Écologie : gadget ou sacré ?
L’écologie doit-il être un dérivatif pour bobos en quête d’âme ou fournir le sacré, la référence ultime, de toute décision.

Contrairement à ce qui est souvent proclamé, c’est l’énergie et non pas l’argent qui est nécessaire à toute vie, tout mouvement, toute organisation sociale, sur Terre comme ailleurs. C’est la forme scientifique et purement rationnelle d’un être suprême doté de tous les pouvoirs divins, tous les pouvoirs sacrés. Sa nature et son mode d’utilisation déterminent tout, agencent tout sans possibilité d’aucune transgression.
L’énergie peut provenir de combustibles fossiles mettant en jeu des réactions entre molécules ou à partir d’atomes fissiles qui se prêtent à des réactions nucléaires délivrant bien plus d’énergie. Un jour, les combustibles fossiles viendront à manquer, ce jour dépend des découvertes futures de gisements et de leur facilité d’exploitation. Un jour, les minerais se prêtant aux réactions nucléaires viendront à manquer. Ce jour dépend pour l’essentiel si les nouvelles technologies possibles sont adoptées ou non.
Mais le problème ne se pose pas en ces termes : quelle humanité voulons-nous ? Une où une minorité domine la multitude ou une autre où un idéal de fraternité s’impose à toute autre considération. La première n’est que la continuation des processus dits économiques mis en place à partir des années 1980 : c’est le passage d’une civilisation spiritualiste à une autre purement matérialiste. La seconde demande une ardeur sans cesse renouvelée, ponctuée d’insuccès pour lutter contre les tendances si naturelles qui poussent à se hisser plus haut que les autres pour les organiser, les commander, les faire obéir… pour le bien de tous.
Les occidentaux proviennent tous d’un univers chrétien qui définissait comme sacré le respect, voire l’amour, des autres. Les Hommes cheminaient à plus ou moins petits pas, guidés par cette boussole. Certains endossaient un costume bien trop grand pour eux mais tous étaient contraints par un sacré incontestable, incontournable, de suivre le chemin dessiné ou du moins de montrer aux autres qu’ils essayaient de le faire.
Un peu partout, on s’est débarrassé d’un carcan jugé trop contraignant car privilégiant le tous sur le chacun. Mais si le refus de partager anime d’instinct les enfants, comprendre que le bien de tous passe d’abord par le bien de chacun représente un effort de tous les instants : « Quand on cesse de croire en Dieu, ce n’est pas pour croire en rien, c’est pour croire en n’importe quoi. »
Le premier des N’importe quoi est l’idéologie libérale censée fournir une telle abondance de biens qu’elle justifie la destruction méthodique de toute forme de valeurs collectives, de toute forme de justice, de toute forme de variété, de toute forme de morale. L’éthique est remplacée par la réglementation, la probité par la concurrence : une société du bonheur sans nécessité d’un sacré peut apparaître. Cette approche satisfait les puissants car elle justifie leur puissance, mais la classe dominante qui s’installe ainsi, guidée presque exclusivement par l’appât du gain, se révèle à l’usage d’une affligeante médiocrité.
Le second des N’importe quoi est la résurgence ou l’extension d’une religiosité dans ce qu’elle a de pire. Toutes les formes de croyance sont atteintes et des rituels qui confinent à la sorcellerie reviennent sur le premier plan de la scène. Une instrumentation par le pouvoir politique, inauguré à l’origine par l’Empereur Constantin, s’est fragmentée pour être présente dans toutes les régions du globe avec divers habits. Ce qui importe vraiment ce n’est pas la religion qui peut rendre fort des imbéciles, mais la foi qui pousse à croire ardemment, et non pas à penser, qu’un Homme en vaut forcément un autre si personne ne triche.
