Le gouvernement français abdique : on décide à sa place !
La réforme sur la protection des majeurs date du 5 mars 2007 et doit s’appliquer le 1er janvier 2009. Seulement voilà, le gouvernement n’a pas pris les décrets d’application. Préférant ostensiblement les banquiers aux canards boîteux, il n’a que faire de cette loi. Par conséquent, on se passera de gouvernement et le pouvoir réglementaire sera exercé ailleurs. C’est l’ANAS qui a décidé de prendre des mesures en lieu et place du gouvernement qui s’en fiche !
Le gouvernement est bien trop occupé à chôyer les riches et à soigner sa com’ par des réformes déclarées urgentes comme la réforme de l’audiovisuel ou de l’éducation, pour avoir à se soucier de faire appliquer les lois que le Parlement a votées !
La loi n°2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs a été adoptée sous la présidence Chirac. C’est une réforme indispensable mais l’idéologie de la rutpture commande, semble-t-il, de mépriser ce qui est utile et dont on ne peut revendiquer la paternité avec force tapage médiatique.
Partant de cette idée, les lois de la République ne s’appliquent que si elles sont l’oeuvre du gouvernement actuel et si elles peuvent apporter à ce gouvernement quelque gloire pour ses ministres et son chef. La réforme de la protection juridique des majeurs ne fait pas partie de ces réformes gratifiantes. De plus, elle concerne les laissés-pour-compte, ceux qui ne font pas la richesse du pays.
Par conséquent, deux ans après, seul un décret est paru récemment. Le décret 2008-1276 du 5 décembre 2008 modifiant le Code de procédure civile et qui fixe le cadre du nouveau dispositif juridique qui regroupe, pour rappel, les mesures judiciaires (sauvegarde de justice, curatelle et tutelle) et une mesure conventionnelle, le mandat de protection future. Le régime de la nouvelle mesure d’accompagnement judiciaire est également déterminé.
Tous les autres décrets sont encore en attente. Il manque les décrets relatifs notamment aux modalités de financement, aux conditions d’exercice des mandataires judiciaires ou encore à la mesure d’accompagnement social personnalisé.
Certes deux décrets étaient parus peu après la loi : celui du 30 novembre 2007 relatif au modèle de mandat de protection future sous seing privé et celui du 23 novembre 2007 modifiant le Code de procédure pénale et relatif à la poursuite, à l’instruction et au jugement des infractions commises par des majeurs protégés (dispositions judiciaires qui n’ont pas de véritable dimension sociale). Mais, depuis, plus rien ! Or la réforme s’applique le 1er janvier 2009 !
Le gouvernement a donc abdiqué pour ce qui est de réglementer la mise en application de la réforme des majeurs. Mais comme la nature a horreur du vide, c’est l’ANAS qui va donc décider à la place du gouvernement. L’ANAS, c’est l’Association nationale des assistants de service social et elle peut bien intervenir, vu que le gouvernement ne fait rien et, d’ailleurs, n’y connaît rien et ne veut pas connaître...
Voici donc ce qui est décidé :
Comme beaucoup de départements ne savent comment faire pour la mise en place la mesure d’accompagnement social personnalisée (Masp) au 1er janvier 2009, date d’application de la réforme, l’ANAS décide de diffuser "analyses et préconisations". Mais, comme l’ANAS n’est pas le gouvernement, elle veut bien prendre sa place pour faire appliquer les lois de la République mais n’en fera pas la propagande. Bonne pomme, elle veut bien faire son boulot bénévolement mais pas en faire l’éloge. Elle s’autorise donc évidemment à dénoncer le "resserrement des espaces pour solliciter librement une aide, dans un cadre non contraint et où la personne peut dire en sécurité un problème sans qu’elle se trouve prise dans une spirale administrative qui la soumette à un contrôle et à une attitude de soumission".
Et comme le gouvernement n’a pris ni décret ni circulaire pour expliquer la réforme, c’est encore l’ANAS qui vient donner SON analyse juridique du dispositif créé par la loi du 5 mars 2007. Bien entendu là encore, pas question de vanter les mérites de la réforme et de se limiter à la décrire. Au contraire, l’ANAS en fait une libre critique. Et elle peut d’autant mieux se le permettre qu’en face, ou si vous préférez, là-haut au gouvernement, personne ne la contredit. Ainsi, l ’ANAS émet une grande réserve à l’égard de la Masp.
La note se conclut par une série de recommandations. L’ANAS demande (disons "décide" !) que la Masp "s’appuie sur la compétence des professionnels". En effet, "l’accompagnement proposé par la Masp est déjà à l’oeuvre dans le cadre des services sociaux départementaux. Les professionnels savent travailler les questions d’endettement et de santé. Ils savent aussi accompagner les personnes vers une des formes d’accompagnements ponctuels".
L’Anas demande -pardon décide aussi- que les départements "différencient l’espace d’aide contrainte et celui d’aide librement choisie", en créant deux services distincts selon la nature de l’intervention.
Enfin, l’Anas invite "les professionnels à refuser de proposer une saisine du juge d’instance en cas de refus par l’intéressé du contrat d’accompagnement social personnalisé ou de non-respect de ses clauses".
Eh oui, c’est ainsi que les choses se passent au royaume de France. Le Gouvernement a pris la place du Parlement et donc le Gouvernement n’a plus le temps ni le goût de s’occuper de faire appliquer les lois votées par le Parlement d’avant. Rupture oblige !
Ceux qui voulaient un coup d’Etat pourraient s’en satisfaire, sauf que ce n’est pas le peuple qui décide mais des associations professionnelles. Donc, pour une meilleure démocratie, je vous invite, Citoyens, Citoyennes, à fonder une association que nous appellerons l’ANANAS et qui se chargera d’appliquer les réformes votées et dont le Gouvernement ne veut pas ! Fruité n’est-ce pas ?
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