• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Le gouverneur de la Banque de France s’illusionne-t-il, ou (...)

Le gouverneur de la Banque de France s’illusionne-t-il, ou cherche-t-il à nous leurrer ?

En Octobre, le PS réclamait une commission d'enquête sur les « fautes et les errements » qui ont conduit au scandale de Dexia, le premier sauvetage bancaire de la crise de l'euro (lien). Ceci intervenait au moment où l'Autorité Bancaire Européenne tranchait en faveur de recapitaliser les banques (lien), après des mois de tergiversations pendant lesquels le gouverneur de la Banque de France (BdF), Christian Noyer (CN), s'est fait le spécialiste de (tenter) de rassurer les marchés sur la solidité des banques, et plus généralement de la zone euro, usant d'arguments dont la maladresse n'a pas échappé à certains médias anglo-saxons. Il défend catégoriquement le modèle bancaire français mais avec des arguments qui semblent porte-à-faux. Ce n'est pas parce que ce type de discours arrange certainement les grands groupes bancaires français qu'il faut nécessairement en déduire que son indépendance de jugement est compromise, quand bien même les médias anglo saxons —encore eux— disent exactement cela des élites françaises. Alors nous apporterons quelques élements d'information et soulèverons des questions, en espérant qu'il ne faille pas attendre que la crise de l'euro prenne un virage pour le pire, avant que ces mêmes élites (renouvelées ?!) ne leur reconnaissent de la pertinence...

Alors que le gouvernement français déployait en 2009 des mesures exceptionnelles, y compris de renflouement des fonds propres, pour sauver les banques, prenant ainsi le relais des interventions d'urgence de la BCE pour les refinancer, CN déclarait :
Les banques n'ont absolument pas besoin de fonds propres, ni d'être recapitalisées
La même année, son mandat à la BdF a été renouvelé, et l'année suivante il devenait également le président de la Banque des Règlements Internationaux (BRI) (1).
 
Devant une commission parlementaire, en 2008, il a prétendu que la BdF méritait la comparaison avec la BRI, qui s'était distinguée par sa prescience avant la crise, mais n'avait pas été entendue par les dirigeants des banques centrales. Nous avons recoupé cette revendication avec le document supposé l'attester, et sommes arrivés à la conclusion que « [t]ous éléments d’analyse [de la BRI] y figurent... », comme il a dit, mais, malheureusement, à l'exception de l'essentiel.
 
Toutes ces années, en paroles, mais aussi au travers, par exemple, de la commission bancaire qu'il a dirigé en 2008 (il est le premier membre de droit de son collège), il a donné l'impression d'être un défenseur zélé de la thèse selon laquelle, puisque les banques universelles françaises ont bien résisté à la crise, c'est la preuve que le modèle est le bon. Or, la raison de l'attachement des grands groupes bancaires au modèle de la banque universelle c'est que, conserver la banque de détail en leur sein, c'est une assurance tout risque. Comme c'est une fonction vitale de l'économie, l'état, et donc le contribuable, viendra les aider, quoiqu'il en coûte. Le sujet ayant fait réapparition suite aux réformes, outre-atlantique et outre-manche, CN a déclaré
Je ne crois pas un instant que le Glass-Steagall Act soit un remède à la crise

C'est une prise de position audacieuse, sur une question stratégique, tant elle contraste avec ce que nous tenions, avant qu'il ne s'exprime sur ce sujet, comme le consensus des grands banquiers centraux (Volcker, Mervin King). Quoiqu'aient pu être les erreurs idéologiques de ces derniers par le passé, il faut au moins se satisfaire qu'ils souhaitent remettre à plat le modèle d'organisation du système bancaire. Pas CN, et pas, non plus, le lobby bancaire. Il n'est pas concevable, bien sûr, qu'il n'y ait pas une étude de la BdF étayant l'opinion tranchée de CN mais, pour l'instant, nous n'avons pu la trouver... Heureuse surprise, toutefois, survenue quelques temps après le premier jet de cet article (5 Novembre), Michel Barnier a déclaré souhaiter que la Commission Européenne étudie l'opportunité d'une législation de type Glass-Steagall en Europe (2).

Une autre des affirmations de CN, dans une émission de radio récente, laisse perplexe :

Les bonus [...] me choquent un peu. Mais autant je suis contre la banque casino d’une façon générale [...] que je pourchasse dans les banques françaises [...] car ce sont toutes les activités de marché qui sont dangereuses.

Cette déclaration appelle plusieurs interrogations, ne serait-ce que sur la signification, dans ce contexte, du mot « pourchasse ». Elle intervient au moment où il est révélé que les banques gonfent artificiellement leurs résultats, alors que la transposition dans le droit français, de la directive européennes des bonus est jugée « permissive » par un député européen.

Nous allons maintenant d'approfondir ce qui précède dans l'ordre à peu près chronologique.
 
*

Dès 2003 la Banque des Règlementation Internationaux (BRI) et le Fond Monétaire International (FMI) en 2005 ont mis en garde la Réserve Fédérale (Fed) et de la BCE contre le risque d'explosion d'une bulle immobilière
 
L'exploit de la BRI, de prévoir la débâcle des subprimes aux Etats-Unis, et la crise globale qui en résulterait, est relaté en détail dans un article de Der Spiegel (1). En voici un extrait (traduit de l'anglais) :
En Mars 2006 la BRI réitérait, dans son rapport trimestriel, de graves risques [d'effondrement] dans le marché du crédit hypothécaire « subprimes ». L'investissement étranger [alimentant la bulle] dans ce secteur avait grimpé en flèche, notaient les auteurs. Or, le marché de l'immobilier avait commencé a montrer des signes de faiblesses et les investisseurs s'exposaient à des pertes non-conventionnelles. [...] Quelques mois plus tard, en Décembre, la BRI relevait que le marché de la titrisation de prêts hypothécaires « subprimes » avait drastiquement chuté au dernier trimestre. La perte de confiance se matérialisait.

Quant au FMI, on pourra consulter un profil dressé par le Wall Street Journal (2).

(1) Global Banking Economist Warned of Coming Crisis... (2) Mr. Rajan ...

 
La Banque de France avait-elle fait, juste avant la crise, des analyses méritant la comparaison avec la BRI, comme le revendique son gouverneur ?

