Max Gallo : du sort souvent funeste des convertis
De tous temps, il y eut des convertis, et l’on ne peut que se réjouir de ce signe de santé mentale de l’humanité. Nos idées ne sont dont pas si minérales et nos opinions évoluent parfois pour s’adapter à des changements qui ne nous doivent rien, mais nécessitent de notre part une modification de jugement, de comportement, d’action.
(Janissaires, eux ont été convertis par force,
mais leur sort ne manqua pas d’être funeste)
C’est ainsi qu’une célèbre dame de plume a pu écrire
« Cet homme, je l’adorais et à présent je ne peux plus le supporter
…
comme les hommes changent ! »
Pourtant s’il faut avoir un regard positif sur ces mouvements de l’esprit et du cœur, sur ces balancements de l’âme, force est de constater que la condition de ceux qui font ainsi preuve de mobilité, de souplesse, de sensibilité à la pensée, à l’opinion de l’autre, cette condition-là n’est pas vraiment très enviable.
Une des raisons de cette faible approbation des uns et des autres (ceux qui ont été abandonnés autant que ceux qui ont été rejoints, et même, celui qui prend connaissance des faits sans être engagé en rien dans l’affaire) est que, de même que celui qui se révolte peut être qualifié aussi bien de résistant, de patriote ou de saboteur, voire de terroriste (ou encore d’ennemi combattant illégal aux Etats-Unis et enfermé par précaution sans procès ni accusation d’aucune sorte) de même, celui qui passe d’une conviction à une autre peut se voir indifféremment attribuer le statut d’opportuniste, transfuge, renégat ou même d’apostat.
La nuance avec le qualificatif donné précédemment (converti, ou « homme d’ouverture ») étant en grande partie du domaine du subjectif et donc fort difficile à contester.
Ainsi en est-il de Max Gallo, réputé homme de gauche qui a rejoint depuis la dernière campagne présidentielle le camp et même la personne d’un homme peu apprécié de l’électeur de gauche (je ne parle pas ici des chefs de parti dont on ne sait trop s’ils sont autre chose que des « cadres politiques disponibles » ) lequel se trouve actuellement dans la triste position d’être qualifié de traître par certains de ses anciens amis, alors que ceux du bord où il vient d’accoster sont loin de l’accueillir à bras ouverts.
Triste condition qui est souvent le lot du converti, mais qui peut encore se détériorer grandement pour peu que le camp qu’il a décidé de rejoindre donne des signes de faiblesse ou, pire, en vient à se délester d’une partie des éléments (convictions, valeurs, promesses) qui avaient précisément motivé sa conversion.
Hors c’est précisément la position dans laquelle se trouve notre récent académicien (une récompense qui pour certain a une odeur de soufre et participe à une méfiance qui n’avait pas besoin de cela), face à un "ami" sans cesse en mouvement dans des directions opposés, qui se déclare chaque jour « le meilleur ami » du pays où il pose le pied, ou de l’homme dont il serre la main, cet ami constamment en situation de redéployer pour Paul les moyens qu’il avait, dans l’instant précédent, promis à Pierre (comme par exemple la réattribution d’une partie des fonds du Grenelle de l’environnement pour alimenter le plan banlieue).
Mais il y a pire !
Il peut arriver que le cheval choisi – à tort ou à raison, le propos n’est pas là – s’avère ne pas être le bon.
La pièce rapportée se trouve alors dans la position de tous ceux qui ont soutenu un conquérant, lequel, après une période de victoire et de fastes, se voit contraint de reculer, décliner, voire disparaître.
Dans ce cas, les places dans l’avion du retour sont très chères (les Arkis, ou leurs homologues vietnamiens en savent quelque chose) et celui dont on persiste à se méfier parce que ses origines sont autres, et surtout en raison d’une présomption d’un nouveau « retournement » potentiel (ce qui a été fait une fois peut l’être à nouveau), celui-là n’a guère le choix. Car, dans ces replis, ces retraites périlleuses, les plus vaillants soldats, par devoir, mais surtout par désespoir, sont souvent les pièces rapportées.
Max Gallo est ainsi de plus souvent dans cette situation de défense pied à pied d’un territoire que d’autres ont déjà abandonné, comme cela a été le cas par exemple dans sa prestation sur l’Esprit public du 22 juin où il s’est senti obligé de justifier des baisses d’impôts pourtant tout à fait injustifiables (sur ce point la quasi-unanimité des analyses s’accordent*), face à ceux qui prenaient garde de ne pas trop toucher l’homme à terre (sur France Culture on n’est pas chez Ruquier) contraint d’user de formules expéditives à propos d’un désaccord sur lequel il manquait d’argument, et de procéder comme l’homme dont il s’est rapproché, à savoir sauter constamment à un nouveau sujet (allumer un nouveau contre-feu technique éminemment Sarkozienne) pour quitter chaque terrain où son pied s’embourbait.
Victime de cette obligation faite au converti de défendre plus vigoureusement encore que tout autre celui qui était l’adversaire, rallié parfois pour des raisons tout à fait légitimes, on comprendra que l’Immortel n° 24**, ex-porte-parole de Pierre Mauroy, ait de plus en plus de difficulté avec le réel et en particulier le parcours sinueux de celui dont il est devenu le soutien.
Et malheureusement pour lui, en dehors de l’hypothétique éclatante victoire du camp qu’il a rejoint, et plus particulièrement de la personne à laquelle il a associé son chemin (qu’il faut même à présent protéger de son propre parti où le mécontentement commence à gronder***), il est difficile de trouver une issue positive à la situation de Max.
Il ne lui reste plus qu’à l’ancien président du Mouvement des citoyens à espérer que les dieux de la guerre soient avec lui.
Alors, au bout du triomphe, pour celui qui a commis deux tomes sur Napoléon****, il y aurait la promesse, sur le même modèle, d’une autre fameuse biographie.
* 80 % des montants ont profité à moins d’1 % de ceux qui bénéficiaient de la mesure.
Pour tous les autres bénéficiaires, la mesure coûte plus qu’elle ne leur rapporte !
** puisque académicien
*** Notamment en raison de la « politique d’ouverture » aux « personnalités disponibles »
**** Une raison du ralliement à celui qui a pu se dire « Bonaparte sans Napoléon » ?
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