Le système semble vraiment pourri et le divorce entre le peuple et des élites suit son cours
Tous pourris ! A chaque fois que des affaires mêlant finance et politique sont révélées, le spectre du « tous pourris » hante la gent médiatique et les dignitaires des partis. Alors il faut déminer cette affaire nauséabonde pensent les communicants car la hantise du populisme se dessine alors que l’atmosphère de défiance populaire se transforme vite en crainte du populisme, des extrêmes, et même de la révolte. Chaque fois qu’un dirigeant est pris la main dans le pot de confiture, c’est la chienlit médiatique. Le choc de confiance se transforme en cauchemar et en choc de défiance. De quoi en oublier le choc de simplification. Mais l’engrenage est impitoyable. A chaque fois, les politiques se défendent, prétendent que c’est un homme qui a fauté et que le cas ne se reproduira plus et que la république se doit d’être sérieuse et exemplaire et qu’il ne faut pas aller dans les extrêmes car ce n’est pas bien. La même litanie mais c’est à se demander si la classe politique n’est pas désinvolte. Les affaires ne cessent de se répéter en dépit de la crainte des extrêmes. On dirait que ces gens sont d’un autre monde et disposent d’une autre conscience. La cupidité les entraîne au-delà des règles morales et surtout les fait sortir de la légalité. Ils se croient au dessus des lois pense la vieille dame au comptoir du bistrot.
Jérôme Cahuzac est sorti de la légalité. Enfin, ce n’est pas le ministre mais son fric qui est sorti de France pour aller prendre un hébergement en Suisse après avoir contourné la patrouille fiscale. On oublie une chose dans cette affaire. C’est que l’affaire Cahuzac aurait débuté vers 1992 et l’on peut se demander comment cet affairiste des labos et cliniques a pu passer au travers des contrôles fiscaux alors que bien des artisans ont vu l’inspecteur éplucher leur compte régulièrement. Les années 1990, c’est aussi le plus grand scandale financier de l’époque, bien étouffé et dont le trou a été comblé par le contribuable alors que des sommes considérables ont fait et défait les comptes par le biais du Crédit Lyonnais, banque qui fricotait avec les financiers et l’Etat, avec des anciens serviteurs de la république passés de l’autre côté des affaires. Comme d’ailleurs le trésorier de la campagne de François Hollande, Jean-Jacques Augier, repéré par la patrouille du Offshore leaks avec ses multiples sociétés naviguant de la Chine aux îles Caïman. Rien d’illégal mais pour un Socialiste, ça fait pas très moral cette affaire et ça montre bien où le compagnon de route de Hollande que fut Augier, X et énarque promo Voltaire, ex-inspecteur des finances place sa foi ; du côté des affaires plutôt qu’au service de l’Etat qu’il peut remercier pour la formation qu’il a reçue gratuitement et le passage aux finances qui lui a permis de constituer un bon carnet d’adresse. Comme Cahuzac d’ailleurs qui après son passage à la santé a pu faire fructifier son patrimoine de réseau social en vendant ses services aux industries pharmaceutiques. Au passage, notons que l’ex-président Sarkozy avait juré que les paradis fiscaux seraient supprimés.
Alors, tous pourris ou bien quelques canards boiteux ? Le bon peuple va finir par croire à la première éventualité, surtout que les affaires ne cessent d’être révélées ; il se dit que chez ces gens du pouvoir, la cupidité est la règle et que les barrières de la morale publique sont vite franchies, y compris celle de la loi républicaine. S’il réfléchit un peu plus, il se dit que comme dans les saisies de drogues, seulement 10 % des délits affairistes sont détectés par les patrouilles juridiques ainsi que médiatiques. Si Cahuzac est tombé, ce n’est pas suite à une enquête sérieuse et appliquée des services de l’Etat mais à deux ou trois personnes qui, pour des raisons privées, ont fait fuiter quelques indices compromettants vers Médiapart. Le citoyen en sort estomaqué. Et en plus, il ne connaît que la partie émergée de l’iceberg de la cupidité. Le philosophe est quant à lui plus mesuré. Il sait très bien que la démocratie et les partis finissent par dériver dans l’oligarchie. Il a lu le livre édifiant de Robert Michels sur « les partis politiques », un essai écrit il y a un siècle. Et encore d’actualité. A l’ère moderne, la nature du pouvoir semble définitivement échapper à la vertu et à l’éthique républicaine. La puissance financière du 21ème siècle permet aux cupidités oligarchiques de brasser d’énormes sommes et le système du pouvoir ne paraît pas déterminé à enrayer le processus, surtout que les masses sont anesthésiées et même dociles et complices. Combien de citoyens sont prêts à réélire un élu malgré ses déboires judiciaires ? Mais le peuple n’a peut-être pas définitivement accepté le caractère oligarchique du pouvoir. Alors, le divorce entre les élites et les citoyens suivra son cours. Nul ne peut savoir quelle forme prendra ce divorce. Mais nul ne peut affirmer sans cligner de l’œil que le peuple est vertueux. S’il y aura un divorce pour faute, ce sera des deux côtés.
Le gouvernement marche sur des œufs. Un remaniement ne serait pas bien compris des citoyens, sauf comme une embrouille de plus. Toutes ces affaires ne participent pas à la paix sociale, car la récession étant avérée, la fracture sociale et la facture pour les moins lotis ne peuvent que s’accentuer. Inch’Allah comme on dit de l’autre côté de la mer !
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