La Banque de France est une succursale de la BCE, mais elle publie aussi ses propres analyses, souvent, mais pas seulement, pour apporter un point de vue particulier à la France. Devant une commission parlementaire relative à la « crise financière internationale » (1), fin 2008, CN a dit :
Quant à la chronologie des événements, on pourra se reporter au numéro de décembre 2006 de la Revue de [S]tabilité [F]inancière de la Banque de France. Tous les éléments d’analyse y figurent : sous-évaluation des risques, appétit excessif pour le risque, problèmes intrinsèques au mécanisme de titrisation, manque de transparence, faible liquidité des produits structurés, incertitudes entourant leur valorisation. L’analyse existait bel et bien : sans doute aurait-il fallu lui donner plus d’écho. Au demeurant, les travaux de la Banque des [R]èglements [I]nternationaux aboutissaient aux mêmes conclusions. Il convient donc de réfléchir aux moyens d’exercer une influence plus forte ex ante.

Nous avons consulté la page internet Revue de Stabilité Financière à l'onglet 2006 (2). Elle contient une section nommée Chronique, et des études. Parmi ces dernières, seul le document Liquidité et stabilité financière aurait pu correspondre à la description ci-dessus. Nous avons lu ses principaux résultats, mais ils ne contenaient pas ce que nous cherchions. Nous avons aussi lu la Chronique qui aborde deux questions :

Les risques sont-ils correctement évalués par les marchés financiers ?
Les mécanismes de transfert de risque sont-ils suffi samment robustes ?

Il faut un certain temps pour comprendre que les tournures indirectes du type « les marchés pensent que... » ne désignent pas l'opinion d'autrui, mais bien ceux des auteurs qui cherchent par ce moyen à se couvrir. On arrive néanmoins à déchiffrer que la réponse, pour la première, était que les primes de risques du marché étaient faibles mais que le « scénario de croissance et d'inflation maîtrisée » était jugé crédible. La deuxième met en balance la résilience à un choc, permise par les mécanismes modernes de transfert de risque, avec des « interrogations qui demeurent ». Y sont énumérés des généralités sensées (opacité...), mais il n'y a toutefois rien de spécifique qui rappelle le risque majeur identifié par la BRI, résultant de l'accumulation monumentale de dettes hypothécaires et financières, aux Etats-Unis (mais aussi, dans les faits, en Espagne et en Irlande)...

CN avait donc raison de dire « [t]ous les éléments d’analyse y figurent », sauf qu'il manquait l'essentiel. Donner à cette revue « plus d'écho », mais sans remédier à cette lacune cruciale, aurait été assez futile.

Alors même que le département de recherche du FMI s'était distingué, l'échec à traduire en actions ses recommandations fît l'objet d'une évaluation interne, sous la direction de DSK (3). En a t-il été de même, à la BdF, depuis le temps ? Autrement dit, quelles sont les « réflé[xions] aux moyens d’exercer une influence plus forte ex ante » qu'il préconisait ?


(1) Rapport d'information... (2) Revue de stabilité financière de 2006... (3) IMF fails...


*

Les principales banques universelles françaises en 2007, 2008, 2009 : pertes liées à des fraudes massives, des investissements dans les sub-primes, des engagements en produits dérivés avec des contreparties douteuses, assèchement de leurs liquidités nécessitant leur mise sous perfusion par la Fed et la BCE, et sauvetage par le contribuable américain et français.

Quelle banque détient le record historique de pertes résultants d'opérations sur produits dérivés frauduleuses ? Une banque universelle française, la Société Générale. 5 Milliards d'euros de pertes, en Janvier 2008. Quelle autre affaire ressemblant à celle de Kerviel a été éclipsée par le début de la crise des sub-primes, en 2007 ? Une banque universelle française, le Crédit Agricole (Calyon), avec une perte de 250 millions d'euros, résultant d'opérations non autorisées sur des produits dérivés (1). Y a t-il eu une enquête sur les possibles carences dans les systèmes de surveillance ?! La BPCE, elle, au travers de sa filiale Natixis subit une perte de près de 750 millions d'euros dans des conditions similaires en 2008 (2).

Quelle est la banque impliquée dans le deuxième évènement majeur de la crise de 2007, après les ennuis révélés de Bear Sterns, fin Juillet, qui a déclenché les interventions jointes de la Banque Centrale Européenne et de la Réserve Fédérale ? Une banque universelle française, BNP-Paribas, qui était impliquée dans les sub-primes (3). Quels sont les points communs de ces banques ? Ce sont des banques universelles, c'est à dire celles qui ont des activités de marché, et, pour trois d'entre elles, une présence internationale conséquente.
 
Quels ont été les établissements qui, s'étant portés contrepartie des contrats de produits dérivés de crédits avec AIG, ont le plus bénéficié du plan de sauvetage du leader mondial de l'assurance, en 2008, par l'administration fédérale américaine ? Les banques universelles françaises présentent aux États-Unis, pour 19 milliards de dollars sur un total de 59 alloués par l'état fédéral au sauvetage de AIG. Ce montant de 19 milliards est-il significatif ? Il représente les deux tiers du montant du plan de relance, la même année, pour contrer les effets de la crises, accordé à l'infrastructure routière et ferroviaire, soit 27.5 milliards de dollars, pour l'ensemble des Etats-Unis (4).
 

La seule banque qui n'a rien demandé et rien reçu du gouvernement, au milieu de la crise, est aussi la seule banque exclusivement de détail, la Banque Postale.
 
Quel est le montant du plan de soutien aux banques françaises, par l'état l'état français, décidé en Janvier 2009 ? 360 milliards, dont 40 en recapitalisation, et 340 milliards en prêts, aux établissements bancaires qui en font la demande. Six banques ont bénéficié de la première tranche (10 milliards d'euros) du plan de sauvetage (1). La Banque Postale, elle, n'a rien reçu, et donc rien demandé. La Banque Postale est aussi la seule banque exclusivement de détail, c'est à dire offrant les services classiques aux particuliers et aux PME.


Et le gouverneur de la Banque de France en pense quoi ?
 
