Premières victimes du virus H1N1, les médias français ?
C’est étrange. Alors que je venais d’envoyer mon dernier papier pour Agoravox sur la grippe H1N1 de 2009, un billet à visée conclusive, dans le but de conclure avant l’été et surtout le prochain hiver, la question de la pandémie grippale qui selon moi n’existe pas, j’ai été troublé par un fait divers amplifié par la caisse de résonance qui panique, je veux parler des médias. Un clic sur les sites des journaux qu’on aime tant, du Monde, du Figaro, de Libération, du Nouvel Obs, et voilà la dépêche qui s’inscrit en toutes lettres vers 18 heures. Un premier cas de décès lié au virus H1N1 a été déclaré par l’InVS. En fait, le décès remonte à une dizaine de jours. Mais il est entré dans la phase médiatique vers 18 heures ce 30 juillet 2009. Les dépêches précisent bien que ce décès n’est pas directement lié à H1N1, que la malheureuse adolescente était déjà atteinte d’une maladie grave. Avec des complications pulmonaires sévères. Mais tous les médias parlent du premier cas de décès lié à H1N1, comme s’il fallait qu’en France, il y ait comme dans d’autres pays, un premier décès. Quel affront, les Belges ont rapporté le cas d’une quinquagénaire décédée en portant le nouveau virus H1N1, les Anglais ont recensé une vingtaine de décès atteints par le virus H1N1 et nous, pauvres couillons sanitaires, nous n’avions aucun mort à présenter comme porteur du virus. Mais c’est chose faite. L’équité est rétablie. Nous sommes le cinquième pays à déclarer un mort H1N1, après la GB, l’Espagne la Belgique et la Hongrie. Nous l’avons, notre trophée pandémique, la première victime, pardon, le premier décès d’un patient porteur du virus H1N1. Car tout indique qu’au vu de l’état de santé de la patiente en question, le virus n’a fait qu’accélérer une issue hélas fatale pour cette adolescente qui souffrait d’une grave maladie. Paix à son âme. Mais les médias insistent avec une instance suspecte et maladive dirions-nous. Il leur faut un décès porteur de H1N1, qu’ils présentent comme une victime du virus dans le titre, histoire d’allécher le badaud pour qu’il clique sur le lien. D’ailleurs il est impensable pour un média écrit de taire l’événement. La dépêche étant tombée sous les bons auspices de l’AFP, dûment informée par l’InVS, il fallait bien que chaque média rapporte l’information, sous peine d’être doublé par la concurrence. Comme dans la com d’entreprise. Si votre concurrent fait de la pub, faites en autant, même si la pub ne sert à rien.
Il était 18 heures passées. Ayant acquis une sorte de flair médiatique avec l’expérience, je me disais que ce cas allait faire la une des journaux télévisés. J’ai tenter de raisonner du point de vue d’une rédaction et me suis dit, oui, ils sont capables de le faire, de titrer en premier sur ce décès, quitte ensuite à faire intervenir un spécialiste ou un ministre pour adoucir l’impact et rassurer les gens qui se prélassent en vacances et qui, avec leur télé de camping, en prenant l’apéro, vont immanquablement tomber sur l’annonce terrifiante du premier décès, pas causé par H1N1, mais néanmoins porteur du virus. Bref, les JT ont osé, la Trois, la Deux, la Une, tous ont titré sur cette révélation d’un décès d’une adolescente porteuse du virus nouveau. On ne peut pas exclure un décès lié au virus ont dit les médecins mais les conclusions ne penchent pas en faveur de cette hypothèse ont-ils ajouté. Aucun examen supplémentaire ne sera effectué pour en savoir plus. Ce qui est dans la logique des choses. Car virus ou pas, l’état de santé de cette jeune fille ne laissait pas augurer une issue positive. Nous ne saurons rien de plus. Tant mieux.
Et alors, en dépit du fait que les conclusions ne permettent pas de penser que ce décès est dû au virus, tous les médias titrent sur le « premier cas de décès lié au virus ». Pour ensuite apporter un bémol. Que penser de cette frénésie médiatique ? Pas grand-chose. On savait les médias malades. Ils ont signé là, avec cette arnaque spectaculaire, aussi grave que l’affaire de Timisoara, leur acte de décès. Car dans cette vieille affaire, les médias avaient une excuse, celle de se faire manipuler par les Roumains avec leurs prétendus charniers. Alors que dans la présentation de ce décès, les médias se sont manipulés eux-mêmes, ou disons qu’ils ont fait en sorte de nous enfumer, nous citoyens qui avons besoin d’être informés correctement et non pas affolés. Quand je pense que tout le travail réalisé par quelques internautes pour déminer ce sujet de la pandémie.
Mais bon, oui, je sais, j’ai employé les grands mots, manipulation, Timisoara, c’est exagéré, mais sans doute de bonne guerre pour critiquer un système médiatique qui d’ailleurs, s’inscrit dans un système global dont l’emballement est inéluctable avec la diffusion des nouvelles grippales et des informations grippées. Il y a comme un fatum des choses qui doivent s’enchaîner et répondre à une nécessité socio-médiatique. L’InVS a joué avec sagesse dans cette affaire. Annonçant le décès dans les délais suffisants pour que la famille de la patiente ait le temps de régler les formalités avant qu’une horde de journalistes ne débarque près de l’hôpital. Quant à la nécessité de cette annonce, elle participe sans doute de deux ordres logiques des choses. D’abord annoncer un cas, pour bien montrer que tout est transparent et que la France est lotie comme les autres pays. Pas comme au temps du nuage de Tchernobyl ayant semé le soupçon. S’il n’y avait pas de décès H1N1 en France, les citoyens se diraient qu’on leur cache la vérité et se mettraient à gamberger dans leur tête. Cette annonce arrive au bon moment et de plus, elle permet une sorte de vaccination de l’opinion. Comme une sorte de mise en contact des esprits avec un décès, dont les circonstances font qu’il n’autorise aucun affolement. Ce qui n’aurait pas été le cas avec une gamine en pleine santé décédée après un séjour en colonie de vacances. Bref, dormez tranquille, passez de bonne vacances, il se pourrait bien que la pandémie ne se développe pas (voir mon billet du 31)
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