Autorité ou concurrence. La démocratie est en passe de devenir le troisième des N’importe quoi : le mode d’élection au scrutin majoritaire conduit l’heureux élu à faire la somme des intérêts catégoriels en oubliant l’intérêt commun qui, toujours et à tout moment, nécessite des efforts ; mais ces efforts tous veulent les faire porter aux autres. La Démocratie se meure parce que les dirigeants ne disent plus la vérité mais celle que l’on veut bien entendre : les postures, les faux semblants, les déguisements sont considérés comme une nécessité politique, une suprême habilité.
Pourquoi ne pas choisir un monde futur fait d’androïdes domptant (ou domptés par) des réalités virtuelles, plutôt qu’un autre fait de simples humains se coltinant avec la réalité réelle. L’écologie peut donner une direction à tous, et peut-être même aux dirigeants, pour conserver l’intégrité des différences, des altérités en s’écartant résolument de toute uniformité induite par l’Homme. Mais cette humanité faite de différences est aussi faite de respect et il est impératif qu’un système de castes soit banni, et pourtant il s’installe chaque jour davantage.
L’esclavage a été longtemps une source d’approvisionnement en force de travail au service d’une minorité : Athènes possédait environ 80 000 esclaves aux VIe et Ve siècles av. J.-C., soit environ quatre esclaves par ménage. Les machines alimentées très majoritairement en énergies non renouvelables ont remplacé les esclaves avec profit : un esclave est 10 à 100 fois plus coûteux à utiliser, pour un travail comparable, qu’une machine. C’est cet équilibre qu’il faut modifier, non pas en se passant des machines, mais en favorisant le travail humain productif de valeurs.
Les flux physiques nécessitent de l’énergie et d’autant plus d’énergie que les échanges sont rapides. Les flux économiques et financiers dépendent in fine des flux physiques dans l’économie réelle, mais ce n’est pas le cas dans une réalité virtuelle constituée de rêves illusoirement accessibles. Un monde fait de réalités virtuelles permet d’immenses économies d’énergie. Les individus peuvent alors se réfugier hors la vie en ne consommant plus que le strict nécessaire pour subsister, par exemple nichés dans des alvéoles sur le modèle des hôtels capsule japonais déjà existants. Si l’on se place dans ce cas, aucune crise énergétique n’est à craindre : les ruches d’Homo sapiens pourront s’adapter aux pires disettes.
Mais que fait-on si l’on souhaite vivre au milieu d’hommes, de femmes, d’enfants, de paysages, d’animaux, de poissons… ?
Il faut ralentir les flux économiques et financiers, mais ceux-ci ne forment que l’écume des jours, l’important est ailleurs. Il faut ralentir drastiquement la vitesse de tous les échanges en régulant le flux des énergies, sources de toute activité.
Le prix du pétrole est pour l’essentiel dû aux diverses taxes qui lui sont imposées. Les recettes ainsi recueillies permettent d’abonder les finances des états sans aucune maîtrise sur la destination finale des sommes récoltées. Il est proposé d’augmenter considérablement le montant des taxes sur tous les combustibles fossiles : pétrole, gaz, charbon. Les fonds recueillis seraient alors affectés à un organisme directement attaché l’ONU qui les gèreraient sous le contrôle des 193 pays qui la constitue. Le mandat de cet organisme serait de faire en sorte que les objectifs de l’accord de Paris sur le climat soient scrupuleusement respectés. L’organisme rattaché à l’ONU devrait être constitué des membres de l’Académie des Sciences de tous les pays concernés, représentés par leur Président. Cette distanciation par rapport aux voies traditionnelles où les responsables sont élus plus ou moins démocratiquement mais toujours au prix de lourds compromis avec les mondes du spectacle, est indispensable au bon fonctionnement général. Les membres des académies ont les compétences techniques nécessaires pour trancher selon le seul critère de l’optimisation écologique du futur proche et lointain.
Ceci représente la seule mesure nécessaire et suffisante pour assurer une transition énergétique mais aussi pour induire une mutation vers le seul nouveau monde vivable.
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