Au moment même où le plan de sauvetage était annoncé, CN affirmait de son côté :
Les banques n'ont absolument pas besoin de fonds propres, ni d'être recapitalisées. Le seul objectif c'est d'accompagner le financement de l'économie

Si l'objectif était tel que prétendu dans cette citation, l'argent aurait été alloué à l'économie hors banques, les PMEs par exemple, c'est évident. Le compliment que l'on peut faire à cette déclaration, c'est qu'elle n'est ne contredit pas l'esprit du rapport de la commission bancaire de 2008, qu'il a dirigé (1). Sa philosophie est donnée par ce paragraphe :

Ce contexte souligne une nouvelle fois l’importance fondamentale d’une gestion efficace de l’ensemble des risques, dont la Commission bancaire et son Secrétariat général ont continué en 2008 de faire un objectif central

Le rapport peine à mettre en évidence, dans un rédaction limpide, les leçons essentielles de la crise, comme cet exemple tiré d'un document de la Banque Centrale du Canada :

En premier lieu, et surtout, il est clair que le système, dans son ensemble, n'est pas assez capitalisé.

A la place, on trouve un titre de section intitulé

Malgré l'intensité de la crise, la structure financière des banques françaises est restée solide 

qui est contredit dans le développement qui y fait suite :

[La] crise de confiance à l'égard des banques [...] a conduit le gouvernement français [...] à la création de la Société de prise de participation de l'état (la SPPE), laquelle, à fin décembre 2008, a souscrit pour 10,5 milliard d'euros d'instruments de fonds propres de base émis par les banques, sous la forme de titres subordonnés.

Prenons un autre exemple :

Les banques sont exposées aux hedges funds, à travers leurs activités de financement ou d’investissement, et lorsque les fonds alternatifs jouent le rôle de contrepartie de marché. En particulier, la fraude relative au fonds Madoff a occasionné des pertes substantielles à plusieurs établissements et démontré avec acuité la nécessité de développer une analyse fine des fonds, des produits et des collatéraux reçus en garantie dans un domaine dont l’opacité est une des caractéristiques.

L'« analyse fine des fonds » préconisée, on peut la mettre en perspective avec cette nouvelle, des années après les faits, relatée dans le journal Le Monde (2),

Le liquidateur Irving Picard, chargé de récupérer des fonds pour les victimes de l'escroc Bernard Madoff, a porté plainte contre la banque française BNP Paribas, l'accusant de receler [un milliard] de dollars placés par le fonds rabatteur Harley Internaional, basé aux îles Caïmans.

Autrement dit, il aurait mieux valu se demander s'il ne faut pas supprimer certaines activités, pour lesquels il n'existe pas de « gestion efficace » des risques. Cette réflexion manque cruellement. En particulier, le débat sur la ré-actualisation de Glass-Steagal, c'est à dire, entre autres, la séparation entre la banque de détail et les autres activités, notamment celles de marché, paraît absent. Or, c'était un sujet omniprésent, dans les discussions d'experts, en 2008, outre-manche et outre-atlantique, et a depuis été consignée dans les réformes là bas, bien que sous une forme moins drastique que l'original.

Enfin, le document accorde une part importante à la méthodologie des stress tests, qui, c'est un détail, utilisent un outil notoirement inadapté, la value-at-risk. Rappelons seulement que la banque déchue Déxia obtînt un score excellent il n'y a pas si longtemps, suscitant cette ironie de L'Expansion : la banque qui a tout raté, sauf le stress test (3). 

(1) Commission... (2) Affaire Maddoff... (3) La banque qui a tout raté...


*
 
En 2009, la BRI, qui avait prédit l'éclatement de la bulle immobilière de 2007, annonce cette fois que les dettes souveraines seront les prochains actifs toxiques (1).

Plutôt que de tirer les leçons de la crise de 2007—, surtout compte tenu de la mise en garde de la BRI, les banques françaises, y compris par l'entremise de grands commis de l'état (2), freinent les nouvelles règles de Bâles III censées les rendre plus solides (3).

Des insuffisances de liquidités se déclarent chez les grands groupes bancaires français à l'été 2011, aux Etats-Unis, nécessitant la perfusion de la BCE, une saga qui se poursuit encore à l'automne (4). En sus de l'exposition aux dettes souveraines grecques, aux risques prévus par la BRI en 2009, certaines sources font état de pratiques de refinancement scabreuses, spécifiques aux établissements français. (5)
 
(1) Could sovereign default be the new subprimes ? (2) Bâle III pourrait fausser ... (3) Struggling French Banks Fought To Avoid Oversight (4) Un petit french funding problem... (5) The Economist : Fears over... : French banks are particularly reliant on potentially flighty short-term wholesale funding, rather than on stickier deposits or long-term debt ...

Le gouverneur de la BdF martèle inlassablement que tout va bien, c'est le marché qui se trompe.
 
En Août, Lagarde a dit tout haut ce que chacun pensait tout bas : les banques sont fragiles et doivent être recapitalisées. CN, dans une série de communiqués, s'est fait le spécialiste incontesté du déni de re-capitalisation (traduit de l'anglais) (1) :
Les banques françaises sont solides, résistantes, et bien capitalisées dit le gouverneur de la BdF dans un communiqué aujourd'hui. Elles sortent indemnes des récentes chutes de leurs valorisation.

Aussi récemment que début Octobre, il considérait que le scandale Dexia n'était qu'une anomalie dans le paysage bancaire français (traduit de l'anglais) (2) :

En aucun cas ce n'est un échec [...] Je ne suis pas du tout inquiet... pour les banques françaises, qui sont très solides. Franchement, je suis moins inquiet pour elles que pour leurs homologues américaines. Les nôtres sont en parfaite santé.

Rappelons que Dexia a été sauvée en 2008, grâce à 150 milliards d'euros de prêts garantis par la France et la Belgique, et, pour ce qui concerne la faillite récente, pour 90 milliards d'euros (3). La priorité absolue accordée aux créanciers de Dexia (ou ses contreparties de produits dérivés) domiciliés aux Etats-Unis s'explique, raisonne le NYTimes, comme un retour d'ascenseur au gouvernement fédéral des Etats-Unis, en 2008, pour les faveurs dont ont bénéficié les grands groupes bancaires français au travers du sauvetage de AIG, évoqué plus haut (4).

