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Accueil du site > Tribune Libre > Israël, entre déni et paranoïa

Israël, entre déni et paranoïa

Les événements tragiques qui viennent de se dérouler dans les eaux internationales de la méditerranée constituent un précédent sans équivalent dans l’histoire ô combien tumultueuse des relations Israëlo-palestiniennes. En donnant l’assaut à cette flottille humanitaire internationale, outre le drame humain irréparable, l’État hébreu étale sans retenue à la face du monde sa volonté belliqueuse parfaitement machiavélique. Mû par un puissant déni habillé d’une paranoïa évidente, Israël écrit une histoire toujours plus sanglante où la notion de paix n’est même plus velléitaire. La logique de l’affrontement s’est durablement immiscée dans l’esprit des dirigeants israéliens qui n’auront pas hésité à transformer la bande de Gaza en un gigantesque lieu de rétention à ciel ouvert.

  « Un engrenage mortifère », telle est l’expression employée par le Dr Hervé Rehby [1] au sujet de la situation présente, et il faut souligner la triste lucidité de ce propos tenu par un observateur avisé tout à fait en prise avec la réalité de ce conflit désormais largement enkysté. Un an et demi après l’opération plomb durci [2], la situation des habitants de la bande de Gaza demeure des plus sombre puisque la grande pauvreté n’a de cesse de le disputer au désespoir toujours croissant, alors que tous les indicateurs socio-économiques affichent des taux insoutenables [3]. Aussi, sans cesse ils creusent des tunnels les Gazaouis, avec un courage qui n’est pas sans rappeler la résistance Vietnamienne face à l’occupation Yankee, tout du moins dans la forme. Par ailleurs, certains commentateurs n’hésitent pas à se projeter en affirmant que la bande de Gaza sera le Vietnam des Israéliens [4]. Pour bien mesurer l’ampleur de la tâche, il faut regarder l’incroyable film réalisé par Alexis Monchovet et Stéphane Marchetti intitulé Rue Abu Jamil. Cette œuvre immerge le spectateur dans le quotidien de ce peuple Palestinien oppressé par son tout-puissant voisin [5]. Ces artères de vie amènent une oxygène indispensable à une population toujours exsangue, maintenue sous perfusion par la volonté du prospère voisin. 
Qu’on le veuille ou non, il est impossible de ne pas constater que le mythe de David contre Goliath s’incarne bien dans ce conflit dont les sources s’enracinent dans une histoire tissée de complexité et de passions [6]. Mais le géant est loin d’être terrassé par le frêle ennemi pourtant habité par la ferme conviction d’être dans son bon droit. Il n’y a que celui qui veut faire entendre sa voix, celle du plus fort, pour ne pas admettre cette réalité objective, se retranchant derrière un déni puissant doublé d’un sentiment de paranoïa qui confine au pathologique. Et ce ne sont pas les dernières déclarations faites par Benyamin Netanyahou qui pourront infirmer cette affirmation, ce dernier s’enfermant dans un positionnement quasi criminel tant le rapport de force est à sens unique. Si, dans le domaine de la psychologie, le déni représente un mécanisme de défense face à un risque de décompensation, alors il vaut ici parfaite métaphore quant à la posture affichée par les autorités israéliennes. Quant à la notion de légitime défense, elle ne tient pas car elle présuppose une réponse proportionnée.
