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Accueil du site > Tribune Libre > Le design, un projet totalitaire...

Le design, un projet totalitaire...

Le design, c’est cool, c’est sympa, n’est-ce pas ? C’est Trendy diront certains pour être dans le coup. Ça rime avec le beau, l’innovation, le progrès. Parfois il y a un petit côté fascinant, magique dirons-nous. Si ça va trop loin alors c’est de la science-fiction, « mais c’est avant tout pour poser des questions » répondront les naïfs la bouche en cœur. 

Un concept  fourre-tout : design environnemental, design commercial, design social, design numérique, design humanitaire… Bref, rien de bien méchant dans ce « quelque chose perdu entre l’art et l’industrie » que nul ne sait trop définir avec précision. Nous allons donc tenter d’expliquer, ici, ce que recouvre ce terme et ce qu’il implique réellement sur et dans nos vies.

L’anglicisme design, issu du vieux français desseing (1556), conjugue en son sein deux concepts : le dessin et le dessein. C’est-à-dire qu’il est une représentation mais également un projet qui nous parle de notre présent (tel un miroir) et nous permet de saisir ce qui se dessine (ou se projette) dans un futur plus ou moins proche. Le design est donc un projet ; un projet de vie, ajouterons-nous pour être plus exact. Il est considéré comme l’un des grands métiers de la conception avec ceux de l’urbaniste et de l’ingénieur. Tous des métiers totalitaires car totalisants : ils inventent, façonnent, gèrent, rationalisent, planifient et s’imposent à nous, sur nos vies, sans que nous leur ayons demandé quoi que ce soit. Le design n’est pas neutre mais bien notoirement politique ; et ce d’autant plus qu’il flirte constamment avec la domination et qu’il glorifie perpétuellement le système technicio-logisticien. 

Le design est né au XIX e siècle avec la révolution industrielle, processus historique, qui a fait basculer radicalement les sociétés d’un statut à dominante agraire et artisanal vers un statut commercial et mécanisé, statut qui va forger (renforcer et accroître) à son tour la domination capitaliste, et déposséder progressivement les sans-pouvoirs de la maigre prise qu’ils pouvaient encore avoir sur le monde et son décors. Ainsi le design prend-il son essor dans les puissances capitalistes et impérialistes de l’époque : la Grande Bretagne et la France, avant l’Allemagne et les États-Unis. A l’origine du design, nous retrouvons la conjugaison de certains mouvements artistiques qui ont tenté de critiquer la montée de l’industrialisation. Si l’industrialisation impliquait une modification accélérée de leur environnement et des rapports sociaux, ces mouvements artistiques avaient en germe une certaine mission émancipatrice. Ils ont, d’une certaine façon, essayé de rendre, au moins partiellement, plus vivable le monde tel qu’il était en le délivrant de l’ennui d’une réalité quotidienne déjà de plus en plus envahie par la marchandise. 

Ainsi, face à la concentration des individus (population ouvrière) dans les villes et les usines, avec leur lot de misère et d’environnement noirâtre, l’Art & Craft tentera d’améliorer le quotidien de l’ouvrier en lui créant un espace de vie agréable et beau (la maison et l’ensemble des objets qui la meuble), mais aussi en lui proposant un retour à la nature et la réappropriation d’un certain savoir-faire (l’artisanat). Toutefois, si à sa manière ce mouvement critiquait bel et bien le nouveau système de production, il ne manquait toutefois pas de s’y associer en rapprochant les Beaux-Arts et l’industrie, par le biais des Arts appliqués. Les mouvements qui suivront – Art nouveau, Bahaus et la plupart des avants gardes artistiques du vingtième siècle – ne cesseront dès lors de mener cette danse entre répulsion et attirance où vont s’échafauder des concepts abstraits qui, aisément récupérables et aisément récupérés par le système, n’omettront pas d’aggraver l’immondisme ambiant : telle l’idée d’Art total qui s’applique à tous les aspects de la vie, quoique la plupart de ces mouvements avant-gardistes aient d’abord voulu tout autre chose. 