Dans son discours de Tokyo en Octobre (5), CN soulève un paradoxe : pourquoi le marché désavoue le modèle de la banque universelle français, alors que l'agencement entre banque de détail et activités de marchés dans un même établissement, répartis sur plusieurs continents, est équilibré ? L'histoire récente montre le contraire, nous l'avons vu. Depuis peu, l'agence de notation Fitch intègre explicitement ce mélange des genres, qu'elle juge nocif, dans sa nouvelle grille d'analyse des risques. Sur 8 établissements jugés mauvais, par rapport à ce critère, dans le monde, deux, soit 1 sur 4, sont les principaux acteurs bancaires français (6). Incidemment, dans ce même discours il décrète que, l'euro étant devenu notre ultime actif (sûr), la politique monétaire rigoureuse pratiquée par J-C Trichet sera récompensée. Et de présenter l'ancrage (qui n'en est pas un) du franc suisse à l'euro comme (seule) preuve, ce qui lui vaut les railleries du Wall Street Journal (7).

 
(1) ECB overnight lending jumps... (2) Dexia restructuring... (3) Dexia bailout... : France, Belgium and Luxembourg will jointly underwrite Dexia’s financing needs up to €90bn for 10 years, in a repeat of 2008 when the three governments stepped in with €150bn of garantees to tide over Dexia after it ran into financing difficulties. (4) Bank's Collapse in Europe Points to Global Risks (5) Discours de Tokyo... (6) Fitch installs own Glass-Steagall... (7) Noyer joins Euro-peg gaff list...

L'Autorité Bancaire Européenne finit par décréter un calendrier accéléré de recapitalisation. Ironie, la surveillance de sa mise en application, en France, est confiée au gouverneur de la banque de France (1).
 
Comment expliquer que CN soit à contrecourant de ce que dit le FMI, en la personne de Christine Lagarde, en Août, l'Autorité Bancaire Européenne, qui a décidé d'accélérer le calendrier de recapitalisation en Octobre, et son supérieur hiérarchique, Mario Draghi, qui réclame avec franchise, début Octobre, que les banques prennent des mesures drastiques pour remédier à leurs déficiences de fonds propres (2) ? La stabilité de l'ultime actif dont il parlait pourrait-elle pâtir de ce type d'incohérence ?
 
(1) Ce que peut C.Noyer... (2) Future ECB chief confirms banks definitely need funding

*

Des arguments spécieux favorables aux intérêts des grands groupes bancaires français ?

Dans un entretien avec Challenge (1), en Septembre, le gouverneur a conclu sans réserve que scinder les banques universelles entre la banque de détail d'un côté et le reste (pensons notamment aux activités de marché), de l'autre côté, en accord avec l'esprit Glass-Steagall, était une mauvaise idée. Pour appuyer sa conclusion il cite les exemples de la banque d'investissement Lehman Brothers et la banque de « pure détail », Northern Rock, qui n'étaient donc ni l'une ni l'autres des banques universelles.

Il n'est pas concevable que CN s'exprime sur un sujet aussi sérieux, et même stratégique, sans s'appuyer sur une étude approfondie de la BdF. Pourtant, notre recherche dans le portail de la BdF a été infructueuse (2). Vu le contraste entre, d'une part, la position dominante, dans le cercle des banquiers centraux (Mervin King, Paul Volcker, et quelques autres), rejoints par plusieurs Nobel d'économie (3), et d'autre part celle de CN, nous avons hâte de mettre la main sur cette étude. En attendant de la trouver, nous essayerons, ci-dessous, à titre récréatif, de faire de notre mieux pour essayer de faire connaître ce contraste, sur la base des deux exemples qu'il donne, mais aussi en reprenant les motivations des grands groupes bancaire à rejeter une législation de type Glass-Steagall.

La séparation entre banque de détail et le reste (appelons le banque d'investissement), n'a pas pour fonction de prévenir la chute d'une banque d'investissement, mais que l'activité de banque de détail soit immunisée contre une telle chute. La chute de Lehman Brothers, en soi, est donc un argument irrecevable.
 
Intéressons nous maintenant à Northern Rock (NR). La raison de la chute de cette banque de détail, d'après une étude universitaire (4), c'est que, comme Lehman, elle a financé ses opérations par un recours abusif à des emprunts de courts termes (Wholesale funding). Avec la crise de 2007—, ce segment du marché a été paralysé et NR a dû se refinancer, en dernier ressort, auprès de la Banque Centrale d'Angleterre. Ceci aurait pu être évité, en maintenant des ratios de liquidité et de solvabilité conservateurs, un autre pilier, avec la séparation, des législations s'inspirant de Glass Steagall, comme Dodd Frank aux États-Unis, et l'Independant Commision on Banking, en Angleterre. Nous avons vu, plus haut, que c'était aussi le problème des grands groupes français aux Etats-Unis, à partir de l'été 2011... En vérité, c'était aussi un facteur de la faillite de Dexia en 2008, et en 2011 (5).

En réalité, NR s'est éloignée de son coeur de métier, la banque de détail, pour se diversifier dans différents domaines, qui vont de pair avec le wholesale funding, la rapprochant ainsi d'une banque universelle. Or, CN a, lui, utilisé l'expression « banque de pure détail ». Il ressort que ces activités annexes, toutes choses égales par ailleurs, on aggravé les problèmes de NR, alors que, au contraire, le segment traditionnel a résisté, contrairement, les auteurs de l'étude insistent sur ce point, aux apparences (il y a eu des cas, relatés par la presse, de clients demandant à retirer leurs avoirs).

Alors que la position de CN semble difficile à défendre, il est facile de deviner les motivations des grands groupes bancaires à vouloir préserver la banque de détail en leur sein : comme elle procurent une fonction vitale de l'économie, c'est une assurance tout risque : l'état viendra les aider, quoiqu'il en coûte. En contrepartie, elles bénéficient de conditions de financement avantageuses, tout en s'autorisant des risques élevés. Du côté des actifs, avec les activités de marchés. Du côté du passif, des fonds propres réduits, c'est à dire un levier financier élevé. 

En aparté, la doctrine de CN on la retrouve, non édulcorée, et sans débat contradictoire, dans un article du Monde de Septembre 2011 (6). On peut s'étonner qu'un journaliste peu expérimenté en économie ait eu la tâche de le rédiger...
 
