Le boycott, une arme biologique qui a de l’avenir
Le 4 janvier 1960 disparaissait Albert Camus, et avec lui tout son cortège d’intelligence juste. Au commencement de son ouvrage, L’homme révolté [1], l’auteur écrivait : « je me révolte, donc nous sommes ». Lui rendant ici un hommage respectueux, et non sans un certain malicieux enchantement, nous transformerons la célèbre proposition de la manière suivante : je boycotte, donc nous sommes. Effectivement, n’est-il pas juste de penser que le boycottage représente une des figures de style majeure pouvant habiller un sentiment de révolte ? Aussi, voyons-nous dans ce mode d’action le potentiel d’une arme biologique dont nous estimons qu’il serait judicieux de s’emparer afin de faire entrer en résonance toutes les consciences dissonantes.
Il s’agit donc d’employer cette force de frappe afin de réduire les graves nuisances faites aux plus faibles par un système capitaliste devenu des plus immonde, notamment depuis l’avènement de sa financiarisation outrageuse. La globalisation n’est pas uniquement celle d’un système et de ses pervers avatars, mais c’est aussi celle de la prise de conscience qu’un autre monde non seulement est possible, mais surtout nécessaire si nous souhaitons continuer à faire humanité.
Dans cette perspective de grand « basculement du monde » [3], le boycott peut s’avérer être cette arme biologique nécessaire à tous les citoyens qui veulent s’inscrire dans cette dynamique nouvelle qui tente de dessiner les contours d’un équilibre global vital. La tâche est certes immense, mais en attendant que l’urgence fasse loi, il faut œuvrer en faveur de toutes les alternatives raisonnables qui déjà appartiennent au champ des possibles. À l’inverse, et uniquement dans la mesure du possible, il faut boycotter tout ce qui peut non seulement faire souffrance à l’autre, mais encore à cette Terre nourricière dont nous sommes éminemment redevables. Nous avons encore le choix entre œuvrer à notre avenir ou bien vaquer à notre disparition. Ne pense-t-on pas en sciences économiques que l’homme est cet être rationnel qui agit en fonction de son intérêt le meilleur ? Et bien, il faut sortir ce paradigme de la sphère individuelle pour l’élever au rang du global, alors nous pourrons tendre vers la satisfaction raisonnable de l’intérêt du plus grand nombre. En ce sens, le boycott peut-être une arme de dénonciation de ce qui dysfonctionne dans le mode d’organisation social et économique dominant, notamment cette course effrénée au profit individuel, cette improbable quête parfaitement déraisonnable. Si le monde tourne rond, ce n’est certainement pas pour le seul bien de quelques heureux élus qui auront eu la chance d’être bien nés. De toute évidence, il nous revient de faire en sorte que le plus grand nombre puisse jouir des essentielles beautés distillées ici-bas grâce à une cosmologie bienveillante.
Que les sans voix se fassent entendre au moyen du boycott, qu’ils s’assemblent pour faire valoir leur aspiration à une vie digne, telle que proclamée par les principes érigés en droits fondamentaux.
Il faut désormais croire en cette humanité globale en devenir, forcément différente, naturellement plus consciente de ses obligations, toute tendue vers la gestion du bien commun, au seul profit du plus grand nombre. Le boycott est une arme biologique qui peut produire plus d’intelligence sociale, il faut impérativement nous en saisir.
[1] Albert Camus, L’homme révolté, Gallimard 1951
[2] Olivier Esteves, Une histoire populaire du boycott, tome 1, P.148 et suivantes, L’Harmattan, 2006.
[3] Le basculement du monde, Manière de voir, Le monde diplomatique, octobre-novembre 2009.
17 réactions à cet article
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Tout à fait d’accord !
Pour nous, en ce qui concerne Carrefour & co., voilà des lustres que nous les boycottons, et que nous nous contentons de l’essentiel, via les marchés locaux. Cela présente bien des avantages : liens directs avec ceux qui produisent et vendent leur production, liens sociaux créés avec eux, économies substantielles, puisque nous ne payons pas d’intermédiaires et que nous nous contentons de l’essentiel ! (essentiel de qualité ! de surcroît !).
Le « grand marché des grandes surfaces », c’est le bluff, le miroir aux alouettes, la camelote, le clinquant, le « made in China » ou on ne sait où... le gouffre financier pour ceux qui se laissent séduire par tout ce qui brille et n’est pas utile et pas important !... Et cela, c’est sans parler des « cartes de fidélité » ou des cartes de crédit de ces marques ! Un Etat dans l’Etat !!!
