Mon plan zéro Covid en trois mois, avec un dépistage massif
Le plan consiste en un confinement glissant de trois semaines, incluant un dépistage massif de la population grâce au pooling (regroupement de tests). La France sera découpée en neuf zones de sept millions et demi d’habitants chacune, dépistées l’une après l’autre. Le plan durera onze semaines et mobilisera 43 600 infirmiers et infirmières.
L’itinéraire de 1000 milles commence par un pas. (proverbe chinois)
Ari Joffe balaie l’éradication du revers de la main au prétexte qu’elle nécessiterait des milliers de traceurs (1). BFMTV s’interroge sur la durée du confinement qui serait nécessaire pour parvenir à l’éradication : « deux, trois, six semaines ? » (2) Le plan présenté ici répond à ces deux objections : il réserve le traçage pour la situation où le taux de circulation du virus sera bas, et écourte le confinement grâce au dépistage.
Première semaine
La zone 1 est confinée le plus complètement possible. Les commerces sont fermés, y compris alimentaires. Ceci est possible parce que le confinement ne dure que trois semaines et que les populations sont prévenues avec suffisamment d’avance. Les transports en commun, postiers, livreurs et chantiers sont à l’arrêt. Seules sont maintenues les professions essentielles : hôpitaux, pharmacies, médecins, médias, stations essence et éboueurs.
Des plots en béton ferment les routes. L’armée surveille que personne ne passe. Des laisser-passer sont délivrés pour la logistique du dépistage et les fonctions essentielles (carburant, etc.).
Complet ne signifie pas strict : l’activité sportive individuelle, la promenade et la sortie des animaux de compagnie sont autorisées. Garder cependant à l’esprit qu’une contamination par les parties communes de l’immeuble est possible (3).
Deuxième semaine
La zone 2 est confinée.
Troisième semaine
La zone 3 est confinée.
La zone 1 est dépistée. Les équipes sanitaires parcourent chaque rue et effectuent les prélèvements naso-pharyngés sous un abri de fortune. Aidés des autorités locales, des “rabatteurs” appellent les habitants et les placent en files parallèles, distinguant seulement symptomatiques et asymptomatiques, sans cependant séparer les personnes d’un même foyer afin d’optimiser le pooling. Chaque personne testée positive rencontre un médecin qui évalue sa situation et décide d’une éventuelle prolongation de la quarantaine.
Le dépistage est obligatoire. En cas de refus, deux semaines d’isolement supplémentaires sont requises. Des services sont proposés aux personnes en quarantaine pour les aider à passer la période aussi confortablement que possible. (4)
Quatrième semaine
La zone 4 est confinée. La zone 2 est dépistée.
La zone 1 est libérée : les restrictions sanitaires sont levées, à l’exception du masque dans les transports en commun. La vie reprend son cours normal. Les personnes testées positives sont en isolement à domicile, sous le contrôle d’un bracelet électronique. Un agent de suivi visite chaque jour la personne et veille à ce qu’elle n’ait besoin de rien.
Dans un souci de simplification, aucune liste d’habitants n’est dressée au préalable. Ceci fluidifie le dépistage, et apporte de la souplesse à la population aussi car le dépistage aura lieu quel que soit le lieu où la personne se trouve (résidence secondaire, garde alternée, etc.). Le corollaire est que les contrôles seront effectués a posteriori, par des contrôles de police intensifs : dans les rues, les commerces, les bureaux, les transports en commun, etc. Toute personne testée positive, ou n’ayant pas été dépistée, est recherchée par la police. Des sanctions dissuasives sont prévues. L’omniprésence policière doit marquer les esprits et symbolise la fin du laxisme (5). Elle rappelle à la population que la négligence et la désinvolture ont échoué. Ces contrôles ne durent cependant que deux semaines !
Un contrôle des eaux usées confirme la baisse de la charge virale.
Cinquième semaine
La zone 5 est confinée, la zone 3 est dépistée, la zone 2 est libérée. Et ainsi de suite !
