En France le déni de guerre se poursuit, aux Etats-unis on lui vote des crédits… par danielle Bleitrach
Il est intéressant de voir les suites des révélations sur la catastrophiques guerre en Afghanistan. En France, le président et le premier ministre utilisent la mort du malheureux Michel Germaneau, en laissant croire que c’est toute l’Afrique francophone, voire le maghreb, bref le pré carré français qui serait à feu et à sang, ce qui permet à la fois d’occulter le caractère catastrophique de l’opération militaire de jeudi et de noyer les rares questions qui pourraient fuser sur le désastre afghan tel que le révèlent les dossiers mis à jour par le site Wikileaks sur la réalité de cette guerre. Comment pendant qu’on assassine des Français -il est vrai à quelques milliers de km de chez eux, dans une zone dangereuse bien que limitée- vous oseriez dénoncer notre présence en Afghanistan ? Rassurez-vous personne ne s’est hasardé à l’exercice, la télévision n’en a pratiquement pas parlé, la presse s’est contenté d’en faire une histoire concernant les seuls nord-américains, quant au monde politique il s’occupe d’autre chose. Il n’en est pas tout à fait de même aux Etats-Unis.
Obama un dangereux socialiste
Il est des moments où l’on envie le débat tel qu’il a lieu aux Etats-Unis. Pourtant il a ses dérives quasiment folkloriques et quand on voit le panneau publicitaire (voir photo) que le mouvement tea party d’extrême droite a été capable d’afficher dans l’Iowa le fou-rire nous prend. Obama est comparé à Hitler et Lénine avec un message très lapidaire : « Radical Leaders Prey on the fearful and naïve ». Autrement dit vous les craintifs et les naïfs ne soyez pas la proie de cet homme qui est lui-même la proie de ces leaders « extrémistes ». Le panneau reproduit les trois hommes avec les mots « national socialisme, démocrate socialisme, marxiste socialiste », le dénominateur commun étant ce mot de socialisme qui aux US constitue un épouvantail d’une efficacité sans borne, même si accuser Obama, ce thuriféraire de Wall street et ce zélote du capitalisme, d’être socialiste est à peu près aussi crédible que de l’accuser d’être un grand prêtre vaudou... C’est le genre d’amalgame que certains voudraient bien voir devenir un réflexe conditionné en Europe. Cette brève remarque permet de tempérer ce que ma nostalgie du débat aux Etats-unis pourrait avoir d’excessif.
Mais revenons au fond de l’Affaire : la chambre des représentants approuve l’octroi de 33.000 millions de dollars supplémentaire pour la guerre d’Afghanistan.
Donc si en France nous sommes toujours dans le déni de guerre et si personne ne paraît décidément intéressé ni par le coût, ni par les résultats de cette désastreuse guerre, il n’en est pas de même ni aux Etats-Unis.Mais rassurez vous pour le complexe industrialo militaire qu’il s’agisse de la France ou des Etats-unis les résultats sont les mêmes : il empoche. Que l’on ne s’alarme pas du terme complexe industrialo militaire et de sa domination sur les politiques, ce n’est pas moi qui en suis la dénonciatrice mais le président Eisenhower. (1)
La chambre des Etats-Unis a approuvé le 27 juillet un projet de loi qui octroie plus de 33.000 millions de dollars pour financer la guerre en Afghanistan ; L’approbation de ces nouveaux fonds a coïncidé avec la publication des 91.000 documents militaires en Afghanistan révélant, entre autres choses, des opérations secrètes, le meurtre de civils soigneusement masqués et la dénonciation des services secrets pakistanais. Le nombre de victimes civiles collatérales serait ainsi supérieur aux 195 morts et 174 blessés reconnus officiellement, des dizaines d’autres décès accidentels n’étant jamais mentionnés, précise le Guardian.« les documents dépeignent une guerre paralysée par le manque de compétences et de loyauté des autorités et forces de sécurité afghanes, et par une armée pakistanaise qui paraît au mieux peu coopérative, au pire travaillant en sous-main avec les insurgés contre lesquels la coalition se bat », affirme de son côté le New York Times.Enfin les notes confidentielles confirmeraient les soupçons pesant depuis déjà quelques temps sur l’attitude ambiguë du Pakistan, allié déclaré de Washington dans la lutte contre le terrorisme. Ce pays limitrophe de l’Afghanistan, qui reçoit plus d’un milliard de dollars par an des Etats-Unis pour combattre les talibans, laisserait pourtant certains de ses agents secrets participer à des réunions d’insurgés pour planifier des attaques contre les soldats américains ou organiser des assassinats de dirigeants afghans.Donc le 1 milliard de dollars servirait à alimenter l’insurrection (2). L’Iran est également pointé du doigt pour fournir les talibans en armes, argent et entraînement, rapporte le Guardian. Selon une note diplomatique de l’ambassade américaine à Kaboul, le ministère afghan des Affaires étrangères accuse aussi Téhéran de verser des millions de dollars de pots-de-vin à des parlementaires afghans et d’œuvrer au départ de ministres réformateurs du gouvernement. Ces informations, fournies par des informateurs afghans rémunérés, ne peuvent toutefois être corroborées, précise le journal. On savait à quel point la situation afghane était pourrie mais le voir écrit noir sur blanc et surtout franchissant pour la première fois aux Etats-unis le politiquement correct de l’unanimité nationale des grands médias, est un problème politique.La France est épargnée par ces états d’âme vu que l’omerta continue malgré les révélations sur le mitraillage d’enfants par nos troupes et surtout l’envoi sans cesse croissant des dites troupes françaises en renfort de celles des Etats-Unis dans le bourbier.
