Nouvelles révélations sur la « route des rats »
L'histoire est toujours à enseigner, ne serait-ce que pour faire taire ceux qui voudraient tant la modifier. Les nazis ont bel et bien exterminé dans des camps, les chambres à gaz ont bel et bien existé, c'est indubitable et prouvé, et ces mêmes nazis ont bénéficié à la fin de la guerre de complicités pour s'échapper, notamment vers l'Amérique du Sud et à Bariloche, devenu en fort peu de temps un nid douillet pour nazis. Un livre récent révèle les conditions de cette incroyable exfiltration, dont je vous avais ici déjà parlé en l'appelant "la route des rats" (*) surnom communément donné à ces circuits bien particuliers pour camoufler et faire circuler ces nazis exterminateurs. A l'époque, déjà, j'avais précisé le rôle du Vatican dans cette terrible histoire (**). Un rôle plus que gênant, qui explique combien l'on peut retrouver aujourd'hui de catholiques traditionnalistes chez les négationnistes, qui ainsi se libèrent du "poids de leur faute", tout simplement, pour parler comme eux : les supporters de ces thèses infâmes devraient y réfléchir, à cette façon biaisée de voir les choses. Aujourd'hui, la femme du jour s'appelle Gisela Heidenreich, et elle vient tout juste de raconter la fuite en 1948 du nazi Horst Wagner (voir sa fiche en bas de l'article), responsable de la mort de 356 524 juifs en camps de concentration. L'homme est mort le 13 mars 1977, sans jamais avoir été jugé. Un de ceux qui avait échappé au jugement des hommes, hélas en se réfugiant en Argentine. L'occasion de revenir sur des événements qui doivent être enseignés et non ignorés : plus on en sait (*), plus on en saura, moins on pourra douter, ou se laisser entraîner à douter...
C'est un fait désormais certain que dans les années cinquante, on trouvait en Argentine un bon nombre de criminels nazis : leur protection durera tout le restant de leur vie, pour pas mal d'entre eux : jusque l'ère Carlos Menem au minimum, peut-on affirmer sans craintes (en photo, le passeport argentin d'Eichmann). Deux endroits ont eu leur préféfence : au nord, à Cordoba et au sud, à Bariloche. Deux fiefs du nazisme argentin, comme le précise ici L'Express le 9 avril 1998, dans ce qui reste l'article de référence sur la question. "Sous le premier gouvernement de Juan Peron, mais aussi sous les régimes qui l'ont suivi - Ignacio Klich, qui préside le comité académique de la Ceana, parle à ce propos d'une « connivence sociale qui a duré bien au-delà de la chute de Peron » - l'Argentine a toujours été le sanctuaire, l'ultime refuge des nazis ayant fui l'Europe. Accueillis par une communauté allemande déjà puissante à la fin de la Première Guerre mondiale (ici en photo à droite), aimablement reçus par un régime péroniste influencé par les fascismes européens, aussi antiaméricain qu'il était anticommuniste, les fugitifs du IIIe Reich ont souvent recréé ici des villages à l'image de leurs Heimat natals. Ils se sont installés dans le nord de l'Argentine, non loin des frontières avec le Paraguay et l'Uruguay, dans la région de Cordoba, où vivaient déjà de nombreux marins du Graf Spee, un navire de guerre allemand qui s'était sabordé en décembre 1939 dans l'embouchure du Rio de la Plata, ou bien vers Mendoza, au pied de la cordillère des Andes, près de la frontière avec le Chili."
Mais ce sont bien les montagnes du sud qui les ont davantage attirés, tant elles pouvaient ressembler aux leurs en Autriche ou dans les environs de Munich, comme je l'ai écrit ici (**). "Beaucoup d'entre eux ont particulièrement apprécié San Carlos de Bariloche, sur les contreforts andins, au bord d'un lac, un lieu de villégiature qui rappelle, avec ses chalets, ses montagnes et ses eaux claires, un joli coin de Bavière. C'est ici, en 1954, que s'était établi Erich Priebke, responsable du massacre de la fosse Ardéatine, au nord de Rome, où 335 civils furent tués en 1944 en représailles d'un attentat contre des soldats allemands par des partisans italiens. Comme le raconte Jorge Camarasa dans son livre Odessa al Sur (éd. Planeta), il put, dans les rues de Bariloche, croiser Josef Mengele ou Adolf Eichmann, qui y vint parfois en vacances. L'ancien pilote de la Luftwaffe Hans Ulrich Rudel participait aux tournois de ski du Club andino. Le financier Ludwig Freude, ami de Peron, y avait une maison. Friedrich Lantschner, ancien gouverneur nazi du Tyrol autrichien, y fonda une entreprise de construction. Vivaient également à Bariloche un ancien agent des services de l'armée allemande, Juan Maler, le banquier nazi Carlos Fuldner, d'anciens responsables de la Gestapo ou des SS comme Max Naumann, Ernst Hamann ou Winfried Schroppe. Tout ce beau monde buvait chaque soir de la bière au Deutsche Klub et fêtait, tous les 20 avril, l'anniversaire d'Adolf Hitler au dernier étage de l'hôtel Colonial." De ceux-là tous, j'ai déjà parlé ici-même en effet, comme j'ai évoqué les liens étroits qu'à pu entretenir le banquier Fuldner, l'industriel Freude et Carlos Menem, qui allait tous les protéger en échange d'argent ou de voitures de sport.
