Pourquoi les immeubles s’effondrent
Bombardement ? Tremblement de terre ? Même pas !
En France, les immeubles tombent tout seuls. La faute à la politique du logement menée depuis des décennies.
Depuis les années 70, le rythme de construction des logements sociaux s'est ralenti. Comme dans d'autres secteurs, on s'en remet au secteur privé. Actuellement, la France compte moins de 5 millions de logements sociaux sur un total de 34.5 millions de logements. Autrement dit, seulement un logement sur 7 est un logement social, ce qui suggère que 6 français du 7 devraient pouvoir se loger grâce au marché privé. Nous savons tous que ce n'est pas le cas.
60% des français sont propriétaires de leur logement, et c'est bien là le problème. En effet, le revenu médian est de 1679€ par mois, ce qui veut dire que 50% de la population gagne moins. Fatalement, au moins 10% de la population gagne moins de 1679€ tout en étant propriétaire de son logement.
Maintenant, posez vous une question : comment peut-on amortir et entretenir un logement en gagnant moins de 1700€ par mois ?
C'est impossible. Il est donc clair qu'une partie des propriétaires n'a pas les moyens d'entretenir son habitat. C'est notamment le cas des retraités pauvres, qui ont pu acquérir un logement modeste pendant leur vie active et qui ne parviennent plus à payer les factures.
Dans les copropriétés, cela se traduit par un entretien insuffisant du bâti. Il devient souvent impossible de trouver une majorité pour voter des travaux.
Certaines initiatives des pouvoirs publics, qui partent pourtant d'un bon sentiment, aggravent encore les choses. Ainsi, dans de nombreux cas, on ne peut plus ravaler une façade sans isoler par l'extérieur, ce qui en augmente considérablement le coût. Il était déjà difficile de faire voter un ravalement de façade, mais maintenant, c'est encore pire. De même, il est devenu illégal de remplacer à l'identique de nombreuses chaudières à gaz, ce qui augmente très fortement leurs coûts. Résultat : on prolongera la vie de chaudières obsolètes, dangereuses et polluantes.
Si une AG de copropriété vote des travaux, il y aura des gens qui ne pourront pas payer. Cela fera donc des contentieux, des actions en justice, qui pourront déboucher sur des saisies immobilières. Des retraités, qui vivotaient tant bien que mal, seront ainsi mis à la porte de chez eux.
Faute de recevoir un entretien suffisant, les copropriétés se dégradent au fil du temps,. Il ne faut donc pas s'étonner que des immeubles commencent à s'écrouler.
L'économie d'un HLM est totalement différente. L'office fait construire le bâtiment grâce à un emprunt sur 30 à 50 ans. Une fois l'emprunt remboursé, le montant des loyers suffira à entretenir et moderniser le bâtiment. Au contraire, dans le privé, les logements changent de main constamment et les copropriétaires sont perpétuellement endettés, ce qui bloque les travaux de maintenance.
C'est pourquoi le parc HLM est généralement assez bien entretenu, bien mieux que les copropriétés pauvres.
Comme il n'y a pas assez de logements sociaux, de nombreux français qui devraient avoir accès aux HLM, deviennent propriétaires de logements... qu'ils n'ont pas les moyens d'entretenir ! La seule façon de sortir de cette impasse est de mettre en chantier de très nombreux logements sociaux. Ce n'est pas utopique. En prenant un coût moyen de 200 000 euros, la construction d'un million de logements sociaux supplémentaires coûterait 200 milliards. En amortissant sur 50 ans, cela représenterait 4 ou 5 milliards d'euros par an, ce qui est une charge tout à fait supportable, d'autant qu'elle est remboursée par les loyers.
On me dira qu'il n'y a pas d'argent, mais faut-il rappeler que chaque année, 8.4 milliards d'euros sont dépensés à verser des APL, lesquelles sont finalement captées par les propriétaires sous forme de hausses de loyers ? Cet argent serait bien mieux utilisé à construire des HLM !
On pourrait même raisonnablement envisager de construire plusieurs millions de logements sociaux supplémentaires, ce qui aurait les avantages suivants :
- Des citoyens mieux logés.
- Un habitat plus économe en énergie. Accélération de la transition énergétique.
- La baisse des loyers dans le secteur privé, par le jeu de l'offre et de la demande.
- La fin de l'inflation immobilière.
- Un habitat plus groupé.
- Une meilleure mobilité des salariés.
- Du travail pour les entreprises du BTP.
Ce qui s'effondre aujourd'hui, ce ne sont pas seulement des immeubles, c'est surtout la conception d'une France de petits propriétaires immobiliers. Cette vision archaïque ne répond plus aux problématiques de notre temps.
Source de la photographie :
url de la page : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Fotothek_df_ps_0000116_Fassadenst%C3%BCck_einer_Ruine_mit_Gaslaterne.jpg
url du fichier : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/7f/Fotothek_df_ps_0000116_Fassadenst%C3%BCck_einer_Ruine_mit_Gaslaterne.jpg
Crédit à l'auteur : Deutsche Fotothek [CC BY-SA 3.0 de (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/de/deed.en)], via Wikimedia Commons
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