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Accueil du site > Tribune Libre > Pour un autre nom que le journalisme

Pour un autre nom que le journalisme

La question se pose souvent. A l’occasion d’une émission telle que Les infiltrés. A l’occasion des critiques acerbes lancées par Mélenchon contre les journalistes. A l’occasion des multiples confusions que certains médias que l’on dit journalistiques font. Ainsi se pose souvent, à ces occasions, la question de la qualification de ce métier. Ne faut-il pas un autre nom pour qualifier ce qui fait honte au journalisme ?

 L’infiltration du voyeurisme

Le voyeurisme se propage peu à peu, un peu partout. D’abord par la petite serrure de la télé-réalité, pour enfoncer la grande porte du journalisme. L’émission Les infiltrés a été l’occasion de polémiques. Fallait-il que les journalistes de l’agence CAPA dénoncent 23 pédophiles interviewés ? A l’évidence, il est impensable que ces journalistes ne disent mots face à des viols qui vont, à coup sûr, avoir lieu. L’idée même de protéger ses sources ne se pose même pas.

Mais une question plus importante apparaît. 

L’émission Les infiltrés relève-t-elle du journalisme ?

Le programme est en effet un mélange d’enquête (sur les forums pour ados et les modérateurs, les chiffres liés à la pédophilie sur internet, la cellule rattachée à la police qui surveille le net) et… des interviews de pédophiles notoires. Lorsque l’on regarde cette émission, l’on s’aperçoit très vite que les interviews des pédophiles n’apportent aucune information. Le fait de savoir de quelle façon le prédateur s’y prend pour violer un enfant ne relève pas du journalisme.

Là est la question. Comment doit-on qualifier le travail de personnes qui dissimulent sur internet leur identité en se faisant passer pour des filles de 12 ans (la police utilise le même procédé) pour trouver des pédophiles ? Qui les rencontrent puis les interrogent de la même manière que des policiers. Pour enfin, les dénoncer, de la même manière qu’un policier.

Enfin quelle est la différence entre ce programme et l’émission qui existe aux Etats-Unis dans laquelle un présentateur aidé du public, traque des pédophiles, les piège pour ensuite filmer l’arrestation de la police ? Aucune !

L’opinion publique paraît désabusée face aux contestations du Syndicat National des Journalistes (SNJ) qui a critiqué les dénonciations et d’un collectif. Le débat ne se situe pourtant pas là. Bien sûr qu’il fallait les dénoncer. Mais le journaliste digne de ce nom ne doit pas se prêter au montage d’une telle émission. Fabriquée par et pour le buzz.

Le Buzz : Fléau de la profession

Cette volonté de créer le buzz, se retrouve partout. La rumeur qui devient peu à peu une affaire d’Etat sur le soi-disant double adultère du couple Sarkozy en est l’exemple parfait.

En effet, la presse internationale puis France 24, et I télé, ont relégué cette fausse information à partir d’une source : Un blog hébergé par le JDD.fr. Et ce blog en question avait pour but, selon son concepteur, de « faire du clic », comme l’a rappelé Mediapart. Ainsi, le JDD qui vient de déposer une plainte pour savoir qui était à l’origine de la rumeur, nie dans le même temps qu’il a tout fait pour que des abus de la sorte se produisent (en motivant le buzz et le scandale).

Hélas, les exemples d’une presse poubelle sont légions

Les exemples qui salissent l’image de la presse ne manquent pas.

Lors du crash de l’A 330, la presse a l’interdiction d’approcher les familles des victimes qui sont regroupées dans un hôtel et toujours dans l’attente de nouvelles. Pourtant, une équipe d’Europe 1 n’hésite pas à usurper son identité pour rapporter l’interview d‘une famille en pleurs.

Les fausses vidéos du même crash de l’ A 330 (voir article précédent), le traitement médiatique des émeutes de banlieues avec les voitures calcinées… ne sont que trop d’illustrations de la perversité d’un mélange. Celui de la volonté de faire de l’information avec celle de l’audimat.

Le journalisme devient ainsi un prête-nom que l’on attribue à tous les déchets médiatiques.

Au risque de nous répéter, nous pensons qu’il faut inventer deux choses : 

Il faut d’abord trouver un nom. Un nom pour qualifier cet entre-deux que nous proposent aujourd’hui certains médias. Mix entre l’information et la télé-réalité, entre le voyeurisme et le sensationnalisme, entre le spectacle et la réalité. Comme le dit très bien Daniel Schneidermann : « Encore faut-il trouver un nom à cette pratique, qui se situe quelque part entre le travail de police et le reportage animalier » parlant de l’émission Les Infiltrés.

