Comme vous l’avouez à un de vos lecteurs, vous avez « cédé à la tentation d’un titre accrocheur »... quitte à maltraiter un peu les faits. Ensuite, vous évoquez plus bas Didrot et Rousseau, dont vous cherchez par ces « preuves » à accabler (tout en la caricaturant) la pensée (résumée au « bon sauvage » et à la naïveté) de ces deux « benêts » de Didrot et Rousseau. Tout en évoquant aussi « le courant issu des lumières », donc supposément des personnes actuelles. Et enfin, vous attribuez aux « anthropologues », « zoologues » et on suppose aussi aux « paléonthologues » la capacité d’analyser « sans projeter de contenu idéologique ou religieux ».
Je pense que vous risquez de commettre la même erreur que vous reprochez à vos adversaires, en vous servant d’un fait isolé pour en tirer des conséquences universelles.
D’ailleurs, vous précisez dans votre article combien les paléonthologues (dont l’INRAP) nous sortent une théorie tous les 10 ans. (ce que les passionnés profanes comme moi ont également constaté, et qui nous amène à essayer de discerner comme vous, le scientifique de l’idéologique).
L’exercice est (vous l’admettez) « pas évident »...
Concernant l’article de l’INRAP que vous mettez en lien, il est précisément le fait de « paléonthologues versatiles », si je comprends bien... alors quel crédit lui accorder ? Les faits y sont peut être soumis à des « projections religieuses »... On y lit un certain nombre de « sans doute » et de « laisse supposer ».
En outre, la présentation quelque peu « racoleuse » faite par l’INRAP répond peut-être au besoin de cet institut d’exister médiatiquement, et donc d’accrocher un « nouveau public » gavé de télé violente, ce qui n’est pas mieux que les bons sauvages. (ils nous vendent rien de moins que « la naissance de la guerre »...)
Sur les faits, il ne s’agit que de 6 individus complets et de 4 individus partiels... peut-on parler de guerre ? Quelqu’un a-t-il jamais supposé sérieusement que les hommes préhistoriques ne connaissaient pas la violence ? Et même la haine ? Ou les rites violents ? Alors qu’on sait que l’Homme de Tautavel (400 000 ans) a vraisemblablement été victime d’anthropophagie (probablement rituelle).
Est-il question de démontrer que la violence inter-humaine existait il y a longtemps, ou bien depuis quand existe la guerre au sens moderne ?
La violence inter-humaine devait exister depuis la nuit des temps. Pour tous les motifs qu’on peut imaginer. Mais est-ce cela que la « guerre » au sens où on cherche à la déterminer ?
Vous soulignez à juste titre la proximité (négligée de beaucoup de monde) entre les hommes du néolithique et nous. Trop peu de gens se rendent comptent du bouleversement que l’agriculture a vraisemblablement amené chez l’homme.
Nouvelle mentalité, nouveaux pouvoirs, nouveaux rapports entre les individus et les sexes, nouveaux rêves, nouvelles attentes, nouveaux modes de vie, et sûrement nouvelles religions. Et nouveaux conflits.
On peut supposer que les « nouvelles moeurs » des agriculteurs ont du suciter bien des préventions chez les « chasseurs-cueilleurs »... (on peut rire aujourd’hui de ceux-là mêmes qui nous vendent le « paysan immorial » aux « moeurs enracinées »... alors qu’il a du passer pour un « bobo déraciné » aux yeux des « chasseurs virils ») ... mais bon.
Vous attribuez à l’accumulation du grain ces premières « guerres »... c’est probable. Mais comme vous le dites bien, on en est encore réduit aux suppositions, car c’était peut-être une rixe au sujet d’une femme ou un problème de pain au chocolat

De mes lectures (amateures), j’ai glané que la guerre au sens moderne du terme, serait plutôt née avec l’âge de bronze.
En effet, le bronze (autre révolution technologique) a permis l’aquisition d’armes sophistiquées et suffisamment efficaces, favorisant l’ascention de chefs de guerre et la consitution de butins durables pour justifier la guerre.