Le deuxième privilège des grands groupes bancaires, c'est celui que leur procure leur taille, Too Big Too Fail. Il n'est pas concevable pour une nation de laisser faire faillite un établissement bancaire dont la taille du bilan se mesure en multiple du PIB. C'est une subvention qui ne dit pas son nom. Il n'est donc que raison, de la part de ce lobby, que les timides propositions de le remettre en cause soient combattues par des tentatives de les discréditer (7). Un aspect moins connu de la crise est que des centaines de banques, petites à moyennes, ont été placées en règlement judiciaire par l'organisme FCIC, sans difficulté, tout en protégeant les dépôts.

Dans une émission sur RMC (8), CN réitère les arguments exposés plus haut (Lehman/Nothern Rock), ajoutant que s'il est contre la « banque casino », qu'il dit « pourchasser » dans les banques françaises, tout en condamnant les bonus, il ne voit pas pourquoi le système se priverait de proposer une gamme de services, sophistiqués mais utiles, comme le financement aéronautique. L'hôte de l'émission a eu la présence d'esprit de lui dire qu'il était question de séparation et non de suppression, ce à quoi le gouverneur s'est contenté de répliquer « que ça ne servirait à rien ».

Interrogeons nous sur ces déclarations. Si il avait éliminé ce qu'il appelle la banque casino, des établissements français, la question de conserver la mixité de la banque de détail avec le financement de l'économie réelle pour les grand groupes, comme Airbus, se poserait peut-être différemment. Or qu'entend t-il par « banque casino » ? Il semble en donner la définition dans le même paragraphe :
[...] car toutes les activités de marché sont dangereuses.

Nous ne connaissons qu'une seule façon de « pourchasser » une activité légale : c'est de changer la loi. Or, ses fermes conclusions sur Glass-Steagall sont en faveur du statu quo. Il y a contradiction, à moins qu'il ne puisse donner une autre définition de « pourchasse » et la démonstration de son application.


Dans ce même entretien, il dit être choqué par les rémunérations, mais le code monétaire et financier l'autorise à les limiter, une prégogative qu'il n'a jamais utilisé (9). On apprend dans la foulée que les banques gonflent artificiellement leurs résultats, sur lesquels, naturellement, sont prélevés les rémunérations (10). Enfin, un législateur européen considère que la directive européenne sur les bonus a été transposée par la France de façon « permissive » (11). Ce dernier point n'est peut-être pas du ressort particulier de CN, mais il permet de mettre en perspective les bonnes intentions, en mots, de CN.

(1) Entretien... (2) Recherche par mot clé Glass... (3) The only to save the economy... (4) Reflections on Nothern Rock... (5) Dexia bailout ... : Dexia before 2008 moved aggressively to finance its long-term loans by raising short-term money from wholesale markets, instead of attracting consumer deposits, as is more conventional for banks... (6) Erreur journalistique... (7) Bâles III : Péberau... (8) RMC : Noyer... (9) Dividendes, rémunérations des bonus : ... (10) Comment les banques manipulent leur résultats (11) Directive sur les bonus...

Moyenne des avis sur cet article :  4.78/5   (18 votes)




Réagissez à l'article

23 réactions à cet article    


  • wesson wesson 27 novembre 2011 18:08

    Bonjour l’auteur,

    bon déjà il est faux de parler de Dexia comme du premier sauvetage bancaire depuis le début de la crise de l’Euro. L’Espagne en est à sa 4ème banque nationalisée en douce, mais effectivement ces établissements n’avaient pas l’envergure de Dexia.

    Sur le reste, que dire sinon que la France est la championne des faux-culs concernant la régulation financière. En même temps que notre président proclamait vouloir terrasser l’hydre de la finance et des bonus injustifiés, les négociateurs Français à l’Europe faisait tout pour l’empêcher... Dans ce contexte là, il n’est pas étonnant de voir nos banques inscrire des plus-values fictives pour continuer à toucher leur bonus. Et pourquoi elles s’en priveraient, maintenant qu’elles savent que les états ne les laisseront jamais tomber ...

    Sinon il y a encore un paquet de merde qui va bientôt atteindre le ventilateur : les assurances vies. Les apports en volume ont diminué de plus de la moitié par rapport à l’année dernière, et depuis 2 mois maintenant les retraits dépassent les apports. Les banques et assurances qui ont vendu ce type de placement comme la nouvelle panacée vont là encore y trouver une nouvelle occasion d’y subir enfer et passion. Et au passage, ceux qui ont crû que le système de retraite par capitalisation était une alternative crédible au système par répartition vont assez vite dessaouler !

    Bref, niveau illusions perdues, on en est que au début là !


    • Proudhon Proudhon 27 novembre 2011 18:22

      @l’auteur

      Bravo pour cet article qui ne fait que prouver la vaste escroquerie mondiale dont les peuples sont victimes en ce moment.

      Je profite de cet article pour demander aux intervenants qui le sauraient, quels sont les noms des organismes bancaires et des dirigeants à qui l’Etat français demande les fonds (la monnaie), ce qui, vu les intérêts nous coûte une belle somme chaque année ;


      • zany 27 novembre 2011 18:55

        Proudhon, chercher des noms est inutile car ceci est voulu, par la faillite organisé l’UE prend le contrôle des états européen par la force « pour notre bien », c’est un coup d’état organisé par nos élites droite-gauche confondu.

        Le refus du renflouement de la BCE par l’Allemagne et la France signe la fin programmé de l’euro, une source non confirmé indique qu’en Angleterre ils s’attendent à des émeutes face au futur krach, tachez des faires du stock de conserve pour 2 ou 3 mois, n’attendez rien des traitres qui nous dirige, la mise en esclavage arrive nous revoilà au temps de la féodalités

        Rendez-vous compte, les peuples se doivent de rendre des comptes à des privée qui n’ont aucune légitimité, notre monnaie ne nous appartient déjà plus et nos politique ne sont que des marionnettes au service de

        Goldman Sachshttp://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=rothschild&source=web&cd=1&sqi=2&ved=0CDIQFjAA&url=http%3A%2F%2Fwww.rothschild.com%2F&ei=FHnSTsX-Dof1sgaa16i6DQ&usg=AFQjCNHfW9lN0jHY5nxCkTe3kcT3I9D8Zw&cad=rja

        http://www.google.fr/search?q=goldman%20sax&ie=utf-8&oe=utf-8&aq=t&rls=org.mozilla:fr:official&client=firefox-a&source=hp&channel=np#hl=fr&client=firefox-a&hs=xIP&rls=org.mozilla:fr:official&channel=np&sa=X&ei=O3nSTrCJNYXzsgbmmMnDAg&sqi=2&ved=0CCUQvwUoAQ&q=rockefeller&spell=1&bav=on.2,or.r_gc.r_pw.,cf.osb&fp=7c3d6d7634231cbd&biw=1920&bih=979

        voilà nos maîtres esclaves ! Les lieu et nom devrais vous indiqué QUI dirige.


