L’élection d’Obama ne changera rien
L’événement le plus surprenant, ce pourrait bien être la grosse baffe adressée aux républicains par des électeurs offrant 400 à 500 grands électeurs à Barack Obama. Mais pour le reste, l’avenir des States et du monde, il se peut bien que cette élection ne change rien, n’ayant que peu d’influence sur la vie des gens ni sur les transformations géopolitiques du monde. Qu’a fait Sarkozy pour les Français ? Rien de spécial, malgré toutes les réformes. Les uns ont un peu gagné, les autres perdu ; la vie est chère et le niveau stagne en moyenne.

Imaginons. Le jour se lève. Pas un souffle de vent. Le ciel est gris. Un type dit « il va pleuvoir, le ciel est noir ». Un autre affirme « le ciel est bleu, n’oubliez pas les lunettes de soleil ». La plupart se marrent, constatant que le ciel est gris et qu’il faut s’activer et aller bosser. Le système est plus fort que la démocratie. A notre époque, la volonté politique ne peut que rarement infléchir les choses. Quand elle le fait, ce n’est pas brillant, comme en Irak. Le reste, c’est de la finance, des technologies, des hommes… Un pays aussi endetté qu’entêté qui est la plus grosse place financière du monde, la première économie, disposant encore de la plus puissante armée. Ici en Europe, beaucoup rêvent, mais l’élection d’Obama n’apportera rien de nouveau. Mais elle est un événement nécessaire pour une majorité d’Américains. Obama est le type qui arrive au bon moment, répond le mieux aux aspirations des uns et aux craintes des autres. C’est un peu un mélange de Sarkozy et Ségolène Royal, une sorte de synthèse dix fois mieux réussie que le Bayrou de chez nous.
Dans un coin du paysage médiatique, on trouvera toujours un type, appelons-le Joe le bavard, le type qu’on consulte parce que, comme le plombier, il s’occupe des fuites, mais pas pour les réparer. Il s’en sert car, en fait, sa vraie fonction est celle d’analyste politique. Et comme il est au fait des informations diffusées par les puissants de la planète, il en sait un peu plus que nous. Joe le bavard, ce peut être BHL, Jacques Attali, Ted Stangers ou Pierre Lellouche. L’élection américaine ne changera rien, mais Joe se doit de dire que des choses vont changer. Certes, ne pas dire qu’il va faire soleil pour reprendre notre exemple plus haut, mais qu’une légère brise souffle. Ne pas prendre l’auditeur pour un con, mais donner quelques éléments tendant à penser que, dans tel ou tel domaine, il pourrait se produire bien des choses moyennant quelques trucs, mais à condition que… et c’est parti pour 10 minutes d’antenne. Bref, c’est un peu comme un sujet de philo au bac, portant sur ce qu’apporte la philosophie. Il faut développer. Même si vous êtes convaincu que la philosophie ne vous a rien apporté, vous devez disserter sur deux pages en citant des auteurs pour dire que la philosophie, eh bien c’est vachement intéressant et utile. Imaginez la scène. Bonjour M. Attali, que va apporter l’élection d’Obama ? Rien, mais alors rien du tout, cher Monsieur de France Inter, alors au revoir Monsieur et bonne journée, il fait bien gris !
Parmi les raisons pouvant expliquer que rien ne puisse être changé par l’élection d’Obama, la plus générale, autant que radicale, serait que le système possède une inertie anthropo-technologique telle que rien ne puisse être infléchi par une équipe aux commandes sur ce gros navire qu’on ne peut pas éloigner des mauvaises passes. L’économie est sous la double dépendance de la finance et de la technologie. Le consumérisme et l’individualisme ont gagné la planète. Le plus grand parti qui gouverne, c’est le parti du chacun pour soi. Et aux Etats-Unis, ajoutons le Dieu pour tous. Cette règle fait que la société va, avec la démocratie ou pas, vers la domination des puissants sur les dominés. Telle est la loi naturelle de l’humanité. Selon les pays, la politique permet de moduler les effets de cette loi universelle et de protéger les plus faibles, d’assurer un peu plus équitablement le partage des richesses. Mais le système reste sous la domination de la finance et des économies, les gens, sont asservis par le système du crédit. L’endettement diminue la liberté des uns et augmente le profit des autres. C’est un système pas très sain, mais, pour les économistes, il paraît que ça dynamise la croissance. Peu importe alors que les gens soient surendettés et que quelques-uns se suicident. C’est prévu par la loi naturelle universelle. Et ça arrange les financiers tout en faisant le « bonheur » des créanciers.
Le monde attend des Etats-Unis une réforme du système monétaire. Un G20 est prévu, mais cette réunion n’aura sans doute qu’un effet médiatique. Car la nouvelle équipe ne sera en place qu’au début de l’année 2009 et rien ne dit qu’elle fera quelque chose. Ce qui intéresse les gens et, à travers eux, les propos de tous les Joe les bavards, c’est la croissance économique. Une angoisse planétaire. Le niveau de vie a été multiplié par dix ou plus depuis 1945 et pourtant l’opinion craint de manquer alors que les médias entretiennent ces peurs et que les politiques se portent au chevet de la croissance. Et une dose de relance, et on remet un peu de liquidité par-ci et par-là grâce aux Etats qui, en s’endettant, aliènent une partie de leur liberté face aux financiers. Pourtant, les liquidités existent. Les 25 000 milliards partis des places boursières ne se sont pas envolés. Mais ils sont entre les mains des financiers et c’est sacré. On n’y touche pas. Le système ne peut qu’engendrer de la précarité. Les gouvernants ne s’en inquiètent pas. Quand les pauvres se suicident, ils s’en foutent. Quand les seniors dépriment parce que leurs fonds de pension sont touchés, ils interviennent ! Ainsi va le monde, avant et après Obama.
La nouveauté, ce sera sans doute le changement imposé, les prochaines décennies, par la réduction des marges de manœuvres au niveau des ressources minières et pétrolifères. Le système est entre les mains de ceux qui sauront anticiper, négocier avec les technologies ce changement de société qui nous sera imposé par cette autre loi naturelle : le monde est fini. Et le monde s’en fout royalement de l’espoir infini placé en Obama. Le pétrole s’en ira vers les 200 dollars en 2009 ou 2010. Quant à cette croissance verte européenne louée de Hulot à Cohn-Bendit, gérée de Sarko à Borloo, elle risque bien d’être un boulet qui empoisonnera la vie des Européens.
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