Le FN est-il un parti fasciste ?
Peut-on seulement débattre de la nature du FN ?
LE FN EST-IL UN PARTI FASCISTE ?
Jacques-Robert SIMON
Toutes ou la plupart des discussions politiques avec un membre du Front National (FN) finissent par des invectives, l’un traitant l’autre de fasciste, l’autre traitant l’un de décadent. Au delà des insultes quelle est la part de vrai dans ces assertions.
Les thèmes de l’immigration et de la sécurité sont ceux qui sont le plus présents dans les débats, ils servent d’ailleurs de marqueurs dans les deux camps. Prétendre que les mouvements de population doivent être régulés n’est pas un non sens si l’on veut localement préserver un certain type d’organisation sociale. D’ailleurs tous les responsables politiques l’ont pratiqué de tout temps. Prenons par exemple les Etats-Unis, devenus une référence en tout domaine. ils ont érigé une « barrière » de 1300 km pour diminuer l’immigration mexicaine. L’efficacité de cette mesure fut d’ailleurs très relative car le flux ne diminua que peu. Si l’on considère l’immigration simplement comme des flux de population à réguler, sans y associer une posture électorale, un débat est parfaitement possible.
Le respect des institutions et de l’ordre qu’elles impliquent relèvent bien évidemment du pouvoir. Le thème de la sécurité ne devrait pas non plus engendrer de polémiques. Par contre, si on associe étroitement immigration et insécurité de très dangereux horizons se profilent. Mais nous nous contenterons de commenter les faits, pas les intentions ni les messages subliminaux.
Le véritable désaccord entre le FN et les partis de gouvernement est d’ordre économique. Après avoir longtemps proposé une ligne libérale, l’arrivée de forces nouvelles a permis au FN de mettre en avant un ensemble de propositions qui restituent à l’état un rôle important dans le fonctionnement de l’économie, la politique industrielle, la maîtrise de sa monnaie ; de fait un choix colbertiste. Le reproche principal fait aux autorités actuelles est qu’ils n’ont plus de pouvoirs. Le gouvernement tiraillé entre les multiples instances le chapeautant n’a effectivement plus que de minimes marges de manœuvre, il faut donc se plier aux directives Européennes, au FMI, à l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) et aux multiples autres organismes qui « organisent le bien-être économique et social partout dans le monde ». Les élus locaux servent essentiellement à occuper le devant de la scène des médias, les décisions se prenant ailleurs à moins d’un volontarisme hors du commun. Ainsi un économiste appartenant à la norme des économistes (Directeur de recherche au CNRS, Professeur à Sciences Po) a écrit récemment :
« … si la Corée avait suivi les préceptes de la théorie de l’avantage comparatif, de la libéralisation des échanges et du refus de promouvoir l’émergence de champions nationaux, elle serait aujourd’hui une nation de cultivateurs de riz, et non le leader mondial de l’internet haut débit. »
La théorie de l'avantage comparatif prétend que chaque pays a intérêt à se spécialiser dans la production du ou des biens pour lesquels il dispose d'un avantage comparatif par rapport aux autres pays et à acheter les biens qu'il n'a pas produits. C'est une théorie en faveur d'une division internationale du travail et du libre-échange.
La Corée a donc fait au moins partiellement « autrement » grâce à une très forte implication de l’état dans le monde socio-économique. Le modèle de développement sud-coréen est de fait basé sur des liens étroits entre le gouvernement et les milieux d'affaires, y compris par le crédit dirigé, les restrictions aux importations, le financement de certaines industries. Ces propos ont évidemment leurs limites, une analyse économique et politique d’un pays ne peut pas se résumer en quelques lignes. Il est tout aussi évident que les dirigeants actuels ne sont ni sots ni foncièrement malfaisants, ils connaissent donc cette alternative et seraient prêts à l’appliquer si ils la pensaient possible et efficace. Mais ce qui est possible en Corée ne l’est pas forcément en France.
La capacité décisionnelle d’une Nation dépend principalement de la cohésion de sa population et de son acceptation du destin qu’on lui propose. Le FN est-il capable de rassembler une très large majorité de Français afin d’emprunter une autre voie que celle actuellement prise ? On peut largement en douter si l’on maintient un cadre démocratique. Le fascisme associe populisme, nationalisme et totalitarisme au nom d'un idéal collectif suprême. Il est plus qu’incertain que les Français acceptent très majoritairement les thèses du FN pour créer cet « idéal collectif ». Par voie de conséquence, soit que le FN abandonnerait tout ou partie de ses propositions qui représentent une véritable alternative aux axes actuellement empruntés, soit qu’il s’achemine vers un état autoritaire, voire totalitaire.
Cependant de trop prégnantes références au passé ne doivent pas cacher que, de nos jours, la politique menée (ou plutôt subie) conduit à sacrifier une classe sociale, celle de personnes prétendument peu qualifiées, en fait celles qui n’ont pas suivie une scolarité longue et laborieuse. C’est elle qui est en concurrence avec les personnes en provenance d’autres pays, c’est elle qui ne se sent pas représentée par les élus, c’est elle qui ne veut pas être humiliée à coup d’allocations, de subsides ou de secours. Elle veut avoir la possibilité de travailler de ses mains sans pour cela devoir en être honteux. Incidemment, les plus grandes découvertes ont été faites par des Hommes se livrant au travail manuel. Mais ceci est une autre histoire.
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