POMPE À CHALEUR : une expérience
PRÉAMBULE
Je suis inscrit depuis plusieurs années sur AV. Près de 1600 commentaires et aucun article. Dès l'origine, je n'avais pas l'envie d'écrire des articles, pas plus que maintenant. Parce que je ne suis pas un littéraire et que j'ai de la peine à écrire 2.000 mots pour exprimer ce que je peux dire en 200 mots. Je suis plus un adepte des résumés que des dissertations. Rajoutons à cela un emploi du temps chargé (quoique retraité) et, il faut bien le dire, passablement de paresse.
Mais, il y a quelques jours, j'ai lu un article sur les pompes à chaleur, article contenant des imprécisions et des erreurs, certains commentaires de cet article contenaient de franches contre-vérités.
J'avais entrepris de corriger certaines erreurs, mais petit à petit le texte est devenu bien trop grand pour faire un, voire plusieurs commentaires. J'ai donc pris la décision d'en faire un article. Article qui lui-même me paraît bien grand.
Alea jacta est.
INTRODUCTION
Mon expérience personnelle fait que je suis un fana des pompes à chaleur (PAC). Alors, j'ai envie de partager mon expérience.
Une pompe à chaleur extrait de la chaleur à une source pour la fournir à un circuit de chauffage. La source est plus froide que le circuit de chauffage. C'est un compresseur qui est utilisé pour « tirer des calories » d'une source froide vers un circuit plus chaud (il existe d'autres techniques que les compresseurs, mais, à ma connaissance, pas utilisées actuellement). C'est en fait un frigo « à l'envers ».
Pour obtenir un bon rendement d'une PAC, il faut que la différence de température entre la source et le circuit de chauffage soit la plus petite possible. C'est donc totalement illusoire de vouloir obtenir 80° à partir d'une source à -15° avec un bon rendement.
Image : Luna04 at fr.wikipedia
POUR LA SOURCE, ESSENTIELLEMENT DEUX TECHNIQUES
1) GÉOTHERMIE, FAIBLE PROFONDEUR
J'exclus ici la grande profondeur qui n'est pas à la portée d'un particulier.
On peut admettre une température minimum de la source d'environ 10°, c'est la source la plus efficace.
Il y a deux solutions :
a) Géothermie horizontale
Un serpentin est posé à une profondeur de 80 cm à 1m. Sa longueur dépend de la quantité de chaleur à soutirer. Typiquement, une surface équivalente à 1,5 fois la surface à chauffer. Difficile à envisager en rénovation, à cause des travaux importants à effectuer, au surplus, cette surface ne peut plus recevoir de plantation d'arbres. À la construction, c'est une solution relativement peu coûteuse.
b) Géothermie verticale
Un forage vertical reçoit 2 (ou 4) tubes, l'un des tubes reçoit le fluide froid, qui descend et remonte dans l'autre tube. Attention, l'échange thermique ne se fait pas au fond, mais tout au long de la tubulure (c'est en fait un serpentin déroulé verticalement). La profondeur de forage dépend de la puissance souhaitée (typiquement de 100 m à 250 m.). C'est une solution stable mais coûteuse, qui peut être envisagée en rénovation (dans la mesure où l'on peut amener la foreuse sur place). L'empreinte au sol est quasiment nulle.
Cette solution n'est pas toujours possible, selon le profil géologique, nappe phréatique par exemple, le forage peut être interdit.
2) AÉROTHERMIE
C'est l'air ambiant qui est utilisé (temp. -20° / 40°). Solution bien moins efficace que la géothermie mais aussi bien moins coûteuse. Sans problème en rénovation (sauf, peut-être les voisins à cause du bruit).
POUR LA RESTITUTION DE CHALEUR
1) Par circulation d'air avec échangeur de chaleur dans un faux-plafond.
Solution efficace, l'air circule à bonne température (20° / 22°). Autre avantage : l'installation peut être utilisée en climatisation l'été. En revanche, difficilement envisageable en rénovation à cause des importants travaux à faire (faux plafonds entre autres).
La solution d'air pulsé que l'on voit habituellement pour les climatiseurs est à rejeter : vraiment très peu confortable, air glacé l'été ou trop chaud l'hiver tombant directement sur le corps.
2) Par plancher chauffant, très performant, peut aussi être utilisé pour rafraîchir en été (mais pas vraiment climatiser). En rénovation, importants et coûteux travaux, mais envisageables. En neuf, solution de choix, pas plus coûteux que des radiateurs.