      • Unghmar Gunnarson Unghmar Gunnarson 28 novembre 2011 18:27

        Bonjour,

        Une liste de personnes intéressantes à l’Agence France Trésor, organisme chargé de gérer la dette et la trésorerie du pays. Conseillée par un comité stratégique composé de :

        Président M. Jacques de Larosière Ancien gouverneur de la Banque de France et conseiller du Président BNP Paribas, directeur au NYSE ( New York Stock Exchange ), ancien du FMI, etc.

        Membres M. Peter R. FISHER Co-responsable de la gestion obligataire chez BlackRock Ancien sous-secrétaire du Trésor américain

        M. Jean-Louis FORT Ancien secrétaire général de la Commission bancaire

        M. Francesco GIAVAZZI Professeur d’économie à l’université Bocconi (Milan) et accessoirement conseillé de José Manuel Barroso.

        M. Jean-Pierre HALBRON Ancien Directeur général adjoint d’Alcatel

        M. Emmanuel HAU Membre du directoire de la Compagnie Financière Edmond de Rothschild

        M. Philipp HILDEBRAND Vice-Président de la Direction générale de la Banque nationale suisse

        M. René KARSENTI Président exécutif de l’International Capital Market Association

        M. Ng KOK SONG Directeur général de Government of Singapore Investment Corp.

        M. Bertrand de MAZIERES Directeur général des Finances à la Banque européenne d’investissement (BEI)

        A vous d’en tirer des conclusions.


      • Reprendrelamain Reprendrelamain 27 novembre 2011 18:59

         Si tous les citoyens qui ont conscience de la vaste escroquerie bancaire qui les enfonce dans la crise tous les jours un peu plus, décidaient de mettre leur argent à la banque postale, ils exerceraient le seul contre pouvoir qu’il leur reste et mettraient immédiatement fin à tous les problèmes dont on nous rabâche les oreilles depuis des années.


        • Proudhon Proudhon 27 novembre 2011 20:02

          @reprendrelamain

          J’ai rendez-vous pour ma part mercredi à la Poste.
          Il faudrait aussi parler du Crédit Coopératif et de La Nef, comme banques alternatives et solidaires.
          Mais bon, je ne suis qu’un ouvrier qui n’a pas de grosses économies.


        • gdfontaines 27 novembre 2011 21:27

          La Banque Postale .. c’est elle qu’on ponctionne pour reprendre les merdes toxiques de DEXIA .. lol .. ça craque de partout .. il faut un GLASS-STEAGALL + du Crédit Productif Public (exit l’article 104 de Maastricht) et des Grands Projets lancés entre chaque pays comme Ariane par exemple .. mais nos Etats n’ont plus le droit d’avoir des lignes de crédit via la Banque de France et le Trésor (c’est interdit par Maastricht - article 104) du coup il sont obligés d’emprunter aux banques à fort taux et court terme .. cette soupe aux Veaux est tellement grossière que personne n’en parle ... Réquisitionnons les banques de détails et mettons les banques d’affaires (le Casino) en faillite !


        • Reprendrelamain Reprendrelamain 27 novembre 2011 21:40

          @Proudhon

           Les économies et surtout les salaires des millions d’ouvriers, de chômeurs et de Rmistes pourraient mettre à genoux en quelques jours le système capitaliste s’ils étaient utilisés comme des armes...mais le veulent-ils ?


        • wesson wesson 28 novembre 2011 00:26

          Bonsoir Proudhon,

          « Il faudrait aussi parler du Crédit Coopératif et de La Nef, comme banques alternatives et solidaires. »

          Bonne idée. Le crédit coopératif fait partie du groupe BPCE (Banque Populaire Caisse d’Epargne), et la Nef n’a pas à ce jour d’agrément en temps que banque (ses comptes étant hébergés par le crédit coopératif). Bref il s’agit de 2 émanations de la banque pop, même si effectivement, elles ne sont pas tout à comparables.

          Il y aurait également quelques remarques à faire sur le coté éthique de ces établissement financiers, notamment en ce qui concerne le micro-crédit pratiqué souvent à des taux usuraires, et des garanties scandaleuses.

          Je suis méchant, ces initiatives vont dans le bon sens ... toutefois sachez que sur la question du microcrédit, les taux pratiqués sont honteux,


        • bigglop bigglop 28 novembre 2011 01:52

          @Wesson, pour la NEF et ce que j’en sais, il s’agit d’une banque éthique mais qui n’a pas le droit de distribuer du crédit.
          Donc, si on possède un compte bancaire principal avec des crédits, il faut laisser une provision suffisante et ouvrir un second compte à la NEF qui te proposera les services suivants :
          compte courant avec chéquier
          carte de crédit (Visa, CB)
          compte d’épargne, sur livret
          Pour le crédit, existe le crédit solidaire et le peer-to-peer tout en sachant que le Crédit Coopératif et une banque comme une autre même si elle propose des produits « éthiques »
          Cordialement


        • luluberlu luluberlu 28 novembre 2011 13:21

          Comme toi, moi le pognon je le bouffe au fur et à mesure, pas d’angoisse pour les éconocroques.


        • Proudhon Proudhon 4 décembre 2011 17:35

          @wesson

          Il existe effectivement un compte Nef Crédit coopératif qui permet d’avoir un chéquier, une carte bleue etc. Cela est du au fait que la Nef n’a pas la statut de banque à part entière. La Nef cherche encore des partenaires européens pour créer une banque éthique à part entière.

          Par contre on peut souscrire à La Nef sans recours au Crédit Coopératif à :
           Un Compte à Terme Nef, un Compte Epargne Nature Nef, un Compte Epargne Insertion Nef ou un Plan d’Epargne Nef.

