Parce que vous ne m’appartenez pas
Alors que tous les jours réglementations s'alourdissent dans tous les domaines et que tout indique que ça va continuer, et que dans le même temps les taxes s'ajoutent aux taxes, nous devenons pas à pas littéralement propriétaires de la vie d'autrui. Or, est-il besoin de le rappeler, vous ne m'appartenez pas, et je n'ai aucune envie que ça change.
« Vous ne m’appartenez pas, ni en totalité, ni en partie ». Cette affirmation très simple est pourtant lourde de sens : je ne me reconnais aucun droit de vous imposer des actes ou des idées. Je peux chercher à vous convaincre, je peux passer un marché avec vous, mais je n’ai pas d’autorité sur vous, à moins que vous ne m’en accordiez une dans un ou plusieurs domaines, et que j’accepte de l’exercer. La seule personne dont j’estime pouvoir disposer, c’est moi-même.
Ce n’est pas à moi de définir ce que vous pouvez manger ou non, tant que vous ne mangez pas ce qui m’appartient.
Je n’ai pas non-plus à vous interdire de travailler avec quelqu’un, ou à vous obliger à le faire. Je peux juste refuser de travailler avec vous, quelles que soient mes raisons.
Je n’ai aucune légitimité pour décider l’usage qui doit être fait de vos revenus, fruits de vos efforts, de votre temps, de travail.
Quant à ce que vous faîtes ou ne faîtes pas de votre corps, qui suis-je pour vous imposer mes valeurs et mes choix, tant que vous respectez l’intégrité de ma propre personne et de mes biens ?
De plus, comme vous ne m’appartenez pas, je ne peux imposer une même norme pour tous dans un domaine, car il faudrait pour cela que j’utilise la coercition contre tous ceux qui souhaiteraient échanger librement sans respecter cette norme. Et ce qu’il s’agisse du marché du transport, de celui de l’alimentaire, ou même de celui du travail. De la même façon, et toujours parce que vous ne m’appartenez pas, je ne pense avoir aucune légitimité pour prélever de manière autoritaire une part de ce que vous obtenez par votre travail, et ce même si c’est pour redistribuer le fruit de vos efforts à plus pauvre que vous. Vous n’êtes pas ma propriété, ce qui est à vous n’est pas à moi, je n’ai pas à décider quoi en faire.
Et tous ces pouvoirs qui ne m’appartiennent pas, je ne peux bien sûr pas les déléguer : si je n’ai pas ma place à une assemblée de copropriétaires, je ne peux pas envoyer quelqu’un m’y représenter et défendre mes choix. De même, si j’estime que votre vie ne m’appartient pas, comment pourrais-je mandater un Homme politique pour en diriger certains aspects ? Il m’est donc moralement impossible de soutenir, y compris par mon vote, toute mesure ou tout Homme politique qui tendrait à augmenter la pression réglementaire ou fiscale, car ce serait me considérer comme copropriétaire légitime d’une partie de vous.
Ici on pourrait objecter qu’en démocratie il existerait un consentement implicite à suivre l’avis de la majorité, et que cette majorité est donc qualifiée pour imposer ses choix à tous. Chacun pourrait ainsi légitimement tenter d’imposer ses choix à tous en essayant de convaincre la majorité, ou simplement en espérant faire pencher la balance par son vote. Si l’individu vote, c’est qu’il accepte les règles du vote (donc qu’il est consentant) et s’il ne vote pas, c’est qu’il renonce à donner son avis, et qu’il est donc consentant. Ainsi tout individu serait, par définition et sans même le savoir, consentant. Mais quelle est la valeur d’un consentement si on est obligé de consentir ? La vérité c’est que celui qu’on va mettre en cage pour avoir cultivé certaines plantes dans son appartement n’est pas implicitement consentant. La vérité c’est que quand deux personnes décident volontairement, sans y être forcées par quiconque, de passer un contrat sans payer de taxe, c’est qu’elles ne consentent pas au paiement de ces taxes. La vérité c’est que beaucoup de ceux qui ne trouveront jamais de d’emploi à cause des rigidités du marché du travail imposées « pour leur bien » n’ont jamais consenti à ce qu’on leur impose ces protections. Il serait profondément malhonnête de ma part de considérer que je pourrais m’attribuer un pouvoir sur la vie de quelqu’un, sous prétexte que je consentirais à lui accorder le même pouvoir sur la mienne. La démocratie n’est pas suffisante à mes yeux pour légitimer l’appropriation de tout ou partie de la vie d’autrui.
Quant à ceux qui pourraient dire que le consentement est implicite dès lors qu’on est sur le territoire national, que quand on vit quelque part on accepte les règles du jeu, et que ceux qui ne sont pas content peuvent toujours partir, qui sont-ils pour inclure la propriété des autres, fruit de leurs efforts et d’échanges volontaires qu’ils ont conclu, dans une notion de territoire sans leur consentement ? Oui, si vous entrez dans ma maison vous consentez à y respecter mes règles. Mais mon pays n’est ni totalement, ni même en partie, ma maison et je n’ai aucun droit de décider de ce qui est permis ou non chez mon voisin. Et je ne lui reconnais pas le droit de d’administrer ce qui se passe chez moi.
Il n’existe donc pas de consentement tacite et unanime à subir mes règles. Et le fait que l’immense majorité des gens acceptent de se soumettre à mon idée si elle est majoritaire ne me donne aucun droit sur ceux qui n’y consentent pas. Or la voie légale ne me permet pas d’épargner ces derniers, ce qui m’interdit moralement de l’utiliser pour instaurer des limitations de choix ou des prélèvements supplémentaires.
Ainsi, comme vous ne m’appartenez pas, il m’est impossible de soutenir une nouvelle réglementation ou une augmentation de taxe, car ce serait m’approprier un part supplémentaire de votre vie et de vos choix.
Bien sûr cet obstacle ne s’applique pas quand il s’agit de demander l’abrogation d’une réglementation ou la diminution d’un prélèvement : il s’agit là de rendre une partie des pouvoirs que je n’aurais jamais dû avoir. Et puis comme selon moi vous ne m’appartenez pas, il est normal que je me batte pour que l’argent qu’on me prend (de force) ne serve pas à limiter vos choix, à diriger une partie de vos vies, ni à vous prendre de force une partie de vos revenus ou de vos biens.
Vous l’avez compris, je pense que vous n’êtes pas à moi, que je n’ai pas à décider pour vous sans votre accord, même par l’intermédiaire des urnes. Et si vous non-plus ne pensez pas que les autres sont votre propriété, et que ce n’est pas à vous de gérer leur vie pour eux s’ils ne vous le demandent pas, n'oubliez pas que chaque augmentation d'impôt et chaque nouvelle réglementation vous rendent un peu plus propriétaire d'autrui.
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