L’aveuglement est donc total, l’auto-critique inexistante, et le sens de la raison ne cesse de s’éloigner, de sorte que les plus pessimistes des annotateurs prédisent un avenir encore plus ténébreux pour la région. La chronologie de ce conflit doit nous rappeler à notre bon souvenir, notamment dans le bouillonnement présent du monde où les turbulences géostratégiques, économiques et sociales annoncent bien des bouleversements improbables.
A cela s’ajoute le sentiment d’impunité totale au regard du droit international, corpus largement foulé aux pieds avec constance et arrogance par une nation qui impose sa force d’airain à l’ensemble de la région [7]. Mais, sur ce plan encore, le déni prévaut et s’érige en véritable mode de fonctionnement qui tend à induire une escalade qui peut mener à un chaos irréversible avec un effet de contamination dont il convient de s’inquiéter. 
A l’évidence, l’État israélien est gravement malade, comme atteint d’une paranoïa – essentiellement démographique - qui infère l’agressivité unanimement observée par l’ensemble des scrutateurs avisés, Israéliens y compris [8]. 
Aussi, l’isolement international de Tel-Aviv s’impose tant le diagnostic de l’injustice flagrante subie par le peuple de Gaza éclabousse la conscience collective du monde, mais aussi la conscience individuelle de certaines personnalités issues de la communauté juive [9].
Ils sont nombreux les justes israéliens, les juifs de toutes nations, à s’élever contre la dérive pathologique d’une nation devenue sourde à toutes les prescriptions pourtant indispensables proposées par les praticiens les plus expérimentés [10]. 
Dés lors, à défaut de processus de paix validé, il s’agit maintenant de faire baisser la tension extrême induite par le comportement déraisonnable d’un État dominant qui se définit désormais dans un rapport de force constant pourtant insoutenable sur le long terme. Aussi, immédiatement, le blocus de la bande de Gaza, par ailleurs contre-productif, doit être levé sans condition au moyen d’une pression internationale sans faille. Quant à la société civile, elle doit user de tous les leviers possibles - boycott, convois humanitaires, actions de sensibilisations - pour infléchir les décideurs politiques de toutes les latitudes.
Le droit international doit se faire contraignant pour le bien du plus grand nombre, imposant à l’État israélien des soins juridiquement ordonnés. La communauté des nations se doit maintenant d’imposer sa position au nom de la plus élémentaire notion de justice.
Il y a urgence à ce que les sirènes de la paix puissent résonner à nouveau dans une région du monde dont l’influence dans le rapport des nations entre elles est inversement proportionnel à sa surface géographique tant les passions humaines s’y sont cristallisées depuis l’aube des temps. 
Ainsi, au-delà du peuple palestinien en général, et des Gazaouis en particuliers, il en va de la bonne santé des relations internationales à ce qu’Israël ouvre enfin les yeux sur sa politique suicidogène en accordant une nécessaire confiance à ses voisins contenus dans de minuscules territoires confettis, se libérant par là-même de cette paranoïa extrêmement nocive pour son propre devenir. 
Idéalement, à l’instar de la position chantée par l’immense poète disparu Mahmoud Darwish, la meilleure des solutions serait la vie en communauté de ces deux entités qui, faut-il le rappeler,
appartiennent au monde sémite. Enfin, il faut lire l’ouvrage absolument iconoclaste de Shlomo Sand [11] pour poser un regard quelque peu lucide sur l’histoire largement mythifiée d’un peuple auquel il n’est aucunement question de dénier le droit de vivre en cette terre trois fois sainte.


