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Accueil du site > Tribune Libre > J’ai des crocs qui demandent le divorce !

J’ai des crocs qui demandent le divorce !

Eh ouais... j'ai une ratiche qui demande la séparation de corps... Pourtant, depuis qu'on vit ensemble. Elle ne veut plus de moi et me le fait savoir la salope. Seulement voilà, l'été, je vis dans la cambrousse, au fin fond de la Lozère, département splendide s'il en est. Mais allez trouver un arracheur de dents le ouiquinde du 15 août !

 

Nous touchons du doigt le problème des « déserts médicaux ». Au village le plus proche, la mairie met gracieusement à disposition du médecin volontaire un local clair, vaste, bien situé. Il est venu deux « toubibes » roumaines. Un petit tour et puis s'en vont.. Actuellement, après un an sans praticien, nous avons « touché » un toubib espagnol. Il est bon, sympa et compétent. Pour combien de temps tiendra-t-il  ? Il y avait aussi, au début, un dentiste dans le même bâtiment communal, mais il a foutu le camp et il faut faire 50 bornes aller-retour pour espérer en trouver un.

La médecine est organisée de façon paradoxale  : fonctionnement totalement libéral mais avec un financement public. Résultats  : l’offre de soins se dégrade inexorablement en quantité. Deux généralistes s'installent quand vingt-cinq partent à la retraite. Certaines régions ont vu la moitié de leurs cabinets fermer. Dans dix ans, il y aura moins de 23.000 généralistes en cabinet contre 56.000 aujourd’hui. Les jeunes étudiants délaissent la spécialité « généraliste » pour d'autres plus glorieuses, plus rémunératrices.

Sont-ils réellement à plaindre, ces enfants gâtés de notre société  ? La collectivité – donc nos sous - paie leurs longues études. Ne serait-il pas normal qu'en retour les toubibs acceptent au moins pour quelques années de s'installer là où leur présence serait la plus nécessaire  ? Mais il est plus « sexy », plus confortable, plus rémunérateur de s'installer à Paris, Nice, Aix ou Avignon plutôt que dans le Nord, la Creuse ou la Lozère...

Pourtant, lorsqu'on aura le temps, on les plaindra  : ils touchent 23 euros et réclament 25 euros par consultation. À raison de 12 à 15 minutes en moyenne, cela fait autour de 100 euros de l'heure, soit de 500 à 800 euros par jour de travail. Á rapprocher des - environ - 1000 euros net par mois du smicard et des 1500 euros par mois d'un enseignant débutant. Et vive le trou de la Sécu  : 20 milliards environ, soit le prix d'un tunnel sous la Manche chaque année.

Ils obtiennent tout ce qu'ils veulent les toubibs parce qu'ils sont en position de force. Parce qu'ils sont nombreux sur les bancs du Sénat et de la Chambre des députés  ; parce que le numerus clausus imbécile organise la pénurie.

Bon. Le mieux pour nous, cambrousards, c'est encore de manger bon, boire dru, brosser madame, respirer un air pur et encore gratuit en écoutant les petits oiseaux... Et avoir des crocs plus solides que les miens !

Porco dio...

 

Photo X - Droits réservés

 


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9 réactions à cet article    


  • Ben Schott 14 août 2015 12:11

     
    Y a pire : la grève des corps caverneux !
     


    • cassios 14 août 2015 13:37

      Pour une fois, je vais me fendre d’une petite réponse.Plusieurs raisons expliquent pourquoi les jeunes médecins fuient les villes de petite taille ou villages.


      La première, c’est que quand un étudiant a fini ses études de médecine, il a un age avancé et il est souvent en couple.Donc pour que le couple aille dans un petit village ou une petite ville, il faut que les deux aient du boulot.
      Ma femme(gynéco obs) et moi voulions aller dans une petite ville ou un village mais nous n’avons jamais été en mesure de trouver du boulot pour moi.

      La 2ème raison, ce sont les enfants. De plus en plus d’écoles sont fermées et donc un médecin qui s’installe cherche un endroit où il y aura pour ses enfants une crèche, une école primaire, lycée, etc....
      L’état, en laissant les postes partir, les écoles se fermer ainsi que les centres des impôts ou autres a considérablement réduit l’attractivité de quantité de belles villes et villages

      La 3ème raison, c’est aussi que les jeunes médecins veulent de moins en moins avoir des cabinets car la charge administrative et les procédures sont de plus en plus étouffantes.
      En gros, trop de paperasse ou de règles à la noix.

      La 4ème raison concerne les spécialités, les généralistes étant les parents pauvres au point de vue revenus, les étudiants se dirigent vers des spécialisations plus lucratives.
      Mais du coup, il faut être plus proche d’un grand nombre de patients et privilégier les grands centres urbains.