Ensuite, il faut une instance capable d’orienter, limiter et questionner le métier de journalisme. Un organe qui représente, face à ce quatrième pouvoir qu’est la presse, un contre-pouvoir.

Un organe qui puisse dire clairement que non, l’émission d’Arlette Chabot, directrice de l’information de France 2 sur l’identité nationale, ne relève pas du journalisme. C’est au pire le relai d’un piteux débat gouvernemental, au mieux un documentaire sur le cher et tendre ministre Eric Besson.

Un organe qui puisse mettre un holà à la contre-information ou à l’ambigüité de l’information (faux reportages de M6, ou fausses vidéos de TF1 et France 2 sur la Guerre Israélienne) et condamner la propagation de rumeurs non vérifiées.

Il n’y a qu’un exemple de cette idée de contre-pouvoir ou plutôt de critique de ce pouvoir : c’est l’émission animée par le journaliste Daniel Schneidermann, sur France 5 : Arrêt sur images.

Emission qui avait pour habitude de relever les incohérences, les mensonges ou erreurs des médias.

Cette émission n’a pas résisté au système télévisuel puisqu’elle a été déprogrammée suite à un conflit avec, Arlette Chabot (qui avait visionné avant diffusion, l’émission consacrée au couple Borloo Schönberg).

Cela traduit bien l’idée selon laquelle, celui qui s’aventure à vouloir imposer une éthique, mettre en lumière certaines dérives et faire un travail journalistique, n’a pas sa place au sein même de ce système.

Il faut donc lutter contre les pratiques qui dénaturent le métier de journaliste. Ce à quoi nous nous essayons sur Acturevue. Les émissions telles que les infiltrés, ont peut-être leur place à la télévision, mais sous un autre nom que celui de journalisme d’investigation.

Certains journalistes d’investigation, les vrais, sont actuellement en prison ou pris en otage.

Arrêtons les comparaisons hâtives et honteuses et trouvons un nom à ce qui n’est pas du journalisme.

D.Perrotin

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11 réactions à cet article    


  • non666 non666 13 avril 2010 11:44

    Il n’y a plus de journalistes en France !
    Si ok, les 3 que je nomme toujours : Thierry Meyssan, Eric laurent et Denis Robert

    Tous les autres sont des vendeurs de soupes , des camelots de l’emotion (les infiltrés) , des vendeurs de thèses orientés : Des propagandistes.

    Scheidermann, l’ancien du systeme qui se revolte uniquement parce qu’il a été ecarté apres avoir si bien servi oublie que le mot qu’il cherche existe :
    PROPAGANDISTE.

    Ils vendent les thèses de leurs signeurs et maitres, , un point c’est tout.


    • Lisa SION 2 Lisa SION 2 13 avril 2010 11:45

      je propose le journautisme !


      • paul 13 avril 2010 12:09

        ou journeurisme....Acrimed , site critique des médias , fait un travail remarquable .


        • Philou017 Philou017 13 avril 2010 12:35

          L’oligarchie politico-financière s’est emparée des médias.

          Elle a mis en place un système entièrement basé sur l’audimat, par l’intermédiaire du spectaculaire, du voyeurisme, et de l’instrumentalisation de l’émotionnel.

          L’information a été formatée dans une forme d’info-news, basée sur l’immédiat et le spectaculaire et là aussi l’audimat facile. Les journalistes ont suivi le format, et sont devenus des chasseurs de buzz, d’images choc, souvent simplistes et trompeuses.

          Mais tout le monde est responsable de cela. Nous n’avons pas compris que les médias pouvaient devenir le principal instrument de manipulation des foules par des pouvoirs manipulateurs.
          Nous avons laissé les financiers finir de s’emparer des médias et les transformer en des machines à news, des machines à avaliser et légitimer les thèmes et objectifs voulus par cette oligarchie politico-financière : consommation, Europe, mondialisation marchande, société mercantile, libéralisme déstructurant.

          Les journalistes ont subi cela de la même façon, avalisant les évolutions délétères sans moufeter.
          Aujourd’hui, le problème est celui de tout le monde, car les médias empêchent les questionnements justes, et les débats intelligents. Cette machine à rendre bête doit changer.


