Glissement progressif du capitalisme
Glissement progressif du capitalisme
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Le système capitaliste peut être considéré comme un système crisique en soi.
Pendant le vingtième siècle, la concurrence entre États et les crises de surproduction ont donné lieu à deux guerres mondiales.
L’apparition du socialisme a donné un espoir aux classes dominées, et ouvert une fenêtre de réforme à l’intérieur du système capitaliste lui-même. La contestation interne a débouché sur des avancées sociales qui ont permis plusieurs décennies de croissance y compris pour les classes dominées. Le niveau de vie général s’élevait à travers des luttes dures, dont soixante-huit.
La crise dite du pétrole en 1973 fut un point d’inflexion où la logique croissance-production-consommation commençait à devenir problématique. Les taux de profits diminuaient et une lente désindustrialisation avec un chômage qui devenait important s’initiait.
À partir des années quatre-vingt, le capitalisme avec une forte intervention de l’État, à dominante keynésienne, s’est transformé en un système dur, ultra-libéral, anti-social, initié par Thatcher et Reagan et expérimenté au Chili. Il ne s’agissait plus de fournir un niveau de vie élevé à une population éduquée et soignée grâce à l’intervention de l’État, mais une lutte quotidienne de chacun contre tous et de tous contre chacun dans la concurrence totale, libre et parfaite.
Dans le même temps, ceci expliquant cela, les sources de profit se sont étendues, et à la production matérielle d’objet rapportant grâce au temps de travail inclus dans sa fabrication était ajoutée la création de services ou produits immatériels, dont les coûts de fabrication étaient quasi nuls comparés à ceux de leur conception, comme un logiciel au départ distribué via des disquettes ou des CD, et qui permettent de générer des profits quasi-infinis de ce fait. Ce n’étaient plus les industriels traditionnels qui tenaient le haut du pavé capitaliste, mais Microsoft ou Apple.
Grâce à la combinaison d’une idéologie anti-sociale et d’une transformation de la structure du capitalisme, celui-ci est devenu hégémonique jusqu’à gagner la guerre froide contre le système socialiste soumis à une bureaucratie interne qui lui a fait rater la marche de l’immatériel et de l’informatisation progressive de la société. Il s’est effondré et dans un premier temps a intégré les exigences anti-sociales de la nouvelle idéologie capitaliste.
Dans les années quatre-vingt-dix, le capitaliste était triomphant, devenant hégémonique au point de penser en une fin de l’histoire éternisant sa victoire sur la planète.
La fin de ces années a connu des troubles économiques en Argentine, puis le début des années deux-mille, avec l’effondrement du Nasdaq, furent des premières secousses à un futur sans anicroche.
L’attentat du WTC a sonné le glas à ce mythe, l’histoire se poursuivait. Le système se remettait grâce à l’économie de guerre contre l’Irak, qui n’avait rien à voir avec ces attentats, et bien entendu de l’Afghanistan. La crise économique était ainsi une fois de plus cachée par la guerre, permettant au CMI (complexe militaro-industriel) de se reconstituer et de reconstituer l’économie, d’autant plus que désormais les entreprises d’espionnage, immatériel, comme Google, pouvaient contribuer à la guerre via la NSA.
Mais la tendance crisique n’a pas pu être évitée, lorsqu’en 2008 la crise des subprimes, provenant de crédits distribués sans condition avec des taux variables, a plongé de grandes banques états-uniennes, puis européennes, dans des états de faillite. Une fois de plus, le capitalisme a vacillé.
Le système s’est alors divisé en deux camps, le camp immatériel qui s’est mis à générer, grâce à des transferts financiers et par l’attraction de sa dynamique, des profits considérables dont a bénéficié le système financier, et la sphère matérielle qui donnait des profits de plus en plus faibles en se délocalisant vers les pays de main d’œuvre à bas coûts .
Fin 2019 une nouvelle crise se profilait, rapidement masquée par celle du covid qui a permis de renflouer la finance grâce aux vaccins, fonctionnant comme des produits immatériels, Pfizer vendant le brevet sans forcément s’occuper de la production, et anéantissant les industries matérielles grâce au confinement. La guerre contre la Russie permet d’achever l’anéantissement de la production matérielle, hormis le CMI subventionné de fait par les États et de réduire la population à la misère matérielle, accrochée désespérément aux écrans qui la ruinent silencieusement.
Mais fin 2022, une nouvelle crise est apparue, liée directement au capitalisme immatériel. De façon concomitante, avec le Metavers de Zuckerberg, les problèmes d’Elon Musk avec Twitter, et de l’effondrement de la plateforme de monnaie immatérielle FTX, c’est le cœur de ce que j’appelle le turbo-capitalisme qui est frappé, simultanément au non effondrement économique, tant attendu par l’UE, de la Russie.
Pourquoi cette nouvelle crise ?
À la tendance classique de la baisse tendancielle du taux de profit (matériel), responsable des crises du capitalisme à répétition, il faudrait ajouter celle de la baisse progressive du taux de profit immatériel.
La valeur immatérielle n’est pas, contrairement à la fabrication, basée sur un temps de travail incorporé dans l’objet, mais une qualité de conception, d’information, perçue par l’ensemble des acteurs. C’est comme pour la bourse, où ceux qui investissent le font dans la mesure où ils pensent que les autres acteurs vont investir. Ils ont confiance sur la confiance accordée par leurs pairs. De la même façon, F***book, par exemple, fonctionne dans la mesure où les utilisateurs supposent que F***book est un moyen d’échange commode partagé par leurs amis. F***book est à la mode parce que les utilisateurs pensent que F***book est à la mode.
C’est ce qui fait la fragilité de l’immatériel, une sorte de taux de confiance qui peut rapidement s’effondrer. Pour éviter cela, ils ont besoin, via le système de communication, de façon subtile mais constante, de rendre nécessaire leurs services. Le cinéma, les reportages, la télévision, les journaux, les réseaux eux-mêmes, jouent ce rôle d’influence de la société. Mais de la même façon, ce système lui-même peut s’effondrer lorsque la confiance s’écroule, comme cela a commencé avec le covid et est en train de se poursuivre via la guerre contre la Russie où toute l’information divulguée paraît faussaire.
Une désaffection concomitante du système de communication et de celui des réseaux dits sociaux peut avoir lieu, anéantissant la fortune colossale des hauts dignitaires du turbo-capitalisme et engendrant une nouvelle crise qui touchera alors directement la haute finance internationale.
Lorsqu’une majorité de la population, à partir de ses propres intérêts et de son instinct de conservation, considérera que le système via sa communication, ses lois, ses exigences de plus en plus drastiques et absurdes, n’est plus adéquat, et n’obéira plus à ses diktats mortifères, alors le système s’effondrera.
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