Dans le lot, Wagner Horst sera bien arrêté en Allemagne ; et rendu responsable de l'organisation de la solution finale mais Nuremberg le relâchera, faute de preuves. Il savait qu'elles seraient découvertes un jour où l'autre. Sous surveillance discrète, il réussit à s'échapper en 1948 et rejoint la mère de l'auteur du livre du jour, qui présente une particularité étonnante. Edith Heidenreich, la mère de Gisela, travaillait en effet alors comme conseillère familiale en Allemagne, mais elle était aussi une enfant de parents nazis, puisque retrouvée à la fin de la guerre dans un de ces Lebensborn ou "Fontaine de Vie", ces nurseries où les nazis étaient priés de laisser leurs enfants au régime... selon les folles directives laissées par Himmler. Encore une autre incroyable création de ce régime d'individus passablement dérangés par la notion de race. Des Lebensborn, il y en eût un à Lamorlaye, en France, une commune de l'Oise située près de Chantilly-en photo à droite- et un également en Belgique, à Wégimont, dans la Province de Liège (photographié ci-dessous). On y sélectionnait véritablement les bébés selon les critères "aryens". "Les mères les plus "prolifiques" étaient décorées de la "Croix des Mères Allemandes". Les enfants présentant des anomalies physiques ou mentales étaient étouffés à la naissance, et les mères prévenues que leur bébé était mort-né. Le problème des maternités semble avoir été pris très au sérieux par Himmler ; en 1943, par exemple, il menace le Hauptsturmführer SS Franz Schwarz - toujours célibataire à 44 ans - de l'expulser de la SS si ce dernier ne convole pas en justes noces avant la fin de l'année..." Fait notable, le Lebensborn de Wégimont étant géré... par des religieuses, comme à l'époque beaucoup d'organismes s'occupant de la petite enfance, comme en atteste un cliché retrouvé...à Washington (ci-dessous à gauche).
On retrouvera l'un de ces enfants, déboussolé, envoyé lui aussi à Lamorlaye après être né à Wégimont : "Walter habite aujourd’hui dans le joli village de Nançois-le-Grand, en Lorraine. « Je m’appelle Walter Beausert mais ce n’est vraisemblablement pas mon vrai nom, explique-t-il. Les enfants qui semblaient comprendre le français ont été dirigés vers le nord de la France. Comme je n’avais pas d’acte de naissance, un jugement du tribunal m’en a attribué un qui me faisait officiellement naître à Bar-le-Duc le 1er janvier 1944. » Balloté entre quelques familles d’accueil, hébergé ensuite à l’orphelinat Poincaré, dans le département de la Meuse, il entamera la veille de son mariage une quête qui dure encore aujourd’hui. « Quand je me suis marié, je suis allé voir mon tuteur légal, je voulais savoir d’où je venais. Il ne le savait pas ou n’a pas voulu me le dire. Je n’avais que cet extrait d’acte de naissance délivré par le tribunal et me donnant la nationalité française (…) Je n’ai pas pu en savoir plus jusqu’à ce qu’une loi de 1986 autorise les anciens pupilles de l’Etat à consulter leur dossier. » Depuis, il est souvent revenu en région liégeoise. Il a placardé des avis de recherche autour de la maison communale, interrogé les plus vieux habitants de Soumagne, participé à des émissions de télévision dans l’espoir de retrouver ses parents. Il est persuadé d’être le fils de Rita : « Je l’ai rencontrée, insiste-t-il. C’était un moment très fort. Il s’est passé quelque chose, elle m’a montré des photos, elle m’a tenu par la main mais elle n’a pas voulu avouer que j’étais son fils. Elle est décédée en 1998. » ; Rita, une Liégeoise de 17 ans tombée amoureuse d’un soldat allemand et qui avait été hébergée à l'époque au Lebensborn avec son tout jeune bébé.
