Fin de la COP28, avec en perspective un inévitable « requiem » pour le climat ?
La COP 28 qui s’est déroulée du 30 Novembre au 12 Décembre 2023 à Dubaï (Emirats arabes unis) s’est achevée par un accord au forceps pour aller vers une « transition hors des énergies fossiles dans les systèmes énergétiques ». Mais encore faudrait-il que ce fut possible, car la seule la question technologique ne suffira pas à y parvenir, tant que la question démographique sera exclue des débats.
Accord final à la COP 28, entre satisfaction des un(e)s et réserves justifiées des autres
La COP 28 qui s’est déroulée du 30 Novembre au 12 Décembre 2023 à Dubaï (Emirats arabes unis) s’est conclue par un accord obtenu au forceps, et Sept ans après l'accord de Paris à la COP 21, les Etats participants se réjouissent » d’une avancée cruciale dans la lutte contre le changement climatique ». Bien que les pays pétroliers du golfe Persique emmenés par l’Arabie saoudite, aient beaucoup plus mis en avant seulement la baisse des émissions de gaz à effet de serre que la sortie définitive des énergies fossiles à une date donnée, comme on pouvait s’y attendre, après cet accord, la réaction des leaders politiques mondiaux a été largement positive. Par exemple, le Président Français Emmanuel Macron a qualifié l'accord « d'étape importante dans l'engagement du monde vers une transition sans énergies fossiles et a appelé à accélérer la lutte contre le réchauffement planétaire ». Agnès Pannier-Runacher, ministre française de la Transition énergétique, a salué l'accord comme une victoire du multilatéralisme et de la diplomatie climatique. De même, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a déclaré que » l'accord marquait le début de l'ère post-fossile ». António Guterres, le secrétaire général de l’ONU a lui souligné « l'inévitabilité de la sortie des combustibles fossiles », mettant en garde contre les retards et les demi-mesures.
Contrairement à l’optimisme, parfois béat des responsables des Etats participants à cette COP 28, des réserves justifiées ont toutefois été émises par certain(e)s personnalités. Pour la paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte : « Les promesses, si elles se réalisent toutes, impliqueraient une baisse de 5 % des gaz à effet de serre à horizon 2030, alors que pour limiter le réchauffement largement sous 2 °C il faudrait une baisse de 43 %». Elle a notamment évoqué un besoin supplémentaire de financements, à la fois pour « le déploiement des alternatives aux énergies fossiles pour l’adaptation » et pour le mécanisme de « pertes et dommages ».
Pour le GIEC, les experts du climat dans leur leur 6e rapport, afin que le monde reste sur la voie d’un réchauffement à +1,5 °C, pour eux : « les émissions de CO2 doivent diminuer de 48 % d’ici à 2030, de 80 % d’ici à 2040 et de 99 % d’ici à 2050 par rapport aux niveaux de 2019. Les émissions totales, tout gaz à effet de serre inclus, doivent diminuer de 43 % d’ici à 2030, de 69 % d’ici à 2040 et de 84 % d’ici à 2050. Enfin, un futur compatible avec un scénario de réchauffement à +1,5 °C ne permet aucun développement des combustibles fossiles, car les émissions de CO2 prévues pour les infrastructures existantes dépassent déjà le budget carbone restant ».
Comme le font observer certains journalistes, l’émissaire des Îles Marshall, une île du Pacifique, se montre également critique à l’égard de l’accord. « Je suis venu depuis mon île natale pour travailler avec vous tous afin de relever le plus grand défi de notre génération. Je suis venu ici pour construire ensemble un canoë pour mon pays », a énoncé John Silk lors de la séance plénière de la COP28. « Au lieu de cela, nous avons construit un canoë dont la coque est faible et percée, remplie de trous. Pourtant, nous devons le mettre à l’eau parce que nous n’avons pas d’autre choix », déplore-t-il. Le ministre de cet archipel d’Océanie souligne enfin que le changement climatique érode actuellement les côtes de son état, tout en notant néanmoins que l’accord conclu aujourd’hui constitue un progrès. Bien sûr ! La diplomatie climatique ayant parfois ses raisons que la raison ne saurait avoir...
Il faut se rendre à l’évidence, quels que soient les accords et la meilleure volonté du monde, ne pas poser la question démographique, c’est rendre caduque toute initiative technologique et filer vers les abîmes
Selon DATA population.fr, depuis 1960 où le taux moyen mondial de fécondité oscillait autour de 5 enfants par femme, la plupart des régions du monde ont vu leur taux de fécondité baisser à un niveau moyen oscillant entre 1,7 et 2,8 enfants par femme en 2023. Sauf l’Afrique subsaharienne, qui est actuellement à peine sous les 5 enfants par femme (4,7). Mais malgré cette baisse, en 1960 la population mondiale qui était de 3 milliards d’habitants est passée à 8,1 milliards en 2023 et ce n’est pas terminé...
Quelques exemples de croissance démographique dans certaines régions du monde de 1960 à 2023 : En 1960 l’Afrique comptait 300 millions d’habitants contre 1,3 milliard en 2023 et doublera très certainement d’ici une vingtaine d’années.
