DSK, quand la popularité cache le désamour
Depuis 2007, Dominique Strauss-Kahn est devenu un véritable phénomène. Fort de sa nomination à la tête du FMI, l’ancien ministre de l’économie et des finances du gouvernement Jospin a vu sa cote de popularité grimper en flèche pour atteindre 65% à la mie 2009. Si la popularité de Dominique Strauss Kahn est redescendue à 50%, il reste le politique préféré des français. Nous en arrivons alors à un constat étrange : l’homme politique préféré des français est le patron de l’instance représentative de la grande finance mondiale alors que les français disent la détester. L’homme politique préféré des français ne s’occupe plus des affaires franco-françaises (ou de très loin) depuis sa nomination au FMI. L’homme politique préféré des français est un homme qui s’oppose peu ou pas à la politique d’un gouvernement qu’ils désapprouvent dans leur grande majorité, et présente même, parfois, d’étranges similitudes avec un président battant des records d’impopularité.
La popularité de DSK semble être à première vue, un paradoxe. En réalité, cette popularité est bien plus significative qu’elle n’y parait, elle semble révéler une faillite du politique traditionnel en France. En effet, comme nous l’avons vu plus haut, logiquement, DSK ne devrait pas jouir d’une popularité aussi grande, au contraire : représentant de la grande finance mondiale, délaissant son pays, partageant de nombreuses valeurs avec Sarkozy, sans compter ses frasques extraconjugales, DSK ne devrait pas bénéficier de l’appui de ses concitoyens. Seulement voila les français aiment DSK par défaut.

En 2010, 70% des français ne font confiance ni à l’UMP ni au PS, à tort ou à raison, c’est une autre histoire. Depuis la désillusion Sarkozy, la majorité de ces 70% de française cherche une alternative. Il pourrait, me direz vous, la trouver chez les centristes. Il apparaît cependant que le Nouveau Centre vit, pour le grand public, dans l’ombre de l’UMP et n’a que peu de visibilité. François Bayrou lui a tenté un pari risqué en créant le MODEM, pari pour l’instant perdu, qui l’oblige à se situer en retrait par rapport aux possibilités que l’élection présidentielle lui avait offerte. En effet, en France l’élection présidentielle ne fait pas que donner un président à la France, elle répartit le poids politique des différents partis en fonction du score de leur candidat. Par ailleurs, le manque d’initiative de Mr Bayrou a donné à la France l’image d’un centre mou, sans idée, sans projet, d’un compromis sans queue ni tête entre la droite et la gauche. Certains de ces déçus des partis traditionnels se sont tournés vers les extrêmes, c’est surtout vrai à gauche, d’autres, plus nombreux, ont cherché un centre de substitution. Certain l’ont trouvé en Europe Ecologie, ce qui explique en partie ces scores élevés aux dernières élections. Beaucoup d’autres l’ont trouvé en DSK.
Qui aujourd’hui pourrait réellement définir ce que c’est qu’être Strauss Kahnien ? Qui sait réellement ce qu’est la méthode Strauss Kahn, la doctrine DSK ? Assurément peu de gens. Mais DSK représente d’abord ce que les partis traditionnels n’ont pas aux yeux des français : l’efficacité. Sa gestion de la crise réputée bonne, l’a fait passer pour efficace en opposition à un gouvernement aux résultats discutables et à une opposition considérée par beaucoup comme apathique. En s’éloignant de France, DSK ne s’est pas exposé aux querelles franco-françaises où tous les politiques laissent des plumes.
En se taisant DSK entend se placer au dessus de la bataille politique, il ne participe pas aux querelles des politiques qui, de leur côté ne peuvent plus s’exprimer sans faire l’objet d’une réponse cinglante du camp adverse : en s’écorchant les uns les autres, ce n’est pas seulement leur adversaire que les hommes politiques discréditent mais bel et bien la classe politique dans son ensemble.
Par ailleurs DSK semble - je dit bien semble -, sortir du traditionnel clivage droite gauche qui fatigue les français. Ces derniers voient DSK comme l’homme capable de réaliser les promesses de 2007 de Sarkozy, avec un zeste de social supplémentaire. Finalement DSK représenterait cette alternative, ce centre de substitution, tout ce que le politique "traditionnel" n’est pas capable d’être : Efficace, pragmatique, indépendante d’une idéologie, adulte. La popularité de DSK ne n’est donc pas le signe du génie du patron du FMI, mais bel et bien du désamour entre les français et leur classe politique.
Dominique Strauss Kahn représenterait la réflexion face au chaos de ce qu’on appelle aujourd’hui la « mini-politique ».
Mais aujourd’hui, d’autres entendent concurrencer Dominique Strauss Kahn dans cette course au centre de substitution, à la récupération des désillusionnés. Ces adversaires appartiennent chacun à un courant politique différents et récupèrent respectivement les déçus de l’UMP et du PS : il s’agit de Dominique de Villepin et d’Eva Joly. L’ancien premier ministre, se pose dans une posture de droite résolument traditionnelle, gaulliste et récupère les déçus à droite, Eva Joly elle, plus ou moins leader d’Europe écologie incarne une gauche qui s’est renouvelé à travers le projet écologique. Ces 2 politiques se situent également suffisamment en retrait de la vie politique quotidienne pour jouir eux aussi d’une sorte d’immunité. Longtemps seul dans son domaine, Dominique Strauss Kahn voit aujourd’hui la menace Villepin monter sur sa droite, et la menace Joly sur sa gauche. Dominique Strauss Kahn devra donc faire face à la concurrence.
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