Comment étaient-ils arrivés là en si grand nombre, ces nazis, en Argentine ? Par quel miracle avaient-ils réussi à échapper aux incessantes recherches menées par ceux qui voulaient qu'ils payent un jour leurs forfaits ? Ceux qui parlent, dans leur délire négationniste des "vainqueurs" à propos de Nuremberg qu'ils trouvent bien sûr 'injuste", feraient beaucoup mieux de s'intéresser aux archives... du Vatican. Car ce qui n'est pas un hasard, c'est qu'une bonne partie de ces négationnistes sont aussi des chrétiens traditionnalistes, tel l'infect Reynouard, adepte d'une quasi-secte religieuse, les sédévacantistes. "La question, posée dès 1945, des responsabilités ne cesse de rebondir. La multitude d'enquêtes n'aura fait que confirmer le rôle de la Croix-Rouge, de l'Eglise croate, du Vatican couvrant les passeurs de nazis, notamment les évêques Alois Hudal et Giuseppe Siri. L'habit faisant moins que jamais le moine, ce sont de bien étranges pèlerins qui foulent, vêtus de bure, le sol argentin après l'effondrement du régime nazi. Munis de passeports délivrés par la Croix-Rouge et l'ambassade d'Argentine à Vienne, ils sont accueillis par leurs compatriotes installés dans la province de Misiones à la frontière avec le Paraguay et le Brésil, et dans les Andes ; San Carlos de Bariloche où durant cinquante ans Erich Priebke dirigea une maternité et présida le collège allemand illustre jusqu'à la caricature ces 'colonies' avec chalets bavarois et tavernes munichoises lovés dans l'écrin enneigé de la cordillère". Priebke, ce nazi arrivé sous une robe de bure et devenu gérant de maternité et se pavanant il n'y a pas si longtemps encore dans le principal hôtel de Bariloche alors qu'il était assigné à résidence en Italie : on croît rêver. Il faudra attendre 2009 pour que la mairie de Bariloche se décide à le "répudier". En 2010, âgé de 97 ans, on le photographiait dans un supermarché de Rome... tranquillement dans les allées. Toujours assigné à résidence, mais toujours libre de ses mouvements malgré ses escapades visibles à Bariloche ! Et ce d'autant plus que pas plus tard qu'en février 2011, leportail web du "Journal Digital de Bariloche", publiait une photo de Priebke à table, en Argentine et non en Italie, avec le candidat au poste de gouverneur du Rio Negro, le péroniste Carlos Soria ! Un an après, le "problème" Soria disparaissait : le 2 janvier dernier, il était abattu par sa propre femme Susana Freydoz, dans une chambre d'hôtel, par une balle en pleine tête de calibre 38. Soria avait été proche des précédents présidents Carlos Menem et Eduardo Duhalde, et avait la réputation de passer son temps à espionner le couple Kichner, puis la présidente seule une fois devenue veuve.
Pour ceux qui en douteraient encore, il convient de rappeler les liens entre Hitler et l'Eglise catholique : Hitler n'était en fait pas athée, contrairement à ce qui a pu être dit. "Hitler athée, certainement pas, car il a bien écrit tout autre chose, malgré ces quelques lignes dans Mein Kampf : « Aujourd'hui s'éveille une foi nouvelle : le mythe du sang, la croyance selon laquelle on peut, avec le sang, défendre aussi l'essence divine de l'homme (...). Le sang nordique représente ce mystère qui a remplacé et surmonté les anciens sacrements (...). Le peuple allemand n'est pas atteint par le péché originel, il possède au contraire une noblesse originelle. » (Extraits de Mein Kampf, d'Adolf Hitler). Car il a aussi dit : « Je suis catholique. La Providence l'a voulu. En effet, seul un catholique connaît les points faibles de l'Eglise. Je sais de quelle manière on peut attaquer ces gens-là . » dixit A. Hitler, (Eric Lebec, Histoire secrète de la diplomatie Vaticane, Albin Michel, Paris, 1997, peu suspect d'être partisan dans l'affaire, car c'est un catholique) ... Hitler se proclame catholique dans Mein Kampf, l'ouvrage où il annonce son programme politique. Il y affirme aussi qu'il est convaincu qu'il est un "instrument de Dieu". L'Eglise catholique ne mettra jamais "Mein Kampf" à l'Index, même avant l'accession de Hitler au pouvoir. Il faut croire que le programme antisémite du futur chancelier ne déplaisait pas à l'église. Hitler montrera sa reconnaissance en rendant obligatoire la prière à Jésus dans l'école publique allemande, et en réintroduisant la phrase "Gott mit uns" (Dieu est avec Nous) sur les uniformes de l'armée allemande'"(extrait de "L'Eglise catholique face au fascisme et au nazisme" Editions Espace de Libertés, 1995 par Henri Fabre).
