Nuisances sonores & troubles de voisinage
Une nouvelle loi encadrant les troubles de voisinage : tapage diurne - nocturne - olfactif - trouble visuel à été votée le 15 avril 2024. Si « Nul ne doit causer à son voisin, un trouble de voisinage » ('article 1253 du Code civil), une dérogation existe à condition que l'origine de ces troubles soit antérieure à l'occupation du logement. Le nouvel acheteur d'une maison de village ne pourra donc pas se plaindre du chant du coq ni des cloches de l'église et pas plus du brouhaha d'un restaurant. Cependant, la location d'un appartement airb&b pour y faire la fête, les aboiements d'un chien, le bricolage, etc., peuvent être sanctionnés par la justice. « Aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’Homme dans un lieu public ou privé » (article R.1336-5 du Code de la santé publique).
Le bruit est un son ou un ensemble de sons à un niveau trop aigu ou trop grave ou par son intensité que l'on désirerait ne pas entendre. Le bruit pathogène crée une gêne et constitue une agression qui peut entraîner divers troubles physiques ou psychiques. La soudaineté d'un son peut surprendre et déclencher une note émotionnelle. Quatre sortes de bruits peuvent nuire au confort d'un logement : les bruits aériens transmis par l'air (parole, haut-parleur, instrument de musique, VO) - bruits solidiens transmis par ébranlements ou vibrations (talons aiguilles, chute d'un objet, roulement de billes) - bruits liquidiens transmis par l'eau (canalisations) - réverbération, bruits réfléchis par les parois (murs, plafonds, planchers) et qui continuent à être audibles pendant un certain temps.
La puissance des sons est mesurée en décibels (dB) et leur fréquence en Hertz. 0 dBb correspond au seuil d'audibilité - 20 dB : murmures - 40 dB ambiance d'une ville - 55 dB conversation - 75 dB rue très animée - 90 dB motos - 110 dB réacteur (Les dB caractérisant des pressions acoustiques n'ont rien de commun avec les dB exprimant un niveau électrique). L'oreille ne transmet pas des sensations sonores identiques pour des pressions acoustiques identiques. Le seuil d'audibilité est de 0 dB pour la fréquence 1 kHz, mais d'environ 40 dB pour la fréquence de 100 Hertz.
La première réglementation acoustique des bâtiments d’habitation neufs fixant des exigences d’isolation acoustique entre appartements, de bruits d’impacts et bruit d’équipements (chaufferie, ascenseurs, ventilation mécanique, etc.) date de 1969. Les normes admises entre appartements sont : 36 dB pour les basses fréquences (20 à 400 Hz) - 48 dB médium (400 à 2 kHz) - 54 dB aiguës. A chaque changement de propriétaire de nouveaux acquéreurs semblent ignorer que si l'appartement est composé d'éléments indépendants (maçonnerie, sols, huisseries), apporter une modification à un de ces éléments est parfois contraire à la législation. L'abattage de cloisons modifie l'acoustique de l'appartement (25 dB d'isolation phonique perdue pour chaque cloison détruite) et propage les nuisances sonores aux appartements mitoyens et contribue aux déperditions caloriques. La pose d'un parquet flottant (contrecollé ou stratifié) entraîne un effet de résonance avec amplification des niveaux sonores ; les bruits des meubles déplacés, les vibrations du lave-linge, bruits de pas se propagent aux appartements voisins (ponts acoustiques). Les pertes sonores pour un sol en béton sont d'environ 20 dB, parquet avec bacula et plâtre 43 dB, moquette et tapis 5 dB.
Les sons déplaisants font entre 2 000 et 5 000 Hz, fréquences auxquelles les oreilles humaines sont les plus sensibles. Cette plage de fréquences correspond aux : alarme, porte qui grince, bruit strident, enfant qui pleure, chien qui aboie, etc. Même un ronflement fort ou des bruits de mastication peuvent être dérangeants pour les gens sensibles. Les bruits gênants affectent également la santé physique : hyperacousie (hypersensibilité aux bruits) - augmentation des maladies cardiovasculaires - aggravation des diabètes de type 2. Quant aux sons extrêmement forts ils peuvent endommager les oreilles et provoquer la perte d’audition ou générer des acouphènes. Les effets sur la santé mentale de la pollution sonore englobent : perturbations du sommeil - stress - troubles cognitifs - problèmes d’attention, de mémoire et d’apprentissage.
Les personnes souffrant d’hyperacousie (sensibilité exacerbée aux bruits quotidiens ; 1 % de la population) perçoivent certains sons spécifiques du quotidien (tic-tac d'une horloge, ronflement, climatisation) forts ou douloureux. La misophonie (15 à 20 % de la population) est une aversion sonore qui se traduit par la détestation de certains sons très ciblés et peut devenir obsessionnelle (craie sur le tableau noir). La phonophobie (peur d'un son puissant et soudain) peut être à l'origine d'une crise d’angoisse, de nausées, bouffées de chaleur, saute d’humeur ou vertige. La sonophobie peut survenir à la suite d’une association négative d’une situation traumatisante à un son fort. La paréidolie auditive : certaines personnes pensent entendre des sons ou des voix inexistants à partir d'un bruit de fond sans qu'il s'agisse de phénomènes auditifs hallucinatoires en rapport avec des troubles mentaux (schizophrénie, bipolarité, stress post-traumatique). Il s’agit d’une illusion psychologique : « notre cerveau cherche à donner un sens aux bruits ambiants, ce qui peut mener à des reconnaissances erronées de sons » Andrew King Université d'Oxford.
