Les quinze premiers jours du président Sarkozy : un préjugé favorable
Depuis le 10 mai 2007, Nicolas Sarkozy s’active sans relâche pour gouverner la France. Son style médiatique ne doit pas cacher les actes, un souci d’ouverture et une volonté de rassemblement.
À part la fausse note du yacht à l’île de Malte, Nicolas Sarkozy me paraît avoir fait un sans faute depuis de son retour au travail le 10 mai 2007.
Son style est évidemment différent de celui de François Mitterrand et de Jacques Chirac dont l’âge n’est pas comparable. Mais pas si éloigné de celui de Valéry Giscard d’Estaing, la condescendance en moins.
Nicolas Sarkozy est un adepte du marketing médiatique, et à ce titre, s’il a buggé avec le yacht, il a très bien mis en avant sa volonté (affichée) de se mettre au travail très vite, sans réfléchir sur le protocole.
Ainsi, le jogging commun du président Nicolas Sarkozy avec le Premier ministre François Fillon au bois de Boulogne est véritablement une aubaine pour donner l’image d’une équipe qui est unie et qui fonce.
Certes, s’installer avant son investiture dans une résidence du Premier ministre (le bureau de l’ancien ministre Azouz Begag !), aller à l’Assemblée nationale et même au Conseil national de l’UMP pourrait paraître cavalier, mais ne surprend pas sur la volonté de Sarkozy à vouloir tout diriger. Jusqu’à refuser l’existence d’une présidence de l’UMP.
La nomination du gouvernement, qui a pris beaucoup de temps, a été aussi une très bonne opération de communication : le refus probable de Hubert Védrine n’a pas caché la bonne volonté de ce dernier en se rendant à son bureau, et les nombreuses consultations auprès de parlementaires parfois de l’opposition, comme Jean-Marie Baylet, semblent promettre une pratique voulue avec dialogue et concertation.
La composition du gouvernement est très habile. La nomination de Hervé Morin à la Défense est une belle récompense, mais plus encore celle de Bernard Kouchner et de Jean-Pierre Jouyet aux Affaires étrangères et européennes.
Kouchner n’a jamais été aimé des socialistes ou des radicaux de gauche (à l’origine), critiqué surtout pour son égocentrisme médiatique. Il n’a jamais pu se faire élire, et les quelques tentatives (avortées) de parachutage à Grenoble ou à Metz se sont toujours soldées par un échec (la base militante du PS refusant cet homme décidément trop encombrant bien que populaire). Sarkozy, en fin connaisseur de la vie politique, lui a offert sur un plateau, le Quai d’Orsay, le rêve de sa vie alors que celle-ci, à 67 ans, est déjà bien entamée.
Pouvait-il refuser ? Surtout qu’avec ses déclarations du 15 avril 2007 prônant l’ouverture, Kouchner se montre finalement assez cohérent avec son positionnement politique.
Quant à Jouyet, gros poisson puisque ancien directeur du cabinet de Lionel Jospin à Matignon, et considéré comme un ami personnel du couple Hollande-Royal, il semblerait que ce dernier, n’ayant eu aucun échange avec Ségolène Royal depuis plus d’un an, a été très affecté par cette indifférence.
Dans l’appellation des ministères, l’habileté sarkozyenne est très présente. Ainsi, le ministère de Brice Hortefeux. Au début, et fortement critiqué (par moi notamment), l’appellation ‘Immigration et Identité nationale’ qui laissait augurer des associations douteuses. Puis au fil des consultations, elle est passée à ‘Immigration, Identité nationale et Codéveloppement’ pour finalement sortir en ‘Immigration, Intégration, Identité nationale et Codéveloppement’. Ainsi, Sarkozy ne s’est pas renié, tout en adoucissant l’appellation avec deux mots à fort caractère social (intégration et codéveloppement).
Certes, Sarkozy a décidé de bien verrouiller sa majorité en écrasant totalement toute possibilité de groupe bayrouiste à l’Assemblée nationale, fort de l’enseignement de 2002 où les chiraquiens avaient négligé la candidature de Bayrou (qui était le seul risque pour la campagne de Sarkozy ce printemps). Mais c’est une règle du jeu classique et compréhensible quand on écoute les propos toujours aussi violents contre Sarkozy.
Sur le plan de l’action gouvernementale, Sarkozy a aussi innové en recevant les partenaires sociaux avant même de prendre ses fonctions, leur assurant que la concertation serait de mise à chaque réforme du travail, prenant note de la très mauvaise gestion du CPE en début 2006.
Certes, Nicolas Sarkozy n’hésite pas à dire que tout est une priorité et je ne suis pas sûr que le fait de vouloir faire toutes les réformes en même temps soit un gage de bonne lisibilité, de paix sociale et de sérénité dans l’action gouvernementale.
Mais ses premières préoccupations sont intéressantes, notamment l’absolue nécessité de relance institutionnelle de l’Union européenne et des mesures fiscales pour relancer l’économie (l’objectif de Fillon est d’atteindre 3% de croissance).
Aujourd’hui, nous ne sommes plus en campagne, il ne s’agit plus que de juger sur les actes. Et pour l’instant, ils me semblent pertinents. On peut toujours dire que les arrière-pensées ne sont pas absentes, on peut toujours évoquer l’hypocrisie des uns et des autres, la perspectives des législatives...
Il reste que, lorsqu’on a le pouvoir, on ne doit être jugé que sur ses actes. À mon sens, ils méritent aujourd’hui un préjugé favorable. Et une vigilance attentive pour les actes futurs.
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