européens peuvent désormais saisir la justice américaine concernant l’utilisation de leurs données. Jusqu'alors la législation américaine ne prévoyait aucun recours juridique pour des citoyens étrangers.
Nous assistons donc en quelque sorte à la fin d’une bataille législative qui a duré plus d’une décennie.
Lien : http://www.challenges.fr/europe/20150908.CHA9177/accord-entre-l-ue-et-les-etats-unis-sur-la-protection-des-donnees.html
Cet accord doit être validé par le congrès américain.
Conclusion :
Bien que contrairement à ce qui est annoncé c’est loin d’être une victoire pour les citoyens européens, c’est l’expression même du déni de démocratie qui semble en vigueur ces dernières années au sein des pays de l’ensemble euro-atlantiste.
Cet accord illégal au départ fut intégré au droit européen au mépris du parlement et des aspirations des citoyens. Il aurait été normal qu'il fusse jetté au feu et remplacer par un nouvelle accord dans un cadre démocratique. Les maigres concessions obtenues en 2012 et ces derniers jours ne sont que des chimères visant à faire oublier les renoncements à la protection de la vie privée et au principe de présomption d’innocence.
Nous sommes désormais bien tous considérés comme de potentiels terroristes et donc nos données personnelles doivent être envoyées aux autorités.
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