On achève bien les bagnoles !
A quoi ça sert de philosopher et d’être un fan de Diogène, et d’encenser l’art du dépouillement, si l’on commence à collectionner les tonneaux, et les nains de jardin ! Sans parler des vieilles séries noires cartonnées qui prennent la poussière sur les étagères.
Tant pis je vous confie cette petite histoire, cette petite tranche de vie, trop humaine, trop loufoque, pour en intéresser certains !
De la série noire à la série blanche, de chez Gallimard, il n’y a qu’un pas, qu’un doigt qui court sur les reliures de nos vies.
Qui est l’assassin, et qui est la victime ?
Les romans, c’est comme la vie, c’est comme nous, bourrés de non-sens, et de contradictions !
Je me souviens encore du jour où je l’ai achetée. J’étais entré chez ce vieux bouquiniste du grand boulevard. C’est là que j’ai entendu parler d’elle pour la première fois.
Ce que j’adore, ce sont les vieilles « séries noires » cartonnées, de la collection Gallimard, lancée par Marcel Duhamel. Dès que j’en repère un exemplaire, mes voyants virent au rouge. Le flash du collectionneur ! Je tends aussi sec la main avant que celle d’un autre ne se pose dessus, comme si c’était une pépite d’or. A peine si je regarde le titre… Il y a la patine de l’âge, la splendeur des vieilles jaquettes !
J’ai un faible pour les vieux trucs d’une façon générale : Vieilles maisons, vieux objets….
Le seul genre d’antiquités que je ne supportais plus, à l’époque, c’était les vieilles bagnoles. Des épaves que je ne parvenais jamais à garder plus de deux années. J’en avais ma claque d’être emmerdé à chaque déplacement, et d’améliorer mes connaissances mécaniques à chaque nouvelle tuile. D’ailleurs à quoi bon enfin savoir ce qu’était une tête de delco, quand les nouveaux modèles en étaient dépourvus.
Il devenait de plus en plus urgent que je me trouve une nouvelle caisse. La veille, j’avais acheté « l’argus », un journal spécialisé, afin de mettre la main sur l’affaire du siècle. J’avais rapidement laissé tombé, découragé. Toutes ces annonces me paraissaient autant d’arnaques. Une nouvelle fois, j’étais sûr de me faire avoir. Vous savez, ce truc « impeccable », de première main, qu’à toujours couché au garage, ou appartenant au grand-père décédé, et qui l’entretenait soit disant « comme la prunelle de ses yeux ». On met à jour peu à peu le mensonge, avec son compteur trafiqué et son défaut de parallélisme, mais il est trop tard, et question yeux, on n’a plus que les siens pour pleurer !
Je préférais retarder encore un peu plus l’échéance, et passer mon temps ailleurs que dans un garage, dès le lendemain de « l’affaire du siècle » .
Au moins on ne se fait jamais berner quand on achète un bouquin d’occasion. Les bons livres se bonifient avec le temps. Le nombre de lecteurs ayant corné et marqué les pages sont autant d’encouragements à acheter. Tout le contraire d’une bagnole !
Ca faisait un mois que je n’avais pas été chez le vieux. Je l’ai toujours appelé ainsi. C’est un ancien colonel qui a ouvert une bouquinerie pour passer le temps. Il m’a expliqué ça un jour où j’étais le seul client traînant dans son magasin, toujours ouvert, même à des heures impossibles.
J’étais plongé dans un bouquin de Chandler, derrière un tourniquet. Un client entra, ruisselant de pluie, et commença de discuter avec le libraire. Ces deux là se connaissaient bien. et j’entendais la voix du vieux se confier : « Non, non, J’ai pas encore réussi à la liquider ! »
Quand on lit un polar, voilà le genre de phrase qui vous fait sursauter.
Une berline Peugeot était garée devant le trottoir. On aurait dit une voiture neuve. C’était elle « le contrat », qu’ils regardaient tous deux, benoîtement.
« C’est pourtant une bonne affaire. Trente mille bornes au compteur, ce n’est rien du tout pour une voiture de quatre ans ! »
« T’as fait de la publicité, au moins ? lui dit l’autre.