3) Par radiateur à basse température BT (30° à 45°), performant, mais surface de chauffe relativement importante, il existe maintenant des radiateurs à plusieurs couches diminuant sensiblement l'encombrement. Solution tout à fait envisageable en rénovation, il suffit de remplacer les radiateurs.
J'ai vu que, maintenant, il existe des murs chauffants, mais je n'ai strictement aucune idée de ce que cela représente.
4) En utilisant les radiateurs existants à haute température HT (60° à 85°). Solution peu performante.
POUR SYNTHÉTISER
Dans l'ordre de performance décroissant :
1) Géothermie + circulation d'air
Excellent rendement, un peu plus coûteux (il faut prévoir une construction plus haute) qu'un chauffage classique en neuf.
Pratiquement pas possible et très coûteux en rénovation (faute, souvent d'un plafond de hauteur suffisante).
2) Géothermie + plancher
Très bon rendement, il arrive que certaines personnes ne supportent pas le chauffage par le sol, mais c'est assez rare,
Pas plus coûteux que le traditionnel en construction, sans doute la solution de choix si l'on ne peut pas assumer les surcoûts (hauteur d'étage) de la solution 1.
Travaux relativement importants en rénovation.
3) Géothermie + radiateurs BT
Bon rendement et bon compromis en rénovation.
4) Géothermie + radiateurs HT
Rendement médiocre.
À proscrire totalement en construction.
En rénovation, sans doute un mauvais choix, il vaut mieux investir en remplaçant les radiateurs HT par des BT, le retour sur investissement se fait en 2-3 ans, sans compter le confort accru.
5) Aérothermie + circulation d'air
Attelage totalement déséquilibré. Si l'on investit pour la circulation d'air, faire un petit pas de plus pour la géothermie.
6) Aérothermie + plancher
Même remarque que pour 5).
7) Aérothermie + radiateur BT
Un compromis acceptable lorsque l'on ne peut pas passer à la géothermie. Mais relativement peu performant.
8) Aérothermie + radiateur HT
La pire des solutions (en fait, ce n'est même pas une solution), on combine tous les inconvénients.
À proscrire, tant en neuf (et se poser des questions par rapport à la compétence d'un installateur qui le proposerait) qu'en rénovation.
Par temps froid (< 5°), la PAC utilise le chauffage électrique par résistance, le rendement est catastrophique est devient négatif, autant faire du chauffage électrique direct.
À mon avis, c'est quasiment de l'escroquerie (pas forcément au sens étroitement juridique du terme) de le proposer, à l'exception, et encore, du littoral méditerranéen.
C'est, malheureusement, le système que l'on rencontre souvent en rénovation. La plupart du temps pour des raisons financières. Mais c'est un calcul à très très court terme. En 2-3 ans l'économie sur une solution à radiateurs BT est mangée et bonjour les dépenses.
QUELQUES REMARQUES
En dehors de quelques camelotes chinoises, les PAC, fonctionnent très bien, le matériel est, dans la plupart de cas, de bonne qualité.
La durée de vie d'une PAC est de l'ordre de 25-30 ans (à comparer avec une chaudière gaz ou fuel).
L'entretien est peu coûteux. Cet entretien est, obligatoire dès que l'on dépasse une certaine quantité de fluide caloporteur, limite atteinte dans la plupart des cas pour des installations de chauffage, l'entretien obligatoire tous les deux ans, peu coûteux, de l'ordre de 150 €, à mettre en rapport avec l'entretien d'une citerne de fuel.
La PAC, c'est une chose, mais je pense que le plus important c'est d'avoir affaire à un installateur qui connaît son métier en général et les PAC en particulier. Malheureusement, dans le domaine des PAC, il y a beaucoup plus de bricoleurs (par exemple, des gens qui vous proposent sans rire de l'aérothermie en climat alpin) que de vrais professionnels.
Je le répète, l'installation d'une PAC est très technique, ce n'est pas à la portée de n'importe quel chauffagiste.
L'immense majorité n'est absolument pas qualifiée dans ce domaine, même s'il se dit certifié et qu'il le soit effectivement (certifié, mais pas forcément compétent).
C'est très différent d'une installation classique, mis à part le réseau de radiateurs. La plupart des gens mécontents le sont non pas à cause du matériel, mais de l'installateur. Si le matériel casse ou tombe en panne, c'est dans la quasi totalité des cas à cause d'une installation mal faite et de réglages aberrants.
