Pourtant tout avait bien commencé !
C'est une France en ruine qui est libérée en 1944 et 1945. Tout est à reconstruire. Et pourtant, c'est à cette époque que l'on va établir les piliers de l'État social en s'appuyant sur le programme du Conseil national de la Résistance (CNR). Ce programme, adopté dans la clandestinité le 15 mars 1944 , sous le titre « les Jours heureux » jette les bases des mesures à appliquer dès la libération du territoire. Sur le plan politique, il prévoit « l'instauration d'une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l'éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l'économie ». Sur le plan social, il envisage « un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d'existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail » et « la reconstitution, dans ses libertés traditionnelles, d'un syndicalisme indépendant, doté de larges pouvoirs dans l'organisation de la vie économique et sociale ». Le programme du Conseil national de la Résistance demande également « le retour à la nation de tous les grands moyens de productions monopolisées, fruits du travail commun, des sources d'énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d'assurance et des grandes banques, la mise en place d'une « démocratie économique et sociale », la rationalisation de l'économie et l'urgence de la reconstruction ». On nationalise donc, les Houillères du bassin du Nord et du Pas-de-Calais et les Charbonnages de France, qui exploitent des matériaux stratégiques au redressement du pays. Renault est nationalisé sans compensation financière, pour collaboration avec l'ennemi, et devient une régie. Sont nationalisés également les transports aériens et l'industrie aéronautique, la Banque de France et les quatre plus grandes banques françaises (le Crédit lyonnais, la Société générale, le Comptoir national d'escompte de Paris, la Banque nationale pour le commerce et l'industrie. Le gaz et l’électricité et les onze plus importantes compagnies d’assurance sont elles aussi nationalisés. Bien sûr, Il y a aussi l'histoire du plan Marshall, qui aurait permis la reconstruction de l'Europe occidentale, mais, en réalité, il s’agissait sans doute, moins de tendre une main secourable à l’Europe que de mettre en place une hégémonie financière, commerciale, politique et culturelle américaine. « America first », les américains ne font jamais rien pour rien !
La dernière vague de nationalisation résulte de la volonté du gouvernement socialo-communiste dirigé par François Mitterrand avant qu’il ne se renie et prenne délibérément une direction plus libérale. Elle concerne des groupes engagés dans une compétition européenne et mondiale, notamment dans l’industrie aérospatiale (Dassault, Bull, Matra, Thomson-Brandt) ; il s’agit même de multinationales (Saint-Gobain, Bull, PUK, Rhône-Poulenc) ou de filiales de multinationales (ITT-France). Outre ces entreprises industrielles, plus de trente banques (y compris de petits établissements régionaux) et groupes financiers sont également nationalisés. Ces nationalisations sont supposées compléter la vague de 1945-1946 et parachever le contrôle de la Nation sur les richesses qu’elle crée… puis est arrivée la grande vague néolibérale, et les citoyens bercés de bonnes paroles se sont laissé endormir. Depuis, c’est le mouvement inverse qui s’est opéré, « les privatisations » ont asséché les recettes de l’état au bénéfice exclusif d’investisseurs et d’actionnaires privés.
Comment se fait-il que ce qui était possible dans un pays qui sortait d’une guerre ne l’est plus aujourd’hui alors que le PIB de la France depuis 1950 a été multiplié par 5 ? Une des raisons est la baisse des recettes de l’état. Le taux normal d’imposition sur les sociétés était de 50 % jusqu'en 1985, depuis il n’a cessé de descendre, il est depuis janvier 2022 à 25 %, et Bercy parle d’une imposition a 15% pour le futur ! les niches fiscales accordées aux entreprises sans condition ni contrôle s’élèvent à 100 milliards ! Toutes les réductions de cotisation (et pas de charge !) et les cadeaux fiscaux successifs n’ont fait que creuser le déficit sans apporter aucune amélioration. Les réformateurs néolibéraux qualifient souvent le modèle social français de fardeau insoutenable pour l’entreprenariat privé. Pourtant, au cours des dernières décennies, les aides publiques aux entreprises ont presque triplé en pourcentage du PIB, ce qui montre que les interventions de l’État soutiennent de plus en plus les profits privé. En France, l’État est interventionniste mais toujours au bénéfice du capital !
Sources :
La Tribune, le 27/05/2013 : « 70 ans après, que reste-t-il du programme du Conseil national de la résistance ? ».
La nationalisation des banques s'est effectuée de manière rapide, afin d'éviter des mouvements spéculatifs qui ont pour but la réalisation de bénéfices à court terme. Le projet de loi a été déposé le vendredi 30 novembre au soir, après la fermeture de la bourse, pour être voté le 2 décembre et publié au Journal officiel dès le lendemain.
« Les Origines du plan Marshall, Le mythe de "l'aide" américaine », d’Annie Lacroix-Riz, aux Editions Dunod. (17) Elucid.média, le 05/10 2021 : « France : analyse historique du PIB ».
L’Humanité, le 7.07.23 : « Budget : 60 milliards à trouver d’ici 2027, la Cour des comptes crie haro sur les niches fiscales ».
Gouvernement.fr, le 25/08/2021 ! « La réduction des charges et de la fiscalité des entreprises et la relance de l'investissement ».
Les crises.fr, le 07/10/2023 : « En France, l’État est interventionniste mais toujours au bénéfice du capital. ».
http://2ccr.unblog.fr/2024/02/21/pourtant-tout-avait-bien-commence/
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