« Bah…Pour le moment j’ai juste mis une annonce dans mon magasin. Y a quand même pas mal de gens qui passent ici ! »
« T’es con ! Les gens qui passent ici, c’est des fauchés, des vieilles filles et des rêveurs. Y en a pas un qui te demandera de l’essayer ! Passe là dans les petites annonces de Ouest-France ! Je te garantis qu’elle partira vite fait. Moi si j’en avais pas une, je te la prendrais tout de suite. »
Toute cette histoire de vente et de transaction avait l’air de faire suer considérablement le vieux. Il parlait de la brader, allant jusqu’à baisser encore le prix de dix pour cent, si le client marchandait. Il fallait qu’il s’en débarrasse au plus vite. La neuve attendait au garage.
C’est ainsi que j’ai acheté cette bagnole, dix pour cent moins cher, en plus d’un roman noir, à jaquette cartonnée. Le vieux me l’avait offert gracieusement, en prime. Foutu bouquin : J’étais persuadé de l’avoir jeté sur le siège arrière, mais par la suite je fus incapable de remettre la main dessus, ni même de me rappeler le titre que j’avais eu entre les mains. Il semblait avoir été avalé par cette nouvelle voiture, à l’espace intérieur étonnant.
C’était tout de même agaçant d’avoir paumé une série noire de la belle époque.. Toute cette histoire de vente avait du me troubler les sens.
Peut-être après tout l’avais-je oublié sur le comptoir !
Je me demandais si je n’avais pas rêvé, le lendemain quand je m’éveillais. Pas de roman noir sur ma table de chevet ! Mais un rapide coup d’œil par la fenêtre me rassura. La Peugeot était là, et il est vrai que pour moi c’était presque un rêve.
C’était effectivement une bonne voiture. Bien sûr la peinture métallisée s’écailla au fil du temps. La carrosserie prit son lot habituelle de creux et de bosses. Mais le jour où je l’ai achetée, elle était vraiment impeccable.
Son seul défaut était d’avoir le siège conducteur passablement enfoncé. Le vieux, c’est vrai, était obèse. Il devait peser au bas mot dans les cent cinquante kilos. Il fallait le voir se déplacer en dandinant, entre les piles monstrueuses de livres de poche, qu’il tachait de distribuer sur les étagères, au fur et à mesure des ventes.
Il hésitait de plus en plus, quand il lui fallait monter sur son escabeau branlant. Je revois encore son regard anxieux, quand il mettait le pied sur la première marche : Le même qu’ont les alpinistes avant de se lancer dans la dernière arête menant au sommet.
Comme il devait se sentir rassuré, dans ce siège baquet qui avait fini par épouser ses formes ! La chose qu’il regretterait en elle, m’avait-il dit en me remettant les clés de contact, et bien c’était son volant. « Pas trop grand, et bourré de mousse . Il a une consistance impeccable quand on l’a dans les mains ! »
Il agitait ses doigts potelés en me disant cela, d’une façon plutôt jouissive et exaltée. Tout à coup il m’avait paru obscène. Je ne sus pourquoi je l’imaginais, derrière l’étalage de littérature érotique, à l’heure où le magasin était fermé, tournant avidement les pages, le souffle court et la face congestionnée.
Voilà donc pourquoi il demandait si souvent aux jeunes filles de monter à l’escabeau à sa place, pour décrocher un bouquin inaccessible. Son poids et son arthrose avaient bon dos…
Dès que je pris possession de l’engin, je nettoyais le volant avec une chiffon imbibé d’alcool. Néanmoins, pendant bien longtemps encore, il m’apparut passablement spongieux, et collant. La mousse qui l’entourait n’en finissait pas d’exhumer d’étranges humeurs. Je crois que le fantôme du vieux continuait à l’habiter.
Une voiture est un peu comme une chaussure. Il faut la faire, qu’elle se fasse à votre pensée et à votre corps. Petit à petit, au fur et à mesure que l’odeur de tabac brun du vieux disparaissait, elle devint complètement mienne.
J’ai parcouru avec elle bien plus de cent cinquante mille bornes. Un sacré paquet d’heures, à rouler et à rêver, à jouer des freins et de l’accélérateur.