Avant de signer quoi que ce soit dans ce domaine, je conseille vivement de demander, à un potentiel futur installateur, une liste d'anciens clients et de prendre contact avec ses clients. Il faut en voir plusieurs, ce n'est pas une référence absolue (l'installateur ne donne pas des adresses de clients mécontents), mais cela permet déjà de se faire une idée, ne serait-ce que par la longueur de la liste des clients.
MON EXPÉRIENCE PERSONNELLE
HISTORIQUE
J'ai une maison de 160 m2, sur deux niveaux, dans un climat relativement rude (Haute-Savoie) chauffée initialement à l'électricité. Moyennement isolée par 8 cm de laine de verre entre les agglos de 20 cm extérieurs et le mur de doublage intérieur de 6 cm de briques en terre cuite et enduit de plâtre.
Cette maison a 38 ans. À l'origine, chauffée à l'électricité, le rez, pièces à vivre, avec des radiateurs à accumulation (tarif de nuit) ; le premier, chambres, avec des convecteurs.
Eau chaude sanitaire (ECS) et cuisson des aliments électricité également, en fait, tout électrique.
NOUVELLE INSTALLATION
Il y a sept ans, j'ai remplacé la totalité de mes fenêtres doubles par des fenêtres triple vitrages à l'argon. Déjà près de 35 % d'économie sur le chauffage.
Il y a quatre ans, j'ai supprimé le chauffage électrique et installé une PAC avec géothermie verticale (forage à 200 m), elle a une durée de vie estimée de 25-30 ans, garantie d'usine de 5 ans.
Le fabriquant parle d'un COP de 4,54 avec une différence de température de 35°. Expérience faite sur 4 saisons complètes, je parle plutôt d'un COP de 4 (c'est-à-dire, pour 4 kWh thermiques fournis pour 1 kWh électrique consommé).
La PAC ne fait pas plus de bruit qu'un gros frigo américain et comme elle est située en cave, en n'entend strictement rien.
Un ballon tampon de 500 l fait intermédiaire entre la PAC et le circuit de chauffage, il augmente l'inertie du système et évite les démarrages trop fréquents de la PAC, démarrages gourmands en énergie (une autre solution, c'est d'utiliser une PAC en technologie inverter, mais à l'époque de mon installation pas encore disponibles dans cette gamme de puissance avec des constructeurs sérieux).
Le forage est garanti pour 50 ans (son remplacement ne sera même pas le problème de mes héritiers directs) !
J'ai également mis 5 m2 de capteurs solaires pour l'ECS sur un toit bien orienté.
Un ballon de 400 l est réchauffé en priorité par le capteur solaire le complément éventuel est fait par la PAC durant les heures de nuit.
J'ai réalisé dans toute la maison une installation de radiateurs BT. L'idéal, serait d'avoir, dans les pièces à vivre, salon, cuisine, un chauffage au sol, mais cela demandait trop de travaux dans une maison que je devais continuer à habiter pendant l'installation.
J'ai obtenu de l'installateur un complément de garantie et d'entretien jusqu'à 7 ans. Y compris le circuit de chauffage, les circulateurs et vase d'expansion. C'est en faisant faire les travaux en hiver que j'ai pu négocier ce contrat et une réduction sur le prix total.
Durant les travaux (deux semaines et demi hors forage), j'ai toujours eu au moins une pièce chauffée correctement avec l'ancienne installation.
Le forage a été fait en 2 jours et demi, montage et démontage du chantier compris, impressionnant. Je me suis cru dans un pays pétrolier ...
Pour mon installation, j'ai sélectionné parmi une dizaine d'installateurs et demandé des devis à 4 d'entre eux.
Avant de me décider, j'ai visité 5-6 installations, elles avaient de 10 à 25 ans d'âge et fonctionnaient toutes sans aucun problème.
L'une avait même plus de 27 ans de fonctionnement sans problème. Elle venait de tomber en panne, elle était techniquement réparable à peu de frais. Malheureusement, le fluide frigorigène utilisé à l'origine est maintenant interdit et le propriétaire a dû remplacé totalement la PAC et l'électronique de contrôle, le tout pour environ 12.000 €, soit, grosso-modo, le prix de deux chaudières gaz, mais ces chaudières gaz ont une durée de vie de moitie inférieure et surtout, sont bien plus coûteuses à l'exploitation.
RÉSULTAT :
Ma consommation électrique totale, chauffage, ECS, cuisson, éclairage, etc a été divisée par 3,5 (calcul sur 4 saisons). J'ai divisé ma facture d'électricité par 2,5 (la différence entre consommation/coût provient du fait qu'auparavant mes radiateurs à accumulation fonctionnaient à bas tarif alors que la PAC fonctionne 24 h. / 24.
