La discrimination des femmes en santé...
Un document sur la santé des femmes, diffusé sur la Cinq montre toutes les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes dans le domaine médical...
"C'est une fatalité méconnue : aujourd'hui, en France et partout dans le monde, en matière de santé, naître femme est un désavantage.
La discrimination des femmes en santé peut aller jusqu'à mettre leur vie en danger. On la retrouve dans toutes les grandes pathologies, à commencer par les maladies du coeur.
Les maladies cardiovasculaires en France tuent 200 femmes par jour, dans le monde 12000 femmes par jour. Les symptômes des femmes sont méconnus, voire ignorés : elles sont moins bien diagnostiquées et moins vite soignées.
Il n' y a pas si longtemps, la médecine considérait les femmes comme des hystériques qui se plaignent sans raison.
Aujourd'hui, la charge mentale et la précarité économique les empêchent de prendre soin d'elles.
Une autre raison explique cette discrimination : une certaine vision de la femme dans le milieu médical qui perpétue une méconnaissance de leur corps. L'infarctus ne se manifeste pas exactement de la même façon chez les femmes que chez les hommes, mais on ne l'apprend pas au cours des études de médecine.
A l'institut coeur poumon de Lille, on a vu de plus en plus de femmes se présenter aux urgences, ces dernières années : face à l'explosion des cas de femmes victimes d'infarctus et d'AVC, une cardiologue sonne l'alerte.
"Dans l'imaginaire collectif, aujourd'hui, les femmes vivent plus longtemps que les hommes, et finalement, c'est les femmes qui restent et les hommes qui décèdent avant. Cet adage là ne sera peut-être pas vrai dans 20 ans, quand on voit la vitesse à laquelle va la progression des maladies cardiovasculaires qui tuent les femmes."
Aujourd'hui, en France une femme sur trois meurt d'une maladie cardiovasculaire, pourtant, ces pathologies sont encore considérées comme plutôt masculines... Les femmes sont sous dépistées, sous traitées, sous évaluées. Des journées chargées au travail, à la maison : les femmes ne prennent plus de temps pour prendre soin d'elles.
La cardiologue connaît bien ce profil de femmes que le surmenage et la charge mentale ont menées à l'infarctus. Les femmes ont tendance à malmener leur corps et à le pousser plus qu'il ne faudrait. Les femmes ont tendance aussi à cacher leurs douleurs.
Les femmes ne s'écoutent pas, quand elles ont des symptômes, souvent, c'est de l'angoisse, c'est du stress, elles se sous dépistent.
Il y a aussi un autre problème : les femmes peuvent avoir des symptômes qui, non seulement, sont différents de ceux des hommes, mais qui, en plus, prêtent à confusion.
Dans un cas sur deux, les symptômes sont sournois : fatigabilité à l'effort, un essoufflement à l'effort qui va s'aggraver dans le temps, des signes digestifs, des brûlures à l'estomac.
La prise en charge des femmes peut poser problème, et en cas de suspicion d'accident cardiovasculaire, il faut aller vite, mais les femmes et les hommes ne réagissent pas de la même manière en cas de douleurs dans la poitrine.
Des études ont montré que les femmes appellent les services d'urgence en moyenne 15 minutes après les hommes.
La crise cardiaque chez la femme est en général considérée comme plus grave : plusieurs études l'ont démontré, avec une plus grande mortalité, parce que les prises en charge peuvent être retardées, chez les soignants eux-mêmes... on pense, pour la femme, plutôt à des crises d'angoisse.
Le travail et la famille passent aussi avant la santé des femmes.
Il y a, en plus, une dégradation de la condition féminine : les femmes d'aujourd'hui ne sont pas nos grands-mères ou même nos mères, ces femmes là étaient relativement protégées, elles étaient à la maison, elles n'avaient pas ce triple boulot qui est de travailler, d'être performante au boulot, de s'occuper de son mari ou de son compagnon, de s'occuper de ses enfants...
L'accident cardiaque a triplé ces dernières années chez les femmes de moins de 50 ans.
Le cancer du poumon est l'autre grande maladie qui se féminise à toute vitesse : en France, le cancer du poumon explose chez la femme, alors qu'il stagne chez l'homme.
Les femmes sont victimes d'une double injustice : l'inégalité par rapport au tabac, on sait que, à tabagisme égal, les femmes ont plus de risques de faire un cancer du poumon, de plus, comme dans l'inconscient, c'est un cancer qui touche moins les femmes, souvent, on a tendance à minimiser les symptômes : toux qui persiste, fatigue.
Il y a des raisons à cette discrimination massive des femmes en santé : on communique beaucoup sur tout ce qui est gynécologique, mais on oublie tout le reste.