          Tout ceci n’est pas parfait mais c’est déjà un plus...


        • bigglop bigglop 27 novembre 2011 19:57

          Bonsoir à tous,

          Merci à @Julien S pour cet excellent article, très pédagogique qui propose une bonne synthèse des évènements et de l’escroquerie mondiale dont nous sommes victimes.

          Christian Noyer est représentatif de la "politique monétaire" du gouvernement français et Sarko qui a sauvé l’Euro, détruit les paradis fiscaux, pour au moins la 4ème ou 5ème fois.

          Cependant, dans la quasi totalité des articles personne ne parle d’une activité mafieuse, le shadow banking (situé dans les paradis fiscaux) dont l’activité valorisée (10 000 mds $ en 2008) est équivalente à celle des marchés règlementés, intervenant sur les mêmes produits, en hors bilan, avec une préférence pour les plus risqués donc plus rentables à court terme, comme les produits dérivés, special purpose vehicle qui sont à l’origine de la crise des subprimes.

          Ces entités non régulées peuvent être :

          des banques universelles ou financières

          des hedge funds (le plus souvent) agissant comme des banques d’investissment

          des fonds de pension souscrivant des produits créés par des banques d’affaires à partirde leur propres opérations.

          Des fonds de placement

          Il en résulte un risque systémique d’ampleur mondiale, révélé en 2008, qui perdure aujourd’hui en l’absence de volonté politique de régulation.

          En ce moment, nous constatons la faillite de la politique monétaire européenne basée sur une croyance quasi-mystique, dogmatique en l’Euro, seul recours pour sauver l’Union Européenne, mais qui nous conduit à la catastrophe.

          Aujourd’hui, on ose parler d’un découplage de l’Eurozone entre pays forts et faibles, d’harmonisation fiscale (refusée même avant Maastricht). Tout cela prouve une absence de vision, l’amateurisme, la précipitation.


          Telle une litanie lancinante, les nouvelles se succèdent et concourent toutes au même sentiment d’effondrement inéluctable. Ce furent une émission obligataire calamiteuse – cette fois-ci italienne – la dégradation de la note de la Belgique, ainsi que celle de banques portugaises et hongroises, succédant à celle de la Hongrie elle-même. Rien ne semble résister à cet effondrement auquel rien ne fait obstacle, surtout pas les discours des dirigeants européens, dépassés et divisés entre eux, qui multiplient à un rythme effréné et en pure perte les conciliabules en tentant de donner le change.

           Un écroulement de l’Italie amènerait inévitablement la fin de l’euro  auraient déclaré, selon un communiqué de la présidence du Conseil italien, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel au cours du mini-sommet de Strasbourg auquel participait Mario Monti. Comme l’usage s’en est désormais instauré, la réaction du marché obligataire a été immédiate et sans équivoque : les marchés ne croient pas au redressement italien et engagent l’asphyxie du pays, qui doit refinancer l’an prochain plus de 400 milliards de sa dette. « L’Italie doit faire face à d’immenses défis », a reconnu Olli Rehn, le commissaire européen. Pas seulement elle, si l’on en croit pour une fois les dirigeants allemands et français.

          Standard & Poor’s a abaissé à AA la note de la Belgique, craignant que les difficultés du secteur financier – on pense en particulier à Dexia, dont le dossier n’est pas bouclé – ne nécessitent de nouveaux soutiens publics, la dette pouvant alors dépasser les 100% du PIB. C’est Moody’s qui a dégradé la note hongroise, le motivant pour des raisons qui méritent d’être relevées. La politique du gouvernement hongrois conservateur est en effet sévèrement critiquée pour avoir taxé les banques, les sociétés d’énergie, de distribution et de télécoms, d’avoir nationalisé les fonds de pension privé et obligé les banques à partager le surcoût des crédits en francs suisses qu’elles avaient accordés aux particuliers, le forint plongeant et le franc suisse explosant. Tous crimes qui méritent incontestablement châtiment.

          L’autre jour, Sarkozy a baissé son froc (et son pavillon) devant Merkel et Monti en acceptant une profonde modification notamment du Traité de Lisbonne et a renoncé à sa position d’un changement des statuts de la BCE pour qu’elle puisse monétiser la dette européenne.

          Mais cette modification du traité se fera en dehors de tout cadre référendaire européen, en utilisant l’article 48 du TFUE (Traité de Fonctionnement de l’Union Europe Européenne).
          Ce procédé avait déjà été utilisé le 16/12/2010 par le président du Conseil Européen, Herman Von Rompuy pour l’accord du 11/03/2011 de l’instauration d’un mécanisme permanent, le FESF et le MES.

          Les solutions proposées par la triade Merkel, Monti, Draghi, ne résolvent rien, au mieux gagner du temps avec un coût exorbitant et ne « soignent » que les effets et non la cause.

          La panique de la « contagion » augmente aux Etats-Unis, des « stress-tests », pour une trentaine de banques "too big to fail" sont mis en place.

          En Europe, tous les établissements financiers, dont britanniques, cherchent à se débarrasser des dettes souveraines, les échanges inter-bancaires sont limités (perte de confiance, risque d’illiquidité)

          La garantie théorique de 20% sur les premières pertes sur dettes souveraines offerte par le FESF, sont insuffisantes et ne rassurent pas les marchés. Les CDS (credit default swap) ne sont pas actionnés. Tous retiennent leur respiration.

          Enfin, le FESF suscite la méfiance, car l’effet de levier annoncé contribuera à la création d’une pyramide Ponzi et le « special purpose vehicle » n’est qu’un support type subprime. Ces deux dernières solutions ne viendraient-elle pas de Goldman-Sachs, spécialiste en la matière ?

          TIC TAC TIC TAC TIC TAC




          • luluberlu luluberlu 28 novembre 2011 13:26

            la pendule d’argent qui ronronne au soleil qui dit oui qui dit non et puis qui nous attend.


          • bigglop bigglop 29 novembre 2011 01:06

            Bonsoir @luluberlu,

            Quand la réalité rejoint la poésie.

