Et si les homos en savaient plus que vous ?
À l’adolescence, quand 90% de la population se soucie des devoirs de maths, les homos se soucient avant tout de leur devoir personnel : la construction d’identité en autonomie. Pour l’hétéro c’est plutôt simple, la construction est accompagnée (voire fixée ?) par beaucoup d’éléments de la société : on regarde la télévision et on s’identifie très rapidement, aux couples dans les publicités, dans les films… Pendant ce temps, les LGBT (dont les transgenres [opposé : cisgenre] : dont le genre – homme, femme – ne correspond pas au sexe -mâle, femelle- à plus fort titre étant donné qu’ils doivent aussi se construire un corps) ont dû subir depuis le plus jeune âge les contraintes liées aux rôles sociaux genrés : jusqu’à récemment, ils étaient invisibles (et ils sont toujours moins représentées que ce que la statistique le supposerait légitimement) et l’hétéro-centrisme total. Bon, c’est vrai, on a tous des problèmes familiaux et financiers qui contraignent notre développement, mais combien d’entre nous, à part les homos, n’ont pas bénéficié d’un entourage leur permettant une identification ? Ce problème d’identité, même dans les minorités ethniques n’a pas d’égal, étant donné que, même si les enfants de ces dernières sont rejetés par la sociétés, ils bénéficient au sein de leur entourage proche des semblables, des exemples à qui s’identifier. Attention, il n’est pas question ici de personnes exemplaires, mais d’un simple besoin pour un être en construction de pouvoir se dire « ça pourrait-être moi » sans avoir à exterminer une partie de soi. La question est la suivante : comment grandir, être, aimer, quand on ne peut prendre modèle nulle part ? Comment un louveteau pourrait-il trouver sa place dans son milieu de vie sans que sa famille ne soit là pour le lui montrer ? Étant donné que, jusqu’à présent, un homo naît très souvent dans une famille hétéroparentale, et la non-visibilité des minorités de l’identité, il n’a d’autre choix que d’apprendre à faire exister sa personne, et de trouver sa place lui-même. On n’a pas d’autre choix que de se renier pendant des années à cause des représentations que l’on nous a fait intégré, quand on survit malgré des poussées suicidaires incessantes, et puis quand ensuite on a une identité à construire, chaque jour, sans personne pour nous guider.
Et c’est ce parcours, certes formateur et grandissant, mais qui laisse chaque année des milliers de morts en chemin, aux pieds des immeubles, dans les hôpitaux, sur les bras et dans les coeurs de leurs proches (qui la plupart du temps ignorent la cause du suicide), que les anti « théorie du genre », les assassins des minorités, voudraient faire perdurer. La « déviance » serait bien trop horrible, malsaine, pour permettre qu’on sauve et qu’on facilite bien des vies en expliquant à l’école qu’il n’y a pas de schéma préférable. Ces faiseurs et colporteurs d’un soit disant « lobby gay » qui attaquerait la famille et la société sont trop sadiques mais surtout trop en déni pour pouvoir être crédibles. Quel crédit apporter à ceux qui ignorent toujours que les homos sont nés de familles hétéros et que des familles homos produisent des enfants hétéros ? Cela ne peut qu’être que la manifestation innocente de leur désir inconscient de continuer à tuer indirectement tous les « déviants » de la société…
Si les homos forment un « lobby », c’est le syndicat de la lutte pour la survie, car ils n’acceptent plus de voir leurs cadets se couper les veines sept fois plus souvent que les autres. S’il ne s’agit aucunement ici de faire de morale ou d’opposer homos et hétéros, il m’a paru important de rappeler à tous les assassins pourquoi ils en sont, et pourquoi ils devraient respecter les « déviants » qui en savent certainement plus à la vie. La position de victimisation est ici assumée, car le louveteau devant trouver sa place dans la chaîne alimentaire sans famille est bien une victime. Les homos l’ont tous été du moment que la société ne leur proposait pas d’exemple d’être, tant que la société ne leur donnait aucun miroir, et leurs combats montrent que les victimes peuvent se libérer, même s’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir, tant en France qu’à l’étranger.
À ceux qui tendraient à inverser les rôle et transformer les homos en bourreaux : le jour où les hétéros ne pourront plus s’identifier à personne dans la société et se suicideront de non-existence, vous serez audibles. Il est cependant raisonnable de penser que, la proportion d’homos dans la population générale étant de moins de 10%, vous ne devriez jamais être écoutés.
À celles qui s’indignent contre la rapidité qu’ont eu les homos à faire changer la société, il faut avancer le fait que les homos sont distribués aléatoirement dans la population, décuplant les possibilités de rencontre et faisant baisser drastiquement l’ignorance et la méconnaissance. Cette chance inouïe dont n’ont pas bénéficié les luttes civiques des Afro-américains ou d’autres communautés, qui contraint les homos à ne pas pouvoir connaître de communautarisme réel et de séparation du reste de la société, vu qu’ils sont pratiquement tous liés à des milieux hétérosexuels. Chance inouïe dont le revers de la médaille, l’isolement, a longtemps empêché les homos de se retrouver, de se reconnaître, et de se construire.
Quelle expérience de la société ont ces assassins qui puisse leur donner le droit de tuer des jeunes en désirant rétablir un carcan social qui a déjà fait des millions de morts au cours des siècles ?
Notes :
Usage du terme « homo » pour faciliter la caractérisation et la représentation des LGBTIQ.
Cet article n’entend pas donner le monopole de la lutte pour la construction identitaire aux homos.
Il a été ici seulement question de la non-visibilité, c’est donc sans compter les effets catastrophiques des discours haineux anti-diversité et leur intégration par la population.
Ce combat est aussi le combat des femmes : comment pourrait-on observer une parité dans les tâches ménagères ou dans l’éducation des enfants si l’on continue à mettre des poupons et des dinettes dans les seuls bras des filles ?
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