La désastreuse communication de DSK
Une succession de mauvais choix aura présidé à sa com'
Lorsqu’une entreprise est en état de faiblesse consécutivement à un évènement funeste, elle construit ce qu’on appelle une “communication de crise”. Il existe trois axes principaux de “communication de crise”, enseignés dans toutes les grande écoles de la planète.
1 / La vérité.
Cette première stratégie consiste à accepter la crise, reconnaître le problème, et ce, le plus rapidement possible.
Assez peu employée en Europe, cette stratégie de la reconnaissance est pourtant l'une de celle qui fonctionne le mieux à long terme. En avouant sa responsabilité, on joue la carte de la transparence et on obtient aussitôt de la crédibilité. Cette stratégie permet surtout d'éviter une remontée ultérieure d'informations contredisant les premières déclarations, situation dans laquelle l'entreprise a énormément à perdre sur le plan de l'image. Un exemple : en mai 2004, l'effondrement du Terminal 2E de Roissy fait six morts et plusieurs blessés. ADP met à disposition des médias des informations et des images. ADP annonce en outre qu'il rasera le terminal s'il le faut. Cette communication-vérité clôt rapidement le drame.
2 / Le contrefeux
On contre-attaque en invoquant un complot, en reportant la responsabilité à l'extérieur sur un champ autre, en orientant les faits vers l'administration, le politique...
Le contrefeux extérieur, qui consiste à déporter le problème réel en dehors du champ de l'entreprise, doit impérativement s'appuyer sur des éléments tangibles. Dans le cas contraire, son utilisation peut s'avérer bien plus négative que la crise elle-même.
3 / Le déni
On garde le silence dès le début de la crise - stratégie choisie par les autorités russes lors de l'accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl, par exemple. On cesse de parler à partir d'un moment déterminé. Les conséquences d'une telle stratégie peuvent s'avérer très mauvais si les faits ressurgissent à plus ou moins long terme et avec une nouvelle lecture des événements. Concrètement, cet axe se traduit dans la plupart des cas par une perte de crédibilité : à la suite au naufrage de l'Erika, en décembre 1999, Total commence par ne pas communiquer, puis par nier sa responsabilité dans la marée noire, avant finalement d'adopter une position inverse qui lui coûtera cher en terme d’image.
L’équipe EuroRSCG qui suit le couple DSK Sinclair depuis le début a mélangé les trois formules dès l’éclatement de l’affaire, ce qui constitue une première erreur : il faut déterminer une stratégie et s’y tenir ensuite sans faillir.
Stratégie de la vérité : si DSK avait courageusement assumé son passé de libertin, et donné une interview sincère à Claire Chazal à son retour en France, les effets atomiques de l’affaire du Carlton et de Lille eussent été considérablement réduits. La défense de DSK se fondera ce soir-là au principal sur la relaxe par défaut de Cyrus Vance. Pas une seule fois DSK ne parle à la première personne, et il fait clamer son innocence par le procureur, en outrepassant d’ailleurs la pensée de celui-ci, écrite noir sur blanc. Mais surtout, DSK n’assume pas un comportement qui va être révélé ultérieurement, avec des effets désastreux additionnés, puisque la soi-disant interview-vérité sur TF1 devient au final un mensonge par omission.
Stratégie du contrefeux : ici entre en scène le biographe officiel de DSK, qui se fait le porte parole officiel de la version du complot durant des semaines. Hélas, Taubman finit par être disqualifié par DSK lui-même, au terme d’un communiqué sec et laconique : l’effet contre-productif de cet avocat aveugle sourd et muet, qui transforme - probablement contre son gré à partir du moment où l’affaire lilloise est connue - DSK en martyr n’échappe pas à l’intéressé, qui est tout sauf un idiot.
Stratégie du déni : là il faut parler du comportement incompréhensible de Anne Sinclair. Le silence total de l’épouse “baffouée” est en soi défendable en terme de posture, mais il devient arrogant dès l’instant où on la voit triomphante à chacune de ses sorties publiques, bras-dessus bras-dessous avec DSK. La révélation de l’immense fortune du couple, son train de vie extravagant, ses multiples demeures à Paris, Marrakech, Washington, etc. a produit en outre un effet désastreux qu’il aurait fallu circonscrire par la prise de parole.
Au fond, la gestion de crise par le couple DSK / Sinclair et ses conseils aura été très contradictoire...
Aujourd’hui, il semble que l’ancienne équipe EuroRSCG ait été remerciée, au profit d’une gestion plus juridique et technique, via les nouveaux avocats – très aguerris - choisis par Anne Sinclair et son mari. Nous verrons si cette voie est la bonne, mais en théorie, elle l’est.
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