Une croyance réitérée : "Aujourd'hui s'éveille une foi nouvelle : le mythe du sang, la croyance selon laquelle on peut, avec le sang, défendre aussi l'essence divine de l'homme (...). Le sang nordique représente ce mystère qui a remplacé et surmonté les anciens sacrements (...). Le peuple allemand n'est pas atteint par le péché originel, il possède au contraire une noblesse originelle." (Enrico Riboni - "Les pages Noires du Christianisme, 2000 ans de crime, terreur, répression" )« Hitler n'a jamais quitté l'Église catholique » rappelle d'ailleurs le Dr Otto Dietrich qui vécut dans l'entourage immédiat du Führer (c'était le le chef du service de presse (Reichspressechef) du parti). Et ce précieux témoin ajoute : « Il avait interdit d'appeler Charlemagne le « boucher des Saxons », dans la presse ou ailleurs ; Charlemagne avait christianisé les Allemands par la force de l'épée et on lui donnait ce surnom à cause des luttes sanglantes qu'il avait menées contre le duc de Saxe. « Hitler considérait Charlemagne comme l'un des plus grands hommes de l'histoire d'Allemagne, car il voyait d'abord en lui l'unificateur des Allemands et le créateur de l'Empire ; il l'approuvait d'avoir, en vue de ce « but national suprême », aussi bien introduit la religion chrétienne dans les pays germaniques que d'avoir agi avec une rigueur impitoyable contre tous ceux qui ne voulaient pas coopérer à l'unification sous l'égide du christianisme. C'était pour cela qu'il ne tolérait pas que l'on pût critiquer les massacres du grand empereur Charles… » (Dr Otto Dietrich, "Hitler démasqué" - Grasset, Paris 1955).
Une croyance et une alliance avec un clergé qui vont lui permettre d'accéder au pouvoir : "janvier 1933, le Zentrum, parti catholique, dont le leader est un prélat catholique (Prälat Kaas ; ici à gauche), vote les pleins pouvoirs à Hitler. Ce dernier peut ainsi atteindre la majorité des 2/3 au Reichstag pour suspendre les droits garantis par la constitution. Avec une charité toute chrétienne, le bon prélat et ses ouailles du Zentrum accepte aussi de fermer un oeil sur les détails procéduriers discutables des nazis, comme l'arrestation des députés communistes avant le vote. Puis l'église commence à négocier un nouveau concordat avec l'Allemagne : dans ce cadre, elle "sacrifie" le Zentrum, alors seul parti significatif que les nazis n'ont pas interdit : en effet, il les a aidés à arriver au pouvoir. Le 5 juillet 1933, le Zentrum s'autodissoud sur demande de la hiérarchie catholique, laissant le champ libre au NSDAP de Hitler, désormais parti unique. Le prélat Kaas laisse les compatriotes se débrouiller avec la dictature qu'il a aidé à installer, et déménage au Vatican, où il entame une nouvelle carrière : alors que le monde s'embrase, Monseigneur Kaas, désormais évêque, dirigera des fouilles sous la Basilique de Saint Pierre qui aboutiront à la découverte du 2ème crâne de Saint Pierre" (***).(Enrico Riboni - Les pages Noires du Christianisme, 2000 ans de crime, terreur, répression ). Un sujet en or pour l'historienne Clémentine Portier-Kaltenbach, pour sûr (****) !
Le Vatican avait donc toutes les possibilités de choisir son camp, et surtout d'aider ou non les vaincus à se mettre à l'abri après la défaite. Or il va clairement organiser un réseau d'exfiltration dont l'ampleur et l'organisation peut difficilement avoir été cachés aux yeux de la plus haute hiérarchie de l'Eglise (à savoir Pie XII), c'est bien aussi ce que révèle (une nouvelle fois) ce nouveau livre. "La question, posée dès 1945, des responsabilités ne cesse de rebondir. La multitude d'enquêtes n'aura fait que confirmer le rôle de la Croix-Rouge, de l'Eglise croate, du Vatican couvrant les passeurs de nazis, notamment les évêques Alois Hudal et Giuseppe Siri. L'habit faisant moins que jamais le moine, ce sont de bien étranges pèlerins qui foulent, vêtus de bure, le sol argentin après l'effondrement du régime nazi. Munis de passeports délivrés par la Croix-Rouge et l'ambassade d'Argentine à Vienne, ils sont accueillis par leurs compatriotes installés dans la province de Misiones à la frontière avec le Paraguay et le Brésil, et dans les Andes ; San Carlos de Bariloche où durant cinquante ans Erich Priebke dirigea une maternité et présida le collège allemand illustre jusqu'à la caricature ces 'colonies' avec chalets bavarois et tavernes munichoises lovés dans l'écrin enneigé de la cordillère." Déguisés en moines dominicains, comme ceux-là même qui se montraient en train ce nourrir les troupes hitlériennes : c'est déguisé ainsi, notamment, qu'Adolf Eichmann avait rejoint l'Argentine.