La Chine comptait 670 millions d’habitants en 1960 et depuis, malgré une période de politique rigoureuse à 1 enfant par femme, en 2023 elle en a 1,412 milliard.
L’Inde avec 460 millions d’habitants en 1960 devance en 2023 son voisin Chinois avec 1,430 milliards. Sauf que son territoire de 2 287 264 km² est presque trois fois inférieur à celui de la Chine 9 600 000 km² lequel est au 3e rang derrière la Russie et le Canada.
Si on y ajoute une perte à l’échelle mondiale de 275 km2 par jour de terres arables (100 375 km² par an) sous le béton et l'asphalte, du aux effets de l'urbanisation, des voies de circulation routières, ferroviaires à grande vitesse, aéroportuaires auxquels il faut ajouter le dérèglement climatique et une population qui explose, on peut imaginer l'impact écologique et ses effets particulièrement désastreux… Ce qui ne peut que rendre impossible la baisse de 5 % des gaz à effet de serre à horizon 2030, prévue par la COP 28…
Faut-il rappeler que de nombreuses personnalités, telles que René Dumont (1904 - 2001), Jean Dorst (1924-2001), Claude Lévi-Strauss (1908-2009), Albert Jacquard (1925-2013), le Dr Jean Briere (1933-2022), le professeur Philippe Lebreton, biochimiste, écologue, militant écologiste historique (ex élu régional , titulaire en 1972 de la première chaire d’écologie à Lyon) et bien d’autres encore, comme Antoine Waechter et Didier Barthès dans leur dernier livres qu’ils ont coécrit « Le défi du nombre » ont ou avaient tiré le signal d’alarme sur la question démographique. Tous ont démontré que la croissance démographique non maîtrisée par rapport à l’espace vital reste la problématique écologique fondamentale. C’est vrai pour quelle que soit l’espèce animale, mais surtout quand il s’agit de Homo sapiens, le plus destructeur qui soit pour les ressources et énergies naturelles, ainsi que pour le climat, sans oublier la faune avec la sixième extinction des espèces, dont il est seul responsable, de même que la flore qu’il ne cesse de détruire pour ses besoins liés à son nombre en croissance constante, or exclure de toute réflexion et débat politique sa problématique démographique est un crime contre la planète
Où encore comme ne cesse de le rappeler lors de conférences ou l’écrire dans ces livres, le journaliste-écrivain pour la nature et l’écologie, Michel Sourrouille, également membre de Démographie responsable (DR) https://www.demographie-responsable.fr/ où il est rappelé dans un dernier livre collectif à 23 auteurs qu’il a coordonné, « Surpopulation… mythe ou réalité ? » : « Si beaucoup savent que nous sommes déjà 8 milliards depuis novembre 2022, peu de monde connaît le taux de croissance moyen de la population mondiale (1 % actuellement, soit un doublement tous les 70 ans) et encore moins la densité moyenne au niveau planétaire (61 hab./km²). La densité de la France est de 124. Si on prend une densité de 100 hab./km², cela veut dire concrètement qu’un individu n’a qu’un carré de 100 mètres de côté pour satisfaire tous ses besoins…. et laisser un peu de place pour la biodiversité. Un individu à l’hectare, c’est une bonne image de l’état de surpopulation humaine sur cette planète et dans la plupart de ses territoires. La pression démographique s’accroît même si le taux de croissance est moindre. Il y a moins 10 000 ans, c’était le début du néolithique, nous n’étions que 1 à 10 millions sur cette petite planète. Maintenant il faut s’exprimer en milliards . Notre nombre qui s’est accru de 1 milliards en 130 années, puis de 1 milliard tous les 22 ans sur la période 1930-1974, et de 1 milliard tous les 12 ans entre 1974 et 2022. Entre 2011 et 2022, il n’a fallu que onze années pour s’accroître d’un milliard supplémentaire, population qu’il faut pouvoir nourrir, loger et offrir quelques commodités. La lutte contre la pauvreté et la famine devient de plus en plus difficile ».
Irresponsabilité des gouvernants face à la non-prise réellement en compte le la problématique démographique.
Il est plus que regrettable que pendant ce temps dans le monde, les dirigeants politiques ne semblent guère se soucier de la question démographique. Dans la plupart des pays Européens, telle la France, on poursuit des politiques natalistes. La question se pose alors de savoir pourquoi cette problématique de croissance démographique incontestable et incontestée n’est jamais pris en compte par la quasi-totalité des conférences politiques nationales et internationales, la COP 28 qui s’est déroulée du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï, aux Émirats Arabes Unis n’a pas fait exception à la règle. Lors de ces conférences, lorsqu’elles évoquent le dérèglement climatique ou les questions énergétiques et les pollutions en proposant des « solutions technologiques », ou simplement des recommandations, en final si elles sont mises en application, elles auront un effet souvent comparables à un « cataplasme sur une jambe de bois », car, même si elles vont dans le bon sens, elles sont immédiatement contre-dites par des besoins nouveaux inhérent à la croissance démographique.
