Lobby nucléaire contre lobby anti-nucléaire
Halte au manichéisme ! En politique encore plus qu'ailleurs, il n'y a pas d'un côté les méchants lobbyistes face aux gentils idéalistes. Si le lobby nucléaire est puissant et organisé, celui des opposants à l'atome l'est tout autant, avec en prime un réseau militant déterminé.

Il y a toujours un problème lorsqu'un politicien répond à ses adversaires par l'invective et les noms d'oiseau. Chez les écologistes, l'anathème absolue est de qualifier de "lobbyiste" toute personne proposant des éléments allant à l'encontre de leurs idées.
La sortie médiatique du patron d'EDF, qui a affirmé cette semaine qu'une sortie du nucléaire menacerait un million d'emplois en France, a légitimement irrité les écologistes qui se battent depuis des années pour expliquer qu'une sortie du nucléaire est économiquement pertinente.
Lobby nucléaire contre lobby anti-nucléaire. Ce choc frontal va-t-il offrir aux Français un vrai débat sur le nucléaire (qui semble aujourd'hui indispensable) ? Un débat à charge et à décharge au cours duquel tous les points de vue s'exprimeront ?
Que nenni, puisque lorsqu'un défenseur de l'atome s'exprime, il se transforme automatiquement en manipulateur à la solde du lobby nucléaire. Et qu'a contrario, chaque sortie des anti-nucléaires est raillée comme "utopiste" et "irréaliste".
Pourtant l'industrie nucléaire et les associations anti-nucléaires constituent de facto des lobbies, qui utilisent diverses méthodes de mobilisation et d'influence pour faire avancer leurs idées dans l'opinion publique... Ce qui est d'ailleurs plutôt sain et démocratique.
Le terme de lobby est sans doute un gros-mot en France, mais à y regarder de plus près toute personne qui s'exprime de manière plus ou moins concertée et organisée fait du "lobbying" : c'est juste défendre ses idées et tenter de convaincre le plus grand nombre.
Il est évident que les déclarations d'Henri Proglio ne sont ni innocentes ni anodines et qu'il a en tête la défense d'un modèle industriel qui le fait certes vivre... mais auquel il croit aussi. rien en tout cas ne permet de lui faire un procès d'intention et d'affirmer que ses positions sont cyniques.
La parole des élus et permanents d'Europe Ecologie, des cadres de Greenpeance ou des diverses associations anti-nucléaires mobilisées, sont-elles également démonétarisées sous prétexte qu'il s'agit de salariés dont les prises de position seraient systématiquement peu sincères ?
La vérité est qu'en matière de nucléaire, comme dans beaucoup d'autres secteurs, les deux parties ont des convictions et une organisation pour défendre leurs messages : c'est peut-être du lobbying mais ça permet quand même d'avoir un débat contradictoire.
Et il serait temps que les deux camps sortent de l'invective et proposent aux Français une vue d'ensemble des enjeux globaux de la sortie sans que tout le monde ne s'accroche à sa petite vérité.
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