Passons aux calculs
La population
La France compte 67 848 156 habitants (6). On dépiste seulement les habitants de 12 à 80 ans parce que le taux d’incidence est plus faible chez les enfants (7), et pour éviter de faire courir des risques aux personnes âgées. On ne dépiste pas les populations rurales car ce serait trop chronophage. Ce serait pourtant utile (8). La population à tester diminue dès lors de 14,1 %, 5,6 % (9) et 20 % (10), soit au final 40 939 577 habitants à dépister. On dépistera avec un soin particulier les quartiers populaires et les vingtenaires et trentenaires (résidences étudiantes, etc.), où la contamination est la plus élevée (11) (12).
La capacité de test
La France a réalisé pendant la semaine du 14 décembre 1 647 350 tests PCR (13). Nous retenons ce chiffre comme capacité maximale. Une partie sera réquisitionnée pour le plan zéro Covid : dans la zone contaminée, les cas contacts et la moitié des préventions ne seront plus testés. Faute d’avoir trouvé les chiffres, même dans les rapports hebdomadaires de Santé Publique France, nous estimons au doigt mouillé réquisitionner 62,5 % de la capacité de test pour le plan, ce qui en laisse 37,5 % pour les zones où le virus circule encore. Noter qu’au fur-et-à-mesure où la zone contaminée se réduit, davantage de tests sont disponibles. En supposant qu’un cinquième seulement des tests seront nécessaires à l’issue du plan (pour les cas résiduels et la prévention), nous obtenons en moyenne 182 385 tests PCR par jour, que nous convertissons en dépistages dans le paragraphe qui suit.
La taille optimale du regroupement (pooling) est de 15. Il est possible en théorie de monter jusqu’à 30 (14), mais cela augmenterait davantage le nombre de tests dégroupés, qu’on n’en gagne en regroupant. Le taux d’incidence officiel, à l’heure où nous écrivons ces lignes, est de 214 (15). Mais les tests sérologiques révèlent qu’une personne contaminée sur deux (16), voire deux sur trois (17), ne se font pas dépister et ne sont donc pas comptabilisées. Nous gardons la moyenne et multiplions le taux officiel par 2,5, soit un taux d’incidence retenu de 535 contaminations par semaine et par 100 000 habitants. Grâce au regroupement et compte tenu de ce taux d’incidence, nous multiplions environ par sept la capacité des tests PCR, puisque nous atteignons 1 241 419 dépistages PCR par jour (dépistages PCR = tests PCR par jour x regroupement / (1 + regroupement^2 x taux d’incidence)). Mais, pour simplifier la logistique, nous en utilisons seulement la moitié : uniquement les laboratoires les plus proches de la zone dépistée, soit 620 710 dépistages PCR par jour (1 241 419 / 2).
La totalité des tests antigéniques sont réquisitionnés pour le plan, soit un million par mois (18). Ces tests simplifient grandement la logistique et sont recommandés par la HAS pour les dépistages « à grande échelle de populations ciblées » (19). Ces tests apportent un supplément de 32 787 dépistages par jour.
Toutes technologies confondues, nous aboutissons à une capacité moyenne de 653 497 dépistages par jour allouée au plan. (En réalité, la capacité débutera à 533 359 et augmentera progressivement. Mais, pour simplifier le propos, nous considérons ici uniquement les moyennes)
La durée de la campagne
Avant le dépistage, un confinement est nécessaire en raison du temps d’incubation. Nous avons retenu une durée d’incubation de sept jours, la moyenne étant de six (20). Nous multiplions par deux pour prendre en compte les contaminations intra-familiales, soit 14 jours. Le dépistage s’effectue donc en troisième semaine. Noter cependant qu’il existe des variations individuelles et que la durée d’incubation peut atteindre trois semaines, dans certains cas (21). Pour être d’une efficacité absolue, le confinement devrait, en théorie, durer au moins deux mois, soit deux fois trois semaines plus au moins deux semaines de contagiosité après l’apparition des symptômes (22). Un confinement aussi long aurait évidemment de graves effets délétères.
Nous aboutissons donc à une durée de 8,9 semaines (40 939 577 / 653 497 / 7) pour le dépistage, à laquelle s’ajoutent les deux semaines d’incubation. La durée totale pour le plan zéro Covid peut dès lors être établi à 10,9 semaines. En douzième semaine, l’immense majorité des Français aura retrouvé une vie (quasiment) normale.
