Infox de guerre 46
Le président Zélensky, malgré un agenda chargé, nous a accordé un nouvel entretien.
- Monsieur le président, où en est le conflit avec la Russie ? Vous avez dit avoir un plan pour reprendre la Crimée.
- Oui, en fait j’ai de nombreux plans : plan A, plan B, C, D... vous connaissez le principe.
- Alphabet latin ou cyrillique ?
- Les deux : comme je vous l’ai dit, mes généraux et moi-même avons de nombreux plans. Et en réserve, nous avons l’alphabet grec : plan alpha, bêta, gamma etc.
- Impressionnant, en effet. Pouvez-vous nous donner un exemple, sans trop dévoiler votre stratégie ?
- Tout à fait : après la Crimée, nous allons annexer la région de Belgorod !
- Mais… n’est-ce pas en Russie ?
- Oui, mais ce n’est que justice : ils nous ont pris le Donbass, on leur prendra une surface équivalente.
- Est-ce pour cela que vous avez bombardé Belgorod ?
- Exactement, et notre stratégie porte ses fruits : ils ont déjà évacué des centaines d’enfants. Encore un effort, et tous les habitants quitteront ce futur oblast ukrainien.
- Mais cibler les villes, sans objectif militaire... Ne risquez-vous pas d’être accusés de crimes de guerre ?
- Nos alliés n’ont jamais rien dit pour Donetsk et depuis qu’Israël a dépassé les 20 000 morts civils à Gaza, on a compris qu’on se retenait inutilement ! Dommage qu’il faille chaque fois obtenir l’autorisation des proprios des missiles, de grands timides. Nous, on voit plutôt les choses en grand !
- Genre 3e GM ?
- Voilà : c’est d’ailleurs ce que je vais expliquer à mes amis australiens, lors de ma prochaine tournée pour récolter des fonds et des armes.
- L’Australie ? Mais… c’est très loin !
- Eux aussi doivent comprendre que nous sommes le dernier rempart de la liberté : si nous laissons faire Poutine, après l’Ukraine il s’en prendra à la Pologne, aux pays baltes, à l’Allemagne et la France ! Et après l’Europe, ce sera le tour de l’Australie !
- Selon vous, la Russie serait donc dans une phase expansionniste, impérialiste ?
- Oui, c’est que que j’expliquerai ensuite à toute l’Amérique du Sud, que Poutine convoite également.
- On dit que l’armée russe se renforce progressivement, que les choses ne se passent pas bien sur le terrain, que le soutien à l'Ukraine s'effrite - beaucoup s’interrogent. Par exemple, où sont les fameux chars Abrams ? Nul ne les a vus en action… Y a t-il des consignes américaines de ne pas les exposer ?
- Pas du tout, mais ce sont des chars modernes, de technologie furtive : ils échappent aux radars, aux caméras et aux smartphones.
- Étonnant ! Mais on ne voit pas non plus les résultats de leurs actions…
- C’est qu’ils tirent aussi des obus furtifs ! Nos mécanos tentent de corriger ce petit défaut.
- Parmi tous vos plans, y en a t-il un sur une offensive russe qui serait victorieuse ?
- Bien sûr ! Nous avons préparé un gouvernement en exil, que je dirigerai depuis ma villa en Italie ou peut-être à Miami, et les millions de dollars nécessaires sont déjà en lieu sûr.
- Vous voulez dire qu’une partie des fonds étasuniens et européens n’est plus en Ukraine ?
- Je ne peux rien dire à ce sujet : le pognon, c’est sacré !
- On dit que la mobilisation rencontre des difficultés, que l’enrôlement devient forcé…
- Oui : certains ont peu de patriotisme, ce sont de mauvais Ukrainiens, alors autant les envoyer au front !
- Et sur la mort du journaliste blogueur américano-chilien en prison à Kiev, un commentaire ?
- Il était en mauvaise santé.
- Merci, Monsieur le président.
Politique française :
Après un quinquennat et demi à lutter contre les grands problèmes de notre temps - extinction des espèces, climat, transition écologique, pesticides, désindustrialisation, corruption, emprise des mafias, déclin diplomatique de la France, etc. - le président Macron s’est donc diverti pendant quelques jours grâce aux petits jeux politiques du remaniement. Et ce, au grand plaisir des éditorialistes qui ont empli les médias de leurs (passionnantes) analyses… Que retenir ? Fusion de sport et de l’éducation, fusion de la santé et du travail, et arrivée d'une dure à cuire à la culture. En résumé : mens sana in corpore sano, le travail c’est la santé, la culture c’est bien mais il faut tenir à l’oeil ces turbulents artistes ! Un retour aux valeurs traditionnelles.
Coup de froid sur la France ! Nos médias ont rappelé les conseils techniques : il fait plus froid dehors (authentique !), il faut se couvrir, le froid ressenti est plus important quand il y a du vent !
Là encore, sans aller jusqu’à de la connerie ressentie, on sent un retour au tradi. Demain, la messe en latin ? Ou, a contrario pour préparer les élections européennes, en anglais ?
Politique européenne :
La Lituanie prépare des lois de « dé-soviétisation » (comprendre dé-russification), où sont envisagés pêle-mêle les noms de rue, les statues, les monuments (les recouvrir de drapeaux ukrainiens, par exemple), les cimetières - une répression culturelle à l’ukrainienne ! Sont prévues aussi des lois contre les citoyens russophones (exiger un examen de niveau de langue).
Et en Lettonie, c’est pas mieux : on se demande ce que peut bien leur avoir fait le poète Pouchkine, qui n’a même pas connu l’époque soviétique, pour qu’ils s’en prennent à sa statue ! Et on y cherche aussi des noises à leurs « non-citoyens »… comme ce dangereux retraité de 82 ans, responsable d’association russo-lettone, qui vient d’être expulsé !
En somme, par peur que la Russie ne prenne prétexte de persécutions contre une minorité russophone pour attaquer, on les persécute ! Ils ne connaissent pas le mot « provocations » dans les pays baltes ? Les articles à ce sujet sont rarissimes dans nos médias (ici, la Tribune), et l’UE se tait...
Pour conclure, deux visions radicalement opposées du conflit ukrainien :
Un article de Slate où la Russie est perçue comme une grave menace pour toute l’UE… (ils ne disent rien de l’Australie !) « Les signes d’une possible future guerre entre la Russie et l’Otan »
Et une conférence de presse de la porte-parole de la Russie, une analyse détaillée du conflit, où l’on peut également lire certaines choses que nos médias n’ont jamais mentionnées, comme le tir de Kiev sur un hôpital de Donetsk (centre de traumatologie) ou sur la place à Noël.
Pourquoi citer l’article de Slate, à mon sens aussi parano que les pays baltes ? Parce qu’il aborde une notion intéressante de géopolitique : les « cygnes noirs », ces signes avant-coureurs visibles avant le déclenchement des hostilités. Le hic, c’est que dans leur analyse du conflit ukrainien, ils oublient leurs propres « biais cognitifs » atlantistes, et ne font aucune mention des nombreux signes noirs qui ont précédé l'invasion : le coup d’État du Maïdan, le financement et le rôle des USA, les soulèvements après les lois anti-langue russe, les années de persécutions et de bombardements du Donbass... Ne parlons même pas des causes plus anciennes : l’extension de l’Otan, contrairement aux engagements oraux, l’abandon des traités de contrôle des armements, ou les preuves de l’ancienneté de la stratégie américaine contre la Russie, par Ukraine interposée. De fait, une invasion ne naît pas ex-nihilo, comme ça, jusque parce qu’il faisait beau ce jour-là et que le chef s'ennuyait ! Ce conflit aurait dû être évité par la voie diplomatique.
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