François-m-a-dit
Fin de la
« Françafrique » ?
Il est un domaine où le changement voulu par François HOLLANDE, va s’’installer avec force et qui pourtant n’a pas été abordé lors de la campagne électorale : c’est la politique Africaine de la France.
La rupture avec les habitudes passées est totale.
Il n’y a plus de "cellule" Afrique, comme du temps du Général, où le machiavélique Jacques FOCCART, exerça avec maestria ses talents d’entremetteur et d’homme de l’ombre.
A l’arrivée de la gauche au pouvoir, en 1981 et le début des années MITTERRAND, on imaginait la pratique révolue. Il n’en a rien été et Guy PENNE, devint le Monsieur Afrique du Président socialiste.
Jacques CHIRAC et Nicolas SARKOZY ont suivi la tradition. Seul GISCARD d’ESTAING avait tenté de modifier les rapports occultes Franco-Africains, mais le sacre de l’Empereur Jean Bedel BOKASSA avait, quelque peu, entravé et décrédibilisé son action.
À peine installé à l'Élysée, le Président François HOLLANDE a multiplié les contacts avec les chefs d'État Africains, crise Malienne oblige. Il en a profité pour imposer son style, réaliste et prudent.
Des contacts téléphoniques ont eu lieu entre l’Elysée et Abdelaziz BOUTEFLIKA, Président Algérien, Alassane DRAMANE OUATARA, Président Ivoirien, Macky SALL, Président Sénégalais et Mohamed OULD ABDELLAZIZ, Président Mauritanien. L’aspect officiel - et faisant toujours l’objet de "communiqués officiels" - des relations nouvelles avec les anciennes colonies se démarque nettement de la "méthode SARKOZY", faîte de tutoiement et de grandes tapes dans le dos.
En effet, dans la nouvelle organisation il n’y a plus de notion de "cellule", qui faisait un peu penser à une « officine » traitant des affaires Africaines dans l’ombre et le plus grand secret.
Les rapports entre la France et le continent noir ne sont pas, malgré tout, ignorés par l’Elysée ; ou du seul ressort du Ministre des Affaires Etrangères.
L’Afrique reste du "domaine réservé" du Président et une équipe restreinte a été constituée et placée sous l’autorité du Secrétaire Général de l’Elysée, Pierre-René LEMAS, homme de confiance du Président, issu lui aussi, de la promotion "Voltaire" de l’ENA.
Dirigée par le Conseillé Paul JEAN-ORTIZ, elle compte Hélène LE GAL et son adjoint Thomas MELONIO, et occupe le grand bureau en rez-de-chaussée du 2, rue de l'Élysée, avec vue sur jardinet, qui fut celui de tous les "Messieurs Afrique" successifs depuis Guy Penne en passant par Jacques FOCCART, puis sous SARKOZY, Claude GUEANT.
Pourtant Hélène LE GAL, diplomate de carrière très peu portée sur la connivence, nommée pour sa connaissance des dossiers africains, bien que de sensibilité socialiste, n’avait jamais rencontré François HOLLANDE avant de s’installer à l’Elysée.
Le rayon d’action de l’équipe "Afrique" de la nouvelle Présidence de la République n'est en rien parasité par le jeu personnel du secrétaire général : Pierre-René LEMAS n'est pas Claude GUEANT, lequel recevait volontiers visiteurs du soir africains, porteurs de messages et autres intermédiaires. Qu'on se le dise, d'ailleurs : les réseaux ou néoréseaux trouveront porte close à l'Élysée.
Pour le reste, Hélène LE GAL et Thomas MELONIO, économiste proche de Pierre MOSCOVICI, ancien de l'Agence Française de Développement, reçoivent beaucoup depuis le 1er juin. Une dizaine de rendez-vous par jour, conseillers de chefs d'État, émissaires, opposants, investisseurs, ambassadeurs : le tandem ne chôme pas.
Tous deux assistent par ailleurs aux audiences et coups de fil « africains » de François Hollande, avec qui ils communiquent d'ordinaire par notes.
Ils assistent mais, contrairement à certains de ses prédécesseurs qui le faisaient aisément, pas question pour Hélène LE GAL d'appeler ou de prendre elle-même au téléphone un chef d'État africain. Les présidents ne parlent qu'au président, c'est la consigne.
« On se parle si on a quelque chose d'important à se dire et ce quelque chose doit être notifié à l'avance », résume un proche de la Présidence. Même ligne de conduite pour les personnalités africaines reçues au Château.
Trois Chefs d’Etat ont été jusqu’ici reçu sous les lambris du Palais Présidentiel : Le Roi du Maroc, Mohammed VI, Boni YAYI, le Président de la République du Bénin et Mahamadou ISSOUFOU, Président de la République du Niger.