Les effectifs
Nous considérons, en première approximation, qu’un prélèvement naso-pharyngé demande 10 minutes, que les infirmiers travailleront dix heures par jour (ce temps de travail décide malheureusement directement de la durée totale du plan !) et que 50 % du temps sera consacré aux déplacements. Le dépistage de la première zone sera observé de près, ce qui permettra d’affiner ces chiffres, pour l’heure établis au doigt mouillé. Ces premiers chiffres, donc, donnent 30 prélèvements par jour et par infirmier, soit 21 783 infirmiers nécessaires (653 497 / 30). Le prélèvement naso-pharyngé nécessite un geste précis, aussi nous doublons le nombre d’infirmiers afin qu’ils se relaient chaque heure, le deuxième s’occupant de l’étiquetage. Nous obtenons un total de 43 566 infirmiers mobilisés à un instant t. Un renouvellement ou une rotation au fil du temps des personnels sera évidemment nécessaire. Le recrutement des infirmiers sera le plus délicat puisque les professions médicales sont évidemment très sollicitées en temps d’épidémie.
Les autorités locales feront en sorte de trouver des hôtels ou d’aménager des gymnases. À défaut, des cars-couchettes seront utilisés. Un soin particulier sera apporté au repas du soir, qui doit être gustatif afin d’apporter un peu de soleil après ces journées fatigantes !
Coordination
Les médias diffuseront quotidiennement la progression du plan, sous la forme d’une carte de France, sur le modèle de la météo. Ils transmettront des consignes ciblées aux populations concernées par les prochaines étapes.
Après le plan
Ce plan comporte des failles. La population devra être parfaitement informée du fait qu’après l’éradication, de nouveaux foyers apparaîtront très probablement. Il est essentiel que des mesures fortes et rapides soient décidées en amont, afin d’éradiquer immédiatement toute résurgence. En ce domaine, rien à inventer : on s’inspirera des mesures très efficaces mises en place dans les pays d’Asie et d’Océanie (23) (24).
Un fait doit être souligné : même lorsque les mesures sont strictes, le virus parvient à passer (3) (21) (25). L’optimisme reste cependant de mise puisque la principale source des nouvelles contaminations dans les pays “bons élèves”, sont des importations provenant de pays où le virus circule (26) (27).
L’indispensable adhésion de la population
Ce plan ne réclame ni beaucoup d’argent, ni technicité particulière. En revanche, il nécessite de l’organisation et, surtout, l’adhésion de la population. Dans certains pays occidentaux, ce dernier point constitue probablement la première difficulté, souvent inavouée. Johan Hoebeke considère ainsi la confiance de la population dans ses dirigeants comme une condition nécessaire pour atteindre le zéro Covid (28). Nous approuvons et pensons dès lors que le plan présenté ici, ou un autre, ne peut pas être conduit en France par l’équipe gouvernante actuelle. Le Président Macron doit se mettre en retrait, ne plus apparaître dans les médias ainsi que son gouvernement. Une personnalité extérieure au gouvernement, dotée avant tout d’une bonne capacité organisationnelle, sera appelée pour conduire le plan. Cette personnalité, sans lien avec la grande industrie, s’entourera d’un collège multi-disciplinaire constitué d’experts et d’acteurs : médecins, biologistes, laboratoires, maires, préfets, journalistes, associations de patients, etc. Sans nul doute, des personnalités médicales et de la société civile seront volontaires pour se mettre au service d’un tel projet.
Ce plan est une ébauche. Les critiques sont les bienvenues, surtout si elles sont constructives !
Yves Ducourneau, le 26 février 2021
PS : La Chine a réalisé en mai, à Wuhan, un dépistage massif de la population de Wuhan. 9,9 millions d’habitants ont été testés en 19 jours par 50 000 infirmiers, aidés par 280 000 travailleurs et bénévoles (29).
