Faces cachées des polémiques autour de la limitation de vitesse à 80 km/h
Radio et TV nous imposent beaucoup de longues discutailleries au sujet de la limitation de vitesse à 80 km/h. Le plus souvent, elles restent superficielles. On tente de se livrer ici à une analyse plus profonde et originale du sujet. Cet article ne vous laissera pas indifférent ...
En général, les Français aiment conduire, vite autant que possible. Perso, je n’échappe pas à la règle et j’adore la légère griserie procurée par la vitesse. A vrai dire, la voiture reste le joujou inavoué de nombreux adulescents (1) parmi lesquels on trouve de plus en plus de retraités... Et puis, dans certains milieux, une belle et puissante bagnole ne témoigne-t-elle pas, d’un statut social honorable voire d’une vie réussie, enviable et heureuse ? Je me souviens d’un adjoint qui m’implorait de lui octroyer une Mercédès pour sa voiture de fonction car, m’assurait-il, il ne pouvait décemment pas stationner sur les parkings de nos clients (administrations) avec une voiture de standing inférieur. Il ne s’agit pas de dénigrer ici l’automobile en soi. La voiture reste un outil indispensable, notamment pour les prolétaires modestes auxquels on demande souvent ponctualité et mobilité bien qu’ils ne disposent généralement que des véhicules les moins fiables du parc.
Pourquoi nier qu’à 90 km/h, on s’ennuie moins qu’à 80 ?
La nouvelle réglementation sur la limitation de vitesse à 80 km/h donne lieu, depuis plusieurs semaines, à des palabres interminables dans les médias. Bien entendu, il est de bonne guerre, pour l’opposition, de faire feu de tout bois. Ce genre de sujet, c’est comme le renouvellement de vaisselle de l’Elysée ou la piscine de Brégançon : pendant qu’on en discute, on oublie nos vrais problèmes comme la désespérance dans les EHPAD, l’immigration, le partage par la décroissance (2), la fonte des glaciers terrestres, la croissance du salafisme en France, les comportements violents chez les jeunes, l’addiction à la pornographie chez les mêmes, les drogues, la réduction rampante de la liberté d’expression (3).
Cependant, lorsqu’on cherche à creuser l’affaire, on en découvre quelques aspects situés bien au-delà du banal bruit de fond politique.
Certains, par exemple, vont pousser la mauvaise foi jusqu’à affirmer que la vitesse est moins dangereuse que la lenteur (Les conducteurs rapides maîtrisent la chose quand les lents manquent de sûreté et de réflexes n’est-ce pas ? ). D’autres vont vous démontrer que plus on va vite moins de temps le moteur va tourner et moins on va consommer de carburant. D’autres encore vont noyer le poisson en accusant la voirie : qu’on coule des autoroutes ou des voies séparées partout et le PB sera définitivement réglé. Mais restons indulgents : comme la vitesse, la mauvaise foi et le déni de réalité éhontés procurent une certaine griserie, surtout en plein apéro... Et puis, pour certains comme Christine Angot, la pureté d’une idéologie balaye le nombre de victimes qu’elle entraîne. Pol Pot pas mort !
Examinons maintenant quelques aspects purement techniques (Sautez ce passage si vous n’aimez pas les chiffres).
Si vous sautez en bas d’un mur de 3,50 mètres, il est évident que vos chevilles et votre colonne vertébrale supporteront mieux le choc que si vous sautiez d’un mur de 4,50 mètres. Dans le premier cas vous toucherez le sol avec une vitesse de 30 km/h contre 33,75 km/h dans le second cas (valeurs arrondies). A noter que le rapport entre 33,75 et 30 est le même qu’entre 90 et 80. Dans le premier cas, les coûts et conséquences médicaux seront moindres que dans le second.
L’énergie cinétique (Joules) croît avec le carré de la vitesse. Par conséquent, l’énergie cinétique d’un véhicule roulant à 90 km/h est 26% plus forte que celle d’un véhicule roulant à 80 km/h (81/64). Même chose pour les corps des passagers qui subissent des chocs d’autant plus violents que leur énergie cinétique est grande.