Les Présidents en "délicatesse" avec la CPI (Cour Pénale Internationale) ont été courtoisement, mais fermement, écartés. Telle est la nouvelle ligne de conduite tracée par la Présidence Française.
Cela risque d'ailleurs de poser problème à la fin de ce mois de juin, puisqu'une dizaine de chefs d'États francophones, de retour du sommet de Rio sur l'environnement, ont prévu de faire escale à Paris pour y être reçus par un homme que la plupart ne connaissent pas encore. Il va falloir gérer la bousculade. Qu'ils se rassurent pourtant : contrairement à ce que certains d'entre eux ont pu craindre, François HOLLANDE n'a formulé aucune exclusive. Il rencontrera tout le monde.
Quant au premier voyage du président en Afrique subsaharienne, rien ne presse et rien n'est prévu pour l'instant.
Le ni-ni est aussi en vigueur à l'Élysée : "Ni tabous ni donneurs de leçons".
En d'autres termes : on ne s'interdira rien, mais on y mettra les formes. Trois principes en guise de feuille de route : bonne gouvernance et démocratie, pacte de croissance et de développement, attachement à la stabilité et à la sécurité du continent, mais sans ingérence. Le cadre est vaste, reste à le décliner au cas par cas, surtout le premier point.
Il va de soi aussi que rien ne sera entrepris pour entraver d'éventuelles enquêtes judiciaires en cours, notamment sur les fameux "biens mal acquis". Aucune immixtion de l'Élysée ou du Ministère de la Justice dans ces dossiers n'est envisageable !
Le début du quinquennat de François HOLLANDE, en matière d’affaires Africaines, a été placé dans une véritable ambiance de gestion de crise.
A Chicago, François HOLLANDE, en marge du sommet de l’OTAN, s’est entretenu sur la situation Malienne avec Barack OBAMA, David CAMERON et le Premier ministre canadien Stephen HARPER. Il a dit que la France n'interviendrait pas militairement et qu’elle ne serait pas médiatrice sur ce dossier.
Mais à l’Elysée on ne cache pas que l'inquiétude est vive.
L'évolution, sur le terrain, du rapport de force entre les groupes islamistes et les Touaregs du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA) est suivie de très près.
Paris estimant toujours qu'il est possible et même tactiquement recommandé de parler avec ces derniers pour dissocier leurs forces de celles d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et d'Ansar Eddine. Parallèlement, les efforts de la Communauté Economique Des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et de la présidence de l'Union africaine pour obtenir l'aval du Conseil de sécurité de l'ONU à une opération militaire conjointe sont encouragés, voire suscités.
Le sort des otages Français détenus au Sahel par l’ACMI est en filigrane des préoccupations Elyséennes.
Un autre problème, bien que moins préoccupant, se pose : la présence du Chef de l’Etat au XIVe Sommet de la Francophonie qui se tiendra du 12 au 14 octobre à Kinshasa.
A l'Élysée, on estime que les élections générales de novembre 2011 en République Démocratique du Congo sont entachées d’illégalités.
Entre l'idée de se rendre à Kinshasa au nom du rayonnement de la France, afin d'y prononcer un discours ferme sur la gouvernance, la démocratie et les droits de l'homme - qui dénoterait avec le discours de Dakar (toujours la confrontation du quinquennat passé avec la Présidence "normale") - et la tentation du boycott, la décision ne serait pas encore prise.
La "françafrique" a donc bien vécue au pays des Droits de l’Homme.
L'expression "France-Afrique" semble avoir été employée pour la première fois, en 1955, par le président ivoirien Félix HOUPHOUËT-BOIGNY, pour définir le souhait d'un certain nombre de dirigeants africains de conserver des relations privilégiées avec la France tout en accédant à l'indépendance.
Le néologisme "Françafrique" a été popularisé dans son sens actuel en 1998 par le livre "La Françafrique, le plus long scandale de la République" de François-Xavier VERSCHAVE.
Aux termes de cet ouvrage, l’auteur récupère l’expression d'Houphouët-Boigny pour désigner et dénoncer le caractère occulte des relations franco-africaines. Dans son ouvrage de référence (étayé et complété par un second quelques années plus tard), VERSCHAVE décrit ce système caractérisé par des pratiques de soutien aux dictatures, de coups d'États et d'assassinats politiques mais aussi de détournements de fonds et de financement illégal de partis politiques.
France-Afrique ou France-à-fric ?
(sources : "Jeune Afrique" (www.jeuneafrique.com), Wikipédia(fr) et archives personnelles de l’auteur)
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