Les faits sont là, indubitables, et la question fondamentale demeure : "les dictatures du continent latino-américain utilisèrent la compétence des vaincus de la guerre dans leur croisade anticommuniste, mais que penser de l'attitude du Vatican ? Quels intérêts inavouables justifient que le Saint-Siège ait soustrait à la justice quelques-uns des pires assassins que l'histoire ait engendrés ? Plus que jamais, il convient d'éclairer le rôle obscur de Pie XII. Ce qu'a évité de faire l'Eglise dans le texte récent où elle reconnaît ses torts et faiblesses vis-à-vis du génocide des juifs". Parmi les "exfiltrés", des nazis avérés : "à Bariloche, véritablement infesté de nazis, au point qu'ils y dressaient leur drapeau sur les écoles ou affichaient leurs swastikas en réunion, derrière un portrait de leur idole, d'autres avaient manifestement débarqué : on y reconnut aussi Edouard Roschmann, devenu Federico Wegener, par la grâce de l'immigration argentine, décriée précédemment, le boucher du ghetto de Riga, venu se faire soigner dans un hôpital au Paraguay pour une infection, ainsi que Walter Rauf, "l'inventeur" du camion à asphyxier pour supprimer les juifs. Il s'en prendra en Afrique du Nord aux tunisiens et persécutera les juifs italiens, s'en prenant en priorité à leur or. Réfugé en Syrie, puis au Liban, il rejoindra par l'habituelle "route des rats" l'Equateur puis le Chili, pour y devenir un zélé collaborateur d'Augusto Pinochet", comme j'avais déjà pu l'écrire ici.
Dans ce contexte plutôt lourd sur la responsabilité du vatican dans la protection et l'exfiltration des nazis, la phrase du pape actuel liant l'athéisme au nazisme avait fait il n'y a pas si longtemps bondir, le pape et son frère ayant eux-même fait partie jadis des jeunesses hitlériennes. Le 18 septembre 2010, l'ancien cardinal Ratzinger (Benoît XVI) avait en effet dit ceci : "de notre vivant, nous pouvons nous souvenir de la manière dont la Grande-Bretagne et ses dirigeants se sont dressés contre la tyrannie nazie qui voulait éradiquer Dieu de la société et nier toute humanité à certains, en particulier les juifs, qui étaient jugés indignes de vivre". Un non sens complet : Hitler ne souhaitait pas éradiquer Dieu, d'une part et d'autre part l'athéisme ne conduit pas au nazisme, contrairement à ce qu'à osé dire ce pape pour se disculper et absoudre toute son Eglise : "tandis que nous méditons sur les leçons de l'athéisme extrême du XXe siècle, n'oublions jamais comment l'exclusion de Dieu, de la religion, et de la vertu de la vie publique conduit finalement à une vision déformée de l'homme et de la société, et donc à une vision réductrice de l'individu et de son destin ». Venant d'un pape ayant collaboré à la très droitière revue Aula-Verlag, dirigée par Otto Srinzi et Jürgen Schwab, deux leaders de l’extrême-droite germanophone, rien de très étonnant, à vrai dire.
L'Eglise a participé de l'hitlérisme, comme elle a participé en France au Pétainisme : le pape actuel s'est ouvertement rangé dans le camp des révisionnistes avec cette sortie plutôt malvenue. Le livre qui vient juste de sortir enfonce un peu plus le clou sur la croix, pourtant. Horst, échappé en 1948 sera hébergé quelques mois dans des monastères et des couvents, sous une fausse identité, puis recevra d'Aloïs Hudal un passeport lui permettant de se rendre à Gênes, d'où il embarquera vers l'Argentine, confirme bien celle qui avait failli devenir sa belle fille : il s'installera directement à Baricoche, au milieu de la communauté nazie installée bien avant guerre et devenue plutôt impressionnante. Le même Hudal faisant de même pour Franz Stangl, le commandant de de Sobibor et de Treblinka, qui sera envoyé au Brésil, sous la protection d'un passeport octroyé à la Croix Rouge, cette même Croix Rouge à qui on confiera après guerre la gestion des archives des camps de concentration... à Bad Arolsen, où l'on a recensé 17,5 millions de victimes du nazisme. Une bien mauvaise idée, au final (ici l'annonce du transfert en France des archives numérisées ; soit 87 millions d’images).