La force (Newtons) fournie par le moteur pour vaincre la résistance à l’avancement dépend notamment de la résistance de l’air laquelle croît aussi avec le carré de la vitesse. La puissance (Watts) fournie par le moteur est égale à la vitesse (m/s) multipliée par cette force. La consommation instantanée augmente donc avec la puissance.
Voyons alors les aspects écologiques.
Tout accroissement de vitesse entraîne indéniablement un surcoût écologique. A la consommation de carburant, il convient d’ajouter celles de caoutchouc, de lubrifiants, de plaquettes de freins, d’asphalte etc. Et, bien entendu une réduction de la durée de vie des véhicules.
Question tordue : quel serait, en 2018, l’état écologique de notre planète si les vitesses moyennes de tous les véhicules terrestres, bateaux et aéronefs à moteur (vapeur, pétrole, gaz, électricité) depuis le XIXème siècle avait été réduite du facteur 80/90 ?
CONCLUSION
Il est pour le moins cocasse que les citoyens du « vertueux » pays organisateur de la COP21 ( Fin 2015) n’accordent pas plus d’attention aux aspects écologiques de leur mode de vie tels que celui de la vitesse maximum autorisée de leurs automobiles.
Il est aberrant que les citoyens d’un pays à fort déficit commercial, passablement endetté de surcroît, se soucient peu du poste le plus important dudit déficit : le pétrole.
Au-delà de ces basses considérations économico-écologiques ("mesquine logique comptable" disent les casse-cou de l’économie et autres budgétivores), un peu de perspicacité révèle des non-dits beaucoup plus profonds éclairant le sens caché que l’homme contemporain donne à sa vie.
Ainsi, parmi les arguments contre le passage de 90 à 80, on entend celui du temps perdu (8 minutes et 20 secondes sur une distance de 100 km). La vitesse nous fait gagner du temps. Le temps, c’est de l’argent. C’est de l’investissement, de la production, moins de chômage. Mais le côté le plus secret de l’argent, n’est-il pas plus de consommation superflue, plus de loisirs énergivores ? C’est demander toujours plus à une planète quasi exsangue. Rappelez-vous l’empreinte énergétique du Concorde : de nombreux carriéristes, de people, de VIP et autres personnages de même acabit le vénéraient comme un instrument indispensable à leur emploi du temps extrêmement serré. L’était-pas belle cette vie de snob où l’on pouvait s’offrir, le temps d’un éclair, un shopping capricieux à New York ? Aujourd’hui, combien de personnes admettraient, avec le recul, qu’il s’agissait de pure vanité ? Ou, au contraire, combien d’inconscients regretteraient encore que le manque de supersonique commercial pour gens de qualité nuit grandement à l’expression optimum de leur rendement exceptionnel ?
En 2018, seuls les services d’urgence devraient avoir besoin de vitesse !
Pour terminer, jetons un coup d’œil sur la présente Coupe du Monde. On redécouvre une pensée de Pascal « Les hommes s’occupent à suivre une balle et un lièvre. C’est le plaisir même des rois ». Aujourd’hui, les rois ce sont les vedettes du foot et le lièvre se sont leurs gros cachets. Souvent, ils s’en octroient des voitures italiennes rapides et des femmes bien carrossées, comme des pit babes (5). Ce sont les idoles de nombreux jeunes, les futurs automobilistes...
Mais, allez-vous dire, cela n’a strictement rien à voir avec les 80 km/h.
En êtes-vous bien certains ?
(1)Adulte qui, pour diverses raisons, se comporte comme un adolescent. Ce phénomène se trouve en pleine croissance dans le monde occidental.
(2)Association de mots encore tabous mais bientôt incontournables.
(3)A ce sujet, l’éviction récente de TV Libertés de You Tube est scandaleuse. Si on ajoute à cela la loi « Fake news », on est en droit de s’interroger sur l’avenir de la liberté d’expression.
(4)Emission On n’est pas couchés du 2 juin 2018
(5)Hôtesses, généralement sexy, attachées aux principaux évènements touchant à l’automobile.
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