Rages et utopies d’un enfant du siècle
Jeune, j'étais convaincu que le monde allait s’améliorer et que lorsque cela serait possible, il n’y aurait ni famine, ni pauvreté, ni maladie ni guerre. En grandissant, j'ai compris que non. La famine, la pauvreté, la maladie et la guerre étaient entretenues afin de faire les affaires de certains...
J’ai coutume de dire que tout est politique. La manière de discuter avec ceux qui nous entourent. Comment l’on considère sa famille, ses amis, ce que l’on veut transmettre à ses enfants, partager avec ses voisins… La façon que l’on a d’apprendre, d’ouvrir les yeux sur le monde, de traiter les animaux, de manger, d’écouter de la musique… De consommer aussi, puisqu’il le faut bien. Le rapport que l’on entretient avec l’argent.
Mais aussi façon que l’on a de choisir le film que l’on va voir, ou de se renseigner sur une actualité, selon qu’on va pêcher les infos à la TV, la radio, ou sur un site alternatif sur le web. Selon qu’on lise ou pas, qu’on connaisse Fanon, Kropotkine, Thoreau, Bourdieu, Zinn… Ou pas.
Du moins, je pense que tout devrait être politique. Car on devrait toujours réfléchir et remettre en question notre manière de vivre ensemble, afin qu’elle soit continuellement la plus optimale possible.
C’est la politique politicienne – celle qui est censée réfléchir pour nous à la manière optimale de bien vivre ensemble – qui a le plus perdu de son essence politique… Institutionnalisée, professionnalisée, détachée des préoccupations du peuple mais en revanche complètement soumise aux pouvoirs de l’argent (multinationales, Bourses, lobbies et traders sont au-dessus d’elle et les médias sont postés à ses côtés), la politique professionnelle n’a plus aucun sens.
Peu à peu, les dirigeants brident les peuples. Dépossédés de nos droits, à boycotter les produits des États qui colonisent, à boycotter les produits avec OGM ou pesticides qui nous empoisonnent, à choisir nos semences, à dire non à l’Europe, à cette crise que nous n’avons pas créée et à cette austérité qui nous tient en laisse, à refuser d’être geolocalisés – et donc surveillés – à tout bout de champ, nous sommes peu à peu (et de manière juridiquement démocratique) privés de nos libertés individuelles et collectives chèrement acquises.
Ce n’est pas de la science-fiction. C’est la dure réalité. Et même si certains s’en accommodent, elle est difficile à accepter pour le citoyen qui ne réfléchit pas que pour lui. Il est impossible de croire que cette réalité dirige l’Humanité vers le sens du progrès, de la justice, du Bien Commun.
De plus, nos sociétés occidentales et « modernes » s’efforcent de vider de tout contenu politique tous les produits culturels qui nous parviennent, ou encore d’en déformer la réalité historique. Nous empêcher de comprendre, c’est nous empêcher d’agir. Ou alors les uns contre les autres, en nous poussant à la compétition, pour les études, pour le travail, le logement, bientôt pour des choses aussi essentielles que la santé, l’eau ou la nourriture. C’est le propre de la nature humaine, qu’ils diront… Non !
Le darwinisme social est un leurre. Se battre pour la survie ou pour le pouvoir n’est qu’une illusion, le fantasme d’un homme animal, mu par des nécessités grotesques. Ce n’est pas le seul moyen pour l’espèce humaine de progresser. L’entraide est aussi importante – si ce n’est plus importante – que la concurrence comme l’a bien expliqué Kropotkine dans… « L’Entraide », justement.
Je pense que le pouvoir est un concept mauvais. Il pervertit. Toujours. Le système est rarement mauvais en lui-même, mais nous, êtres humains, sommes plein d’imperfections lorsqu’il s’agit de l’appliquer.
« Le pouvoir abêtit les hommes ; aussi devons-nous non point le conquérir et nous l’arracher entre hommes et femmes, mais l’éliminer de la société… » disait Louise Michel.
L’idéal consiste donc à mettre en place un système sans pouvoir… Et malgré plus de cent ans de propagande pour nous faire croire que c’était impossible, cherchez à l’intérieur de vous. Évidemment que c’est possible, si chacun devient le garde-fou de l’autre. Si chacun détient une possibilité d’action limitée par la possibilité d’action de l’autre. Si le dialogue et des règles (acceptées par tous car choisies par tous) permettent de déterminer les tâches à effectuer pour parvenir à un but – quelle que soit l’échelle – et la manière la plus adéquate, harmonieuse et juste de l’atteindre ! De nombreuses sociétés dites « premières » pour ne plus dire primitives fonctionnent ainsi.