      La 5ème raison, c’est que les jeunes médecins ont vu la société se diriger vers les 35H, les RTT, les congés payés et en veulent aussi, chose impossible si tu as un cabinet.
      Pour info, la plupart des cabinets dont le médecin part à la retraite ne trouvent pas de remplaçant même donné gratuitement.

      La 6ème raison, c’est que l’ancien modèle du cabinet de médecin, c’est un médecin qui bosse à plein temps et qui a une femme qui gère les enfants et la maison.Cette époque est révolue, surtout depuis la plupart des nouveaux médecins sont des femmes et veulent s’occuper de leurs enfants (80% de femmes dans les amphis de médecine).
      Donc c’est incompatible avec l’ancien modèle de médecin disponible à toute heure dans toute la région.Ces anciens n’avaient pas qu’une vocation, c’était des hommes dont la dame s’occupe de tout ce qui ne concernait pas la médecine.

      • Garance 14 août 2015 16:03

        @cassios


        En un post vous nous expliquez tout

        Merci

      • leypanou 14 août 2015 16:52

        @cassios
        " les généralistes étant les parents pauvres au point de vue revenus, les étudiants se dirigent vers des spécialisations plus lucratives. " : voulez-vous dire que tout le monde peut faire une spécialité, étant entendu qu’une spécialité est effectivement plus lucrative ?

        Sinon, les raisons que vous invoquez sont parfaitement vraies : beaucoup de médecins préfèrent maintenant travailler comme salarié, choisir son endroit de résidence, et profiter des 35h avec un salaire assez conséquent (j’ai entendu dans les 5000-6000€/mois, certes pas le même que celui d’Ibrahimovic mais plus que celui du pékin lambda).


      • Calva76 Calva76 15 août 2015 10:30

        @cassios
        Excellente synthèse de la problématique !

        Si seulement cette dernière pouvait parvenir à MST... smiley

      • Cacochyme 15 août 2015 11:35

        @cassios

        Je répondrais à cassios que du point de vue de cette profession libérale ses (ces) arguments se défendent. Le seul bémol que je mettrais c’est que cette profession libérale est réglementée mais elle assure aussi un service public. De plus, elle bénéficie d’un numerus clausus au niveau de la première année de médecine. Si il suffisait d’avoir 10/20 de moyenne pour passer en deuxième année, il y aurait pléthore de médecins. D’autre part, même si les étudiants en médecine ne sont pas payés (comme les élèves médecins militaires) pendant le début de leurs études, les études sont gratuites.

        Je ne trouverais pas anormal que chaque docteur en médecine nouvellement diplômé (même pour ceux qui veulent faire une spécialité) ait l’obligation de faire « un service public de la santé » de 2 ou 3 ans dans les zones sous-médicalisé. Ceci aurait du bon quant à la formation pratique car, j’ai pu constater que beaucoup de spécialistes ne connaissent plus que leur spécialité. (J’ai vu ainsi un radiologue qui ignorait que les dents de lait avaient des racines, c’est en voyant la radio de mon fils qui avait les dents enfoncées par un coup de balançoire qu’il le découvrît, il pensait au départ que les dents s’étaient cassées et que mon fils les avait avalées ou recrachées)

        Pour prendre un exemple aux USA, pays du libéralisme s’il en est, un Procureur doit d’abord être passé pendant 7 ans par la case avocat.

        En Grande Bretagne les médecins ont une clientèle sectorisée.

        Bref il s’agit là d’une question de volonté politique. Les futurs étudiants en médecine qui ne seraient pas satisfaits de cette réforme pourraient toujours s’orienter vers la maçonnerie ou l’agriculture où l’on manque de bras. Nous restons dans le libéralisme....


      • leypanou 14 août 2015 16:55

        Le problème a certainement une solution, mais encore faut-il que les pouvoirs publics s’en donnent les moyens.

        Mais c’est le dernier de leurs soucis et à part des gesticulations régulières sur les médias, rien n’est fait pour le régler définitivement.


        • Samson Samson 15 août 2015 04:25

          Je ne dis pas que çà résoudra le problème des déserts médicaux mais, à défaut de dentiste à proximité, un flacon de teinture-mère de calendula dans la pharmacie pour les bains de bouche ou pour masser les gencives aide au moins à patienter.
          Bon courage !


          • foufouille foufouille 15 août 2015 11:57

            chez moi, beaucoup de médecins mais qui te font revenir pour gagner du fric. et comme le patient est moins con que avant, certains médicaments sont en vente libres, internet existe en campagne = le médecin gagne moins de fric et se plaint beaucoup.
            le dentiste est mal remboursé, c’est pas pour les sans dents.

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