Mai 1939 à Paris : une incroyable campagne de publicité pour l’Allemagne nazie et contre l’Union soviétique…
En Ukraine, la victoire de la révolution bolchevique est très vite suivie par un meeting à l’occasion duquel Skrypnik, un membre du Comité central bolchevik, se sera écrié :
« Camarades, Kiev est libérée par l’armée rouge des ouvriers et paysans révoltés ! Camarades, le pouvoir des Soviets vous apporte… » » (Alexandre Barmine, op. cit., page 81.)

D’une certaine façon, ces points de suspension sont lourds de menaces… En effet, voici ce que, selon notre témoin, les Soviets sont susceptibles d’apporter là où la population a le malheur de les voir arriver triomphants…
« Nous vîmes la scène suivante. Un couple se présenta devant le poste, l’homme vêtu en ouvrier. Ses papiers étaient en règle. Ils passèrent. Le chef de poste les suivait d’un regard aigu. Il les rappela. D’un geste brusque, il dégrafa le paletot de l’homme et découvrit, comme il s’y attendait, des épaulettes. « Emmenez-le ! » Deux soldats emmenèrent l’officier, dont la femme ne comprenant pas encore quel malheur s’abattait sur eux, demandait : « Mais qu’arrive-t-il, mon ami ? » Quatre cents officiers prisonniers furent fusillés à l’arsenal en représailles du massacre des ouvriers. Le sang appelle le sang, cela ne faisait que commencer. » (Idem, page 82)
Et pourtant, par la suite, Alexandre Barmine offrirait vingt ans de sa vie à ceux qu’ils présentent ici tout simplement comme des criminels, tout en nous assurant du fait que ce genre d’assassinat n’était qu’un début !… De qui se moque-t-il ? Des Françaises et des Français de 1939 ?…
Mais, puisque les bolchéviks avaient commencé, il n’y a aucune raison de s’étonner de l’attitude de la Rada ukrainienne… qui se trouve bientôt rangée en une étonnante alliance que voici paraître cinq semaines plus tard, lorsque… « l’armée rouge de Mouraviev dut se replier devant les Ukraino-Allemands ».
D’abord incrédules, nous sommes aussitôt renvoyé(e)s vers une note de bas de page qui ne paraît pas être de Barmine lui-même…
« La « Rada » chassée presque complètement de l’Ukraine demanda l’aide des Allemands. Les Allemands envahirent l’Ukraine avec 33 divisions dont quatre de cavalerie, au total plus de deux cent mille hommes. La résistance de l’armée rouge était brisée. Les Allemands avançaient avec une rapidité foudroyante. Kiev était occupé le 16 mars [1918]. Poltava, le 30, Kherson le 10 avril. À la fin d’avril les soldats du Kaiser, traversant toute l’Ukraine, entraient en Crimée et au pays des cosaques du Don. » (Idem, page 82)
Au moment où tout ceci se passe, Alexandre Barmine, qui est lui-même né le 16 août 1899 à Waljawa en Ukraine, n’a pas encore dix-neuf ans… Comment ressent-il l’arrivée des Allemands en présence de ces bolcheviks qu’il prétendra avoir rejoints ensuite pour rester à leur service jusqu’à l’âge de 37 ans révolus ? Voilà ce qu’il tient à en faire savoir en France durant l’année cruciale de 1939 :
« « Les Allemands sont là ! » L’idée qu’ils se battaient depuis quatre ans contre le monde entier et entraient maintenant au cœur de l’Ukraine avait quelque chose de grand. Le lendemain, je remarquai à la gare un changement extraordinaire. La gare de Kiev était depuis 1914 délabrée, abandonnée, d’une saleté irrémédiable… Des équipes de soldats y lavaient tout à coup les planchers, y peignaient les murs, y accrochaient des écriteaux allemands tout neufs. Une odeur de savon et une atmosphère d’ordre miraculeux y régnaient. » (Idem, page 82. Les points de suspension sont dans l’édition française.)
Avis aux Parisiennes et aux Parisiens pour l’été de 1940 !…
Car la suite de l’argumentaire – que sa date de publication en France permet de ranger ici dans un cadre pro-nazi – déployé par le futur époux de la petite-fille de l’ancien président des États-Unis, Theodore Roosevelt, n’est pas mal non plus :
« Kiev se ressentit de cette dictature de l’ordre : nos maîtres mêmes vinrent en classe proprement rasés. » (Idem, page 82.)
Les collabos sont d’ailleurs jugés inférieurs à la tâche que l’Allemand veut, et peut seul sans doute, promouvoir… en cette année 1918, à Kiev (Ukraine), tandis qu’à Berlin règne l’empereur Frédéric Guillaume Victor Albert de Hohenzollern :
« À la fin d’avril, le général allemand Eichorn a « envoyé promener » le gouvernement national de la « Rada » qui était trop rouge pour lui. Sur les baïonnettes allemandes était constitué le régime monarchique avec le traditionnel « Hetman » à la tête. » (Idem, pages 82-83)
Voilà qui a décidément de la gueule, n’est-ce pas ?… Qu’attend donc la France de 1939 pour laisser passer le Führer Adolf Hitler, et lui permettre de chasser tout ce qui est trop rouge pour lui ?
Et comment bouder tout le reste de ce que nous annonce Alexandre Barmine ?…
« On pouvait voir passer en auto, dans les rues, l’hetman Pavlo Skoropadski, ancien général de l’armée tzariste, nouveau chef de l’État de la nouvelle puissance d’Ukraine indépendante, protégé du Kaiser. C’était un homme d’âge mûr, vêtu d’un bel uniforme blanc et portant la croix de Saint-Georges de l’ancien régime. La presse illustrée d’Ukraine s’imprimait à Berlin. Des billets de banque ukrainiens, d’un modèle neuf, aussi imprimés à Berlin entrèrent en circulation. » (Idem, page 83.)
Mais pourquoi donc, après avoir été témoin de tout cela qui tranchait si nettement avec la barbarie bolchevique, s’agglomérer au parti communiste d’Union soviétique, s’introduire dans la hiérarchie militaire et puis rejoindre le personnel diplomatique en poste à l’étranger ?…
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