Le Monde et Sarkozy : l’intox ?
De passage récemment, comme cela m’arrive régulièrement, sur le site de notre glorieux quotidien national, mes yeux furent soudain attirés par un titre qui fait la une :
Accusé de « mensonges » sur l’immobilier, Nicolas Sarkozy désavoue Bercy.
A la lecture de ces mots éloquents, mon sang ne fait qu’un tour : que se passe-t-il donc tout en haut de l’Etat ? Un clash gouvernemental est-il en train de naître ? Quels sont les "mensonges" dont est accusé Sarkozy ? S’agit-il toujours de son appartement dont l’escalier en colimaçon est sans doute le plus célèbre de France ? L’ADN du menuisier aurait-il parlé ?
De toute évidence, l’affaire doit être grave. Nicolas Sarkozy n’a pas pour habitude de se défausser de ses responsabilités au détriment de ses collaborateurs, fussent-ils ministres. Donc soit il est très énervé (la faute doit être impardonnable), soit il est le dos au mur, peut-être prêt à démissioner, pris dans l’étau de mensonges mystérieux, pesants au point de mettre la présidence en danger...
C’est alors (et cela me sauva) que mû par un bon sens certainement hérité de gènes marqués par une longue tradition cartésienne, elle-même renforcée par un apprentissage sérieux dans une école républicaine, je me décide à lire l’article, le front déjà soucieux à la pensée des luttes à venir, les yeux embués par l’émotion que ce schisme historique provoqua dans mon coeur de sarkozyste sensible. Non, M. Hollande, ce n’est pas un oxymore.
Quelle ne fut pas ma surprise d’alors constater que ce début de Watergate, tel que semblait l’annoncer Le Monde, ne correspondait en fait qu’à une simple nuance apportée hier soir par Nicolas Sarkozy au Havre à propos de sa loi sur l’immobilier, quand les "mensonges" en question correspondaient aux accusations sans fondement, purement spéculatives, exemples d’école du procès d’intention, émises par Ségolène Royal lors de sa tentative piteuse de come-back politique ! Jugez par vous-mêmes :
Nicolas Sarkozy entend montrer qu’il tient ses promesses. Mardi 29 mai, lors d’un meeting au Havre, le président de la République a indiqué que les intérêts d’un emprunt immobilier contracté pour acheter sa résidence principale pourront être déduits de l’impôt sur le revenu. Cette mesure s’appliquera à tous les prêts "à partir du jour où la loi sera votée" et concernera "tous les emprunts en cours", a-t-il déclaré.
Voilà. Là, vous venez d’assister à un désavouement de Bercy (ministère de l’Economie et des Finances) en direct. Bon, bien sûr, vous ne saisissez toujours pas le fin mot de l’affaire (je sais, j’y suis passé moi aussi), mais cela va venir. Je suis là pour ça.
En apportant ces précisions, le chef de l’Etat contredit le ministre du Budget, Eric Woerth, qui avait déclaré, aux Echos du 24 mai, que le dispositif ne concernerait que les "résidences principales dont l’acte authentique de vente a été signé après le 6 mai 2007, jour de l’élection du président de la République". "Les intérêts des emprunts pourront être déduits des revenus à hauteur de 20 %, avait ajouté M. Woerth. Il s’agira d’un crédit d’impôt limité dans le temps, qui aboutira à des réductions d’impôrts significatives." Les propos de M. Woerth n’étaient pas tout à fait en phase avec les engagements de M. Sarkozy : celui-ci avait dit, notamment à L’Express daté du 29 mars, que la mesure s’appliquerait "sur les intérêts des emprunts déjà contractés et sur ceux des nouveaux emprunts".
J’espère que vous êtes maintenant plus conscients de la gravité de l’affaire. Il y a quand même un certain flottement entre le président et son ministre, qui, à quinze jours de l’intronisation et à dix jours de la formation du gouvernement, émettent des avis divergents, portant sur des périodes de plusieurs jours, dans leurs interprétations respectives de la loi sur l’immobilier. C’est énorme.
Le 26 mai, à La Rochelle, Ségolène Royal avait dénoncé les "mensonges" et les promesses qui "ne correspondent à rien" de M. Sarkozy. "Les gens vont se rendre compte petit à petit qu’ils ont été floués", avait dénoncé la socialiste.
Ah, voici enfin les accusations de mensonge. Je pense qu’il était primordial de les reprendre sous la forme d’un titre : en effet, l’expérience a montré que lorsque Ségolène Royal s’exprimait sur un sujet, son avis avait valeur de parole d’évangile, notamment dans ses accusations contre Nicolas Sarkozy... Merci au Monde d’en avoir tenu compte.
Vous avez dit "pathétique" ?
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