Tout propriétaire peut être tenu responsable du bruit de ses locataires, 5 % des expulsions se font pour « troubles de jouissance » du bien loué (source Ministère du logement 2021). Contrairement à une idée répandue, il n'est pas permis de faire du bruit avant 22 heures. Entre 07 h et 22 h on parle de tapage diurne, et entre 22 h et 07 heures de tapage nocturne. Les bruits n’ont pas besoin d’être réguliers, répétitifs ni intensifs pour être qualifiés de tapage diurne ou nocturne.
La victime de nuisances doit s'entretenir avec le responsable des nuisances afin d'aboutir à un modus vivendi. Si cela reste sans effet, il peut faire signer une pétition aux voisins concernés et avertir le syndic qui rédigera une mise en demeure par LRAR ou en chargera l'assurance juridique de la copropriété. Si le mis en cause est un locataire, il faut s’adresser à son propriétaire qui est responsable du comportement de son locataire. Autre possibilité, appeler la police qui se doit d'intervenir. La plupart du temps celle-ci demande au fauteur de trouble de bien vouloir stopper son activité et lui rappelle ses obligations décrites dans l’arrêté municipal ou préfectoral. Si le bruit persiste, les policiers sont en droit d’appliquer une amende sur-le-champ et de confisquer l’objet du délit. Le tapage nocturne est passible d’une amende immédiate de 68 euros et de 180 euros si elle n'est pas réglée dans les 45 jours.
En cas d'inaction du contrevenant, adresser un signalement au maire qui se doit de garantir la tranquillité des habitants de sa commune. En cas d’inaction saisir le préfet du département et le conciliateur de justice. Si le fauteur de trouble poursuit les nuisances, faire établir un constat par un commissaire de justice (huissier) et/ou adresser une plainte au tribunal pénal (courrier au procureur de la République ou en se présentant dans une gendarmerie ou un commissariat). Le procureur peut lancer une médiation pénale (procédure gratuite). Si la médiation n'aboutit pas l’affaire se poursuit devant le tribunal civil ou judiciaire qui a remplacé les tribunaux d’instance et de grande instance. Le procureur reste libre de classer l’affaire « sans suite ». Il faut alors déposer une plainte devant le doyen des juges d'instruction avec constitution de partie civile (avocat obligatoire).
Textes de référence contre le bruit : article L571-1 du Code de l’environnement - articles L2212-1 à L2212-1-1 du Code général des collectivités territoriales - article R571-96 du Code de l’environnement - trouble de jouissance (copropriété). Accuser une personne de nuisances à tort est considéré comme une dénonciation calomnieuse. La personne visée peut alors porter plainte au pénal. La peine encourue pour les accusations calomnieuses s’élève au maximum à 45 000 euros d’amende et à 5 ans de prison.
Chaque milieu présente une résistance au passage du son (impédance acoustique) et qui correspond au rapport entre la pression acoustique en un point donné et la vitesse de vibration des molécules en ce point (ne pas confondre avec la célérité du son). Comme le volume d'air compris dans une pièce est limité, l'onde sonore doit changer de propriété quand elle rencontre un autre milieu (béton, plâtre, briques). La plus grande partie des vibrations moléculaires est renvoyée par une onde sonore de la paroi vers l’extérieur, et une fraction pénètre dans le mur, change de mode et de vitesse de propagation (air 340 m/s, béton 3 200 à 3 700 m/s, acier 5 600 m/s) en faisant osciller les atomes du matériau. Une part du son qui parvient de l'autre côté du mur est réémise dans la pièce mitoyenne sous la forme d'onde sonore.
Les sons gênants sont énervants parce que la plupart d’entre eux sont hors de notre contrôle. Si un bruit habituel peut perdre de son caractère de bruit et n'être que faiblement perçu auquel on ne prête plus attention, il est possible de supprimer ceux dont nous sommes responsables : réduire le volume du poste radio, fermer les fenêtres, ne pas laisser le chien aboyer, ne pas claquer les portes, poser des patins de feutres sur le mobilier, ne pas fixer les enceintes ou téléviseur sur un mur, pose de tapis, réserver l'avertisseur sonore au cas d'urgence, etc. Les aides auditives amplifient les bruits gênants d'autant plus que leur porteur n'y est plus habitué.
Il existe plusieurs techniques pour vivre avec des sons gênants, insonorisation fenêtres et portes, tapisseries, moquette, diffusion un fond sonore agréable. Pour obtenir un effet optimum on peut installer une enceinte encastrable. Cette sonorisation transforme les surfaces vibrantes (plafond, mur, sol, mobilier, vitre) en diffuseur sonore dont on localise difficilement le point d'émission. Contre-mesures, diffuser des bruits dérangeants par la tuyauterie, les canalisations des eaux usées, vide-ordure, pont acoustique : cris d’animaux (chiens, poules, coqs, croassements), outils de jardinage ou de bricolage, jeux bruyants, pétards, feux d’artifice, fête privée, pétarades de motocycles puisés dans une sonothèque.
Pour les électroniciens, utiliser un générateur B-F (un simple NE 555 relier à une chaine) délivrant une fréquence sonore proche d'une dimension de la longueur, largeur, hauteur ou diagonale de la pièce ou d'un objet afin de le faire entrer en résonance ; à 40 Hz par exemple, la longueur d'onde correspond à 7,5 m, la pièce peut résonner à 3,75 m et sur les harmoniques 80 Hz, 120 Hz, etc.) ou générer de fausses alarmes, relèvent de l'article 222-16 du Code pénal : « Les agressions sonores en vue de troubler la tranquillité d'autrui sont punies d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ». Une correction, une précision, une astuce, une remarque ?
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