Les femmes ont appris à s'occuper de leur corps pour les problèmes liés à leur féminité, quitte à oublier qu'elles avaient aussi des organes et des artères. La médecine elle-même les a confortées dans cette idée, comme si une femme se résumait à un utérus et une paire de seins.
Cette médecine sexuée porte même un nom : c'est la médecine "bikini". On regardait la santé de la femme principalement au travers de ses organes de reproduction, et des seins.
Cette vision de la femme a même débordé du cadre de la médecine, l'exposant parfois directement aux dangers : ainsi, pendant plusieurs décennies, les industriels de l'automobile ont utilisé un mannequin d'homme pour étudier les accidents et certifier les véhicules.
Les airbags ont été conçus sans tenir compte des spécificités de la femme majoritairement plus petite et dont les muscles du cou sont plus fragiles. Une étude américaine a calculé que dans un accident une femme avait 47 % de risques de plus qu'un homme d'être blessée.
Dans un monde où 52 % des humains sont des femmes, la référence reste encore bien souvent le masculin : un sexisme qui imprègne la société.
Catherine Vidal a étudié les préjugés liés aux femmes en santé : il y a l'idée qu'elles étaient par nature le sexe faible, qu'elles avaient une constitution physique très fragile, qu'elles avaient sur le plan cérébral pas du tout les mêmes capacités d'intelligence que les hommes.
Ce cliché de la femme inférieure physiquement et mentalement s'est traduit dans les pratiques médicales.
Il y a 150 ans cette idée à trouvé une validation scientifique, dans les recherches du neurologue Jean Martin Charcot sur l'origine de l'hystérie. Mais l'étiquette d'hystérique colle aux femmes depuis beaucoup plus longtemps. Dans l'antiquité, on pensait que l'utérus n'était pas fixé et pouvait remonter dans le cerveau. Il en est resté quelque chose dans l'imaginaire commun. L'idée continue à influencer le diagnostic des médecins.
Il est rare qu'on diagnostique un homme hystérique, pourtant, il y en a beaucoup...
Ainsi, l'endométriose est une pathologie qui touche un certain nombre de femmes, plus de 10% avec des douleurs extrêmement fortes au moment des règles et pendant très longtemps, cette maladie a été complètement ignorée. On parle aujourd'hui davantage de cette maladie qui peut prendre des formes graves.
Pendant longtemps, les femmes ont été exclues des essais cliniques et des tests sur les médicaments sous prétexte que leurs variations hormonales biaisaient les résultats !
Quand la production de nouvelles molécules a explosé dans les années 50, les femmes ont enfin été prises en compte dans les essais cliniques, mais pas pour longtemps. Jusqu'à des scandales retentissants...
Cet essor de l'industrie pharmaceutique a conduit à traiter souvent les femmes, en particulier les femmes enceintes, avec des produits qui se sont avérés avoir des effets catastrophiques sur le développement du foetus, en entraînant des malformations, des cancers, ce sont les fameux scandales de la Thalidomide et du Distilbène.
Des enfants sans bras, sans jambes, sans oreilles, la Thalidomide se vendait sans ordonnance et était spécialement recommandée contre les nausées pendant la grossesse.
Le Distilbène était, quant à lui, censé empêcher les fausses couches : cancers, malformations génitales, trois générations plus tard, les conséquences de ce médicament se font toujours sentir.
Par principe de précaution, les femmes sont de nouveau exclues des essais cliniques à la fin des années 70. Il faudra attendre 20 ans de plus pour que les choses changent.
A partir des années 90, sous l'impulsion de féministes américaines qui s'étaient déjà battu pour le droit à la contraception, le droit à l'avortement : elles ont mis en évidence le fait que dans les maladies cardiovasculaires, les femmes n'étaient pas assez représentées.
Souvent, les manuels de médecine ne sont pas à jour : sur un atlas médial, c'est un modèle masculin qui est présenté, comme si le corps masculin était universel. On a ainsi formé des générations de médecins sur un standard masculin. Le corps des femmes est ignoré.
Que dire du machisme dans le milieu médical et du sexisme auquel sont confrontées les femmes au cours de leurs études médicales ?
Violences verbales, harcèlement sexuel, agressions, humiliations, sentiments de dévalorisation et de honte...ces dérives sont souvent passées sous silence...
Et même les patientes sont concernées par des abus sexistes : remarques sur leur physique, allusions sexuelles, harcèlement.
De plus, les douleurs des femmes sont systématiquement sous évaluées : on a tendance à les psychiatriser...
La médecine au féminin a encore bien des progrès à faire !"
Le blog :
http://rosemar.over-blog.com/2021/04/la-discrimination-des-femmes-en-sante.html
Source :
https://www.france.tv/documentaires/science-sante/2387159-femmes-les-oubliees-de-la-sante.html
Vidéo :
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