Ce n’est pas la sortie des énergies fossiles par les seules énergies renouvelables qui résoudront les problèmes, alors que la croissance démographique se poursuivrait inexorablement
Chaque jour, on compte un peu plus de 246 000 nouvelles personnes dans le monde ( quasiment la population de Bordeaux 249 712 ) soit 10 260 par heure, ou 2,85 habitants de plus par seconde. Autrement dit, la population mondiale s'accroît chaque année de près de 90 millions d'habitants. A lire : https://photo.neonmag.fr/que-se-passe-t-il-en-une-minute-dans-le-monde-33018#voila-ce-qui-se-passe-en-une-minute-dans-le-monde-569857
Sortir des énergies fossiles, avec la croissance démographique cela signifie aussi nouveaux besoins en métaux rares pour produire de l’électricité qui restera la clé de voûte énergétique, que l’on utilise le vent avec les éoliennes ou le solaire avec le photovoltaïque, il faut des métaux rares extraits des terres dites rares (qui ne le sont pas toutes fort heureusement), dont la consommation mondiale est également étroitement liée à la croissance démographique. Par exemple, pour satisfaire les besoins inhérents au numérique. Elle était en 2018 de 3130 kW heure par habitant. La population mondiale était de 7,6 milliards d’habitants, soit 3130 kW heure X 7,6 milliards d’habitants = 23 788 milliards de kW heures. Avec la même consommation par habitant qu’en 2018, mais avec une population de 8,6 milliards d’habitants en 2030, cela ferait une consommation de 3130 kW/h X 8,6 milliards = 26 918 milliards de kW/heure, soit plus de 3130 milliards de kW/h.
A noter qu’en 2022, la consommation moyenne mondiale par habitant s’est élevée à 3200 Kw/heure, avec toutefois des disparité importante de zones continentales. Par exemple, alors que pour l’Afrique la consommation moyenne par habitant était de 600 Kw/heure, elle était de 6100 kw/heure pour l’Union Européenne et 4600 kw/heure pour la Chine. https://www.agenceecofin.com/multimedia/0107-109857-la-consommation-electrique-moyenne-par-habitant-dans-le-monde-2022 A lire également : https://www.revolution-energetique.com/quelle-est-la-consommation-denergie-des-8-milliards-dhumains-sur-terre/
On peut comprendre que parmi les pays les plus pauvres, tels que ceux de l’Afrique subsaharienne, les populations aspirent à vivre au même niveau de confort que dans les pays riches grâce à l’électricité, y compris pour se déplacer avec des véhicules électriques, ce qui est légitime, mais pour produire de l’éolien ou du photovoltaïque, ou les deux, comme pour l’ensemble du numérique industriel avec la robotique, des ordinateurs, les smartphones, internet... il faut utiliser des ressources et des énergies fossiles qui ne sont pas inépuisables. Avec le doublement de sa population, soit près de 3 milliards, mais avec seulement la consommation annuelle actuelle par habitant qui serait celle de l’UE en électricité (6100 Kw/heure), ce qui serait relativement faible si l’on considère que la population de l’UE est de 4,2 millions d’habitants, les objectifs et recommandations de la COP 28 risquent fort « d’être mis à mal » faute d’avoir intégrer la question démographique, et là ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres...
Qui dit « intelligences artificielles » et informatique quantique avec croissance démographique et les besoins en électricité, dit aussi nouveaux besoins en métaux rares.
Avec les besoins liées à « l’intelligence artificielle » et l’informatique quantique plus la croissance démographique, même si celle-ci faiblit, la demande de terres rares, dont sont issus les métaux rares est et sera explosive, et notre dépendance de vie totale.
Aujourd’hui encore faiblement sollicités, alors que la demande a été multipliée par plus de 30 fois en 50 ans. Mais aussi, avec les besoins d’électricité où la demande ne fera que croître, les besoins en métaux rares devraient très fortement augmenter à l’avenir. Ainsi, si la voiture électrique qui va s’imposer obligatoirement en 2035, un véritable non-sens avec des véhicules de plus en plus grands et lourds, il faudra extraire davantage de terres rares que ce que l’humanité a prélevé depuis 70 ans. Une véritable bombe à retardement.e .
Ne pas oublier que les métaux rares issus des terres rares sont une ressource fossile qui n’est pas inépuisable. Quand on sait que la Chine détient plus de 90 % de la production mondiale, alors qu’elle possède un peu plus de 30 % des réserves mondiales (44 millions de tonnes métriques pour 120 millions de tonnes métriques dans le monde en 2019) on peut imaginer le pire.
Pour conclure
Il faut se rendre à l’évidence, la démonstration est faite que faute d’intégrer la question démographique, aucun des objectifs et des recommandations de la COP 28, comme ce fut le cas des précédentes, ne permettront pas de limiter le réchauffement climatique sous 2 °C en 2030. Si toutefois au prix d’un effort considérable de résilience on y parvenait, comme l’a souligné la paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte ou les experts du GIEC cela signifie plus aucun développement des combustibles fossiles. Ce qui en l’état est mission impossible.
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