Kälbermarsch
Hinter der Trommel her trotten die Kälber Derrière les tambours trottent les veaux
Das Fell für die Trommel liefern sie selber Pour les tambours ils fournissent la peau
Der Schlächter ruft, die Augen fest geschlossen Les yeux fermés le boucher appelle
Das Kalb marschiert in ruhig festem Tritt Leur pas est droit et solennel
Die Kälber deren Blut im Schlachthaus
schon geflossen Pour ceux dont a coulé le sang
Marschiern im Geist in seinen Reihen mit C’est leur esprit qui rentre dans le rang
Bertolt Brecht (1)
Comme le scénario ne se démode pas, la scène mondiale joue actuellement les prolongations. Bien que, de nos jours, ce n’est plus chez leur boucher que les victimes se rendent de leur propre gré mais chez leur maître à penser.
A l’instar de la propagation contemporaine de la foi dans « l’ordre économique mondial » établi, la propagande institutionnalisée fut utilisée une première fois au début du 17ème siècle par la « Congrégation pour l’évangélisation des peuples », une sorte de « Think tank » de la Renaissance, fondée par le pape Grégoire XV, dans le but de combattre la menace réformatrice luthérienne.
La propagande moderne en revanche, ou l’évangélisation du consumérisme par la publicité, nous la devons au journaliste américain, Edward Bernays (1891-1995), neveu du fondateur de la psychanalyse, Sigmund Freud (1856-1939), et sa théorie sur la « psychologie des masses ».
Le volet académique, si on peut dire, de la supercherie fut assuré par un autre journaliste, américain, Walter Lippmann (1889-1974), inventeur du concept de la « Guerre froide », à nouveau d’actualité, et du terme de la « fabrique du consentement », théorisé dans son ouvrage « Public opinion » paru en 1922, avec dans son sillage les économistes Friedrich von Hayek et Milton Friedman, pères de la révolution néolibérale, dont nous dégustons actuellement les bienfaits.
Ce n’est guère un hasard que la propagation de l’évangile ait été théorisée, et assurée par la suite, par deux membres de la guilde des journalistes, organes du quatrième pouvoir dans l’état.
Au moins depuis l’opération « Mocking bird », révélée par la commission sénatoriale « Church commission », mise sur pied en 1975 dans le sillage du scandale du « Watergate », que nous savons que certains d’entre eux (CBS, Time Magazine, Life, The New York Times, The Washington Post, The Washington Star, The Miami News), et tant d’autres, ne sont que trop avides de se mettre à la disposition de la bonne cause en collaborant volontairement avec les dépositaires du pouvoir, en l’occurrence les services secrets des Etats-Unis, la CIA, par cupidité et vanité, rarement par conviction. Chez les personnes de « moeurs légères » on appelle cela la prostitution.
Par les temps pré-révolutionnaires qui courent, quand ceux d’en bas ne veulent plus, tandis que ceux d’en haut ne peuvent plus, c’est la propagande qui assure le service après-vente. Comme on ne sait pas comment réagira la plèbe quand elle saura que le roi est nu on s’efforce d’éviter qu’elle ne s’en rende compte.
Contrairement à ce que suggère la doxa « TINA » (There is no alternative) qui domine le discours depuis quarante ans, l’organisation du vivre ensemble est en réalité sujet à débat et finalement un choix (démocratique) de société. Seulement, comment la société peut-elle choisir en connaissance de cause quand les dépositaires du quatrième pouvoir et « Mère courage » manquent à l’appel ?
Ce n’est pas dans une crise sanitaire ni même existentielle que s’est vu propulsée l’humanité, mais simplement devant un choix de société, choix franchement tout sauf cornélien. Une redistribution du progrès avec des mécanismes autres que ceux que propose la « doxa » permettrait à la société de dédier son existence à la peinture et au yoga.
(1) Kälbermarsch, parodie brechtienne du « Horst-Wessel-Lied », hymne officiel du parti national-socialiste NSDAP à la gloire du « Troisième Reich »
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