Les vertus de la fessée
Mardi 27 août
Gonflé à bloc par les beaux succès – qu'on ne peut guère contester - de l'intervention armée au Mali, le Maréchal Hollande, probablement inspiré par nos amis qataris et saoudiens (notre ministre de la guerre se trouve aujourd'hui dans les Emirats), est maintenant décidé à « punir » Bachar el-Assad.
A écouter tant de commentaires divers, ce soir plus encore que les précédents, on est obligé de se pincer pour s'assurer qu'on ne rêve pas. Il y a d'abord cette commission d'experts de l'ONU, chargée de déterminer l'origine des tirs responsables des morts causés par un neurotoxique. Elle n'a toujours pas formulé ses conclusions, lesquelles seront, dit-on, délicates à établir. Pourtant, on sait déjà (comment ?) que ce ne sont pas les opposants qui sont responsables, mais l'armée syrienne, et il semble qu'il soit donc tout à fait inutile d'attendre le rapport des experts. C'était déjà, hier ou avant hier, le discours que tenait un John Kerry. Il avait la conviction que c'était Bachar el-Assad qui avait fait le coup, et cette intime conviction du citoyen Kerry devait bien suffire à justifier quelques missiles. Tout cela paraît tout de même assez contraire au plus élémentaire bon sens. On peut à bon droit s'inquiéter des conséquences.
On entend de très curieuses explications. Il ne s'agirait pas de faire la guerre à la Syrie : aucun soldat occidental ne mettrait le pied sur le territoire. L'aviation elle-même n'interviendrait pas : il y a trop de missiles sol-air en Syrie pour risquer la vie des pilotes. On se contenterait d'envoyer quelques petits missiles sur quelques petits objectifs symboliquement choisis. Sur France 24 , le général Desportes évoque plusieurs possibilités : bombarder, par exemple, le palais présidentiel - mais en l'absence de Bachar el-Assad !-, ou quelque site stratégique d'importance mineure, ou des stocks de munitions. Ensuite, la leçon étant donnée, laisser se taire les armes et passer à la diplomatie - comme on dit toujours.
Pourquoi prévenir Bachar el-Assad de la démolition programmée de son palais ? (*) Eh bien, tout simplement, parce qu'il ne saurait être question de le supprimer physiquement ou même d'affaiblir trop son armée, étant bien entendu que le chaos qui suivrait sa disparition serait pire que ce que nous pouvons observer en ce moment. Là dessus, tout le monde semble à peu près d'accord.
Au fond, ce que nos gouvernements paraissent souhaiter, pour ne pas perdre eux-mêmes la face après avoir tant de fois observé l'autre en train de franchir les lignes rouges successives, c'est de pouvoir administrer une sorte de petite fessée au président Syrien, et de l'envoyer au piquet jusqu'à la fin de l'heure. Après cela, nos instituteurs espèrent, en bons pédagogues, qu'il aura perdu définitivement ses mauvaises habitudes. C'était simple, il suffisait d'y penser.
* Certes, il n'a pas été question de le « prévenir », mais si je traduis le propos de cette façon-là, c'est que je me demande bien s'il y aurait une manière plus efficace de s'assurer qu'il ne s'y trouve pas. Après la guerre chirurgicale, le bombardement sur rendez-vous, en quelque sorte.
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