            Et ces pauvres italiens qui doivent trouver le financement de 400 milliards d’euros, minimum, en 2013


          • bigglop bigglop 29 novembre 2011 01:07

            Pardon 2012


          • BA 28 novembre 2011 08:15

            Lundi 28 novembre 2011 :

             

            Alors que des pays comme l’Italie ou la Hongrie ont de plus en plus de mal à se financer à des taux viables sur les marchés, Moody’s écrit que l’élan politique pour mettre en oeuvre une solution efficace à la crise pourrait n’être trouvé qu’après une série de chocs, ce qui pourrait mener davantage de pays à se voir privés d’accès aux marchés du financement pour une période prolongée.

             

            L’agence Moody’s fait là référence aux pays comme l’Irlande, la Grèce, le Portugal ou encore la Hongrie, qui ont dû bénéficier d’un ou plusieurs plans de sauvetage financier de la part de l’Union européenne ou du Fonds monétaire international.

             

            Selon elle, d’autres pays pourraient avoir besoin de faire appel à ce genre de solution si l’UE ne parvient pas à trouver rapidement une réponse adéquate à la crise, et ces pays verraient alors très probablement leur note abaissée à celle d’un investissement spéculatif.

             

            Au vu des événements des dernières semaines, Moody’s indique devoir considérer la probabilité d’un scénario encore plus négatif.

             

            Selon elle, la probabilité de défaillances multiples d’Etats de la zone euro n’est plus négligeable et ne cesse d’augmenter en l’absence de solution à la crise.

             

            Si cette probabilité devait se matérialiser, cela augmenterait la probabilité qu’un ou plusieurs pays quittent la zone euro, ajoute l’agence, pour qui ce scénario d’une fragmentation de l’euro aurait des répercussions négatives pour tous les pays de la zone euro et de l’UE.

             

            http://www.romandie.com/news/n/_Dette_les_notes_de_tous_les_pays_de_l_UE_so nt_menacees_281120110611.asp


            • chantecler chantecler 28 novembre 2011 09:20

              Bonjour ,

              L’article met bien en perspectives les dernières données sur l’état et le fonctionnement de notre système bancaire .

              Ca et les bruits de bottes,(les dernières venant du Pakistan , selon les journaux US qui parlent non d’une bavure mais d’un acte délibéré ) ça n’a rien de réjouissant .

              Juste un détail : lors de la dernière « interview » de notre président , la question de la séparation banques commerciales , banques d’investissement a été posée par Calvi .

              Réponse de NS : « ce ne serait pas juste que certaines banques prennent tous les risques (banques d’investissement ) et que d’autres aucun (banques commerciales ou dépôts)... »

              Voilà .

              Bonne journée .

              Cr.


              • pmxr pmxr 28 novembre 2011 11:49
                Le gouverneur de la Banque de France... il doit jouer au monopoly dans son bureau !

                ... Faute de Francs !


                • luluberlu luluberlu 28 novembre 2011 13:17

                  Y a t’il plus d’escroqueries que d’incompétances ? Parce que si c’est une escroquerie, l’escroc au moins maitrise et peut arréter le jeu si bon lui chante, bon pour lui j’entends. Alor que là, j’ai l’angoissante ceritude qu’il sagit plus d’incompétance et que comme Mickey dans l’apprentis sorcier, nos élites attendent le magicien d’os, dans le prose....et attendants ils colmattent les fuites.


                  • Gérard Luçon Gerard Lucon 28 novembre 2011 13:55

                    et quand on sait que cet ete, Dexia a reussi avec brio les test anti-stress vantes par nos dirigeants et l’UE .. on ne peut que rever et s’esbaudir de leur competence et de leur serieux !!!!!!!!!!!! .. et attendre la chute d’autres banques declarees solides ....


                    • BA 28 novembre 2011 17:11
                      Lundi 28 novembre 2011 :

                      Le Trésor italien a émis lundi 567 millions d’euros d’obligations indexées sur l’inflation à échéance 2023 dont les taux d’intérêt ont bondi à plus de 7,3 %, a annoncé la Banque d’Italie.

                      Le montant levé s’inscrit dans le bas de la fourchette de l’objectif du Trésor qui comptait émettre entre 500 et 750 millions d’euros.

                      La demande est restée soutenue, s’élevant à environ 1,225 milliard d’euros, mais le Trésor peut décider, selon ses besoins, de ne pas émettre le montant maximum, notamment si le taux est trop élevé.

                      Signe de la méfiance des investisseurs, les taux de ces titres ont en effet bondi à 7,3 %, contre 4,6 % lors de la dernière opération similaire dont la Banque d’Italie ne précise pas la date.

                      Ce taux record n’est toutefois pas une surprise car il se situe au niveau où évoluent actuellement les taux à long terme de l’Italie qui sont jugés insoutenables, sur la durée, pour le pays, qui croule sous une dette colossale d’environ 1.900 milliards d’euros, soit environ 120 % du PIB.

                      Les titres émis lundi étant d’un type particulier en raison de leur indexation sur l’inflation, le nouveau véritable test sur les marchés pour l’Italie interviendra mardi, jour où le Trésor compte émettre entre 5 et 8 milliards d’euros d’obligations à moyen et long terme.

                      Vendredi, les taux d’emprunt de l’Italie s’étaient envolés à des niveaux record lors de l’émission de 10 milliards d’euros de titres à six mois et deux ans.

                      Les taux à six mois avaient bondi à 6,504 %, contre 3,535 % lors de la dernière opération similaire le 26 octobre 2011, et les taux à deux ans avaient bondi à 7,814 %, contre 4,628 % lors de la précédente émission.

                      Alors que l’Italie est au bord de l’asphyxie financière, le Fonds monétaire international a démenti lundi discuter avec Rome d’un plan de secours, après des informations du quotidien La Stampa indiquant que le FMI pourrait débloquer entre 400 et 600 milliards d’euros afin de permettre à l’Italie de disposer de 12 à 18 mois pour adopter des mesures budgétaires et des réformes économiques.

                      (Dépêche AFP)


                      • oclinux oclinux 13 novembre 2012 10:57

                        France2 diffuse ce soir à pas d’heure (beaucoup trop tard) un film sur la Nef, cet organisme financier atypique et je suis sur qu’il sera très intéressant.

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON

Auteur de l'article

Julien S


Voir ses articles






Les thématiques de l'article


Palmarès