Horst était responsable de plusieurs crimes. Indirectement en qualité de gestionnaire du Reich, et directement car impliqué dans des décisions dont on retrouvera les preuves après sa mort seulement dans les documents de la Stasi. Selon un rapport découvert par le Berliner Zeitung en 2010, il était en effet impliqué dans des crimes de guerre directs, dont celle d'au moins dix prisonniers américains entre le 28 et le 30 décembre 1944, acquiescant alors à une demande de Ribentropp après une rebellion. Il aurait aussi été impliqué dans la planification de l'assassinat du général français Maurice Marie Gustave Mesny, interné dans un camp de prisonniers de guerre allemand, un crime organisé sous forme de transfert de prisonnier qui aurait eu un accident de voiture : une mise en scène complète et odieuse. Le Dr. Paul Otto Schmidt, numéro NSDAP 8 981 252 et devenu le SS 289 260 avait été arrêté le 4 février 1947 pour le même crime : il sera relâché et mourra libre le 21 avril 1970 à Munich. Le général Mesny avait été froidement abattu d'une balle dans le dos.
Dans son livre, Gisela Heidenreich conclut par un laconique « c'était un monde parallèle, dit-elle,« développé si loin de l'Allemagne, et sans aucune condamnation dans l'après-guerre de la part du public ou des politiciens." Horst, membre du NSDAP (n ° 5387042) correspondra en effet des années avec la mère de l'auteur, comme si de rien n'était : comme s'il n'avait pas été le criminel qu'il avait pu être : chez les négationnistes actuels, on a le sentiment en effet qu'ils rêvent toujours du nazisme de l'époque de Bariloche, celui de personnes ne se sentant même pas coupables de leurs méfaits, et vivant comme si de rien n'était dans un nouveau pays. Il est assez sidérant de constater combien Bariloche n'a jamais été l'objet de soupçons avant l'année 1995 ! La visite d'Eisenhower de février 1960 dans le gigantesque hôtel Llao Llao réputé être le fief des nazis est encore plus troublante : le général aimait y venir pêcher à la mouche dit-on. De fait, on connaît fort peu de criminels nazis ayant reconnu leur culpabilité : beaucoup, tel Eichmann, se sont en effet rangés sous la bannière pratique du "j'effectuais les ordres", sans plus (mais il ne faut pas que cela (*****)). Le nazisme repose au départ sur une irresponsabilité totale, et une idéologie fondamentale ayant comme base la diffférence arbitraire entre des personne dites faibles et d'autres fortes, d'hommes prétenudus supérieurs issus de civilisations prétendues supérieures, et c'est bien pour ça que l'on doive encore, des années après en combattre le moinde germe. De manière à ce que ce monde parallèle qui a vu un bon nombre de criminels nazis échapper à tout jugement (grâce au Vatican)... ne réapparaisse jamais. C'est la morale indirecte que nous apporte ce nouveau témoignage : "plus jamais ça", encore une fois, quitte à devoir le répéter, et encore le répéter (******), aux sourds et aux aveugles embarqués par les sirènes d'autres irresponsables.
Comme le rappelle Der Spiegel, en effet, "Heidenreich a dit qu'elle voulait garder les jeunes générations allemandes au courant de leur passé et combattre les récentes victoires électorales régionales des néo-nazis. « Je suis consterné comment les élèves écoutent l'histoire du nazisme avec une distance incroyable de nos jours. Ils savent beaucoup de choses sur lui, mais cela ne les touche pas émotionnellement. C'est comme la Rome antique pour eux", a déclaré Heidenreich."Il est de notre devoir de raconter notre propre histoire." Un devoir qui devient de plus en plus urgent, semble-t-il ; à voir la circulation intense de thèses abracadabrantesques sur la question.
(*) dans ces épisodes :
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-51-la-visite-guidee-des-95383
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-52-le-nid-douillet-95411
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-53-les-reves-nucleaires-95417
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-54-le-role-trouble-d-95528
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/liberation-55-carlos-menem-l-95700
(**) sur le vatican et la route des rats :
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/des-petits-trous-des-petits-trous-59677
(***) en citant l'extrait, un bloggeur ajoute chez Golias de l'excellent Christian Terras : N’est - ce pas Monseigneur Gràber, évêque de Freiburg qui commenta les lois raciales et les pogroms de la nuit de cristal par ces chrétiens propos qu’on ne pouvait refuser à quiconque le droit de sauvegarder la pureté de sa race et d’élaborer les mesures nécessaires à cette fin. L’ombre de la croix s’étend sur cette barbarie.
Dans Galates 2:8, on voit en effet que Pierre avait reçu pour mission d'évangéliser les Juifs et non pas les paîens. C'est Paul qui avait mission d'évangéliser les païens (et donc Rome, ou il est allé).
Il n'y a pas de document authentique confirmant la présence de l'apôtre Pierre à Rome, cette histoire ne reposant que sur les contes d'un Père d'Asie, Abdias, et sur des suppositions relatives à l'épitre de Clément.
