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Accueil du site > Tribune Libre > Nicolas Sarkozy à Bordeaux signe-t-il la mort de l’hôpital public (...)

Nicolas Sarkozy à Bordeaux signe-t-il la mort de l’hôpital public ?

Que cachent les déclarations de Nicolas Sarkozy lors de son passage au CHU de Bordeaux ? Son plaidoyer pour « un hôpital moderne, performant, attractif » doté de l’autonomie de gestion et d’une « organisation territoriale mieux pensée » recèle en fait la vente de l’hôpital public au secteur privé, et fait la démonstration que travailler plus pour gagner plus ce n’est pas pour l’hôpital !

"Nous avons besoin d’un hôpital fort, d’un service public dynamique, d’un secteur privé conforté. Nous avons besoin d’un hôpital moderne, performant, attractif, à l’écoute des malades, où le personnel soit heureux de travailler", a déclaré M. Sarkozy.

Ce monsieur pense sans doute qu’à l’heure actuelle le personnel n’est pas attentif aux besoins des patients ! En revanche, il a raison sur un point, être heureux d’y travailler devient de plus en plus rare, mais pas uniquement dans le public. Si les consortiums financiers qui dirigent les cliniques privées paient généreusement les services des médecins qui y exercent, la chanson est différente pour le personnel soignant de base. Il est vrai que pour dégager des bénéfices suffisamment intéressants il faut bien "rogner" quelque part. Ce sont les infirmiers et les aide-soignants qui en font les frais. De même que les prestations logistiques ! Qui ne connaît pas ces cliniques où il vous faut venir avec votre matériel. personnel sous peine de ne pouvoir ni manger ni boire ni même se faire renouveler le pansement posé en salle d’opération ! Eh oui ! pour bénéficier des prestations du Dr Trucmuche il ne faut pas être à la CMU !

"Je souhaite qu’elle (l’autonomie de gestion) accompagne le retour à l’équilibre des comptes (...) Je souhaite qu’à la fin de mon mandat il n’y ait plus d’établissements publics de santé qui aient un déficit d’exploitation", a également déclaré le président.

"L’autonomie de gestion" kesako ? Se débrouiller dans une équation à X inconnues pour avoir un équilibre PREVISIONNEL des recettes et des dépenses. Comment réduire les coûts et comment assurer les recettes ?

Réduire les coûts cela semble évident pour notre super manager, il n’y a qu’à déléguer au privé toutes les activités logistiques qui ne sont pas au coeur du système de soins. Merci Monsieur pour l’idée, mais on expérimente déjà et pas franchement avec bonheur, ce genre de délégations. Prestations aléatoires, résultats décevants, coûts restants élevés... Bref pas franchement une amélioration, ni pour les patients ni pour l’hôpital.

Ensuite on peut aussi envisager de réduire les dépenses de personnel soignant ! Ah oui, mais non ! Il en manque déjà beaucoup trop ! Car depuis le passage aux 35 heures, tous les postes non compensés ont déjà dû être assurés par les personnels présents qui accumulent depuis des années les heures supplémentaires non payées et souvent non récupérées. Les conditions de travail se sont dégradées, les salaires n’évoluent pas et la profession n’attire plus. Dans ces conditions, bien évidemment, le personnel soignant est loin d’être en surnombre !

Assurer les recettes est déjà un peu plus délicat ! Les tarifs des prix de journée n’étant pas fixés par les directeurs.

Le gouvernement fixe un objectif de dépenses de santé à ne pas dépasser. A partir de l’année 2000, le calcul de l’ONDAM (Objectif national de dépenses de l’Assurance maladie) est fondé sur l’estimation des dépenses, réalisée par la Commission des comptes de la Sécurité sociale. La réalité du taux d’évolution dépend donc de la qualité des prévisions de cette commission.
Mais elle aussi est soumise à des inconnues, et le principal poste de dépassement des prévisions est celui des médicaments qui augmente de façon constante.

De plus, l’hôpital public ayant pour vocation d’accueillir tous et toutes sans distinction, il n’a aucune garantie que les frais engagés seront compensés par le paiement du prix de journée. Combien de facturations de séjours ne se soldent jamais par un recouvrement faute de couverture sociale de l’assuré !

Dans ces conditions, il est vraiment utopique de penser arriver un jour à ce que les établissements ne soient plus jamais en déficit d’exploitation !