Si nombre de nos concitoyens cherchaient, à proximité, ce qui leur est nécessaire et seulement cela, nous aurions, massivement, ensemble, un poids face à ces géants qui nous « bouffent » ! Si nous savions ensemble nous contenter de peu, le partage serait plus équitable !
De quoi avons-nous besoin ? D’un logis clos et confortable, de vêtements décents, d’une nourriture terrestre saine et frugale, de nourritures intellectuelles choisies, de quelques spectacles ou autres éléments culturels en fonction de nos désirs et affinités... Le reste, c’est ce qui permet à certains de s’engraisser sur notre dos ! C’est l’inutile de cette société de consommation !
Cette invitation au boycott est une très bonne invitation... seuls ceux qui sauront s’y tenir auront des c hances d’infléchir les « politiques » du tout marchand vers autre chose. c’est, dans ce monde, la seule véritable sanction, la toute première action à mener ! -
Même avec un certain nombre de dégâts collatéraux et non des moindres c’est une arme qui vaut mieux qu’une guerre civile.
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exemple de dégât collatéral : la balle dans le pied
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je rejoins l’auteur, c’est l’arme absolue pour lutter contre toutes les injustices. Mais c’est aussi la plus utopique, car nous ne sommes plus des citoyens qui réfléchissent mais des consommateurs qui achètent...
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« c est quand que l on s y met ? »
Jamais je le crains. Il y dans le monde beaucoup plus de gens qui consomment et qui sont content du system que de gens qui consomment et qui en patissent. De plus le boycott en Europe n a aucun sens car nous sommes rien. -
L’idée est excellente et semble naturelle mais faites un parallèle, par exemple, avec la compagnie Total. Total est responsable de pollutions, de morts, de blessés et de gens qui ont tout perdus (AZF), bien que faisant d’importants bénéfices non seulement Total n’est pas condamné mais en plus il licencie. Ma question : « Combien boycott Total ? »
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moi, je pratique depuis longtemps. Je ne possède pas de téléviseur, pas de téléphone portable et le net je suis dessus depuis le début car c’est un pouvoir absolu si l’on s’en sert bien, la preuve. Le boycott est bien une arme insensée contre le capitalisme consumériste que nous connaissons, il faut comparer, lire les étiquettes, ne jamais acheter du superflu ou du jetable ! Mon seul luxe, les livres, car au commencement fût le verbe....Il faut lorsqu’on commente un article faire appel à la raison et se dire toujours : pour juger ce qui est dit je dois prendre en compte le fait que la liberté de l’auteur s’arrête ou commence la mienne et que chaque critique doit être constructive c’est à dire apporter des réponses justes aux questions posées ou apporter des pistes de reflexion et de débats, jamais de critiques pour la critique cela ne sert à rien et n’apporte rien à la conscience. je ne dis rien des insultes gratuites qui accompagnent souvent les commentaires, elles trahissent leurs auteurs : des gens mal dans leur peau et je les plains.
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tres bien dit jeter tous votre tv et votre portable, vive le net et le boycotte, rretons fumer leurs sucettes a cancer, mort au coca cola, c es un combat de tous les jours qu il faut apprendre a nos enfants, créer le site des produits a boycotter, a du boulot, c sur mai les ptites rivires feront nos grand fleuves...
que la Force soit avec vous skool xxra -
Le boycott est effectivement une arme pacifique et puissante, mais qui demande un minimun d’éveil des consciences.
Dans un monde de consommateurs décervelés comme le nôtre, la consommation est pour beaucoup une véritable addiction, le moyen d’oublier les frustrations quotidiennes et les angoisses existencielles. Apprendre à combler ce vide intérieur différemment demande du temps et de la réflexion, un éloignement de notre mode de vie « productiviste ».
Apprenons aux jeunes générations qu’il est possible de vivre et de s’accomplir différemment.
En attendant, ne nous privons pas du plaisir personnel de boycotter tout ce qui nous semble nuisible !
Actuellement, une majorité d’infirmières boycotte tranquillement, silencieusement, l’ordre infirmier qui leur est imposé ; celui ci aura bien du mal à faire céder cette résistance passive, mais sans doute faudra t’il un jour aller plus loin que le boycott pour obtenir l’abrogation de l’ordre infirmier.-
Oui au boycott.
Oui, et mille fois plus encore s’il inclut une chaîne humaine immense, internationale, mondiale, qui n’est pas impossible aujourd’hui grâce à l’Internet.
