Miviludes : les dérives de la mission anti-dérives
La Miviludes et ses répercussions sous forme de commissions parlementaires coûteuses et inefficaces fait choux blanc dans ses derniers travaux. Au point où le contribuable est en droit de se poser la question de l’utilité de son existence et de la légitimité de son travail.
La Miviludes, créée par décret le 28 novembre 2002, est placée sous l’autorité du Premier ministre. Un bureau de 13 personnes, un comité de pilotage de 26 personnes, un comité d’orientation de 30 personnes, une moyenne de 70 sessions de formation dans l’année, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires est un gros appareil, qui coûte cher.
Le sujet lui-même semble avoir son importance, puisque chaque ministère possède son ou ses correspondants "sectes", chaque préfecture possède sa "cellule départementale de vigilance", chaque Cour d’appel son magistrat "correspondant sectes".
Quant à l’Assemblée nationale, elle en est à sa troisième commission d’enquête parlementaire sur les sectes en onze ans, et possède un groupe d’études permanent sur le sujet.
Alors, à l’annonce de la dernière commission d’enquête parlementaire sur les sectes et les enfants, les Français étaient en droit de s’attendre à un travail sérieux, fondé sur des chiffres justifiant la mise en branle de cet énorme appareil.
Or, la publication du rapport 3057 enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 12 décembre 2006, rapport faisant état du sommaire des auditions menées par ladite commission de juin à décembre 2006, révèle une réalité décevante qui remet en question l’existence même de ce type de commission coûteuse.
Du côté du ministère de la Justice, le 3 octobre 2006, Mme Sancy, directeur de la protection judiciaire de la jeunesse, répondait à la commission : "Il y a trois ans, nous avons réalisé, auprès des juges des enfants, une enquête de manière à pouvoir, nous aussi, cerner un peu statistiquement ce que pouvait représenter la problématique sectaire dans le travail des magistrats et des éducateurs et nous nous sommes aperçus qu’elle était très marginale par rapport à l’ensemble des autres problèmes que notre direction est amenée à gérer pour ces mêmes mineurs, à savoir les problèmes de violence, de déscolarisation, d’insertion professionnelle, de difficultés familiales".
Du coté du ministère de l’Intérieur, Didier Leschi, chef du bureau central des cultes, déclarait : "En vue de cette audition, j’ai demandé aux préfectures de recenser, sur les trois dernières années, les incidents liés à la transfusion. Il est remonté un petit nombre d’incidents, souvent réglés par la discussion. Aucun incident mettant en cause des enfants ou un pronostic vital n’a été relevé".
Pour le ministère de la Jeunesse et des Sports, M. Etienne Madranges répondait : "Statistiquement, depuis les trois dernières années, nous n’avons pas eu de cas où nous ayons pu démontrer une mise en danger délibérée des mineurs".
La Commission avait aussi interrogé Mme Françoise le Bihan, du ministère des Affaires étrangères, qui avait répondu le 17 octobre : "Notre service est en charge de tout ce qui concerne la protection consulaire des Français à l’étranger, donc aussi des enfants. Aussi est-ce dans l’ensemble du périmètre de nos actions que j’ai recherché celles qui pouvaient intéresser votre mission. Dans ce vaste ensemble, je n’ai trouvé trace que de deux cas présentant un lien avec le comportement sectaire : le premier, qui se situe au Canada et qui a défrayé la chronique est celui de Mme Getliffe et de ses enfants, le second, pour lequel je ne souhaite pas donner de nom, concerne le père d’un enfant que sa mère a emmené en Suisse [...] Il n’y a pas eu d’autres cas que les deux que je viens de vous citer".
Certains parlementaires ayant fait circuler le chiffre arbitraire de "60 000 enfants victimes de sectes", de manière à justifier médiatiquement l’existence de la commission, M. Joël Bouchité, directeur central des Renseignements généraux déclara le 4 octobre 2006 : "En tout état de cause, 60 000 enfants sur tout le territoire national, cela me paraît beaucoup. Lors de nos relations sur le terrain, dans les préfectures, avec l’éducation nationale, les DDASS, les centres aérés et tous les organismes qui traitent de la jeunesse, nous n’avons jamais eu affaire à 60 000 signalements, ni même à 30 000, mais tout au plus à quelques dizaines..."
Le 11 octobre, M. Michel Godin, directeur général de la Police nationale, déclarait : "J’ai le sentiment que ce phénomène, quoique préoccupant dans certains cas individuels, s’agissant d’enfants, n’est pas une forme de délinquance d’une ampleur de nature à devoir générer trop d’inquiétudes".
Le 12 octobre, Mme Carola Arrighi de Casanova, sous-directrice de la Direction des affaires civiles et du sceau au ministère de la Justice ajoutait : "Je dois d’emblée indiquer que nous ne sommes quasimment jamais confrontés à des situations liées aux sectes".
Ce même jour, Michel Rispe, chef de bureau de l’entraide civile et commerciale internationale au ministère de la Justice déclarait : "Il n’y a à ce jour aucun dossier ouvert, parmi les quelque cinq cents dossiers en stock, dans lequel il y ait des allégations d’appartenance sectaire".
Le 10 octobre, M. Thierry Xavier Girardot, directeur des affaires juridiques au ministère de l’Education nationale avait lui-même répondu à la commission qui lui demandait combien, sur les 23 cas uniques recensés de mise en demeure de scolarisation d’enfants (après 1 119 contrôles), avaient été concernés par le phénomène sectaire : "Je ne suis pas sûr qu’il y en ait un seul".
Et les déclarations se suivent et se ressemblent.
Surprise ?
On peut en douter lorsque l’on sait que, un an auparavant, le 6 septembre 2005, en réponse à une question de Philippe Vuilque, président du groupe d’études sur les sectes, le Premier ministre d’alors Dominique de Villepin avait répondu à l’Assemblée nationale : "Les cas de maltraitance physique ou psychologique de mineurs en relation avec l’appartenance d’un ou des parents à un mouvement dit à caractère sectaire sont exceptionnels".
On peut dès lors se poser la question de l’utilité d’un tel appareil dans une scène nationale qui ne justifie nullement les dépenses du contribuable pour un phénomène marginal.
Le président de la Miviludes, M. Roulet, est aujourd’hui mis en examen pour diffamation suite à ses propres dérives.
La dernière commission d’enquête parlementaire sur le sujet a fait choux blanc, comme on a pu le voir.
Je n’ai pas examiné les précédentes commissions, mais il serait intéressant de se pencher sur la question.
Quoi qu’il en soit, d’autres phénomènes n’ont pas fait l’objet de trois enquêtes parlementaires :
- la drogue, qui génère une interpellation toutes les 5 minutes ;
- le suicide, avec un suicide toutes les 40 minutes (11 000 morts par an) ;
- le viol, avec un viol commis toutes les 2 heures.
Pourquoi vouloir détourner l’attention vers des phénomènes inexistants ?
A quand la Miviludecop, Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives des commissions parlementaires ?
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