D’abord assez méprisante à mon égard, elle a appris à me connaître, moi et mes histoires de fous, quand elle me ramenait de mes journées passées à l’hôpital psychiatrique. Je lui reconnaissais son bon sens, et sa circonspection, devant mes doutes et mes hésitations. Elle ne bronchait jamais en écoutant ces histoires de vies cruelles.
Peut-être après tout s’était-elle instruite, avec tous ces livres qu’elle avait trimballés, dans sa vie antérieure. Qui connaît tous les chemins de la connaissance ?
On a bien tort de dire que la voiture est le dernier espace où l’homme peut se retrouver seul. C’est oublier un peu vite la voiture elle-même, et la communication qu’elle entretient avec vous.
Je ne devrais peut-être pas parler ainsi de ce tas de ferraille. Je sais pourtant bien que rationnellement une voiture n’est qu’une addition d’organes mécaniques obéissant à des lois physiques. Je sais aussi que le regard des gens commence à changer quand vous commencez à exposer de genre d’idées. Ils ne seront pas étonnés quand ils apprendront que vous travaillez chez les cinglés, comme ils disent. Jusqu’au jour où eux-mêmes ont un problème et perdent leur belle certitude.
Après tout on admet bien que les maisons anciennes sont remplies de fantômes. Pourquoi n’y en auraient-il pas dans les vieilles caisses ?
Une voiture, c’est comme un animal, on s’attache. Mon gamin m’avait accroché une peluche au rétro intérieur. C’était ma médaille de saint-Cristophe, mon porte-bonheur.
Au bout de sept ou huit ans, forcément, je la considérais comme faisant partie de la famille. Je me souviens que je regardais les épisodes de l’inspecteur Colombo d’une autre façon. Pour moi, il était de plus en plus clair, que la star, dans cette série américaine, c’était bien sûr la 403 !
D’accord, ma Peugeot à moi n’était pas décapotable, mais elle avait la même intelligence et le même sale caractère que la sienne.
Les années de jeunesse était passées depuis longtemps.
Sans doute que j’aurais du au moins changer les amortisseurs.
Il fallait savoir la prendre, jouer de l’accélérateur et de la clé de contact avec beaucoup de diplomatie. Une technique qui devait plus au feeling qu’à l’explication rationnelle.. Quand au carburateur, ce n’était plus qu’un robinet haute pression qui rejetait des hectolitres d’essence dans l’atmosphère, sous forme de fumée noire et malodorante. Un vrai gouffre pour mon porte-monnaie et une catastrophe pour l’environnement ! Je sentais bien que mes discours écologiques ne tenaient plus la marée, avec cette friteuse polluant tout le quartier et mettant à mal l’anticyclone des Acores.
Elle avait malgré tout gardé de beaux restes. Un silence intérieur digne d’une cathédrale gothique, une bonne qualité de confort, et des accélérations que je jugeais foudroyante, moi qui n’avait possédé avant elle que de petites voitures braves et têtues, mais lentes à la gâchette.
Quelques défauts bien sur apparurent, mais jamais la moindre vraie panne. Jamais elle ne nous laissa en plan, s’emmurant dans ce silence têtu qui ne veut plus rien savoir de vous, exigeant un dépanneur ou un avocat, comme une femme incomprise.
Comment pouvait-elle se débrouiller pour tenir le temps ? Ca, c’était un mystère. Peut-être possédait-elle des organes d’autorégulation. Si je lisais de la science-fiction plutôt que de la littérature policière, je serais peut-être capable d’avancer d’autres d’hypothèses. Le fait est que je manque d’imagination pour expliquer sa formidable endurance.
Son abnégation, devrais-je dire.
J’ai pourtant été un mauvais maître. Voilà une bagnole qu’a toujours couché dehors, ne connaissant jamais la sécurité et le confort d’un garage, même au cœur de l’hiver, quand l’humidité traverse les tôles et corrompt les caoutchoucs.
Avec ça, on peut pas dire que j’ai été un maniaque du livret d’entretien. Ma philosophie a toujours été de considérer qu’on ne touche à rien tant qu’on n’a pas d’ennuis. J’ai jamais changé la moindre courroie ni aucune durite. Juste une fois les bougies, pour savoir si j’avais encore le coup de main.