Contre un ordre social et interrnational injuste
Contre l’empire de la honte, celui des firmes trasnationales gavées de super profits, qui affame des centaines de millions d’êtres humains, qui leur refuse l’accès au médicament, à la santé et à l’instruction.
Oui contre le gaspillage de l’eau.
Contre le gaspillage de l’énergie.
Contre la vie chère
Oui, contre la surconsommation et contre l’endettement pour surconsommer
Oui pour les dénoncer nominativement
oui contre les Ogm et la bouffe uniformisée.
Contre la sinisrose.
Oui à ce Boycott qui sera largement suivi dans les pays du tiers monde qui n’ont plus rien à perdred pourvu que l’information correcte et complète circule bien sur Internet. Il suffit juste d’organiser ces réseaux, ces chaînes humaines-
Moi, depuis DADvSI, je boycotte les majors, en n’achetant ni CD, ni DVD et surtout en ne piratant pas.
Malheureusement, malgré le piratage et les boycotteurs, le cinéma enregistre un record de nombre d’entrées cette année.A cause des ch’tis, qui n’ont pas pu couler Titanic parait-il à cause du piratage sur Internet.
Faites un geste contre le cinéma : boycottez le piratage
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Il y aurait bien des manières de boycotter et je vous fait grâce d’en énumérer quelques uns. Ce que je vous dis c’est qu’il y aura retournement car Dieu le veut ainsi. Soyez croyants.
Pierre Boisjoli
le conseiller divin
le seigneur des seigneurs
le roi des rois
le prince de la paix-
Je boycottais déjà depuis les licenciements LU, Danone.
Seulement, hormis le fait qu’il s’agisse d’un comportement hautement responsable, le boycott est punis par la loi.
Entendons-nous : le boycott EFFICACE est punis par la loi, celui pour lequel on demande une libre expression populaire est punis par la loi, souvenez-vous du triste sort du site jeboycottedanone.com qui fut condamné.De plus, le boycott sans relais, sans objet clairement défini à boycotter est inefficace.
Il faut absolument dire et écrire : boycotter carrefour, danone, ou un produit particulier, et pas seulement un concept général, sinon on risque que de n’être que quelques illuminés sans poids économique à procéder.
Le Hic, d’une action globalisée, c’est je le répète, qu’elle est durement réprimée par la loi.
Alors, à mon avis, avant d’aller plus loin, il faut réfléchir aux outils à mettre en plus, en tenant compte autant des outils technologiques que des outils juridiques, sinon on va tous se « chier » dessus et en définitive on ne fera rien d’efficace.
Question subsidiaire : y a-t-il un juriste, avocat ... qui pourrait intervenir et qui serait solidaire de ce genre de combat ? Car « en face » il y en a pléthore ne nous faisons pas d’illusion
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Tout d’abord toutes mes excuses aux contributeurs avisés qui ont soutenu ce billet de ne pas avoir pu répondre dans l’immédiat, et j’espère que cela n’aura pas été mal interprété. Si je cite l’exemple d’Alexandra c’est évidemment pour démontrer toute la pertinence de ce moyen d’action. Certes, il nécessite une certaine discipline ainsi qu’une bonne dose de volonté, mais demeure tout à fait probant. Enfin, le boycott peut se décliner au singulier comme au pluriel, localement ou globalement, bref, c’est un moyen de lutte à géométrie variable.
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Enfin un article sur le Boycott ! Bien fait en plus. Je m’intéresse de plus en plus en cette forme de contestation. Elle est forte, légitime, et elle fonctionne en plus, si toutefois nous prenons conscience de son efficacité. Faites des recherches sur le mot « boycott » dans vos moteurs de recherche, et vous verrez qu’il n’y a pas grand chose à lire en réalité sur ce sujet. (A part les incessant boycott aux produits Israéliens... On s’y perd...)
Les pays anglo-saxon utilisent plus que nous cette forme d’action.Il manque de la structure à nos actions citoyennes. Un boycott ok... mais nous voyons rarement de « DATE de fin d’action » (idem pour les petitions d’ailleurs)... de ce fait, avec internet qui nous régurgite sans cesse des infos, il est difficile de voir si une action est toujours en cours ou non.Je pense que pour commencer, un lieu unique d’information sur les actions en cours est nécessaire.Allez donc postez vos actions sur lesmanifs.fr (boycott, manifs et petition).Attention ce site n’est pas l’auteurs d’actions... mais un lieu de rencontre pour informer des actions en cours !-
Merci pour ce lien qui peut faire lien !
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