          • PtitLudo PtitLudo 13 avril 2010 15:40

            Pas mieux. Il a suffit de voir lors du débat qui a suivi « le jeu de la mort ».
            2 journalistes face à face :
            - un bien dans le système, ayant ses entrées, Morandini, pas fichu d’aligner 2 mots de suite ou une quelconque réflexion sensée
            - un vrai journaliste (je ne me rappelle plus son nom), bien sûr boycotté par les médias mainstreams, qui travaille pour arrêt sur images et qui développait une vrai réflexion. Bien sûr sur le plateau, ça ne plaisait pas car ça prend trop de temps, or on est dans la religion du zapping, un fait en remplace un autre de suite, ce qui évite ainsi au télespectateur de réflechir à ce qu’il voit ou entend.


          • Lucsaint Lucsaint 13 avril 2010 16:27

            Ces gens-là sont appelés par les vrais journalistes (les anciens) : les « nouveaux journalistes ». Dans cette cour des miracles on trouve des animateurs télé aux dents étincelantes, des speakrines bimbos aidées d’enquêteurs illétrés, des zozos du micro-trottoir, des clowns, des militants écologistes, des imbéciles pistonné(e)s sortis d’écoles de fils à papa, des abrutis de football, des petits soldats de l’ordre moral, des recopieurs de dépêches AFP et autres petits fonctionnaires de la pensée unique...
            Dénominateur commun : ils ont tous la carte de presse.

            Pour info, un véritable journaliste comme Pierre Péan, enquêteur hors pair (François Mitterrand une jeunesse française, La Face cachée du Monde, Le monde selon K, etc.) lui, n’a pas droit à la carte de presse.
            Le système français est ainsi fait... 





            • frugeky 13 avril 2010 17:44

              Le jour du 150e anniversaire de l’amendement Schoelcher (mettant fin à l’esclavagisme en France), en 1998 sauf erreur de ma part, le journaliste de France-info terminait son petit reportage sur le déplacement de Jospin dansle village natal de Schoelcher par ces mots « [...] la commémoration de l’amendement Schoelcher qui mettait fin à la pratique de la traite des blanches. »

              Avant de répéter la même erreur 10 minutes plus tard puis encore et toujours 10 minutes plus tard, etc... selon le format de cette radio.

              C’est d’abord par leurs erreurs factuelles que les journalistes se déconsidèrent.

              Je parle même pas du reste, ça va m’aigrir.

              C’est depuis que je répète en boucle à mon fils :« si tu travailles mal à l’école, tu finiras journaliste. »


              • yvesduc 13 avril 2010 19:41

                Le pire étant peut-être d’endormir le bon peuple en lui donnant l’impression que ses médias sont là pour le protéger, alors que cela commencerait plutôt par une critique de fond de la politique telle qu’elle est menée par Sarkozy, mi autoritaire, mi incendiaire.


                • pieroufff pieroufff 13 avril 2010 23:16

                  Attention je parle des journalistes influents (donc parisiens hélas)

                  Effectivement c’est la réflexion qui leur manque

                  Pas de couilles, pas de temps ?...Hypocrite manipulateurs ?

                  Bof je crois même pas pour la majorité, plutôt des idiots utiles (très utiles même)

                  paradoxalement leur milieu social (a priori gauchisant défendant la veuve et l’orphelin, mais en fait bourgeois de centre ville) les mènent à avoir une connaissance très faible des réalités et souffrances de la France (je veux dire au delà du periph’ et encore)

                  Bref plutôt que de continuer des lieux communs, je préfère vous laissez contempler cette photo des rédacteurs stagiaires de la partie « désintox 11 septembre » du site pseudo-« alternatif » RUE 89

                  http://www.rue89.com/files/2002_02_03_11septembre_lequipe_grand.jpg

                  Pour moi et la majorité des gens ordinaires y a pas besoin d’aller plus loin (hélas), les codes vestimentaires et les attitudes sont criants...mais c’est vrai qu’avec rue 89 c’est peut être le pire du pire...

                  Non, le pire c’est que quand ces personnes (j’espère pas toutes quand même...) sincèrement motivées pour découvrir d’autres milieux sont au contact du peuple (vous savez les gens qui parlent pas forcément bien et qui vous regardent bizarre), ben justement les gens se méfient d’eux et les voient arriver de loin avec leurs gros sabots et leur truffe enfarinée et ils risquent pas d’être mis au parfum de ce qui se passe

                  Bref ca reste juste mon avis et mon constat...