Notes :
(1) "Covid-19 : Rethinking the lockdown Groupthink", par Ari Joffe, Preprints, 03/11/2020
« Second, the less devastating test-trace-isolation/quarantine strategy seems not feasible. In the United States it was estimated that there would be a need to train an extra 100,000 public health workers, (…) »
(2) "En quoi consiste la stratégie du "no covid", vantée par des chercheurs en Allemagne ?", par Salomé Vincendon, BFMTV, 29/01/2021
(3) "Covid-19 : une personne asymptomatique à l’origine d’un « cluster » de soixante et onze individus en Chine", par Marc Gozlan, son blog, 09/07/2020
(4) "La « quatorzaine » est un « échec » pour le conseil scientifique", 20 Minutes, 09/09/2020
(5) "Confinement : plus démoralisés qu'au printemps, 60% des Français disent avoir transgressé les règles", par Jeanne Bulant, BFMTV, 12/11/2020
(6) "France", Wikipedia
(7) "Répartition des cas en fonction de l'âge", Covidtracker, consulté le 20/02/2021
(8) "Comment le coronavirus s'est propagé dans les campagnes", par Anne Le Gall, Europe 1, 23/10/2020
(9) "Pyramide des âges 2020 - France et France métropolitaine", Insee, consulté le 20/02/2021
(10) "Part de la population rurale dans la population totale en France de 2006 à 2018", Statista, consulté le 20/02/2021
(11) "Covid-19 : comment expliquer la mortalité "exceptionnelle" en Seine-Saint-Denis ?", par la Rédaction avec AFP, Sud Ouest, 05/04/2020
(12) "Covid-19 : la vaccination ne suffira pas pour éviter un bond des hospitalisations en France, selon une étude", France Télévisions, 25/02/2021
(13) "Covid-19 : avant les fêtes, le nombre de tests en forte hausse", par la Rédaction avec AFP, Le Figaro, 24/12/2020
(14) "Covid-19 : Le dépistage par pooling chez les asymptomatiques", Santélog, 29/04/2020
(15) "Taux d'incidence", Covidtracker, consulté le 26/02/2021
(16) "Covid-19 : selon Delfraissy le nombre de cas est en réalité à 100 000 par jour", par Lucie Oriol, The Huffington Post, 26/10/2020
(17) "Vers un 3ème confinement ? Ce que l’on sait désormais de leur bilan avantages", par Charles Reviens et Claude-Alexandre Gustave, Atlantico, 12/01/2021
(18) "Voici le fabricant français choisi par l'État pour le fournir (aussi) en tests antigéniques", par Simon Chodorge, L'Usine Nouvelle, 06/11/2020
(19) "Covid-19 : la HAS positionne les tests antigéniques dans trois situations", Haute Autorité de Santé, 09/10/2020
(20) "Covid-19 : même si c’est rare, une période d'incubation de 16 jours est possible", par Johanna Amselemmer, Yahoo ! Actualités, 10/02/2021
(21) "Coronavirus en Nouvelle-Zélande : premier cas local depuis plus de deux mois dans le pays", par la Rédaction avec AFP, 20 Minutes, 24/01/2021
(22) "Combien de temps une personne est-elle contagieuse ?", Adios Corona, 31/05/2020
(23) "« Au bout du troisième, on commence à connaitre » : Auckland se reconfine pour trois jours", LCI, 15/02/2021
(24) "Contrôle de l’épidémie de Covid-19 : les leçons de la Nouvelle-Zélande", par Marc Gozlan, son blog, 28/10/2020
(25) "Covid-19 : l'Islande dément tenir deux Français responsables de sa nouvelle vague", par Jé. M. avec AFP, BFMTV, 25/09/2020
(26) "Comment l'Australie s'est quasiment débarrassée du Covid-19", par Thibaut Déléaz, Le Point, 30/11/2020
(27) "Coronavirus : la Corée du Sud dit faire face à « une deuxième vague » depuis mai", par M. D. et AFP, BFMTV, 23/06/2020
(28) "Covid : quelles mesures sont efficaces, lesquelles ne le sont pas ? Entretien avec Johan Hoebeke", par Michel Collon, Investigaction, 22/02/2021
(29) "Post-lockdown SARS-CoV-2 nucleic acid screening in nearly ten million residents of Wuhan, China", 20/11/2020, Nature
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