Dans son rapport annuel rendu le 9 février, la Cour des comptes dénonce un certain nombre de choses dont la presse s’est fait l’écho. Elle émet aussi une critique sévère sur la politique de lutte contre le surendettement, ce mal grandissant amplifié par la crise actuelle loin d’être terminée. La Haute juridiction ne se contente pas de critiquer : comme à son habitude, elle propose une série de recommandations.
Insuffisance de la prévention et de la lisibilité de l’information sur les crédits, absence de pilotage des commissions par l’Etat, sont quelques-uns des points relevés par la Cour des comptes à propos de la politique de lutte contre le surendettement conduite par le gouvernement.
On ne fait pas assez pour la prévention des risques de surendettement, dénonce la cour
Le dispositif légal intervient comme pompier, en mode "traitement social" et pas en mode préventif. La cour relève par exemple que la consultation du FICP (fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers) n’est pas systématique. Sur ce point, il est à noter qu’un projet de loi a été examiné en Conseil des ministres en avril 2008 et qu’il est en souffrance depuis ce temps alors qu’une mise en oeuvre était annoncée pour janvier 2010. Ce projet prévoyait notamment pour le prêteur l’obligation de consulter le fichier FICP. Mais il faut croire que ce n’est pas une priorité de l’Etat de gêner les banques et les organismes de crédit dans leur action prédatrice ni de venir au secours de gens en grande difficultés.
Pourtant, il est urgent d’agir puisque la dégradation s’accélère. Depuis le début de l’année 2009, le nombre de dépôts s’inscrit en hausse de 17 % par rapport à la période correspondante de l’exercice précédent. 80 % des ménages surendettés sont locataires (pourcentage à la hausse) et au moins 75 % de leur endettement est bancaire.
Il faudrait que la France fasse le minimum requis, à savoir transposer la directive européenne sur le crédit à la consommation, ce qui aurait au moins l’effet de porter le délai de rétractation après la souscription d’un crédit de 7 à 14 jours et de contrôler davantage les crédits automobiles (avec un relèvement du seuil de 21.000 à 75.000 euros).
Aucun pilote dans l’avion
Comme le souligne avec force la Cour des comptes, l’Etat délaisse la politique de lutte contre le surendettement. Deux exemples : alors que la loi confie aux préfets la présidence des commissions de surendettement, le gouvernement n’adresse aucune instruction à ces autorités qui dès lors se débrouillent seules pour apprécier les situations, d’où des écarts de décisions importants sur le territoire, d’autant plus qu’il n’y a pas de barème national. Second exemple : alors que la loi impose la présence aux commissions d’un juriste et d’un conseiller en économie sociale et familiale, plusieurs commissions n’ont pas recours à ces professionnels.
Il est urgent de prendre des mesures de base comme le raccourcissement des délais de traitement des dossiers de surendettement, l’accroissement des pouvoirs de la commission de surendettement qui devrait pouvoir, dans certains cas, imposer un plan.
Ces mesures étaient prévues par le projet aujourd’hui oublié.
La Cour des comptes émet un certain nombre de recommandations dont la mise en place d’un pilotage national stratégique, pour s’assurer notamment de la cohérence des critères et barèmes, le renforcement de la connaissance statistique du surendettement par la Banque de France, et une procédure de signalement auprès des services sociaux des départements pour un accompagnement social adapté.
Mais sommes-nous à l’heure des comptes ? Il est permis d’en douter quand on voit avec quelle légèreté le gouvernement laisse courir la dette nationale vers les 100 % du PIB en 2012. La même inconscience semble régner pour le surendettement des particuliers.