La pierre angulaire de ce changement – qui ne sera jamais fini, c’est le propre des vraies (r)évolutions de ne jamais se considérer comme accomplies – c’est l’éducation. Apprendre à nos enfants dès le plus jeune âge le dialogue, le partage, le consensus des idées, l’écologie, le respect, l’amour (!), c’est l’évidente base de la société de demain. C’est individuellement et collectivement, en apprenant à changer soi-même, et en partageant son expérience et ses vues avec son entourage, que l’on peut changer son monde, le monde. Je le crois sincèrement.
Tout changement social commence par un changement individuel
Nul besoin de partir à l’autre bout du monde ou loin de la ville (à la campagne) pour mettre en pratique ses idées. De nombreux gestes tout simples peuvent être adoptés peu à peu. Oui tout doucement, patiemment, car on ne se débarrasse pas de ses addictions juste en le décrétant, elles nous sont inculquées comme réflexes et normalités depuis tout jeune, elles sont tenaces !
« Sois le changement que tu veux voir dans ce monde », avait écrit Gandhi.
Il faut déjà que nous apprenions à être, devenir, ou redevenir positifs. Pour tout. Partout. Ne pas se sentir agressé par les autres, mais voir en eux nos semblables, nos frères. Oui, même dans les transports en commun. Oui même dans les représentants des institutions les plus répressives. Il faut le faire pour soi. Car autrui est un autre soi, un autre toi.
On ne peut se dire citoyen du monde, amoureux des peuples et des cultures, des voyages et des différences, et ne pas réussir à discuter avec un SDF, un Rom, un policier, un électeur du FN sans la rage aux lèvres ou avec un dégoût visible. C’est mon avis, et ça me froisse le cœur quand je vois des gens qui se disent « vraiment de gauche » qui évitent soigneusement le SDF dans le métro en rentrant chez eux d’une manif avec t-shirt et banderoles…
Par la suite, il faut trouver des moyens de changer la disquette, le programme que l’on essaye de nous faire intégrer depuis notre plus tendre enfance. La solution la plus évidente consiste à arrêter de regarder la télévision et les informations propagandistes qu’elle diffuse. L’Internet est maintenant fourni en sources d’information de très bonne qualité et éloignées du discours dominant, tellement loin des réalités.
« Si vous n’êtes pas vigilants, les médias arriveront à vous faire détester les gens opprimés et aimer ceux qui les oppriment » a dit un jour Malcolm X.
On doit aussi apprendre à semer des graines d’idées positives même dans les esprits les plus riquiqui. Tant pis. Si vous savez qui vous êtes et êtes convaincus que votre interlocuteur est dans l’erreur ou la peur, vous lui devez votre clairvoyance. Ne considérez jamais que quelqu’un ne vaut même pas la peine qu’on discute avec. Nous naissons tous égaux. Seules les circonstances font ce que nous sommes.
Tous ensemble, cessons de nous comporter comme un troupeau de consommateurs abrutis, mais devenons petit à petit acteurs de notre consommation. Aujourd’hui, nous n’avons pas le pouvoir politique de choisir ce que l’on met dans nos assiettes. Avec les OGM, le brevetage du vivant, les résultats de recherches falsifiées, les emballages qui ne disent rien, les supermarchés qui ont le monopole de la distribution dans certaines régions, impossible de décider ce que l’on achète à la source, via des réformes.
C’est pourquoi il faut le faire sur le terrain. S’informer, tenter peu à peu de changer ses habitudes, préférer aux supermarchés – temples de la consommation – la consommation locale, le bio, manger moins de viande… Éviter la pub et ses messages subliminaux. Revenir à l’essentiel. Changer tout doucement ses habitudes de consommateur, et expliquer à notre entourage notre démarche.
Être conscient de nos jours, c’est aller jusqu’à devenir dissident : la désobéissance civile devient une marque de civisme par les temps qui courent. Les lois tentent de rendre impossible la critique même des lois. Mais ceci n’est pas la preuve d’une société en pleine forme. S’informer, c’est trouver des erreurs. Et si erreur il y a, il est de notre devoir de les souligner, pour qu’elles soient corrigées. Et la seule façon de corriger la loi, c’est de la contester, et même de lui désobéir…
« Ce n’est pas un signe de bonne santé mentale que d’être adapté à une société malade » expliquait fort à propos le philosophe Jiddu Krishnamurti.
Et pour boucler la boucle, tentons de devenir nous-mêmes des médias. Discuter avec tous, défendre sa position, faire éclore les utopies, les prophéties réalisatrices chez les autres – les jeunes surtout -, c’est un devoir citoyen et un plaisir humain. Et évidemment, si toutes ces belles idées individuelles devenaient un projet de société (révolutionnaire), l’éducation en serait la pièce angulaire.
Et ce monde meilleur, à quoi ressemblerait-il ?
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