Le design, lui, poursuivra son avancée avec les crises économiques, la société de consommation et les nouvelles technologies. Quant aux artistes, ils ne cesseront d’accroître leur connivence, voire leur entier ralliement, avec le système capitaliste industriel, ce que montre assez bien aujourd’hui le misérable spectacle que nous offre le (pseudo)-art contemporain. Deux exemples frappants et significatifs :

Le designer Brooks Stevens qui popularise, dans les années 50, la notion « d’obsolescence programmée », créée par le riche philanthrope américain Bernard London pour sortir le pays de la grande dépression des années 30. 

– Le Pop Art et son chantre Andy Wharol qui, de sa Factory , n’a fait que glorifier le système ( sous couvert d’en questionner les dispositifs ) en rendant artistiques les produits qui colonisaient en masse nos sociétés et nos têtes, autrement dit en fétichisant la marchandise. Standardisation, sérialité, technologie et marchandisation : le spectacle et sa société à leur apogée…

 Pour lire le texte complet du « Collectif Manuela Rodriguez » :

http://2ccr.unblog.fr/2013/08/08/le-design-un-projet-totalitaire/

Lire également : CINEMA, FILM ET PROPAGANDE …

 « LE DESIGN EST UNE NUISANCE. SEULE SA DISPARITION SAURA NOUS REJOUIR. LE RESTE N’EST QU’AFFAIRE DE BENI-OUI-OUI« 


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20 réactions à cet article    


  • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 22 août 2013 19:45

    Très intéressant, merci !


    • La mouche du coche La mouche du coche 22 août 2013 20:52

      Le design est LE produit de l’ultra - liberalisme et l’auteur devrait se demander pourquoi. 


      • MARMOR 23 août 2013 11:53

        Mr l’auteur mélange tout, le design, l’art nouveau, l’art déco, le pop art....

        Le design a toujours existé, sauf qu’il ne s’appelait pas design. Boulle était un designer, comme Brunelleschi. Toute la création mobilière ou architecturale est passée par un dessinateur, un artiste qui a pensé et crée un modèle et l’artisanat puis les industriels se sont chargé d’en faire des séries. Idem dans l’automobile. Le design est l’art d’apporter du « beau » à un objet usuel. Pensez vous vous que des créateurs de génie comme Giacometti, J.M Frank, J. Royère, E. Boiceau ou A. Arbus fabriquaient eux mêmes les consoles, fauteuils, tables ou enfilades qu’ils ont dessiné ? On peut recommencer à fabriquer des voitures carrées, des godillots en bois et des écuelles taillées directement dans la table ! Sinon, pour le beau, il vous reste Ikea, qui plaît beaucoup car TOUT ce qu’ils fabriquent et vendent a été conçu par des designers. Ou comment faire renter le beau dans le quotidien de la population lambda.

        • fb 23 août 2013 12:17

          Quel fatras ! Mais l’article complet est encore mieux dans le genre. Donc il faut supprimer le design (en français correct on parle plutôt de conception). Tout un programme qui m’évoque Jacques Rouxel :

          « Les shadoks avaient calculé que leur fusée avait 1 chance sur 1000000 de décoller, ils se hâtèrent de rater les 999999 premiers essais. »


          • MARMOR 23 août 2013 13:41

            Il faut quand même oser associer le dessin et le totalitarisme !!! 

            L’artiste crée, dessine, point. C’est ce qui vous permet _ peut-être, mais ça m’étonnerait _ d’avoir chez vous des chaises ou une lampe conçue et dessinée par Starck, et fabriquée par un industriel. Sinon, je ne sais pas si vous auriez les moyens de vous offrir une oeuvre unique et originale... Le mont St Michel en plâtre ou une Tour eiffel dans une boule de neige, peut-être !
            Même les petits bureaux d’écoliers avec banc fixes ont été creés par une designer, et pas n’importe qui, Charlotte Perriand , qui a travaillé avec Janneret, dit Le Corbusier, un grand totalitariste et grand capitaliste celui là aussi. Son « palais » sur les hauteurs de Monaco faisait 3.50m de côté !!

            • tf1Goupie 23 août 2013 13:53

              Quand un Bolchevik de Base comme Robert Gil vient nous donner des leçons sur le totalitarisme c’est toujours un grand moment !!