Même Luther, l'un des pères du protestantisme, a dit que Pierre n'est jamais venu à Rome : "Certains érudits disent que saint Pierre n'est jamais venu à Rome ; et le Pape a certainement bien du mal à répliquer à de tels savants... Seul, saint Paul y a certainement été..." (Wider das Papsttum vom Teufel gestiftet).
Et le pape Pie XI déclarait, en privé, que pour lui, "il était certain que jamais saint Pierre ne mit les pieds à Rome..."
On remarquera même que ce Pape Saint-Pierre semble avoir été bicéphale : l'un de ses crânes est conservé à "Saint-Pierre" au Vatican (en fait, il s'agit d'un crâne de femme !), l'autre à "Saint Pierre et Paul hors les murs".
Il semble bien, d'ailleurs, que Pierre a été exécuté avec son frère Jacques en 46, à Jérusalem, sous Cuspius Fadus, et qu'il n'est donc pas mort à Rome..
Cela montre bien combien la tradition de la fondation de la Papauté par pierre ne repose sur rien de solide.
En réalité, le Pape Saint-Pierre, comme les douze premiers papes, est un personnage légendaire qui n'a jamais existé.(ces premiers papes semblent avoir été inventés par Eusèbe de Césarée, dit Eusèbe le menteur au IVe siècle). On ne possède d'ailleurs aucun documents sur les premiers papes jusqu'en 325. ils n'ont pour seul titre que celui d'évêque de Rome. Le titre de pape n'apparaissant qu'en 306, à Alexandrie."
s'il y en a à qui ça plaît ce genre de propos, je ne saurais trop leur conseiller celui-ci..., notamment ce que j'ai déjà pu écrire ici...
(*****) "De son côté, l’historien Laurence Rees a rouvert le dossier Auschwitz. Il montre que les organisateurs de la solution finale n’étaient pas des exécutants serviles. Les ordres donnés étaient souvent assez vagues et il fallait que les responsables de la mise en œuvre prissent des initiatives et fissent preuve d’engagement pour atteindre les buts fixés. Selon L. Rees, cet engagement est d’ailleurs ce qui donne force au régime totalitaire. Il faudrait donc autre chose que de la simple soumission à un système pour aboutir à des crimes de masse. Cela nécessite aussi que les exécutants des basses besognes croient à ce qu’ils font, adhèrent à leur mission, se mobilisent activement. L’obéissance ne suffit pas, l’idéologie compte"
(******) Telle l'histoire personnelle de Frida Lyngstad, par exemple, la chanteuse d'Abba, à l'incroyable parcours : "elle est l'une des 12 000 enfants norvégiens nés pendant l'occupation allemande, de 1940 à 1945, des amours entre soldats allemands et femmes norvégiennes. Après la guerre, ces femmes et leurs enfants sont devenus des parias de la société norvégienne : beaucoup d'entre-elles furent violées par des résistants, enfermées dans des maisons closes ou internées ou expulsées, certaines d'entre-elles et leurs enfants auraient servi de cobayes pour l'expérimentation de drogues comme le LSD par l'armée norvégienne et la CIA." Sidérant, non ? Elle avait appris son parcours en pleine gloire musicale : "durant cette période, elle a une révélation sur ses origines. Anni-Frid croyait que son père était mort lorsque son navire avait été coulé par les Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle découvre qu'elle est en réalité la fille d'un sergent allemand marié, Alfred Haase, lorsqu'un magazine allemand (Bravo) publie sa biographie en 1977 (la nièce d'Alfred Haase fait alors le rapprochement avec son oncle et prévient ce dernier)". En 1992 ; Frida épouse le Prince Heinrich Ruzzo Reuss von Plauen, membre de la famille princière allemande Reuss... il meurt 7 ans après d'un cancer
livre à consulter : Marc Hillel et Clarissa Henry, Au Nom de la Race, Fayard, 1975
PS : Une liste non exhaustive des criminels nazis (il y en a 1387) est disponible ici. A noter à la 693eme ligne cette indicatgion : "Höss, Rudolf (sévit à Dachau de 1934 à 1938, puis à Sachsenhausen en 1938, puis à Auschwitz dès 1940, puis commandant d'Auschwitz) : écrit ses mémoires en prison, condamné à mort en Pologne et exécuté le 16 avril 1947, derrière le crématoire du Stammlager à Auschwitz. (A ne pas confondre avec Rudolf Hess)."
article sur les criminels nazis réfugiés en Argentine : "Les nazis de la pampa", l'Humanité, mai 1998.