                  D’ailleurs ce jugement a priori sur l’aspect extérieur est bien utile pour différencier les manifestations pro et anti-dictature dans les pays qu’on connait pas (Venezuela, Thaïlande)

                  J’en suis navré mais ca se révèle trop souvent vrai pour être négligé (d’ailleurs si c’était faux l’expression « code vestimentaire » n’existerait même pas)

                  Ce qui n’empêche en rien de rester ouvert d’esprit prêt à rencontrer sincèrement tout être humain d’où qu’il vienne et de, parfois, avoir de bonnes surprises

                  Je sais que je prête le flanc à la critique au plan théorique et tout, mais là mon commentaire c’est du concret qui ne se soucie pas de la morale

                  www.eyeswideopen.over-blog.com

                  partiel en allemand
                  www.eyeswideopen.over-blog.net


                  • ddacoudre ddacoudre 13 avril 2010 23:33

                    bonjour acte revue

                    il est impensable que ces journalistes ne disent mots face à des viols qui vont, à coup sûr, avoir lieu. L’idée même de protéger ses sources ne se pose même pas.
                    ceci n’est pas dans le fils du droit français, c’est seulement une position consensuelle.

                    En quelques mots, le cas est celui d’un homme condamné en 1986 à cinq ans de détention pour vol aggravé (brigandage) et tentative de meurtre et qui se trouve toujours aujourd’hui, vingt-trois ans après sa condamnation et dix-huit ans après la fin de sa peine, détenu du fait de sa dangerosité présumée.

                    Lorsqu’il décide d’une mesure de sûreté, le juge ne contrôle pas la preuve de la culpabilité de l’accusé mais pose un diagnostic de dangerosité et un pronostic de récidive. La dangerosité est présumée car elle est en toute hypothèse improuvable. Elle exclu de ce fait tout contrôle de sa légalité et, par voie de conséquence, tout risque d’erreur judiciaire.

                    il me semble que les journaliste de sont pas des juges.

                    ces évolutions agissent comme un révélateur et lèvent un tabou. C’est en effet une manière de se libérer de l’obligation de respecter l’Etat de droit en cherchant à mettre en œuvre un « droit pénal de l’ennemi » dans des pratiques contemporaines qui en rappellent de plus anciennes.

                    C’est en s’engageant dans une logique de guerre contre les dangers publics que l’on glisse vers un réflexe de défense sociale par l’élimination du délinquant perçu comme un ennemi. Ce droit pénal de l’ennemi à toutefois dénoncé dans son principe même par Rossi en 1929., joli retour en arrière pour ceux qui se félicité de la bravoures de ces journalistes.

                    C’est l’art social de lutte contre le crime, on se doit de protéger l’homme dans son milieu social. Un retour à la prudence mène ainsi vers des mesures ante delictum injustifiables en droit et fondamentalement contraires au principe de la légalité. Les difficultés concrètes et l’opposition des juges sont bien connues. L’examen des conséquences matérielles de telles doctrines apparut pour ce qu’elles portaient de dangers pour la démocratie et les principes fondamentaux de l’Etat de droit et fut abandon, et nous sommes entrain de revenir dessus.
                    Ce qui est à présent nouveau n’est pas de prendre en considération la dangerosité d’une personne mais « d’autonomiser » cette dangerosité pour la prendre seule en considération.

                    La combinaison nécessaire dans la mesure de la peine du juste et de l’utile fait qu’une peine n’est juste que tant que l’acte est reprochable à l’auteur. Il y a là une fonction rétributive et punitive bien connue, qui repose sur une communion entre culpabilité et dangerosité. Aujourd’hui, il faut absolument apaiser la victime et rassurer l’opinion. La dangerosité sans la culpabilité s’autonomise comme concept détaché de l’infraction et légitime un enfermement pour une durée indéterminée, par exemple du seul fait d’une peine antérieure. C’est envisager la culpabilité sans imputabilité.

                    nous entrons alors dans la chasse au sorcière. ce n’est comme tu peux le lire pas seulement le choix d’une dénomination journalistique. nous serions bien inspiré de rejeter ce types d’émissions.

                    sinon bien d’accord avec un contre pouvoir aux médias.
                    http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=73187
                    http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=68327
                    cordialement.



                    • kataroff kataroff 15 avril 2010 16:41

                      Je me demande si les journaliste des ’infiltres’ ont pretendu a leurs sources qu’ils etaient proteges en tant que sources. Je suppose que oui, car sinon qui aurait pris le risque de temoigner ?

                      Il y a donc dans ce cas tromperie, non ? Et donc decredibilisation de la profession. Encore quelques affaires comme celle la et ce type de reportage deviendra impossible, c’est ce que je crains.

                      Car ce type de reportage peut avoir une utilite, je pense par exemple aux parents qui, mieux informes, peuvent peut-etre mieux proteger. Si le prix a payer est d’en laisser filer quelques uns, faut voir, et je ne dis pas cela a la legere.

                      Car si des journalistes ont pu mener l’enquete, pourquoi pas la police ?

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