Selon M. Sarkozy, cette autonomie doit donner "les moyens de libérer le travail, parce que les 35 heures ont été mises en place au détriment du personnel hospitalier qui a payé le prix de la désorganisation".
"Je souhaite que l’on trouve très rapidement (...) une solution pérenne de gestion des heures supplémentaires dans les hôpitaux", a-t-il poursuivi, se prononçant pour "payer ce qui est possible" et la possibilité de "convertir (les jours de RTT) en cotisations pour financer les retraites complémentaires".

Pour quelqu’un qui s’est engagé à ce que chacun puisse travailler plus pour gagner plus, la déclaration ne manque pas de piquant ! "Payer ce qui est possible"... Tiens donc ! En clair, il va falloir faire une croix sur les heures accumulées au fil des ans par la faute du gouvernement qui n’a jamais donné les moyens de gérer les 35 heures à l’hôpital et en plus transformer les RTT en cotisations de retraite complémentaire...

Et le clou du spectacle, c’est le projet de faire entrer des managers, purs et durs, pour prendre des postes de directeurs d’hôpitaux. J’imagine bien un directeur de chez Danone venir prendre la direction de l’hôpital Georges Pompidou, ou pourquoi pas Thierry Breton, ou Roselyne Bachelot... !

Après tout, il semble bien qu’aucune compétence ne soit requise pour être parachuté dans les fonctions les plus hautes de ce que l’on souhaite faire couler ! L’incompétence serait même un prérequis nécessaire !

En tout cas, hôpital public va devenir un nouveau lieu de parachutage des "potes" divers et (a)variés, qui finiront de le saigner à blanc ! Tant pis pour ceux dont les moyens ne leur permettront pas de se tourner vers le privé. Ils se contenteront de cette carcasse vide que l’hôpital sera devenu.


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7 réactions à cet article    


  • tvargentine.com lerma 25 octobre 2007 13:35

    Oui à l’hopital public moderne et avec un personnel qui apporte disponibilité,performance et qualité du service.

    Et en cela Nicolas Sarkozy a raison.

    Vous dites « Pour quelqu’un qui s’est engagé à ce que chacun puisse travailler plus pour gagner plus, la déclaration ne manque pas de piquant ! »Payer ce qui est possible« ... Tiens donc ! En clair, il va falloir faire une croix sur les heures accumulées au fil des ans par la faute du gouvernement qui n’a jamais donné les moyens de gérer les 35 heures à l’hôpital et en plus transformer les RTT en cotisations de retraite complémentaire »

    Adressez vous à votre maitresse MARTINE AUBRY qui vous a imposé une logique de productivité sans vouloir vous donner les moyens. Dans l’informatique,nous avons les mêmes contraintes que vous et la responsabilité n’est pas celle de Nicolas Sarkozy mais du camarade JOSPIN,qui n’a rien compris (? ??) et surtout MARTINE AUBRY la grande responsable de cette loi REACTIONNAIRE et ULTRA-PRODUCTIVISTE qui bloque les salaires et pénalise le pouvoir d’achat sans parler des conséquences sur le travail

    Alors remettez les choses à leur vrai place


    • antochrit antochrit 25 octobre 2007 18:49

      Personnellement un gouvernement ou un autre .... ! je n’ai franchement guère vu la différence depuis longtemps ! Je n’ai ni maitre ni maitresse et je constate uniquement que seuls ceux qui se targuent d’être nos élus ne sont pas les dindons de la farce ! Mais aujourd’hui, quelqu’un qui déclare haut et fort qu’il faut travailler plus pour gagner plus et qui s’y engage, ne peut par ailleurs dire que l’on paiera « ce qui est possible ». Sur les arriérés accumulés, soit... ! Mais aujourd’hui la situation est identique et risque même d’empirer, et payer les heures supplémentaires à l’hôpital va couter cher. Tout le monde en est conscient, néanmoins nous aimerions ne pas être à nouveau les seuls à écoper. Comment les hôpitaux vont ils pouvoir payer ? Sur des budgets qui ne sont pas élastiques, si rien n’est prévu, le risque est de voir encore diminuer le nombre de personnel ou de ne pas faire partie de ceux qui gagneront plus même si nous travaillons plus !


    • jesuisunhommelibre jesuisunhommelibre 26 octobre 2007 18:19

      Voila un lien sur une réflexion approfondie sur l’avenir de l’hôpital :

      http://www.ifrap.org/6-actualite/Colloque-2005-03/agenda-colloque-mars-2005.htm


    • Ceri Ceri 25 octobre 2007 23:25

      Merci pour ce bilan de la langue de bois sarkozyste, mais en fait commune à tous les politiques. j’ai déjà croisé un type spécialisé dans l’optimisation des couts, qui était encoyé faire un tour à l’hopital pour donner des conseils aux médecins et aux infirmières pour « optimiser » le fonctionnement. No comment.

      Et c’est clair que le but est de libéraliser complètement le secteur des soins de santé, c’est dit dans l’AGCS, dans les objectifs de la Commission.

      Et ils vont nous faire le mm coup que d’habitude : on baisse les crédits, on baisse les effectifs, on restreint le service, et après on dit : oh regardez ca marche mal l’hopital public, ou la santé en général, donc il faut privatiser !


      • Walid Haïdar 26 octobre 2007 00:24

        Le plus navrant, c’est que le système de santé privé, on voit ce que ça donne aux états-unis, et c’est lamentable (et je ne parle pas du film Sycko, mais de nombreuses analyses faites depuis des années à ce sujet, voir par exemple l’analyse qui en est faites dans « capitalisme contre capitalisme », de Michel Albert, qui est pourtant un libéral).

        Globalement, la gestion marchande des hopitaux et du système de santé en général, induit un surcoût énorme, et une offre de soins très inégalitaire, et peu performante.

        Les états-unis dépensent beaucoup plus que nous pour leur santé, et pourtant, ils vivent moins longtemps, et surtout les pauvres n’ont pas du tout accès à autant de soins que chez nous. Seuls les riches peuvent se soigner convenablement.

        Et pourtant, globalement, en additionnant ce que tout le monde paie por la santé, ça fait beaucoup plus que chez nous.

        Comme quoi la somme des intérêts et des logiques privées n’est pas du tout une garantie en soit d’une quelconque optimisation.

        Tout ceci n’est qu’un dogme basé sur des théories économiques battues en brèches depuis des années par des travaux toujours plus nombreux d’économistes de premier plan. Mais les vieilles idées reçues (comme le fat que libéralisation=efficacité), ont la vie dure.

        Mais je ne comprend qu’on s’étonne que la droite soit pour le démantellement d’un service publique. La nouvelle droite est, dans sa majorité, la fille d’un courant idéologique qui est POUR l’inégalité sociale. Elle a tout intérêt à ne pas aider à restructurer harmonieusement un service publique.

        Quand on voit que tout ce qui ressort de leur réforme pour le finacement de la SS, c’est de taxer les malades, et qu’ils appellent ça de la solidarité, on a un joli résumé de leur état d’esprit.

        Maintenant, faire payer seulement les gens malades, et pareil quel que soit leur revenu, c’est de la solidarité. C’est extraordinaire. Demain, le feu sera mouillé. Prendre les gens pour des cons est comme un exercice de style de chaque instant pour le pouvoir en place.

        Et cette réforme, évidemment ne comblera pas le trou de la sécurité, pas du tout, mais on nous explique que la franchise est là pour payer la recherche sur Alzeimer...et que c’est pour ça qu’elle est solidaire.

        Comme si plus ils disent de conneries, et plus elles nous donnent le tourni, et moins on leur en tient rigueur.


        • antochrit antochrit 26 octobre 2007 09:48

          A vouloir gérer la santé comme un autre produit de consommation, à vouloir mettre en concurrence le service public et le privé, nous allons directement et très vite arriver à cette médecine à 2 vitesses que nous craignons majoritairement. Tout est en place pour que le privé gagne : contraintes différentes (aucune obligation de recevoir les pathologies couteuses et longues, ni les patients sans ressources, en psychiatrie pas de placements sous contrainte...) Par contre tarification à l’activité comme dans le public et remboursements sécurité sociale identiques. Les établissements privés ont tout le loisir de ne choisir que les activités qui « rapportent ». A voir l’acharnement que la fédération des hopitaux privés met à vouloir une convergence de la T2A entre public et privé le plus rapidement possible, nul ne peut douter que le marché soit juteux ! Gouvernement et consorts y ont des interêts personnels puisque ces établissements font partie de gros consortiums financiers dont ils sont souvent actionnaires eux même.


        • Falkland 26 octobre 2007 16:30

          Avec l’europe, tout le secteur public va disparaitre tot ou tard, la question ne se pose meme pas.

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