Le mythe du carnet de commande et de la relance keynésienne

Le mythe de la relance keynésienne et d'une économie figée que l'Etat aurait la capacité de relancer (par des investissements massifs) sert de bréviaire à une partie de nos concitoyens (et des corps intermédiaires, syndicats comme politiques).
A entendre nombre de doctes économistes (qui à gauche n'ont souvent jamais travaillé dans ou pour une entreprise) pour faire redémarrer l'économie il suffirait d'appliquer une recette éprouvée dans le passé et toujours infaillible : augmenter les salaires et le pouvoir d'achat, ouvrir les vannes des dépenses (publiques) pour qu'enfin l'économie reparte dans notre pays (ou partout ailleurs).
Le développement ne serait qu'une question de robinet : la Gauche serait seule capable d'être généreuse en ouvrant les vannes alors que la Droite (forcément cupide et égoïste) tiendrait trop ferme la manne de l'argent public.
Il est toujours instructif d'écouter les gens de Gauche parler d'économie. On retrouve souvent dans leur bouche les poncifs qui sont (encore) débités à l'éducation nationale concernant l'économie.
Le carnet de commande entre mythe et réalités
L'image du carnet de commande (à remplir) est très largement répandue à gauche. C'est une nostalgie des temps industriels quand le commercial (ou le VRP des années 60) déposait en fin de semaine dans son usine un carnet de commandes (bien rempli) que chaque service devait ensuite prendre en compte dans l'entreprise (depuis l''ouvrier jusqu'au patron).
La plupart des entreprises ne fonctionnent plus sur ce modèle du carnet de commande (ou du bon de commande comme Clémentine Autain en parle encore aujourd'hui, toute habituée qu'elle est aux commandes des administrations)
Le travail change radicalement dans les entreprises, les commandes (comme l'activité) ne sont plus des stocks mais des flux
Dans beaucoup d'entreprises le travail n'est souvent plus planifiable (pour les prochains mois ou années) c'est semaine après semaine, jour après jour, heure après heure parfois que l'entreprise ausculte ses divers indicateurs et résultats, analyse son activité, anticipe les changements (arrêter une gamme, livrer les produits les plus demandés, s'adapter aux demandes de la clientèle).
Dans le monde des affaires tout s'accélére et le carnet plein de commandes peut se transformer en peau de chagrin en quelques jours
Le problème désormais de la société française est à la fois la nécessité d'opérer dans un monde qui n'est plus en expansion (-30 % de demande d'énergie en quelques années dans les usines du fait de la désindustrialisation) que de s'adapter à la rapidité des changements
Les changements ultra rapide des consommateurs (une réputation peut être ruinée en quelques semaines, un nouveau service sur Internet écraser tous les autres en quelques jours..), les évolutions des monnaies (quand vous achetez des vêtements en Asie pour les revendre en France, 10 % d'évolution de l'Euro face au dollar peuvent vous rendre riche ou vous ruiner), les recompositions et restructurations incessantes des entreprises font que le paysage des affaires est tout sauf figé (dans un carnet de commandes).
Face à cette rapidité les politiques qui travaillent à la vitesse des ministères, de la vapeur ou des représentations nationales ne peuvent plus produire que des lois dépassées (avant même d'être publiées au journal officiel), des décisions en retard d'une guerre, des règlements qui entravent désormais l'activité réelle (en prétendant agir pour le bien commun).
Le monde va trop vite pour l'Etat, il lui faut cesser d'entraver les acteurs économiques (d'abord ne pas nuire comme Hypocrate le précisait en matière de médecine)
Le monde va vite, il n'a jamais pris autant de vitesse et face à cela le mythe de la relance par la consommation (ou par les investissements de l'Etat) n'est plus d'actualité.
La seule mission qui devrait être celle de l'Etat (en plus de ses missions régaliennes) devrait être celle d'accompagnateur et de facilitateur de ces mouvements browniens car face à la vague (mondiale) du progrès et du développement, aux milliards de nouveaux compétiteurs (la mondialisation fait chuter certaines classes moyennes mais sort de la misère des centaines de millions de très pauvres) il est vain et ridicule de résister (même pour des tribus gauloises),
Surfer plutôt que d'indigner
Chacun peut donc, comme un dauphin, surfer sur la vague du changement plutôt que se réfugier sous la vase (la culture des avantages acquis) ou se risquer dans le bassin sanglant des requins (tuer pour ne pas être tué).
Ce qui souhaiteraient mieux comprendre notre époque (en oubliant un peu les siècles et idéologies du passé) pourraient tirer profit de la lecture d'un livre canadien paru en 1994 : "la stratégie du dauphin" de Paul L. Kordis, Dudley Lynch.
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