[1] Président du centre Yavné de Bordeaux, médecin à l’hôpital Barzilay situé à 10 km de Gaza. Sud-Ouest du 02/06/2010. 
[2] Gaza, un an après , dossier à lire sur le site Youphil.com
Quel Avenir pour le rapport Goldstone ? , Sylvain Mouillard, Libération, 29 janvier 2010
[3] Gaza : 1,5 million de personnes en proie au désespoir, rapport du CICR 2009.
[4] Bradley Burston, Ha’ Aretz, in Courrier international
[5] A regarder sur LCP
[6] Histoire d’Israël, Manière de voir, avril-mai 2008.
[7] Alain Gresh, Israël, l’impunité jusqu’à quand ? Les blog du monde diplomatique.
[8] Consulter le site btselem.org
[9] Esther Benbassa, Être juif après Gaza, éditions CNRS.
[10] Philippe Lemarchand, Lamia Radi, Israël/Palestine demain – Atlas prospectif, éditions Complexes, 1996.
[11] Shlomo Sand, Comment le peuple juif fut inventé, Fayard 2009.

Illustration : L’archipel de Palestine orientale, Le Monde diplomatique, avril 2009.
 

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17 réactions à cet article    


  • Free Palestine Free Palestine 4 juin 2010 10:35

    La force du Hamas, et au delà, de l’ensemble du peuple palestinien, malgré ses divisions, en dépit du traumatisme que représente la spoliation de son identité nationale, réside en un mot : Soumoud, un borborygme barbare pour les non–arabisants, qui résume à lui seul le long calvaire palestinien et le combat de ce peuple vers la liberté et la dignité. Notion de synthèse faite d’enracinement à la terre, de résistivité, de privation et d’endurance face à l’occupation israélienne, un témoin de premier plan en fait la description clinique, démontrant les multiples aspects de ce Soumoud, dans un ouvrage qui constitue une compilation de ses chroniques quotidiennes sur le terrain même des épreuves palestiniennes. Correspondant du journal Le Monde à Ramallah, en poste depuis six ans en Cisjordanie, en Palestine occupée, Benjamin Barthe, prix Albert Londres 2008, est un parfait contre exemple des bonimenteurs et falsificateurs.


    • Soraya 4 juin 2010 10:41

      J’hallucine les cons et incultes qui peut y avoir sur terre !

      C’est en créant et diffusant des articles de merde comme celui-ci que vous augmenter la haine !

      Que du médias et que des partis pris.

      Oh on est en FRANCE on invente n’importe quoi ici.


      • Free Palestine Free Palestine 4 juin 2010 10:59

        @Soraya
        Article d’une très grande objectivité et sans complaisance aucune pour le projet criminel sioniste et ses infâmes dirigeants,la version des portes voix du sionisme c’est à la télavi vision Française qu’il faut la chercher ou sur les « grandes » radios nationales qui n’ont d’autre forme d’objectivité que d’ouvrir l’antenne et offrir un énorme temps de parole à des personnages aussi douteux que Fréderic Encel ancien dirigeant du Bétar France une milice d’extrême droite sioniste interdite en Israël même et aux états unis, mais qui semble jouir d’une impunité sans borne sur le territoire de la république.


      • hans lefebvre hans lefebvre 4 juin 2010 11:07

        @Soraya, j’hallucine triplement quant à votre bêtise suprême qui voile à peine votre arophobie certaine ! Lisez-donc Shlomo et les autres, votre niveau ne pourra que s’en trouver amèlioré !
        NB : Je ne vous traite pas ici de grosse conne, mais je le pense bien haut !


      • hans lefebvre hans lefebvre 4 juin 2010 11:08

        @FP, vous faites bien de parler ici du betar, ce groupuscule fascisant dont on fait bien peu cas ! Ils incarnent le pire....


      • Radis Call 4 juin 2010 11:21

        J’approuve totalement cet article...Ajoutons à la paranoïa, le trait victimaire qui est aussi une constante...Quand Israël tue , il est toujours « obligé » de le faire, pour de nobles raisons....

        Sauf que dans cette opération contre la flottille de la paix , il ne peut le justifier et cela éclate à la figure du monde , qui n’a pas par ailleurs oublié l’histoire , et c’est bien là l’origine du malaise .

        Paranoïa savamment entretenue par des dirigeants voyous

        Un petit témoignage d’un romancier que j’apprécie beaucoup et dont je n’ai jamais trouvé la moindre trace d’antisémitisme ou d’antisionisme dans ses romans...

