Pour sauver le soldat Sarkozy : La tentation de la grande manip
Non seulement le doute ne subsiste plus sur la défaite annoncée du déjà ex-président Sarkozy, mais il est même hautement probable qu’il risquera d’entraîner dans sa chute d’innombrables élus professionnels, et autres politiciens carriéristes, qui commencent à donner de sérieux signes de panique. Ils comprennent désormais qu’ils ont amarré, de façon par trop imprudente, leurs précieuses situations à une locomotive dont ils viennent de se rendre compte qu’elle est lancée à tombeau ouvert sur un sombre inconnu.
Le tout récent bouleversement du Sénat, l’un des bastions les plus inexpugnables de la Droite française, qui était resté dans son giron depuis la création de la 5eme république, pendant plus d’un demi-siècle, est un signe supplémentaire, si tant est qu’il en fallait encore un, pour se convaincre de l’inéluctable débâcle.
Au sein du sérail politique de l’UMP, pire qu’un glas solennel, qui aurait sonné, à la limite, la fin d’un cycle, et le commencement d’un autre, dans un ordre républicain qui en vu d’autres, ce sont les tocsins de tous les clochers de France, les tambours et les trompettes, et même toutes les sirènes de pompiers qui se sont mis à battre la chamade, dans un indescriptible charivari. Il faut dire qu’ils ont été lents à la détente dans la cambuse. Non parce qu’ils ne se doutaient pas de l’imminence du sinistre, mais juste parce que des règles de clan les soudaient les uns aux autres, dans la posture des singes de la sagesse, dans un reflexe grégaire qui réunit des poussins sous l’aile protectrice de leur maman-poule. Ils voyaient bien que de noirs nuages s’amoncelaient au dessus de leurs ronronnantes certitudes, mais ils n’en étaient que plus pétrifiés. Parce qu’à trop se confondre dans une mentalité de clan, on perd ses ressorts individuels. On n’ose pas être le premier à se rebiffer, à oser la première et toute timide protestation. Et donc, ils attendent tous qu’un plus audacieux, un plus fou, un plus irresponsable ose enfin expectorer la peur collective, le premier reproche, l’anathème qui sommeille en boule dans la gorge de la multitude apeurée, pour qu’éclate enfin la colère trop longtemps contenue, contre celui et ceux qui ont osé jouer avec les carrières bien empaquetées de toute la famille UMP.
A ce moment là de la libération, lorsque les barrières consensuelles tomberont, ce sera la ruée, la curée, une curée de poules sur un grand fauve devenu vermisseau. A ce moment là, on ne s’entendra plus. Pendant que les uns caquèteront de prudes recommandations à l’impénitent ambitieux, pour lui suggérer, pour le bien de toute la Fratrie, et la sauvegarde des intérêts de tous, y compris, et surtout les siens, de passer la main, d’autres monteront sur leurs ergots compensés et appelleront ouvertement à la rébellion. Ils encourageront le Zorro le plus en vue à accourir sur son noir destrier, pour prendre sous son manteau tous les sergent Garcia de l’Union.
Mais le problème, dans cet ultime sursaut de survie serait qu’il viendrait un peu tard. Voire trop tard. Il serait bien difficile au candidat de dernière minute, un canasson au pied levé, de pouvoir s’aligner avec les favoris des autres écuries dont il ne pourra qu’admirer les sabots, loin devant lui.
Alors quoi faire ? Quoi faire pour que ceux qui ont laborieusement monté la construction Sarkozy ne perdent pas la main ? Quelle botte secrète pourraient-ils utiliser, puisqu’ils n’ont plus le temps de remplacer leur principal atout ?
Une seule ! Il ne leur reste qu’une seule possibilité pour s’assurer que malgré son écrasante impopularité, Sarkozy puisse être élu, et bien élu.
Qu’au second tour il n’ait pas le candidat du PS en face de lui, mais celle du Front National. Parce que là, ce serait un vote chantage, un vote refuge, un vote quasi forcé, qui pourrait même le propulser à un taux d’élection de républiques bananières.
L’équation est somme toute très simple. Si Marine Le Pen arrive au deuxième tour, et sauf grosse surprise, elle fédérera contre elle la quasi-totalité des mouvances politiques, des lobbies, des syndicats, des médias, et de tous les faiseurs d’opinion. Le candidat qui sera face à elle sera assuré d’engranger les consignes de vote « utile » de presque tout le monde. Un peu comme lors des élections de 2002 ou Chirac l’emporta à plus de 82%. Juste parce qu’il avait Jean Marie Le Pen en face.
La question se posera, cependant, de savoir quel sera le modus operandi pour inciter les électeurs à voter Front National plutôt que PS, lors du premier tour. Parce que toute la stratégie devra reposer sur l’objectif que le PS doit être absolument éliminé lors du premier tour. C’est une condition siné qua nun.
Pour Nicolas Sarkozy, en effet, l’ennemi qui pourrait lui barrer la route d’une réélection ne sera pas Marine Le Pen, mais le PS. Avec Marine Le Pen, même si un effet pervers sera toujours envisageable, il sera calculé en conséquence, et de toute façon, si elle est élue malgré tout, et bien que le risque qu’elle le soit mobilisera contre elle un formidable potentiel, y compris celui du premier parti politique de France, celui des abstentionnistes, son accession à la première institution du pays sera de toute façon plus digeste pour la droite classique, et moins périlleuse que celle d’un PS dont l’organisation et le potentiel lui permettront d’occuper l’ensemble du paysage politique, alors que le FN reste un lilliputien politique, malgré sa grosse voix et son bombage de torse. Il sera comme un nain qui s’invitera à une table de géants, en termes d’occupation du prisme politique, toutes facettes confondues.
Ca ne serait ni facile, ni sans risque donc. Mais il n’est pas interdit de penser que cette stratégie de la manipulation serait peut-être dans les moyens, et les pensées, de l’UMP, mais aussi des lobbies qui le chapeautent, ou qui lui sont conjoncturellement acquis.
Mettre en place une campagne insidieuse, tout à fait discrète, voire subliminale, pour étoffer le rang des électeurs du FN, en réservant toutefois les techniques adéquates pour les débaucher de nouveau au moment voulu, est susceptible d’être envisagé par un groupement politique en perte de vitesse, qui risque de tout perdre en un tournemain. A fortiori que de très gros intérêts, de toute nature, y sont arrimés.
Vaste programme ! Serait-on tenté de me répondre. C’est un scénario assez invraisemblable en effet. Une sorte de galéjade politique sortie d’un esprit qui vadrouille dans un fouillis fait de théories du complot, et de fumisteries en tout genre. Difficile à croire, et à réaliser. Disons que c’était juste pour mettre un grain de sel dans une purée de pois.
19 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON