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Logique de l’échange marchand

L’économie est fondamentalement la science qui traite des conditions de l’échange entre producteurs et consommateurs. Dans l’échange le plus simple, le troc, A et B doivent pouvoir produire des biens dont ils ont réciproquement besoin. Si l’un des échangistes est défaillant (pas de production ou pas de besoin), l’échange ne s’effectue pas. On constate que le principe de l’échange suppose un équilibre difficile à atteindre entre deux partenaires. Le déséquilibre est donc consubstantiel à l’économie et la notion crise est redondante avec celle d’économie devenue « politique ». L’économie contient toujours le risque de crises qui se distinguent simplement par leur intensité, leurs causes et leur périodicité.

Bien que nous ayons affaire à une économie mondialisée complexe, la nature d’un déséquilibre peut s’analyser très simplement à partir d’un traitement de l’échange de base entre deux producteurs. La compréhension du plus simple nous permettra de saisir le plus complexe puisque, au fond, le mécanisme à l’œuvre est identique et ne change pas de nature en se démultipliant. Nous retrouverons par là-même les fondements des théories économiques les plus sophistiquées. Nous examinerons deux cas d’imperfection de l’échange.

1) Celui de l’échange impossible : A fabrique le bien a’ dont B a besoin mais celui-ci est dans l’incapacité de produire le bien b’ exigé par A dans l’échange.

Cette situation résulte de la contrainte de l’échange par laquelle deux échangistes doivent être en condition de produire « pour l’autre » afin de satisfaire leur propre besoin. Elle suppose que A dispose des moyens techniques et des matières premières pour satisfaire B mais cette production est impossible puisque B ne propose rien en échange. Ce cas sera d’autant plus fréquent entre échangistes voire entre pays que la division internationale du travail contraignent chacun à produire de moins en moins pour soi et toujours plus pour l’autre afin de satisfaire ses propres besoins. Dans l’économie autarcique, le produire pour soi est la règle, pour l’autre l’exception. Dans les économies d’échange, nous dépendons de l’autre pour notre propre survie. Il faut que notre travail corresponde à son besoin, il faut que nous lui offrions quelque chose de DIFFERENT qu’il ne puisse produire lui-même (ou à un coût plus élevé).

L’échange devient impossible lorsque B ne peut rien produire pour A (pas plus qu’il ne peut produire pour lui-même). En conséquence de cette loi de l’échange chaque chômeur met à son tour un autre travailleur au chômage. En effet, si A ne peut échanger avec B, il doit arrêter de travailler alors même qu’il dispose des moyens de satisfaire B. Il s’agit là d’une des modalité de la crise de surproduction des sociétés industrielles où cohabitent tout à la fois d’abondantes forces et moyens productifs et chômage élevé. La solution classique a été imaginée par Keynes : l’Etat doit distribuer par anticipation à B une fraction de la future production de A afin de satisfaire B sans que celui-ci ait à produire. Le producteur A est ainsi remis au travail mais dans le fond, il doit travailler gratuitement pour B. Les politiques de redistribution de revenus présentent donc le double avantage de lutter tout à la fois contre le chômage et de rétablir une certaine justice sociale. Mais au fond elles n’augmentent pas réellement les capacités productives qui existaient déjà et étaient simplement sous employées.

Cependant, se met en œuvre un diabolique mécanisme cumulatif inhérent à la productivité du travail dont la valeur individuelle s’élève graduellement. Consécutivement, la masse du travail dans les secteurs productifs (industrie, agriculture) ne cesse de diminuer et celui des services d’augmenter ce qui entraine un transfert de la valeur pour alimenter les dépenses étatiques et services sociaux (chômage notamment). Ainsi doit-on comprendre l’élévation croissante des prélèvements opérés sur le secteur dit productif et l’origine de l’Etat providence redistributif. Mais surtout ce mécanisme pervers trouve sa raison d’être dans la division entre secteur producteur de valeurs et secteur non marchand. Les différents services publics ne sont pas rémunérés et l’Etat est contraint de capter de la valeur sur le secteur marchand pour payer ses fonctionnaires. Le développement des services publics et des aides de l’Etat est donc totalement tributaire du secteur marchand et de ses salariés quant au taux des prélèvements que ceux-ci sont décidés à supporter. L’industrie peut produire des biens peu utiles ou des gadgets mais puisqu’ils sont marchands ils s’imposent aux services « sans valeur » que peut fournir l’Etat et qui pourraient s’avérer plus nécessaires.

2) Pour compléter notre analyse, il faut examiner un déséquilibre de fond interne au secteur marchand lui-même et qui concerne les productions avec contraintes physiques et certains services. Les secteurs primaire et secondaire (agriculture et industrie) n’ont pas vocation à produire des biens de façon illimitée puisque dépendant des capacités de la terre ou de la disponibilité des matières premières. En supposant que A (petit agriculteur) fournisse B (journaliste), sa production agricole sera limitée par les capacités et rendements de sa terre. Tel ne sera pas le cas de B qui ne rencontre d’autre limite que son temps de travail et son imagination. Mais comme le travail de B dépend de l’offre de A, le journaliste devra adapter ses capacités de travail à celles de A. Ainsi, le vaste secteur des services marchands est-il toujours en situation de surproduction, il dispose des moyens humains quasi illimités mais se voit obligé d’adapter son niveau de travail aux capacités et contraintes des secteurs primaire et secondaire.

Comme on le constate schématiquement les services étatiques sont sous l’entière dépendance des secteurs producteurs de la valeur marchande pour la quotité à prélever, et les services privés pour le niveau de leur production. Du côté des services, il y a des capacités illimitées qui restent inemployées quand celui des deux autres secteurs rencontrent des contraintes physiques objectives. De fait, la population active dans l’industrie et l’agriculture n’a cessé de diminuer, le chômage d’augmenter, contraignant à des transferts de travailleurs de plus en plus nombreux dans le secteur des services au développement limité.

On comprend aujourd’hui pourquoi les exigences de prélèvement de la valeur sont si pressantes tout comme la résistance des secteurs dit productifs à l’augmentation de ses charges.


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16 réactions à cet article    


  • jako jako 29 janvier 2014 15:03

    Et si A produisait pour A et B pour B ?


    • Alexiskbacri Alexiskbacri 29 janvier 2014 15:09

      Le retour vers des formes d’autonomie autarciques est en effet une des solutions d’avenir pour contrecarrer les effets négatifs de l’échange généralisé mondialisé.


      • jako jako 29 janvier 2014 15:13

        Merci de votre réponse, alors le problème des ressources et matières premières reviendra sur le devant de la scéne, quel casse tête !


      • Robert GIL ROBERT GIL 29 janvier 2014 15:18

        voila sur le sujet ...c’est court, est simplement expliqué.

        1) MARX ET LE CAPITAL FICTIF
        et
        2) CONCEPT DU CAPITAL FINANCIER



        • jef88 jef88 29 janvier 2014 16:00

          L’ORIGINE DE LA MONNAIE
          dans la Grèce antique des villes organisaient des marchés.
          au départ la règle c’était le troc !
          mais les villes prenaient un impôt sur ces marchés et l’impôt était en nature .....
          alors, facile de piquer une vache sur un groupe de quatre mais beaucoup plu difficile d’en piquer une et demie sur un groupe de six !
          alors, miracle ! ils ont inventé la monnaie !
          c’étaient au départ des lingots de métal (pas très pratique)
          puis l’argent et l’or ont fait leur apparition ! ! ! !


          • Buddha Marcel. 29 janvier 2014 17:05

            tout ceci est plus simple, je m’en vais vous le dire ...pour survivre un seul moyen il y a c’est uniquement tu vois le groupe collectif...déjà pour ma naissance a un collectif je la dois , de la jusqu’à ma mort avec les autres travaillera..avec entraide et soin , nous survivons très bien le matin au jardin et le soir chez les voisins...cela aurait du durer des millions d’années , car vivre simplement cache les profonds secrets d’une vie bien comprise. ce fut sans compter sur l’insatisfait et le violent , sur le voleur aussi qui voulait tout le grain...médusé et surpris par tant d’infamie, les bras donc nous en sont tombés ... puis de fil à tricoter en aiguille a repriser, nous sous sommes laissez faire, trop occuper à vraiment travailler...voila comment il y a déjà longtemps le barbare , le mécréant nous vola notre vie...

            Il n’y a rien a vendre et rien à acheter si tu veux quelque chose démerde toi pour le faire, seul tu ne pourras pas, ou bien alors si mal ,que après quelque mois la mort sera fatale. alors avec les autres peut être va tu le faire, mais si tu le peux tu vas encore mal faire..la société marchande déjà là est le troc, n’est rien d’autre que l’assurance d’une vie misérable, au plus bas tu achètes au plus haut tu revends, là réside en fait le seul sens ici bas...comme ça n’a aucun sens et que nous le savons, le jours alors arrive on nous nous détruirons....

            survivre est une chose mais vivre en est une autre, les marchands du temple ont beaucoup prospéré, sur le dos de l’esclave qui lui a accepté ,de perdre son bonheur et toute sa liberté
            Ainsi faute repose comme le premier péché, sur le couple maudit marchand et marchandé..

            vivre n’est pas survive, le sens est donc perdu, tu te maudis toi même a être si têtu..

            de chemin pas un pas deux il n’y a, et pourtant tu le crois pas ; naitre c’est aussi mourir, mais tu ne le veux pas, et bien mon gars alors pour ça tu vas souffrir ; souffrance qui bien sur rime avec démence, cependant rien n’y fait, je ne veux rien comprendre, plutôt un coffre en or qu’une amitié sincère, et voila comment donc disparue cette espèce perverse.....


            • Buddha Marcel. 29 janvier 2014 17:10

              cela étant dit pour moi la société marchande de profit est le vol et la guerre, point barre..

              le choix est facile a partir de là


              • Daniel D. Daniel Q. 29 janvier 2014 17:11

                Joli montage sophiste pour imposer une vision économique où le secteur commerçant et de service qui ne produisent rien ont une capacité d’enrichissement sans limite.

                Une bonne grosse simplification, un niveau de compréhension des échanges économique plus que léger, aucune prise en compte des réalités macro-économique.
                C’est indigent comme analyse, parler d’État, de chômage, d’industrie, agriculture, de redistribution, de contribution, et oublier la banque et son impact sur tout le système.

                Les intermédiaires économiques que sont les marchands et les banquiers qui était nécessaire dans certains cas, sont devenu obèses et nuisibles,grâce a l’allongement des chaines d’approvisionnement. L’histoire du jean a une jambe fonctionne aussi pour le commerce international. la tonne de riz acheté 1 vendu 2 puis revendu 3 puis revendu 4 jusqu’au mort de faim africain qui n’auras pas les moyens d’acheter ...

                L’État ne remplit pas son rôle de protection et de service des citoyens, il est au service des banquiers et des marchands qui construisent la mondialisation qui les enrichit de plus en plus.

                L’économie, c’est de la politique.

                L’usure, c’est du vol !


                • Buddha Marcel. 29 janvier 2014 17:31

                  très bien dit et démontré.....à mon avis

                  salutations


                • Daniel D. Daniel Q. 29 janvier 2014 18:58

                  L’économie est en train de nous tuer, mais on peut la neutraliser définitivement.

                  Il faut juste un choc et une bonne préparation intellectuelle des populations sur la réalité de l’économie et ses effets.

                  Le temps vient pour la création d’un système monétaire plus rationnel et d’une réalité sans usuriers parasitaires, on as les moyens technique de faire disparaitre les banquiers tout en gardant des structures de dépôt retrait et d’échanges.

                  La dette est l’escroquerie la plus inique et la plus lourde de conséquence qui n’ait jamais existé, tout doit être révélé, il est temps pour la vérité d’être exposé en pleine lumière !


                • Buddha Marcel. 30 janvier 2014 08:56

                  j’adhère oui..merci..de toutes facons l’heure est à la tourmente, elle est inetiable, le choi sera victime consentante, ou autre chose de nouveau...

                  la vie va nous forcer au seul choix que nous ayons jamais eu, ensemble ou les uns contre les autres...


                • Cassiopée R 29 janvier 2014 17:26

                  Les énergies utilisés par l’économie sont en train d’asphyxier la planète et ses habitants, alors tout ses bons théorèmes ne servent rien si ce n’est à nous tuer à petit feu.


                  • Alexiskbacri Alexiskbacri 29 janvier 2014 17:46

                    Pour Daniel Q
                    Vous avez effectivement compris que je simplifiais à l’extrème et je vous complimente. Vous avez également remarqué que je n’aborde pas le rôle de la monnaie et des banque et je vous en félicite.Si vous avez pratiqué la science économique vous auriez constaté que tout se tient, chaque phénomène réagit aux mouvements des autres dans un système d’interdépendance généralisée. Il est donc difficile d’étudier un domaine indépendant des autres ce qui necessiterait à chaque fois l’élaboration d’un traité. Tel n’était pas l’objet de cet article court voulant saisir le plus microscopique, le système génétique dans son fonctionnement le plus primaire.
                    Je déplore enfin que vous n’ayez pas bien saisi le caractère particulier des services qui ont peu de contraintes matérielles objectives et qui disposent donc EN THEORIE d’un potentiel de développement illimité.


                    • Daniel D. Daniel Q. 29 janvier 2014 18:52

                      Je reconnait le potentiel illimité de croissance des services et sa dangerosité vis a vis du système économique réel. C’est la croissance de ce système qui as permit l’existence d’une structure capable de détruire l’économie réelle productive. C’est ce même schéma de pensé qui ne peut inclure la redistribution et le social dans ses analyses, et qui n’analyse pas le rôle et l’effet de l’État de manière impartiale.

                      L’échange économique meurt actuellement de la déflation de la masse monétaire globale, c’est a dire du volume de dettes servant de liquidités dans l’économie réelle. C’est structurel, logique, mathématique, et cela influence la totalité des échanges économiques.

                      Le service de la dette est ce qui nous ruine progressivement depuis 1973, avec la complicité active des politiques, des économistes aux ordres et des médias pour cacher l’information et faire de la propagande simplificatrice pour que le moins possible de gens pensent a s’intéresser à la cause des causes.

                      Quand on veut expliquer la vie d’un poisson, on ne peut pas ne pas parler de l’eau, même si le poisson parlerais probablement de tout de reste avant d’en venir a ce fondamental.

                      Le sophisme est l’art de construire des chaines logiques amenant a des conclusions logiques dans un cadre choisi au départ qui est basé sur des postulats erronés. La chaine de raisonnement est rationnelle et logique, mais remise dans son contexte global elle montre son coté irrationnel et incohérent.

                      Chassez les changeurs et les marchands du temple, l’usure c’est du vol.

                      Cordialement,


                    • SALOMON2345 29 janvier 2014 18:15

                      Au petit matin le boulanger produit et vend ses croissants grâce au travail du mitron qui a pétri la farine elle-même reçue du meunier lequel a écrasé les grains livrés par l’agriculteur de ses blés moissonnés par sa machine fabriquée en Allemagne, récolte grâce également aux semences achetées aux US... et le balayeur qui fait le ménage et les carreaux de la boulangerie tandis que l’éboueur se coltine la poubelle : c’est quoi comme « valeur », marchande ou pas ?

                      Quand à devoir payer avec des enclumes (pour faire du troc par le métallurgiste) c’est effectivement difficile pour acheter sa baguette de pain quotidienne...
                      Edgar Morin confirme que tout est complexe : la preuve !!! En soulevant le capot d’une voiture je reste dubitatif devant la « foultitude » de pièces utiles pour que le moteur fonctionne pour partir ensuite en week-end sur des routes entretenues - par nos impôts les garces - et trouver tout ce qu’il nous faut pour le bien-être de notre séjour, avec plein de gens qui bossent, qui bossent, qui bossent... dans le marchand ou non !!!

                      • Alexiskbacri Alexiskbacri 30 janvier 2014 09:29

                        Oui, mais le boulanger va dépendre du meunier qui va dépendre de la quantité de blé moissonné et donc les industries de tranformation ont leur niveau d’activité tributaire du secteur agricole. Mais ces services rajoutent de la valeur-travail également et sont considérés comme marchands à la différence des services publics gratuits.

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