Mais on peut pas dire qu’elle m’a coûté.
Avec le recul je me demande si je n’ai pas recherché inconsciemment ses limites, à la faire craquer, motivant ainsi un acte de rupture définitif avec elle. Mais rien ! C’était comme si mes accès de fureur et mes claques la renforçaient dans sa détermination stoïque.
Seule la lecture de Marc Aurèle, me permettaient de la comprendre !
C’était une voiture qu’avait le sens du devoir.
Elle ressemblait finalement à une de ces vieilles domestiques d’autrefois, comme on n’en fait plus, ayant élevé sans se plaindre les enfants de ses patrons, ne pensant même pas, l’âge aidant, faire valoir ses droits à la retraite, tant elle est sûre de faire partie de la maison.
Il fallait pourtant bien que j’envisage une remplaçante.
Bref, il fallait que je la vire.
Onze années d’exploitation de cette malheureuse m’avait amené à faire quelques bonnes économies. Le bas de laine était plein et l’avenir automobile s’annonçait dorénavant radieux.
Il était tout à fait maintenant envisageable d’acheter une voiture neuve, une de ces caisses dernier cri vantées par les publicités, et dont l’acquisition m’avait si longtemps paru illusoire.
Je médite, je temporise pendant des jours, et souvent je prends mes décisions en cinq minutes. J’avais déjà repéré la succursale, toute en baie vitrée haute de dix mètres, avec les drapeaux immenses flottant au sommet. Un de ces endroits ressemblant à une ambassade, fait pour vous convaincre de votre appartenance au monde des puissants et des riches, dès que vous y mettez les pieds. On vous reçoit dans de grands fauteuils, et l’on vous propose même un café.
Le vendeur n’a pas eu beaucoup de mal à se donner. Dix minutes que j’étais entré pour me documenter, et déjà je prenais option sur un modèle.
En prenant le volant pour l’essayer sur la voie express, je réalisais combien la voiture que j’avais cru si longtemps sophistiquée était devenue ringarde, dépassée, larguée…Tous ces mots dont les ados usent à propos de leurs parents.
Est-ce que je ne faisais pas un transfert sur cette vieille caisse ? Evidemment oui. J’étais vraiment malheureux pour elle, et le plaisir de conduire cette voiture trop parfaite n’y changeait rien.
Mieux valait ne pas parler de ses sentiments stupides à personne !
Je pensais à Rimbaud. Il avait assis la beauté sur ses genoux, et l’avait trouvé laide. Comme je le comprenais.
Il me restait une semaine à attendre avant de prendre livraison. Le contrat stipulait que la marque me reprenait l’ancien modèle à un prix dérisoire, le prix de la casse.
Je n’avais donc plus qu’à garder ma guimbarde en attendant.
Elle m’attendait sur le parking, tranquille. J’avais une boule à l’estomac quand je m’assis dans le vieux fauteuil défoncé. Elle dut le sentir, mais ne me dit pas un mot.
Pendant toute cette longue semaine, Il y eut ainsi entre nous un silence, des appréhensions, des non-dits, que le vide du radiocassette enlevé, sans explication, ne parvenait pas à combler.
Je pensais à tous ces kilomètres que nous avions parcourus ensemble sur les routes de France, d’Espagne, et même du Portugal. Cela n’était pas rien, et comptait certainement parmi les jours les plus heureux de mon existence.
Ma jeunesse était maintenant derrière moi. Même si j’avais plein d’astuce pour l’avenir, et une philosophie ou deux de rechange en guise de roue de secours, j’accusais quand même un bon coup de blues.
Plein de nostalgie, nous allâmes tous deux une dernière fois à la mer. Les vagues s’écrasant sur le rivage avaient le même gris métallisé que sa carrosserie métallisée, maintenant un peu passée. Et comme nous revenions vers elle, luttant contre le vent, je la voyais au loin, nous attendant sur le parking, toujours fidèle.
Je repensais à toi plus jeune assise à mes côtés, les enfants encore petits allongés sur la banquette arrière, leur pouce dans la bouche, et le déroulement sans embûche des kilomètres sur l’autoroute, éclairé par deux phares puissants. Le moteur tournait comme une horloge et les cadrans lumineux me renvoyaient des gages de sécurité.