              C’est ça le charme d’Avox.

              Le Design a vocation à rendre plus beau et plus utile ce qui est fabriqué par l’homme ; mon Dieu quelle horreur... smiley


              • MARMOR 23 août 2013 13:58

                @ TF1, 

                Merci d’avoir situé l’auteur politiquement, je comprend mieux l’absurdité de l’article !!

                • fb 23 août 2013 14:01

                  Ce n’est pas un article mais un tract (mal copié d’ailleurs : aucun respect des paragraphes, ça doit être le côté « no design » du tracteur !).


                • tf1Goupie 23 août 2013 14:49

                  Ben non justement l’auteur respecte une charte de présentation, la même que dans tous ses articles : début de paragraphe en gras, histoire que ce soit plus lisible.

                  L’auteur utilise en fait des principes du design, ce vilain design qu’il voue aux gémonies.

                  Bref il exploite ce qu’il dénigre.


                • MARMOR 23 août 2013 14:12

                  Le plus simple serait de demander à ce monsieur ce qu’il a prévu pour remplacer la conception et le dessin pour la création des meubles, voitures, avions, outils en tout genre, immeubles, bateaux, vélos, etc.....


                  • MARMOR 23 août 2013 14:27

                    Ah la belle époque, où chacun pouvait s’offrir une bagnole - avec chauffeur de préference- Tu achetais le châssis et le moteur chez Rolls ou Bugatti, et tu faisais carrosser chez Chapron, Lecoq ou Mulliner. Puis comme tu avais besoin d’une commode tu allais Chez l’ebèniste du coin t’offrir une Boulle en coeur d’ebene, réhaussé de bronze, de nacre, et d’écaille de tortue, et filets de cuivre dorés à l’or fin ! La démocratie, quoi, merde !


                    • MARMOR 23 août 2013 15:19

                      Toujours pointu dans l’ironie imagée le Captain !!

                      Bonjour Escartefigue !

                      • escartefigue 23 août 2013 15:27

                        Salut Marmor , 


                        je lis les vôtres avec beaucoup de plaisir .


                          • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 23 août 2013 18:53

                            Les recadrages rugueux des commentaires précédents me semblent informatifs et probablement justifiés sur une multitude de points.
                            Le fait est que j’ignore presque tout de l’histoire et de l’actualité du design et même de l’art en général. Je n’ai que des vues très distantes de tout ça.

                            Malgré cela ou à cause de cela, je maintiens que j’ai trouvé l’article intéressant car au-delà des faiblesses soulignées et même si le contenu était effectivement maladroit de mille points de vues, je trouve que la question du rapport entre pouvoir et production de nature « artistique » n’est pas neutre, mais alors pas neutre du tout.

                            De tout temps les puissants se sont alliés les artistes ou les savants et pour ces deux corps de métier s’est toujours posée la question des limites de la collaboration avec le pouvoir en fonction de sa nature.

                            Il me semble pour ma part que, de la même manière qu’un scientifique doit travailler avec le souci que sa recherche ne servent pas plus ou moins directement à la destruction de l’humanité ou de la planète, les artistes et les concepteurs doivent interroger l’usage qui est fait de leurs créations.

                            Or, dans le contexte actuel d’une planéte dévastée par l’exploitation sans borne d’un système capitaliste dont, à notre corps défendant, nous sommes tous les suppôts en raison de notre participation, bon grè mal grè, à un système consumériste qui vise à susciter le désir tous azimuts et puise donc de toutes les manières possibles à cette source éternelle encore incomprise : le beau, je pense que ceux qui sont producteurs de « beau » seraient bienvenus de se questionner sous le rapport de leur « collaboration » à cette machine infernale.

                            Je pense que nombre d’entre nous ont apprécié le côté ravageur du film « Fight Club » qui, dès l’intro, faisait voler en éclats ce flamboyant vernis de beauté sous lequel la société de consommation nous englue et fabrique à tour de bras des zombies de la jouissance éternelle gavés de beaux objets à tous les étages et dans tous les placards.

