L’affaire Florence Cassez
L’affaire qui prend désormais le nom de sa malheureuse héroïne Florence Cassez est probablement beaucoup plus importante que nous ne le pensons actuellement. Pour ceux qui ne seraient pas au courant, s’il se peut qu’il y en ait encore, rappelons les faits en quelques mots.
Comme on peut le lire sur le site de Wikipédia, cette jeune fille est « accusée d'avoir participé à l'organisation criminelle « Los Zodiaco » (« la bande du Zodiaque ») et a été condamnée en appel par la justice mexicaine en 2009, à une peine de soixante ans de prison pour enlèvement, séquestration, délinquance organisée et possession d'armes à feu à l'usage exclusif de forces armées ». Les preuves que disent en retenir les autorités mexicaines sont effectivement accablantes.
Par exemple « Cristina Ríos Valladares, enlevée le 19 octobre 2005 avec son mari et leur fils, et séquestrée pendant 52 jours a publié une lettre ouverte « à l'opinion publique » où elle déclare que son fils et elle reconnaissent Florence Cassez comme leur ravisseuse grâce à sa voix et son accent. Toujours d’après eux cette dernière a extrait du sang de l'enfant pour l'envoyer au père et a menacé la mère de la tuer. En mai 2009 David Orozco, un des membres du gang, est arrêté et affirme, lors de l'enquête, que Florence Cassez dirigeait la bande avec Israêl Vallarta son petit ami. D’après lui Florence Cassez avait pour tâche de toucher les rançons et de préparer les enlèvements ». Mais tous ces témoignages sont entachés de suspicion et fermement niés par Florence Cassez.
Il s’agirait donc d’une simple affaire de délinquance comme il y en a malheureusement de plus en plus un peu partout mais qui devient importante car elle met en cause deux pays, le Mexique où le gouvernement n’arrive pas à éradiquer une situation désormais catastrophique puisque les nombre de rapts avec demande de rançon et assassinat est un des plus élevé au monde, et la France à cause de la nationalité de sa principale inculpée Florence Cassez.
Notre pays tout entier prend fait et cause pour elle. Et au moment où ces lignes sont écrites la tension est à son paroxysme car elle a été prise en main par notre président Nicolas Sarkozy qui en fait une affaire personnelle. Et c’est là que le bât blesse.
En effet notre principale argumentation est que nous devons défendre Florence Cassez parce qu’elle est française. Or cette défense n’a aucun fondement moral. Il est incompréhensible qu’aucune voix ne s’élève pour la dénoncer. C’est la logique des chefs de bande. C’est celle des tribalismes qu’on observe si souvent dans les pays d’Afrique. C’est celle qui fut défendue il y a quelques années par le dirigeant Kadhafi lorsque son fils Hannibal fut arrêté en Suisse pour les mauvais traitements infligés à son épouse. Et c’est une conduite qui est indigne de la part d’un grand pays comme le notre.
Florence Cassez ne doit pas être défendue parce qu’elle est française mais parce qu’elle sera reconnue comme innocente. Et c’est exactement de la même façon que nous devrions nous battre pour que n’importe quel innocent de par le monde soit défendu qu’il soit français ou non. Et il est tout à fait compréhensible que son président Filipe Calderon s’étonne que, dans les arguments présentés ces jours ci par Nicolas Sarkozy, il n’ait été question que de la nationalité de Florence Cassez et jamais de sa culpabilité.
Or ce qui est essentiellement grave dans les développements actuels c’est le consensus général avec laquelle notre pays tout entier tolère cette ligne de conduite, lui reprochant seulement d’être exposée un peu brutalement et pas avec toute la diplomatie qui aurait été nécessaire. Non seulement nous ne nous grandissons pas en adoptant cette attitude mais nous devenons indignes de ces grands esprits qui firent la gloire de la France autrefois. Cette France où Voltaire put dire un jour « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites mais je me battrai s’il le faut pour que vous puissiez pourtant le dire ».
Certes dans un monde où la démographie et les ressources explosent de toutes parts notre petit pays semble tenir de moins en moins de place. Mais il nous restait la fierté de ces grandes idées que depuis la glorieuse Révolution française nous avions contribué à répandre dans le monde tout entier. Or plus que de grandes richesses, plus qu’une forte population ce sont justement les grandes idées qui font un grand peuple. Ces grandes idées qui firent la gloire de la Grèce autrefois toute chétive qu’elle ait pu être. Cette Grèce où seul l’honneur dicta à Socrate sa conduite quand il fut condamné à mort par les Lois de son pays et que ses amis lui proposèrent de s’enfuir. Grâce à Platon il nous en est resté le très beau plaidoyer qu’on trouve exposé dans Criton et qui serait trop long de redonner ici. Ce plaidoyer où dans une prosopopée célèbre les Lois disent à Socrate « Ne mets ni tes enfants ni ta vie ni quoi que ce soit d’autre à plus haut prix que la justice ».
Une telle élévation de pensée fait que la Grèce, bien qu’elle se soit effondrée depuis longtemps, est encore de nos jours, par les écrits qui nous en sont restés, un des phares du monde. Celui dont nous sommes fiers. Par les grands hommes qu’elle a eu autrefois la France avait en quelque sorte pris le relai. Mais la réaction unanime, exclusivement nationale, et finalement tribaliste qu’ont aujourd’hui nos dirigeants, nos élites politiques et même nos intellectuels devant l’Affaire de Florence Cassez montre que nous ne méritons plus cette considération et ce respect auxquels, à bon droit, nous pouvions prétendre par le passé.
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