L'ECS est pratiquement assurée à 100 % par le solaire durant 4-5 mois par année, 50 % durant 4-5 mois également et pratiquement rien pendant 3-4 mois.
Sur un plan annuel, j'estime que le solaire me fournit 60 % de mon ECS.
Au plus fort de l'hiver haut-savoyard, mes radiateurs n'ont jamais dépassé 45° par une température extérieure de -13°.
L'eau glycolée circulant dans le forage n'est jamais descendue plus bas que 11°. ce qui fait que la différence de température entre source et chauffage n'a jamais dépassé 34°, la PAC, dans ces conditions fonctionne avec un rendement plus que correct.
Je maintiens dans les pièces à vivre à 22°c et les chambres à 16°. Avec un niveau de confort bien supérieur par rapport à mon installation précédente. Au lieu d'avoir un point très chaud (radiateur à accumulation), j'ai maintenant une douce chaleur bien répartie.
Avec un bémol : une forte inertie, en revenant d'une absence en janvier, par exemple, alors que le chauffage est sous « hors gel » (6°) durant 2 semaines, il faut 2-3 jours pour revenir à 22° dans le salon. Je complète par un insert de cheminée pendant 2 jours.
Durant ces quatre ans, je n'ai eu absolument aucune panne ou problème quelconque, l'installateur est passé une fois par année, il a purgé par deux fois mes radiateurs (mais cela c'est normal), contrôlé la PAC, mais, même si je n'avais pas une garantie/entretien, je n''aurais eu rien à payer durant ces années.
LE COÛT
Le forage représente presque le tiers du coût total : 22.000 €
PAC + ballon + régulation + capteur solaire thermique : 25.000 €
Circuit de chauffage : 20.000 €
Je n'avais aucun circuit hydraulique de chauffage auparavant, ce qui explique le coût élevé, bien plus que la pose de 9 nouveaux radiateurs. Pratiquement pas de tuyaux apparents, On a passé plusieurs heures avec l'installateur pour trouver une solution esthétique.
Soit un total de 67.000 € compte tenu de crédit d'impôt et de diverses subventions, j'ai payé environ 45.000 €.
Je ne dépense pas plus que 500-600 € annuels pour chauffage et ECS. Au surplus, avec mon contrat d'entretien pour 7 ans je n'ai aucun frais annexe durant ces 7 ans. Au-delà, c'est à dire dans 3 ans, j'aurais à payer environ 150 € par année d'entretien (à mettre en rapport avec le coût d'entretien d'une installation au fuel).
Difficile de parler du coût réel tenant compte des investissements à cause des différentes durées de vie des composants.
Par exemple le forage s'amortit que 50 ans, la PAC et la régulation en 25 ans.
Pour le circuit de chauffage, en dehors du circulateur et du vase d'expansion, c'est « le temps qu'un tuyau ou un radiateur se perce ».D'autant plus que si l'installation existe déjà, il suffit de remplacer des radiateurs HT par des radiateurs BT (compter 800 € par radiateur).
Mais je pense que, tous comptes fait et de façon pessimiste, on peut tabler sur un amortissement en 20 ans. Soit, un amortissement de 2.250 € par année.
Le financement, c'est la principale pierre d’achoppement pour envisager une nouvelle installation.
On pourrait, pour les petits revenus, envisager des prêts à taux zéro, amortissables sur 25 ans. Mais il y a clairement un manque de volonté politique de faire un vrai virage énergétique. Et pourtant, ce genre de solutions de rénovation fournirait passablement d'emplois, tout comme les travaux d'isolation thermique d'ailleurs.
Mais bien sûr, on ne peut pas à la fois dépenser des milliards dans des solutions du siècle dernier et investir dans le futur.
CONCLUSION
Je suis enchanté du résultat et, expérience faite, totalement convaincu par les PAC en géothermie.
Je suis prêt à répondre à toutes les questions et à faire visiter mon installation (dans la région de Saint-Julien-en-Genevois, Haute-Savoie).
J'ai fait poser également un peu plus de 30 m2 de photovoltaïque, le tout sur un toit bien orienté. La production photovoltaïque est revendue en totalité et j'achète la totalité de ma consommation électrique. J'en suis aussi tout à fait satisfait.
Mais, c'est quelque chose dont nous pourrions débattre ultérieurement.
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