Car on toucherait ici à la définition moderne de la guerre (et au coeur de la querelle idéologique très contemporaine). C’est à dire, non plus de violences et de vols occasionnels, mais la consitution sociale durable autour de la prédation d’autres sociétés humaines. Et il me semble qu’on touche là un vrai sujet de polémiques politiques contemporaines.
On pourrait donc penser que la guerre (au sens moderne) est bien une construction sociale et politique. Que la guerre serait une « théorisation » politique de la violence humaine. Bon... c’est une idée...
Ca va pas supprimer les guerres demain. Mais ça permet de questionner la construction politique. Et surtout de chercher les acquisitions technologiques qui nous permttraient de sortir de l’âge de la guerre (sachant que la violence elle demeure sous d’autres formes).
On peut là brièvement rebondir sur Rousseau... je connais pas bien sa pensée. Mais je dois dire que le « bon sauvage » et la « corruption par la société » peuvent être compris dans des acceptions plus complexes. Je crois déjà que chacun à titre individuel peut faire cette expérience dans son enfance et son âge adulte, de la « corruption par la société »... c’est même à mon sens une des épreuves de notre vie... Sur le « bon sauvage », on peut supposer que son utilisation courante est une forme de barbarisation de la pensée du philosphe (quoi qu’on pense de lui).
Mais au-dela du symbolique, peut-être que certains « bons sauvages » supposés (ou rêvés) par Rousseau ont vraiment existé. Et que les athropologues ont peut-être pu les observer. Certaines sociétés isolées et résiduelles ont pu continuer à vivre (jusqu’à leur « découverte ») selon les formes de la société « primitive-agraire » que vous évoquez. C’est à dire dans un contexte de violence mais non pas de guerre. Les anthropologues ont même parfois parlé de « communisme des primitifs » en parlant de ces organisations sociales qui pouvaient faire penser à l’anarcho-syndicalisme.
Rousseau évoquerait alors intuitivement une part réelle de notre humanité. Voilée par un présent guerrier, mais pouvant être rappelée à vivre par un changement de société. C’est à dire sortir de l’organisation guerrière (même si cela ne signifie pas la fin de toute violence). Car vous reconnaitrez qu’il peut sembler abhérant au coeur de l’homme de consacrer ses énergies à préparer la guerre. Voilà... sans doute faut-il (avec le recul du temps) distinguer la violence de la guerre. L’une comme partie prenant de la vie, l’autre comme construction politique et philosophique.
Concernant la « non idéologie » et la « meilleure lucidité » des anthropologues... je ne suis pas d’accord. (pas plus que pour les présentations tendencieuses -dans un sens ou dans l’autre- des zoologues et des palonthologues« ).
On sait que Darwin (pourtant rejeté par les conservateurs), a été instrumentalisé en »darwinisme social« par des penseurs fascisants... on peut tout pervertir en science.
L’anthropologie est issue de la linguistique. Influencée par la psychanalyse, le symbolisme, le marxisme, l’ethnologie, la sociologie et d’autres courants scientifico-philosophiques, elle a entre-autre enfanté une pensée, le structuralisme.
Elle prétend tout expliquer par l’analyse des structures, des »échanges« et des »contre-échanges« ... Elle finit par présenter une vision utilitariste de l’homme. Et au fond, elle passe de science à idéologie (un peu comme le marxisme parfois, alors qu’il peut être un outil si précieux par ailleurs).
On a connu la gnose, au moyen-âge l’alchimie et plus tard on a eu Machiavel... ce ne sont pas des »lucidités« , mais bien des idéologies égalment. Le monde n’est pas une vaste mécanique horlogère. Attention au déterminisme étroit. Attention au nihilisme, qui n’est que le dernier »coup" de l’orgueil humain. Comme le dit un de vos lecteurs, l’homme ne se résume pas à la guerre. Ni les lecteurs de Rousseau à un ramassis de benêts sans lucidité.