                            Notre vie est remplie de beaux objets, mais c’est à vomir quand on perçoit le contraste avec l’étendue de la laideur dans les rapports humains.
                            C’est là où la beauté devrait abonder.
                            Elle devrait être aussi dans le rapport avec la nature, dans le rapport à notre propre corps, et même dans le rapport à nous-même.

                            Mais non, la beauté n’est pas là,
                            la beauté sort de l’usine !
                            Et elle nous fait consommer des objets, des images, et, au final, ... des êtres.
                            Beaucoup de femmes en savent quelque chose.

                            Nous sommes juste devenus... dépendants... du beau.

                            Goldman Les choses

                            L’histoire des choses (The story of stuff)

                            Et nous avons perdu en route le bon et le bien, pour nous, les autres et le monde.

                            Les artistes ici ne sont pas seuls en cause, nous le sommes tous, dans nos choix au quotidien, nos choix de consommation ou de consomm’action.
                            Nous pouvons tous agir.

                            Bref, on peut penser ce qu’on veut des articles de l’auteur en général, je trouve qu’ici, quel que soit ce qu’on pourra dire de la qualité du traitement, il a mis le doigt sur un ... beau sujet smiley

                             

                             


                            • fb 23 août 2013 19:47

                              Sauf que l’auteur confond le design (conception) avec l’art, la com’, le marketing (version bullshit), le green washing et j’en passe pour balancer sa propagande habituelle.

                              Bien sûr qu’il y a matière à se poser des questions sur la consommation de masse et des effets désastreux induits, mais taper sur le design de façon frontale est d’une rare stupidité.
                              Le responsable c’est le client qui achète, maintenant c’est difficile d’en vouloir à l’entreprise qui a fait son possible pour concevoir un produit attrayant et si possible ayant le moins d’empreinte sur l’environnement tout en respectant la sécurité lors de la fabrication et de l’utilisation de ce produit. C’est précisément l’objet du travail de design qui doit se faire sous de fortes contraintes dans de multiples domaines.

                              Maintenant et malheureusement dans ces contraintes il y a aussi - parfois - des saloperies comme par exemple la batterie soudée d’Apple et autres obsolescences programmées. Sans parler en amont d’autres actions encore moins avouables.

                              Bref, comme d’habitude, ce genre « d’article » est à côté de la plaque et se trompe de combat.


                            • tf1Goupie 23 août 2013 19:57

                              Le designer sait aussi « designer » des produits recyclables, des immeubles et des voitures plus respectueux de l’environnement, des outils renforçant l’ergonomie et l’adaptation à l’humain, des dispositifs soulageant le handicap.

                              Y a même des designers informatiques qui développent des choses comme les outils de l’Internet.

                              Bref, le designer c’est pas un juste un salaud.

                              Mais au vu de certains commentaires il semble que l’auteur ait très mal expliqué ce qu’est le design, que certains confondent avec l’art.


                              • alinea Alinea 23 août 2013 22:03

                                Luc-Laurent : je suis d’accord avec vous ; sauf peut-être que le beau n’est pas forcément ce que l’on nous propose ; que ces objets provoquent des modes à coups de millions de dollars de pub, oui, qu’ils soient beaux, c’est une autre histoire !
                                Donc j’ai trouvé l’article intéressant qui pointe à mon sens une vérité jamais dite, ce qui ajoute encore à l’intérêt.
                                Et sûr qu’il n’y a aucun mélange vu que l’art contemporain trempe totalement dans le libéralisme et s’est détaché de sa mission et même de sa définition...disons que, comme tout le reste, il arrive au bout de l’absurde de l’expression individuelle et du mercantilisme.


                                • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 24 août 2013 18:49

                                  Merci Alinéa pour votre soutien.

                                  Moi aussi, bien d’accord avec vous sur l’art contemporain. Je ne jetterai pas le bébé avec l’eau du bain. Mais l’eau est vraiment sale. Il y a beaucoup de m...

                                  Pour le beau, par contre, au moins parce que je le perçois, je trouve que le design produit pas mal de « beau », même si, là encore, il y a beaucoup de déchet smiley


                                • bert bert 24 août 2013 02:02

                                  rien de tel qu’un bel objet

                                  avec un bon disque du Velvet Underground de 68 smiley


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Robert GIL

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