Mais bien sûr les années avaient passés, pour elle, comme pour nous. Au fil du temps, certains témoins ne s’allumaient plus sur le tableau de bord, ou donnaient des informations fantaisistes. Rien de grave ! Je pensais au début avoir affaire à des réactions caractérielles .
Tout cela n’était peut-être qu’un mécanisme de défense. Certains vieillards préfèrent retourner en enfance, plutôt que d’affronter la réalité d’une déchéance incontestable. J’hésitais à la prendre pour faire de longues distances. Néanmoins, nos relations gagnèrent encore en profondeur. Nous étions garants tous deux de la même route accomplie. Et comme dans les vieux couples qui vieillissent bien, l’humour permettait de palier à bien des inconvénients mécaniques.
Pendant la semaine où nous roulâmes encore ensemble, elle oublia tous ces défauts. C’était comme un retour de jeunesse. Elle me ménageait, faisait l’amoureuse, jouait des hanches dans les virages et se redressait superbe. Je la soupçonnais d’avoir mis du khôl autour de ses phares et de prendre des cours de danse orientale en douce. Elle tournait de nouveau comme une horloge.
C’était à ne rien y comprendre !
Voilà qu’elle s’était remise à démarrer du premier coup, avec un enthousiasme d’adolescente. Je ne sais pas quelle révolution endocrinienne s’était passée sous le capot, mais de multiples autorégulations l’avait amené à diviser sa consommation d’essence par deux. Un coup d’œil dans le rétroviseur me persuada qu’elle ne rejetait maintenant qu’une mince vapeur d’eau, semblable au jet d’une cocote minute. Au jour fatidique où je l’amenais au cimetière, il restait à mon grand désespoir encore un demi-plein dans le réservoir.
Enfin, ce fameux jour, « le jour de la culpabilité », je l’ai garé sur le parking du concessionnaire. Je suis descendu en sifflant, claquant la porte comme à mon habitude, sans me retourner, l’air de rien, comme si je partais chercher du pain.
Je crois pourtant qu’elle devinait quelque chose. Les animaux eux aussi ont cette forme d’instinct quand, trop vieux pour se traîner, on les envoie chez le véto se faire piquer.
J’ai remis les clés au type avec qui j’avais conclu l’affaire, un jeune cadre dynamique aux allures de maquignon, qui se régalait d’avance de sa commission. C’était tout à fait inutile de lui parler de mes états d’âme. Il a barré la carte grise de la vieille Peugeot, d’une longue balafre en travers qui m’a fait mal, puis il a donné un coup de tampon énergique sur le papier.
Pour finir il m’a remis un certificat de destruction, que j’ai du parapher à mon tour.
La messe était dite !
Je n’avais plus qu’à partir au volant de mon nouveau engin. Le plus vite était le mieux. Mais il a fallu qu’il me montre encore toutes les manettes, les boutons, les voyants électroniques, des gadgets intérieurs dont je n’avais pas idée, et encore moins ma pauvre vieille voiture.
Le moteur était d’une propreté époustouflante, plus nickel que mon salon, vraiment, et c’était une chose sidérante à constater, moi qui n’avait connu que des moteurs ruisselant d’huile, ressemblant à des barbecues de jardin.
Elle était haute sur pattes, plus prêt des nuages que de la route.
En montant dedans, j’ai eu l’impression d’être un pilote d’avion partant pour une destination froide et inconnue. J’ai décrit un grand arc de cercle dans la cour du garage avant de sortir.
Alors pour la dernière fois je l’ai vu, derrière les vitres teintées, et j’ai blêmi.
La pauvre vieille était assoupie, exténuée par tous les efforts qu’elle avait accomplie toute la semaine, pour tenter de se maintenir au niveau des jeunes.
Se doutait-elle que je venais de signer son arrêt de mort ?
Tout le passé m’est revenu, et je me suis rappelé en frissonnant du bouquin d’Horace Mac Coy, que j’avais laissé ouvert sur l’étagère du bouquiniste, il y a onze ans de ça, et cent cinquante mille bornes en arrière.
C’était : « On achève bien les chevaux ! »
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