articles sur les Lebensborn :
Pauvres enfants : "Au fil de la débâcle, ces bambins sont transbahutés d'une maternité nazie à l'autre. Leur périple à travers le Reich s'achève le 3 avril 1945, à Steinhöring, près de Munich. C'est là, dans la maison mère, ouverte dix ans plus tôt, que des soldats américains découvrent, au début de mai 1945, environ 300 enfants et une poignée de mamans livrés à eux-mêmes. Les maîtres de l'organisation ont pris la fuite après avoir brûlé les archives. Pour identifier les gosses, il ne reste que des fiches très succinctes. Un prénom germanique, un patronyme, parfois modifié, une date de naissance, le nom de code du lieu où ils ont vu le jour : Westwald, Ardennen... Les petits, confiés à une équipe de secours des Nations unies (l'Unrra), sont regroupés et soignés dans un couvent désaffecté. Le 14 décembre 1945, le père Ludwig Koeppel, curé de Steinhöring, les baptise collectivement. Photographiés, reconnus, certains sont rendus à leur mère. D'autres sont rapatriés, un an plus tard, vers leur pays d'origine. Du moins le croit-on. Car plusieurs bébés belges et néerlandais, nés à Wégimont ou à Lamorlaye, sont envoyés par erreur en France.
Aux mois d'août et octobre 1946, deux trains affrétés par la Croix-Rouge, en provenance d'Allemagne, s'arrêtent ainsi à Bar-le-Duc (Meuse). Sur les 37 enfants confiés aux services locaux de l'Assistance publique, 17 sont encore bébés. Un an plus tard, la justice décide de les déclarer « nés à Bar-le-Duc ». Les prénoms trop allemands sont francisés. Ingrid s'appellera Irène, Gizela sera Gisèle, Songard et Ute deviennent Dominique... Plusieurs d'entre eux sont accueillis par des familles de la région, certains sont adoptés. Tous gardent en mémoire les injures des autres gamins, voire de l'instituteur : « A l'école, on me traitait de "sale boche" », raconte Gisèle Niango, 65 ans, de Nancy. Nous sommes déchirés entre le fait d'être des victimes innocentes et la honte d'avoir été conçus pour servir cette idéologie monstrueuse. »
En 1946, Erwin a 2 ans à peine quand il est rapatrié en Avignon et récupéré - avec son nom inscrit sur un écriteau accroché autour du cou - par l'une de ses tantes. Sa mère les rejoint un an plus tard. Erwin n'a plus jamais revu son père. Il a découvert son nom par hasard, en 1987, en tombant sur son propre certificat de baptême, daté de 1945. Le document mentionnait ceci : « Père : Erwin Konstant Johannes Schmidt. » « Ma mère me l'a arraché des mains avant de le déchirer et de le jeter au feu », poursuit Erwin".
http://www.liberation.fr/grand-angle/0101499849-bebes-nazis-a-chantilly
http://joelmatriche.com/lebensborn/
la fiche (anglaise) de Wagner Horst :
Né à Posen en 1906, d'une formation de journaliste à Berlin, où il a rejoint la SA en 1933, en mai 1938, il rejoint le ministère des Affaires étrangères. En Janvier 1944, il devint officier de liaison entre le ministère des affaires étrangères et la SS, période pendant laquelle il s'est impliqué dans la déportation des Juifs. Il était emprisonné au cours du procès de Nuremberg où il a été entendu comme témoin, et après lequel, en 1948, il a été libéré. Il a été immédiatement délivré contre lui un mandat d'arrêt par un tribunal de Bavière, mais il s'est alors échappé en Argentine. Après son retour en Europe, il a changé son nom en Peter Ludwig et a travaillé comme correspondant pour divers journaux argentins. En Mars 1953, il a été arrêté dans l'ombre du Vatican. Bonn espèrait l'extrader, mais en raison de certaines problèmes techniques avec son changement de nom, il devait compléter par une courte phase en Italie d'abord. Un juge italien a décidé qu'il ne pouvait pas être extradé, son crime étant selon lui politique, et non pénal. Pensant qu'il ne pouvait plus être jugé pour crimes de guerre, Wagner revint volontairement en 1956 en Allemagne de l'Ouest , après quoi il a été arrêté. Après 15 mois en détention provisoire, le tribunal de district de Hamm n'avait pas d'autre choix que de le libérer avec une amende de 80 000 DM , tout temps supplémentaire en prison pouvant être considéré comme une atteinte aux droits de l'homme. Il s'en est suivi une longue période de collecte de l'information, de retards pour cause de maladie, et de changement d'avocats, et pendant toute cette période,Wagner est resté en liberté. Il employait un ancien collègue de ses jours nazis pour de faire représenter, le Dr Ernst Achenbach, un député de la FDP. Enfin, après des années de fuite, Wagner a été appelé pour être jugé le 3 Juillet 1972. Cependant, après des mois à avoir fraudé sur sa santé physique, et de procrastination manifeste, il n'a jamais eu à comparaître à nouveau, au motif de la vieillesse.
71 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON