Le fascisme médiatique pleure sa star

Il était presque 19 heures lorsqu’en zappant sur les chaînes les plus regardées, TF1, France 2, M6, les téléspectateurs ont pu voir un programme unique, enfin, disons consacré à une même actualité, la cérémonie en direct, hommage à Michaël Jackson. Auparavant, la très sérieuse émission C dans l’air s’est penchée sur ce phénomène planétaire. Quelques banalités ont été échangées et certainement pas des vérités. Il a été dit que cet élan était populaire et que les gens exprimaient un besoin irrésistible de communier en cette ère d’individualisme. Est-ce vraiment la bonne interprétation ? Peut-être que oui, mais alors on peut en dire autant et même plus de la messe dans une église ou des récitations du Coran dans une mosquée. Je ne crois pas qu’en communiant autour d’une star, les gens entrent en relation les uns avec les autres. Tout est artificiel et quand on admire une star, on n’est jamais qu’avec la star et pas avec les autres. Le phénomène est similaire avec l’adhésion d’un supporter à une équipe de foot. Aller au stade lui procure plus de sensation que de baiser avec sa femme. Partager la dévotion face à une star, c’est comme partager la vénération d’un gourou. On n’est pas en relation avec l’autre, pas en communion mais en con fusion !

Toujours est-il que les rédactions ont mobilisé quelques spécialistes en jacksonnerie et autres pipoleries. Nikos Alliagas pour la Une, Christian Audigier et Manu Katché pour la Deux, Laurent Boyer et Philippe Manœuvre pour la Six. Cherchez le point commun. Facile, l’un anime la star ac’ et deux autres ont été aux commandes de la nouvelle star. Il est naturel en somme que les fabricants de jeunes pousses promises au succès soient habilités à parler de la plus king parmi les kings des célébrités planétaires. Limousines se succédant, vedettes, de la télé, du cinéma, de la chanson, du sport. A travers cette cérémonie, ce monde d’en haut très narcissique est venu s’auto célébrer en célébrant Michaël Jackson. Ce monde domine les gens grâce à des artifices en jouant sur les émotions. Cette domination heureusement n’est pas politique. Un excité du concept dirait ceci : La popularité des stars, symbolisée par le king Jackson, ressemble à une sorte de « nazisme a-politique » mais esthétique. Cette célébration planétaire nous indique une sorte de naufrage humanitaire. L’importance prise par cet événement laisse augurer une soumission des gens face à l’ordre financier, médical et militaire planétaire.

Plus raisonnablement, on se demandera quel exploit, quel progrès, quel bienfait pour l’humanité, a été réalité par M. Jackson. Le bilan est maigre. Des chansons, des disques vendus sur la planète, des spectacles bien ficelés mais rien de bien transcendant. En fin de compte, la jackson-mania risque de symboliser le naufrage de l’humanité, comme Michel Ange en incarna la naissance. Décrépitude mentale des sociétés post-modernes formées par des individus illettrés du concept, inaptes à déchiffrer le sens du monde, pénétrés de sensiblerie et d’émotionnel au point de vénérer un chanteur et de le mettre sur un tel piédestal alors que des tas d’artistes créateurs, de savants, de politiciens, si si, d’inventeurs, de bienfaiteurs, essayent d’apporter à l’humanité quelque progrès. Mais soyons indulgents avec ces pauvres masses en déshérence de raison, car ce sont les mass médias qui ont fabriqué ces cerveaux décomposés, ces individus pénétrés par l’émotion plus que par la raison. Cette célébration planétaire retransmise par les chaînes publiques, ici en France, ne sert pas l’intérêt public, ni le citoyen, et ne répond pas à une demande expresse des Français, exceptés quelques fans et curieux. Pas la majorité ni le furieux que je suis. A travers cette figure de la pop, c’est tout un système qui s’auto célèbre ce 6 juillet 2009. Un système qui bouffe le cerveau des gens en le contaminant avec des produits insipides mais flattant un certain sens de la danse faussement désinvolte, de la mélodie, de l’esbroufe, de la mise en scène faussement nonchalante. Le jour où l’humanité s’éveillera, elle enverra dans le décor les Madonna, U2, Mariah Carey et autres Britney de music-hall masse médiatisé. La daube musicale est un plat qui se bouffe par les oreilles et qui se chie dans la fosse sceptique.

Pour l’instant, on verra en œuvre dans cette cérémonie le symbole d’une humanité déchue dont la déchéance a fait le triomphe d’un système des médias, de l’industrie, des vedettes, des journalistes révérencieux, des financiers. Les humains sont pris comme les adeptes d’une secte amenée à consommer et se masser devant des stars flattant leurs désirs émotionnels. Comme dans une secte, il est question d’oublier le monde réel, avec ses joies, peines, souffrances et efforts, pour espérer un ersatz de paradis. Il n’y a pas de tristesse car le paradis continue avec les affaires et le show go on. Nous comprenons bien la dimension planétaire de cette œuvre de décérébration qui fera des citoyens les cibles de tous les produits artificiels de stars et de toutes les peurs, notamment celle du réchauffement climatique. De Jackson à Al Gore il n’y a qu’un pas. Et un point commun, le naufrage de l’humanité transformée en vaste secte menée par les gourous et autres vedettes. D’ailleurs, la connivence se dessine. Combien de vedettes impliquées dans ces combats du paquet énergie climat mais qui n’hésitent pas à se balader en jet privé ? Bref, n’allons pas pilonner ce monde de paillette et d’escroquerie des émotions jusqu’à la nausée. L’humanité se flingue, elle n’a pas les bonnes représentations, écouter Jackson ou s’exciter sur la Play station, aucune différence. Va donc sur la Woui, tu ne seras qu’un zombie ! Les puissants ont bien joué, guidé par la ruse du marché. Les dominants empochent les dividendes. La mort de Michaël Jackson symbolise bien ce naufrage amorcé dans les années 1980 et dont les signes se dessinent à l’occasion de tous ces drames humains planétaires, ces enfants massacrés, ces révoltés muselés, ces injustices économiques. Mais c’est si bon de célébrer le Michaël qui a tant donné aux Noirs. Evidemment, on oubliera les massacres au Rwanda, le Sida en Afrique et son sous-développement, les statistiques américaines sur les détenus d’origine black. Que de bonnes litanies et consciences déclamées ce soir de grand’messe au JT de la deux qui, comme la Une et la Six, ont donné en direct l’hommage de Steve Wonder dont on a découvert qu’il s’égosillait et chantait comme un naze. Horrible, carrément inaudible le Wonder sur son piano. La musique noire, c’est bien plus Ray Charles et Jimi Hendrix, Carlos Santana et Chick Corea, que ces daubes qui se sont produites et ont permis de se rendre compte d’une chose. La musique américaine qui se vend est nulle à gerber, une horreur, de Madonna à Britney et Eminem. Une musique pour tympans de chiottes. Et nos médias français de se prosterner en sacrifiant le JT pour cette sinistre célébration en hommage à une minable époque de fric, d’artifice et de paillette, de gardes du corps musclés, de managers sans vergogne, de financiers sans morale.

Quelle évidence. Une Amérique dégénérée qu’on a vue en direct. Comme disait l’autre, il y a la France de Guy Lux et l’autre France. Il y a aussi l’Amérique de Nader, de Dylan, de Berkeley, de Kerouac, de Vidal, de Pynchon, des Doors etc. et cette Amérique de Jackson et Madonna. Dire que nos JT nationaux se sont prosternés pour vénérer cette Amérique sans consistance que tout citoyen normalement équipé d’un système cognitif se doit de détester. Comme du reste l’Allemagne d’une autre époque. Cette Amérique et sa goinfrerie financière, qui dilapide les ressources, vit aux crochets à crédit du monde et n’apporte plus rien d’intéressant, gaspillant des milliards de dollars pour renflouer des banques qui déjà, calculent les bonus des traders et dirigeants pour Noël 2009. La mort de Jackson, ce n’est pas ma religion, et je proteste auprès du CSA pour cette émission religieuse ayant occupé 45 minutes des JT de la Une et la Deux ! La mort de Jackson c’est la démonstration d’une secte médiatique aussi dangereuse dans ses méfaits que la scientologie, qui à travers ses vedettes, rend débiles nos enfants, leur lave le cerveau de cette musique sans odeur ni saveur, faite pour ensorceler les âmes et écarter les citoyens des vrais questions politiques qui se posent. Mais je m’égare sans doute, déjà certains disaient en 1972 que les Stones et Led Zep commerçaient avec Satan. Oui, mais au moins, ils savaient faire de la musique et des textes.