La France blackboulée par l’Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni
L'Australie va acquérir des sous-marins à propulsion nucléaire dans le cadre d'un pacte de sécurité historique avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni alors que la France avait un accord en or de 90 milliards de dollars pour le constructeur français de sous-marins Naval Group conclu en 2016. L'Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni montrent, ainsi que Paris ne fait pas partie du groupe très fermé anglo-saxon. La France, membre de l'Otan, apprend à ses dépens qu'appartenir à cette alliance militaire n'est pas une garantie de voir ses accords êtres respectés. Il semble, également, que la technologie française soit très dépassée pour répondre aux nouvelles attentes militaires.
Des pressions contre le constructeur français. « Depuis qu’il a remporté l’appel d’offres visant à livrer douze sous-marins à la Royal Australian Navy [RAN] basés sur le Shortfin Barracuda [une déclinaison du sous-marin nucléaire d’attaque Suffren… mais à propulsion « classique »], le constructeur naval français Naval Group doit faire face à une campagne médiatique et politique hostile, certains groupes d’intérêts remettant en cause le choix du gouvernement australien », signale Opex360.
L’un de ces groupes de pression a été créé par l’homme d’affaires Gary Johnston, sa position contre la France est annoncée : « Nous sommes un groupe de citoyens australiens préoccupés par le programme actuel du gouvernement australien pour le remplacement des sous-marins de la classe Collins. Nous pensons que le plan actuel de conception et de construction de 12 sous-marins de classe Attack par la société publique française Naval Group est fondamentalement défectueux ».
Le site Submarines for Australia a dénoncé plusieurs points pour annuler le contrat avec la France : « Le premier sous-marin ne devrait pas être en service avant 2035 au plus tôt, ce qui est beaucoup trop tard d'un point de vue stratégique et opérationnel et laissera probablement à nos forces de défense un écart de capacité majeur » ; « Le coût déjà excessif a explosé de 60% avant même qu'une conception préliminaire n'ait été produite et à 80 milliards de dollars pour la conception et la construction et 225 milliards de dollars pour le coût total tout au long de la vie, les sous-marins sont incroyablement chers » ; « En tant que conception « ab initio », la classe Attack fait face à des risques techniques majeurs et sera presque certainement livrée en retard » ; « Les sous-marins sont conçus pour entreprendre des opérations secrètes avec la marine américaine dans la mer de Chine méridionale et même si l'Amérique se livre encore à de telles activités dans la région au milieu des années 30, l'efficacité et la capacité de survie des sous-marins conventionnels dans ce théâtre à ce moment-là doivent être dans le doute ».
Enfin l'Australie veut avoir son industrie de sous-marins : « La raison pour laquelle nous construisons des sous-marins en Australie est de pouvoir les soutenir, tandis que Naval Group visera à maximiser l'implication de l'industrie française - actuellement sans aucune concurrence dans le processus, le niveau d'engagement entre Naval Group et les fournisseurs australiens est insuffisant ».
Un changement de stratégie au sein de l'Otan pour l'Australie. Gary Johnston faisait remarquer en 2019 que « bien que le premier sous-marin à propulsion nucléaire, l'USS Nautilus, ait effectué son voyage inaugural il y a déjà 65 ans, seuls six pays exploitent des sous-marins nucléaires aujourd'hui. Il s'agit des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies (Etats-Unis, Chine, Grande-Bretagne, France et Russie) avec l'Inde. Le lobbyiste rappelait qu' « une raison supplémentaire à cela a été l'opposition continue de la marine américaine et de la marine royale britannique à l'acquisition de SSN [sous-marins d'attaque à propulsion nucléaire] par la marine royale australienne ».
Mais, dès 2019, trois ans après l'accord avec la France, Gary Johnson a signalé un changement de point de vue du coté du Royaume-Uni à travers la position de Chris Stanford qui a servi comme contre-amiral dans la Royal Navy et, qui au cours d'une carrière de 35 ans, était un spécialiste de la guerre anti-sous-marine de l'Otan et commandant d'escadron. Chris Stanford déclarait : « L'Australie doit sérieusement envisager de passer à une force sous-marine à propulsion nucléaire car, dans les circonstances en évolution rapide de la région, c'est la meilleure solution pour répondre aux exigences stratégiques et opérationnelles exigeantes de la Royal Australian Navy. Les délais très longs et le coût extraordinairement élevé et croissant du programme de sous-marins de classe Attack rendent cet impératif ». Les alliés de la France considéraient, donc, déjà les sous-marins français trop vieux et trop chers pour mener des opérations dans la zone pacifique face à la marine chinoise.
« Un coup dans le dos » . Sur France Info, concernant cette rupture du « contrat du siècle » par l'Australie, Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires étrangères, a déclaré : « Le comportement américain me préoccupe. Cette décision unilatérale et brutale ressemble beaucoup à ce que faisait Monsieur Trump ». Il a rajouté : « Ce n'est pas fini. Il va falloir donner des explications ». Il a surtout mis le doigt sur la signification d'être membre de l'Otan : « Je suis aujourd'hui en colère, ça ne se fait pas entre allié ». La France parle ouvertement de trahison : « C'est vraiment un coup dans le dos. On avait construit avec l'Australie une relation de confiance, cette confiance est trahie ».
Le Premier ministre australien Scott Morrison a déclaré que son gouvernement avait décidé d'investir dans des sous-marins à propulsion nucléaire américains et de renoncer à son contrat avec la France pour construire des sous-marins à propulsion diesel-électrique en raison d'un environnement stratégique modifié, a rapporté l'AP. Même si le président américain, Joe Biden, a semblé oublier le nom du Premier ministre australien Scott Morrison alors que les deux hommes ont rejoint Boris Johnson pour annoncer une nouvelle alliance de sécurité indo-pacifique, ce dernier a souligné l'aspect historique du contrat AUKUS : « Aujourd'hui, l'Australie entame un partenariat de sécurité trilatéral renforcé avec le Royaume-Uni et les Etats-Unis pour permettre une coopération plus approfondie sur les capacités de sécurité et de défense ».
Le ministre australien de la Défense a fait savoir : « Nous avons l'intention de construire ces sous-marins à Adélaïde en étroite coopération avec le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Mais permettez-moi d'être clair, l'Australie ne cherche pas à acquérir des armes nucléaires ».
Olivier Renault
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Source : http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=3112
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