        Au contraire , il a dénoncé les mouvements néonazis et le passé trouble de la Suède , son pays .

        http://www.courrierinternational.com/article/2010/06/03/l-intervention-israelienne-racontee-par-henning-mankell&nbsp ;


        • pigripi pigripi 4 juin 2010 11:28

          Pour ce qui est du déni et de la parano, les Israélos se sont formés à l’école du Coran de leurs frères sémites :

           : la taqiya ou mensonge stratégique

          Source wikipediahttp://fr.wikipedia.org/wiki/Taqiya

           Mahomet autorisait le mensonge pour trois cas : faire cesser une querelle entre deux parties, calmer sa femme, et à la guerre[11]. En conséquence, les ulémas des quatre écoles juridiques agréent sur la légitimité de la tromperie pendant la guerre, où le mensonge est compris comme une forme de l’art de la guerre[12]. Cette tromperie est assimilée à un acte de taqiya[13].
          Le mensonge est une arme considérée comme honorable, son manque de noblesse étant plus que compensé par la gloire de l’hégémonie de la charia ; car cette hégémonie est vue comme favorable à tous – musulmans et non-musulmans – ainsi les moyens pour y arriver ont un but clairement altruiste aux yeux des islamistes[5].

          • Ibn al-’Arabi, sur les hadiths : « Dans les hadith, la pratique du mensonge à la guerre est bien décrite. D’ailleurs, il est présenté comme plus nécessaire que le courage »[14].
          • Ibn

            al-Munir (décédé en 1333) : « La guerre la plus complète et la plus parfaite qu’il soit possible de mener dans la guerre sainte est une guerre de tromperie et non d’affrontement, parce que celle-ci est intrinsèquement dangereuse et qu’il est possible d’atteindre la victoire par la tricherie sans subir soi-même de dommages »[14].

          • Ibn

            Hajar (décédé en 1448) : « Soyez très prudents à la guerre, tout en se lamentant et en pleurant [publiquement] afin de duper les infidèles »[14].

          Selon la charia, les musulmans peuvent appliquer la taqiya en reniant leur parole pour dénoncer un traité s’ils pensent, avec ou sans preuves consistantes, que leurs adversaires vont incessamment le rompre. Selon cette même charia vue par certaines écoles juridiques islamiques (notamment celle des Hanafites), les musulmans ne doivent respecter les traités que si ces derniers sont avantageux pour l’Islam[13]. Cet aspect de la charia est basé sur certains hadiths canoniques tels que celui-ci : « Si vous prêtez un jour serment de faire quelque chose et découvrez par la suite que quelque chose d’autre est mieux, alors dénoncez votre serment et faites ce qui est mieux »[15].

          --------------------------

          parmi les moins connus des « beaux noms » d’Allah, on trouve le nom de « El Maker », qui signifie « le Fourbe », ou « la ruse divine ».

          La « machination divine » est la réponse du coran – adjointe à celle de l’istidraj, « l’action divine graduée » – au problème de la prospérité visible de ceux qui ne la méritent pas. Autrement dit, Dieu « trompe » les méchants en les laissant provisoirement prospérer[7].
          Selon Ahmed Tijani[8],

          « La ruse divine (El Makr) est la manifestation d’un bienfait sur un serviteur et son accroissement jusqu’à être entrainé à sa perdition à cause de ce même bienfait-là. »

          — Djawahirou-l-Ma’ani, par Ali Harazim, page 180.

          Lire la suite ▼

          • hans lefebvre hans lefebvre 4 juin 2010 12:06

            Non content d’être hors sujet, vous faites dans l’anachronisme, selon moi.
            En outre, je n’aurais pas l’outrecuidance ici d’extraire du Talmud les passages les plus intolérables....Mais bon, hors sujet pour hors sujet, allons y joyeusement !
            http://www.judaicultures.info/pensee-juive-40/Faits-de-societe/La-condition-de-la-femme-dans-la

              Lire les 7 réponses ▼ (de Céphale, samir, hans lefebvre, AniKoreh)

            • LE CHAT LE CHAT 4 juin 2010 14:27

              Très bon article dénonçant la fuite en avant du gouvernement sioniste de Bentanyahou ,
              dans la logique que ,étant déjà détesté , autant l’être pour de bon !

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