C’est pour cela qu’il faut payer…
Obama a admis qu’il était « préoccupé » par les révélations et la divulgation des documents, tout en insistant sur le fait que les informations sont déjà anciennes (appartenant selon lui à l’ère Bush) et ne contiennent rien de nouveau.« Wikileaks n’a pas cherché à contacter le gouvernement américain à propos de ces documents qui peuvent contenir des informations susceptibles de mettre en danger la vie de citoyens américains, de nos partenaires et des populations qui collaborent avec nous », a déclaré le porte-parole de l’administration Obama. La Maison-Blanche souligne également que la situation chaotique dépeinte dans les rapports résulte du manque de ressources affectées au conflit afghan sous l’administration Bush. Barack Obama avait profondément modifié la stratégie alliée en décembre 2009, en envoyant notamment des renforts militaires.
Donc le vote de fonds additionnels de 33.000 millions de dollars serait en quelque sorte la réponse logique aux révélations. On croit rêver quand on sait la situation de crise dans laquelle se débattent les Etats-Unis. Plus de 100,000 des citoyens des Etats-unis déposent le bilan chaque mois, une procédure de faillite qui leur évite de continuer à payer leuurs dettes mais qui leur fait tout abandonner. Trois millions de propriétaires font face à la saisie cette année. Ajoutez-les aux 2.8 millions qui ont été interdits en 2009, la première année de l’entrée d’’Obama en fonction. Presque sept millions sont sans emplois depuis l’année dernière pour une durée de six mois ou plus longtemps. Si vous additionnez à ceux-là les gens qui ont renoncé à chercher du travail et les gens en temps partiel, le total avoisine les 20 millions. Par parenthèse cela explique la folie des membres des Tea party qui ne remettent pas en cause la guerre mais sont convaincus que le socialisme d’Obama explique leur ruine. C’est cela la logique de l’extrême-droite, faire peur avec l’ennemi intérieur, continuer à nourrir le complexe militaro-industriel et dénoncer le « socialisme » des crédits à l’éducation ou à la santé. Nous avons des gens comme ça en France. Ajoutons qu’aux Etats-unis, ils développent aussi le racisme contre obama… comme chez nous contre l’arabe du coin… Tout plutôt que de s’interroger sur la guerre et sur un ennemi fabriqué par les crédits occidentaux, voir par la CIA elle-même, entretenu par lui comme par la misère et le pillage des ressources du pays.
Aux Etats-Unis, malgré le vote des crédits additionnels pour cette folie manifeste, des voix se sont faites entendre ce qui est un petit plus par rapport à la bande de muets que sont les représentants politiques français. Le député démocrate pour le Massachusetts Jim McGovern a ainsi déclaré le 27 juillet 2010 à l’occasion du débhat sur ces crédits que les documents publiés dans le site internet de Wikileaks révélent la corruption et l’incompétence de la part du gouvernement afghan.
Ce qui d’ailleurs peut être une critique de surface dans la mesure où les Etats-Unis s’opposent à la stratégie de réconciliation nationale pronée par le dit gouvernement. Découvrir la corruption du gouvernement afghan est une plaisanterie, les députés nord-américains sont très naïfs s’ils n’ont pas compris que partout dans le monde les « marionnettes » soutenues par l’occident sont totalement corrompues et s’ils n’ont pas l’élémentaire cynisme de déclarer comme jadis pour Somoza, « c’est un fils de pute mais c’est notre fils de pute »…
Peut-être le problème est-il que le fils de pute en question, comme les services secrets pakistanais n’appartiennent même plus aux Etats-unis et aux occidentaux. Corrompus, incompétents ce n’est pas une nouveauté c’est même compris dans le contrat mais en fait oeuvrant dans le camp de l’opposition aux Etats-Unis et à l’OTAN, voilà une des nouveautés qui montre que nous sommes bien dans une nouvelle époque, celle de l’émergence que nous le voulions ou non d’une monde multipolaire.
Danielle Bleitrach
(2) La popularisation de ce terme remonte à l’emploi par le président des États-Unis Dwight Eisenhower, « Ike », qui avertissait ses compatriotes des dangers d’une trop grosse influence des industriels liées au Département de la Défense des États-Unis, qui gère l’évolution de l’armée américaine par l’intermédiaire de contrats de défense, telle qu’il avait pu l’observer en tant que chef du haut-commandement des armées alliées en Europe durant la Seconde Guerre mondiale ; son discours intervenait également dans un contexte marqué par la course aux armements.
(2) Nous avons dans notre site traduit de nombreux textes en provenance des Etats-unis, dont certains expliquent comment les entreprises privées chargées de la maintenance entre les postes militaires de l’OTAN, étaient soumis à un rackette local des seigneurs de la guerre officiellement alliés des occidentaux, en fait versant sa quote part aux insurgés, le coût en doublait quasiment pour l’armée nord-américaine et celles de ses alliés, ce qui fait que là encore le financement de l’insurrection était pour une part assuré par les contribuables des dits pays de l’OTAN. Même constat dans les 92.000 pages où l’on découvre que les talibans sont pourvus d’armes données par les Etats-Unis lors de la lutte contre l’ex-URSS...
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